Le littoral constitue un milieu qui fait l‟objet d‟une forte appropriation par l‟homme, un espace privilégié de peuplement et de développement des activités humaines. Depuis le début du XXI siècle, plus de 50% de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres du rivage. Et, les taux d‟occupation continuent de grimper à des rythmes très soutenus. Dans tous les façades des grands océans du monde, indien, atlantique, pacifique se tassent et se succèdent de grandes agglomérations (Californie, Bombay, Tokyo, Amsterdam, le Cap…). Des établissements qui illustrent souvent le prestige des nations et le pouvoir dompteur de l‟homme sur la nature. L‟Afrique, n‟échappe pas à ce paysage mondialisé, à l‟heure de l‟apogée des territoires isolés.
Ainsi, le Sénégal avec ses 706 km de côte, a la majorité de sa population le long de l‟atlantique. Une disposition largement héritée de la colonisation à travers ses dimensions économique et stratégique favorisant l‟occupation du littoral. Au cours de l‟histoire, les comptoirs ont évolué en ports, pour finalement devenir des pôles économiques. A l‟aube des indépendances, cette structure s‟est maintenue, voire renforcée. Elle atteint son paroxysme à la deuxième moitié des années 1970, du fait des crises politico-économiques mondiales et des années de sécheresse au sahel. Dans cette région, l‟essentiel de l‟économie est basée sur l‟agriculture de subsistance. Et vue de la fragilité de l‟équilibre entre besoin de la population et production, une rupture d‟équilibre s‟est produite. Et, « si cette équilibre se rompt, les victimes n’ont guère d’autres ressources que de se refugier en milieu urbain » . Du fait du déficit de ressources, le pouvoir d‟intervention sur l‟occupation spatiale des Etats sahéliens comme le Sénégal s‟est réduite. De ce fait, les politiques d‟aménagement et de contrôle des déplacements (surtout des ruraux fuyant la misère des campagnes) sont devenues laxistes dans ces pays. Par exemple, «l‟autonomie démographie » de la capitale Sénégalaise, seule ville ayant une économie diversifiée, est rapidement atteinte (P. VENNETIER, 1991).
La conséquence démographique est qu‟on retrouve plus de 2167793 habitants sur une superficie de 550 km2, en plus de l‟essentiel des activités économiques, avec 95 % des entreprises, industrielles et commerciales. La ville de Dakar, à elle seule regroupe plus de 1.093.051 de personnes, sur une surface de 7.870 ha et l‟essentiel du secteur industriel et tertiaire . Cette situation a entrainé, une urbanisation massive et continue du littoral à l‟échelle de la région. Face aux enjeux économiques actuels et au développement d‟une classe bourgeoise, cette urbanisation s‟étend sur le domaine public maritime. Qui est un milieu sensible du point de vue écologique et physique, particulier du point de vue socio-cultuel et spécifique du point de vue politico-juridique.
Cette dynamique d‟occupation du DPM est différemment appréciée. Elle suscite un engouement pour certains, une indifférence pour d‟autre et une réticence pour un grand nombre de personnes. Devant ces dualités, les chercheurs en aménagement et en gestion des établissements humains sont interpelés en premiers pour une compréhension objective de la situation, et offrir une base de connaissance scientifique aux planificateurs. Il est bien connu que « l’aménagement conditionne les choix individuels » et ses fondements son socioéconomiques. C‟est dans ce cadre que s‟inscrit notre étude qui se donne comme objectif d‟analyser « l‟occupation du domaine public maritime du littoral ouest de Dakar ». Pour se faire, il est important de voire l‟état actuel de l‟occupation, ses impacts et d‟évaluer la gestion.
Contexte et justification
Contexte
Le développement économique est une préoccupation dans tous les pays du monde. Poussant, les gouvernants à se lancer à la recherche d‟investissements pour renforcer leur capacité budgétaire et l‟élasticité de leur marché de l‟emploi. Dans les pays occidentaux malgré des phases de récessions, la croissance se fait ressentir dans la qualité de vie, du fait d‟une bonne planification et d‟une bonne organisation économique. A la différence des pays en développement, où la pauvreté est largement structurelle. En effet, la structure de l‟économie reste l‟une des premières contraintes à une forte amélioration de la productivité et au relèvement notable du niveau de vie des populations. Corréler au rythme soutenu de leur dynamique démographique, une croissance économique forte et soutenue est devenue une impérative pour garantir la paix et la stabilité dans ces pays pauvres. Pour obtenir cette croissance, les pays en développement qui renferment des ressources naturelles importantes se lancent dans de grands travaux d‟exploitations (c‟est le cas de la Guinée Equatoriale). Pour les pays dont les ressources naturelles sont limitées, la recherche de ressources alternatives s‟impose. Au regard de cette nécessité, les territoires ont entrepris des diagnostics territoriaux pour voire leurs points forts et leurs handicaps, afin de poser des perspectives de développement à long terme. Une approche managériale préconisée par certains chercheurs comme A. DIOP qui partant d‟un « diagnostic du système Sénégalais d’administration du territoire » , propose des perspectives d‟organisation et de financement. Dans cette logique, des pays comme le Sénégal ont adopté de nouvelle vision contenue dans des documents comme « le Plan Sénégal émergent ».
Dans ces nouvelles politiques, le tourisme est considéré comme «un des secteurs clés de l’économie nationale». En rappel, le Sénégal comptait officiellement en 2010, 630 hôtels, 18150 chambres, 40000 lits, avec une fréquentation annuelle de 1 500000 touristes .
Cette nouvelle vision s‟explique du fait que, dans ses phases d‟investissement, de fonctionnement et de développement, le tourisme fait appel aux services et aux produits des sous-secteurs de l‟agriculture, de la pêche, de l‟artisanat, de la culture, des BTP etc. Il fait également appel à la réalisation d‟infrastructures publiques structurantes pour un accès aux sites touristiques.
L‟ancienne capitale de l‟AOF, avec son boom démographique, la faiblesse de sa superficie et son caractère presque péninsulaire est fortement interpelée ; Afin de continuer de jouer le rôle de locomotive et de miroir attractif du Sénégal, capable de concurrencer les autres capitales sous régionales, voir mondiales. Ses limites atlantiques dans ces parties SUD, OUEST et NORD, en étant une entrave à son expansion, constitue un atout du point de vue économique. Son littoral est favorable aux activités portuaires et au développement du tourisme qui raffole d‟avoir « pieds dans l‟eau ». Ces conditions sont favorables du point de vue climatique, mais aussi permettent une diversification de l‟offre dans le tourisme d‟affaire et de loisirs (bateaux de plaisances, activités de baignade de plage, jeux aquatiques…). Ces facteurs expliquent la construction de plusieurs infrastructures au niveau du littoral de la presqu‟ile du Cap-Vert en général et un engouement vers sa partie Ouest en particulier. Compte tenu de l‟augmentation de la demande touristique externe et interne avec l‟éclosion d‟une classe moyenne et de nouveaux riches, l‟essor économique à long terme du Sénégal en général et de Dakar en particulier semble intimement lié au développement de ce secteur. Cependant ce nouveau pôle compétitif et attractif, donne une image de prospérité, pour ne pas dire un mirage qui exacerbe l‟urbanisation, déjà forte dans cette zone. En effet, l‟urbanisation est l‟un des phénomènes qui a marqué le siècle dernier et contenue de se renforcer. En Afrique, elle est très liées à la colonisation qui pour des raisons stratégiques favorisait le littoral. Au fait, « l’économie coloniale est une économie de traite » . La destination finale des produits des colonies étaient la métropole, dont l‟océan constituait la principale voie d‟acheminement, donc le littoral un passage obligé. Dans bon nombre de pays du tiers monde, à l‟instar du Sénégal, l‟urbanisation est marquée par l‟hégémonie d‟une ville macrocéphale, qui est souvent la capitale du pays. Celle-ci regroupe l‟essentiel des infrastructures et des équipements. Engendrant un appel continu de migrants qui quittent les villages et les villes secondaires pour rejoindre la capitale. L‟immigration, couplée avec l‟accroissement naturel poussent à des dimensions pittoresques d‟occupation du sol. D‟un taux d‟urbanisation de 97,2% en 2007 (41% pour le Sénégal), la région de Dakar demeure la région la plus urbanisée du pays. L‟habitat et le foncier restent un problème sur le plan de l‟accès (satisfaction de la demande), de la gestion (maitrise de l‟évolution de l‟urbanisation), et des coûts (inflation des prix et spéculation foncière).
Pierre George (1968) disait déjà que: « le paradoxe de l’époque contemporaine au point de vue de l’étude et de la mesure du fait urbain, c’est non point de mettre en cause l’existence de la ville a priori, mais au contraire de poser le problème de sa survie, à postériori » . Ces tendances majeures de l‟accroissement démographique posent d‟énormes enjeux en termes de gestion de l‟aire métropolitaine, de mobilité, de développement économique, de création d‟emploi et d‟accès aux services sociaux de base. Au niveau de la périphérie, le manque d‟infrastructures sociales de base, la dégradation du cadre vie pousse de plus en plus les nouveaux riches à privilégiés, le domaine littoral, particulièrement la corniche Ouest qui bénéficie d‟une bonne localisation. Entrainant une explosion de la demande, de ce fait un effondrement de l‟offre. Une nouvelle carte illustrant « un apartheid social » en résulte : D‟une part les nouveaux « quartiers bourgeois » du littoral, comme les ALMADIES et d‟autre part un ensemble composé de villages LEBOUS et de vieux quartiers mal aménagés. Ainsi face à cette densification urbaine sans précédent, compte tenu de cette croissance continue, et au regard des enjeux économiques se pose la question du développement durable sur cet espace.
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Table des matières
Introduction
Première partie : cadre théorique et méthodologique
Chapitre 1 : cadre théorique
Chapitre 2 : méthodologie
Deuxième partie : présentation du littoral ouest de Dakar et de l‟évolution de son occupation
Chapitre 1 : présentation du milieu physique et socioéconomique
Chapitre 2 : Evolution et état actuel de l‟occupation
Troisième partie : Impact de l‟occupation et analyse du jeu des acteurs
Chapitre 1 : Impact de l‟occupation
Chapitre 2 : Analyse du jeu des acteurs
Conclusion
Bibliographie
Liste des cartes, figures, photos et carte
Annexe 1
Annexe 2