Dans les sols, sous le vocable de ยซย matiรจre organique du solย ยป (MOS), on rassemble un continuum de formes vivantes et mortes allant du rรฉsidu vรฉgรฉtal, animal ou microbien frais aux substances humiques associรฉes ou juxtaposรฉes ร des particules minรฉrales. Cette matiรจre organique joue un rรดle fondamental dans le fonctionnement des รฉcosystรจmes terrestres et dans la productivitรฉ vรฉgรฉtale. Elle participe ร la fertilitรฉ des sols par ses effets sur la structure et par la fourniture dโรฉlรฉments minรฉraux indispensables ร la nutrition et la croissance des plantes. La matiรจre organique constitue รฉgalement une source de nutriments et/ou dโรฉnergie pour les organismes vivants du sol. Cโest un dรฉterminant principal de lโactivitรฉ biologique dans lโรฉcosystรจme รฉdaphique.
Les sols tropicaux sont, pour lโessentiel, caractรฉrisรฉs par une dรฉgradation progressive, cโest le cas des sols ferrallitiques argileux des tanety sur les Hautes Terres de Madagascar. Les causes majeures de cette dรฉgradation sont principalement liรฉes ร la baisse de leur rรฉserve organique. Dans ces sols, le labour intensif entraรฎne une minรฉralisation rapide des stocks organiques et expose le sol nu. Cette surexploitation des terres favorise lโรฉrosion hydrique qui entraรฎne une perte importante de terres arables, de matiรจre organique et de nutriments. Ce phรฉnomรจne conduit inexorablement ร une baisse de la fertilitรฉ et des rendements agricoles. Face ร cette situation, lโรฉlaboration de stratรฉgies adaptรฉes pour assurer une bonne protection des sols et augmenter la rentabilitรฉ agricole sโavรจre indispensable.
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
Le sol
Le sol reprรฉsente la couche superficielle meuble de la croรปte terrestre ร lโinterface entre la lithosphรจre et lโatmosphรจre. Cโest un milieu vivant qui renferme une grande diversitรฉ dโorganismes et constitue le support des activitรฉs humaines. Il reprรฉsente pour les organismes qui y vivent un milieu trรจs complexe et trรจs hรฉtรฉrogรจne. Il est constituรฉ dโune phase solide dominante formรฉe de particules de tailles et de natures variables (particules minรฉrales et organiques), dโune phase aqueuse et dโune phase gazeuse. Le mode de disposition de ces diffรฉrentes particules forme des vides oรน pores. Ce milieu minรฉral poreux est une voie de circulation des phases liquides et gazeuses du sol.
Les constituants du sol
La fraction minรฉrale
Cโest la fraction qui reprรฉsente en proportion 93 ร 95% du poids total du sol. Elle est formรฉe dโรฉlรฉments minรฉraux de diverses tailles issus de lโaltรฉration dโune roche-mรจre sous-jacente. Ces รฉlรฉments minรฉraux de formes et de diamรจtres diffรฉrents dรฉfinissent par leur prรฉpondรฉrance, la nature texturale dโun sol. Ainsi, on di stingue les cailloux ou bl ocs ร รฉlรฉments de tailles supรฉrieures ร 2 mm, les sables ร รฉlรฉments de tailles comprisent entre 2 mm et 50 ยตm, les limons entre 50 ยตm et 2 ยตm et les argiles formรฉs dโรฉlรฉments dont la taille est infรฉrieure ou รฉgale ร 2 ยตm.
La fraction organique
La fraction organique comprend lโensemble des substances biologiques dโorigine animale et vรฉgรฉtale que lโon retrouve dans le sol. On peut distinguer deux fractions : une fraction organique vivante et une fraction organique inerte (Theng, 1987).
Le compartiment organique inerte
Ce compartiment est dรฉfini par divers stades de dรฉcomposition de la matiรจre organique. Les dรฉbris vรฉgรฉtaux (feuilles et rameaux morts) et animaux (excrรฉments, cadavres etc.) de toute nature qui arrivent au sol constituent la fraction organique inerte. Ces dรฉbris qui reprรฉsentent une source importante de matiรจre organique sont plus ou moins rapidement dรฉcomposรฉs dรจs leur retour au sol sous lโinfluence de lโactivitรฉ biologique. Parmi ces dรฉbris, la litiรจre constitue une importante masse vรฉgรฉtale qui recouvre le sol minรฉral. Dans les premiรจres รฉtapes de sa dรฉcomposition, la litiรจre donne naissance dโune part, ร d es รฉlรฉments minรฉraux solubles ou gazeux, tels que, CO2, NH3, NO3- , SO4- etc. (cโest la minรฉralisation). Dโautre part, cette litiรจre donne des composรฉs amorphes (fraction organo-argileuse) qui peuvent contracter desย liaisons avec la fraction minรฉrale chimiquement active du sol (argiles) pour former le complexe argilo-humique. Cette matiรจre organique dont la minรฉralisation est plus lente constitue lโhumus. Lโhumus est relativement plus stable et plus rรฉsistant ร la biodรฉgradation que la matiรจre organique fraรฎche. Lโhumification dรฉsigne lโensemble des processus de transformation de la matiรจre organique fraรฎche en humus.
La fraction organique vivante
La fraction organique vivante comprend les organismes vivants dans le sol. Il sโagit dโabords de la faune constituรฉe par la macrofaune et la microfaune du sol, les organismes microscopiques ou micro-organismes, et enfin les organes souterrains des plantes. Dans cette revue, nous parlerons uniquement des microorganismes.
Les microorganismes
Les microorganismes du sol sont les acteurs principaux des processus de dรฉcomposition de la matiรจre organique du sol et du recyclage des nutriments. Ils sont principalement reprรฉsentรฉs par les bactรฉries et les champignons, qui assurent des fonctions essentielles pour la nutrition minรฉrale des plantes.
– Les Bactรฉries
Ce sont des organismes procaryotes unicellulaires ร paroi rigide et de diverses formes. Lโun des aspects รฉcologiques les plus saillants chez les bactรฉries est leur caractรจre ubiquiste (Horner-Devine et al., 2003). Les bactรฉries sont prรฉsentes dans le sol en proportions variables. Elles apprรฉcient les milieux ร p H neutre ou alcalin, riches en azote, et ร une tempรฉrature variant entre 20 et 40ยฐC (bactรฉries mรฉsophiles). Cependant, Thermus aquaticus, une bactรฉrie des eaux thermales reconnue pour sa contribution ร la Taq polymรฉrase en biologie molรฉculaire, a so n optimum de croissance ร u ne tempรฉrature variant entre 70 et 79ยฐC, une gamme de tempรฉrature lรฉtale pour les plantes et les animaux (Brock et Freeze., 1969). Les bactรฉries sont abondantes dans la rhizosphรจre des graminรฉes et des lรฉgumineuses et possรจdent une grande diversitรฉ spรฉcifique et fonctionnelle. Certaines sont capables dโutiliser le carbone sous forme minรฉrale CO2 comme substrat รฉnergรฉtique. Ce sont les bactรฉries autotrophes. Dโautres ont besoin dโune source de carbone organique pour leur mรฉtabolisme รฉnergรฉtique et leur croissance. Ce sont les bactรฉries hรฉtรฉrotrophes. On trouve รฉgalement parmi les bactรฉries, des organismes saprophytes qui vivent aux dรฉpens de la nรฉcromasse. Les hรฉtรฉrotrophes et les saprophytes sont les plus nombreuses dans le sol.
Certains groupes de bactรฉries du genre Rhizobium sont capables dโentrer en symbiose avec les plantes de la superfamille des Lรฉgumineuses pour la fixation biologique de lโazote. Cette symbiose est dโune importance agronomique considรฉrable. Elle permet de subvenir aux besoins des plantes pour la nutrition azotรฉe (NO3- , NH4+ ) et de rรฉduire la fertilisation chimique azotรฉe. Dโautres groupes bactรฉriens comme les actinomycรจtes (Eubactรฉries gram +, High G-C) possรจdent des filaments ramifiรฉs et รฉmettent des conidies (Davet, 1996). Ils sont proches de certains champignons avec lesquels ils partagent quelques caractรจres (filaments et conidies). Cependant leur filament ramifiรฉ prรฉsente un diamรจtre plus petit que celui des champignons (0,5 ร 1 ยตm). Ces microorganismes ont gรฉnรฉralement les exigences des bactรฉries aรฉrobies (pH voisin de la neutralitรฉ, bonne oxygรฉnation). Les actinomycรจtes participent activement ร lโhumification en sโattaquant ร la lignine composรฉ biochimique rรฉcalcitrant. Mais surtout, ils sont capables de sโattaquer aux humus pour quโils libรจrent ร la fois lโazote quโils contiennent, mais aussi les รฉlรฉments รฉchangeables quโils avaient fortement adsorbรฉ. Certains actinomycรจtes vivent en symbiose avec des espรจces vรฉgรฉtales de la famille des Casuarinacรฉes (Davet, 1996). Cette symbiose actinorhizienne est dรฉfinie comme รฉtant lโassociation entre environ 260 espรจces dโAngiospermes et les bactรฉries fixatrices dโazote du genre Frankia qui aboutit ร la formation de nodules au niveau du systรจme racinaire de la plante hรดte (Dommergues et al., 1998). Des genres comme Streptomyces et Nocordia sont aussi frรฉquemment rencontrรฉs dans le sol et sont particuliรจrement aptes ร dรฉcomposer les composรฉs rรฉcalcitrants. Par ailleurs les bactรฉries participent ร la structuration du sol par la sรฉcrรฉtion de polysaccharides qui lient les particules minรฉrales et contribuent ร la stabilitรฉ des microagrรฉgats.
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Le sol
1.1. Les constituants du sol
1.1.1. La fraction minรฉrale
1.1.2. La fraction organique
1.1.2.1. Le compartiment organique inerte
1.1.2.2. La fraction organique vivante
1. 2. Lโorganisation du sol
1. 2. 1. La texture
1. 2 .2 . La structure
1. 2 .2 1 – Les agrรฉgats : biotopes hรฉtรฉrogรจnes
1. 2 .2.2 – Les micro-agrรฉgats
1. 2 .2.3 – Les macro-agrรฉgats
1.2.3. La porositรฉ
2. Activitรฉs enzymatiques
2. 1. La ร-glucosidase
2. 2. La phosphatase
3. Les modes de gestion des terres
3. 1. Le labour
3. 2. Le semis direct sur couverture vรฉgรฉtale (SCV)
3. 2. 1. Les principaux systรจmes SCV
3. 2. 2. Les avantages des SCV
3. 2. 2. 1. Les SCV: source de MO
3. 2. 2. 2. SCV et protection des sols
3. 2. 2. 3. SCV et stockage du C
3. 2. 2. 4. SCV et adventices
CHAPITRE 2: MATERIEL ET METHODES
1. MATERIEL
1. 1. Prรฉsentation des sites dโรฉtude
1.1.1. Le dispositif de Bemasoandro
1.1.2. Le dispositif dโAndranomanelatra
1. 2. Lโรฉchantillonage
2. METHODES
2. 1. Fractionnement physique du sol
2. 2. Dosage du carbone total et de lโazote total
2. 3. Dรฉtermination des activitรฉs enzymatiques
2. 3. 1. Activitรฉ de la ร-glucosidase
2. 3. 2. Activitรฉ de la phosphatase acide
2. 4. Structure gรฉnรฉtique des communautรฉs bactรฉriennes totales
2. 4. 1. Extraction de lโADN total du sol
2. 4. 2. PCR-DGGE
2. 4. 2. 1. La PCR (rรฉaction en chaรฎne par polymรฉrisation)
2. 4. 2. 2. La DGGE (Gel Electrophorรจse en gradient de dรฉnaturation)
2. 5. Analyses statistiques
CHAPITRE 3 : RESULTATS
A. Site de Bemasoandro
1. Teneurs en C et N totaux du sol
2. Activitรฉs enzymatiques
2. 1. Activitรฉ de la ร-glucosidase
2. 2. Activitรฉ de la phosphatase acide
3. Structure gรฉnรฉtique des communautรฉs bactรฉriennes totales
B. Site dโAndranomanelatra
1. Teneurs en C et N totaux du sol
2. Activitรฉs enzymatiques
2. 1. Activitรฉ ร-glucosidase
2. 2. Activitรฉ phosphatase acide
3. Structure gรฉnรฉtique des communautรฉs bactรฉriennes totales
CHAPITRE 4: DISCUSSION
1. Effets des modes de gestion du sol sur les teneurs en C et N totaux
2. Effets des modes de gestion du sol sur les activitรฉs enzymatiques
3. Effets des modes de gestion du sol sur la structure gรฉnรฉtique des communautรฉs bactรฉriennes totales
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES