Impact de la réhabilitation améliorée sur la prise en charge des complications après colectomie pour cancer

Les protocoles de réhabilitation améliorée après chirurgie (RAAC) ont été développés afin d’améliorer la prise en charge péri-opératoire des patients et ainsi diminuer le stress chirurgical. Une équipe pluridisciplinaire est impliquée, des protocoles de gestion péri-opératoire standardisés sont mis en place et mettent en avant l’éducation du patient qui participe ainsi activement à sa prise en charge. Après colectomie, les protocoles RAAC ont permis une diminution de la morbidité postopératoire et ainsi une réduction de la durée de séjour sans augmentation des réadmissions ni des consultations non programmées post opératoires (1, 2, 3). Dans notre série publiée, cette diminution de la morbidité globale reflétait principalement celle de la morbidité mineure et dans une moindre mesure des complications chirurgicales (1). En effet, les complications postopératoires sont inhérentes à toute intervention chirurgicale et certaines sont inévitables. Le taux de complications après colectomie pour cancer dans la littérature ne semble pas descendre au-dessous d’un seuil de 15 à 20 %, la majorité de ces complications étant de nature chirurgicale (4).Il est donc important de savoir les rechercher, les diagnostiquer et les traiter rapidement. Les complications post-opératoires (CPO) sont le plus souvent considérées comme un échec du protocole RAAC. Pourtant, à notre connaissance, l’impact du protocole RAAC sur le dépistage et la prise en charge des CPO après colectomie n’a jamais été évalué. Il n’est donc pas possible de déterminer si les patients développant une CPO bénéficient du protocole RAAC. Les sociétés savantes recommandent notamment une mobilisation, une déperfusion et une alimentation précoces. On pourrait penser que la démédicalisation rapide des patients pourrait permettre de mettre en évidence plus tôt toute « déviation » clinique et ainsi dépister plus précocement les complications. A l’inverse, une sortie précoce pourrait entrainer un retard diagnostique en cas de complications à domicile et entraîner une perte de chance pour le patient.

Information et optimisation préopératoire 

Lors de la consultation préopératoire, une information détaillée et adaptée était donnée aux patients. Un dépistage systématique des facteurs de risque de complications était également réalisé par le chirurgien, l’anesthésiste et l’infirmier coordinateur : – l’anémie définie par un seuil d’hémoglobine <12 g/dl chez la femme et < 13 g/dl chez l’homme et la carence martiale (dosage fer, ferritinémie). Les indications de transfusion sanguine et de supplémentation en fer suivaient les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) (7,8 ,9). – la dénutrition était définie selon les critères de la HAS (10,11). Les critères de supplémentation nutritionnelle suivaient les recommandations de l’ESPEN (12). Les critères pour le diagnostic de dénutrition chez l’adulte étaient : perte de poids ≥ 5 % en 1 mois ou ≥ 10 % en 6 mois ou ≥ 10 % par rapport au poids habituel avant le début de la maladie. ; IMC < 18,5 kg/m2 si patient <70 ans et IMC <21kg/m2 si patient >70 ans ; albuminémie < 35 g/L. – la fragilité : un score G8 était également réalisé chez tous les patients âgés de plus de 70 ans en vue d’une consultation par un oncogériatre si score <14 (13). Enfin, une évaluation de l’activité physique était réalisée avec mise en place de kinésithérapie ou de programme sportif en cas de sédentarité ou d’isolement social avec mise en place d’aides à domicile et/ou anticipation d’une demande de maison de convalescence en sortie d’hospitalisation.

Critères et modalités de sortie 

Les critères de sortie étaient les suivants : analgésie contrôlée sous antalgiques per os (PARACETAMOL IZALGI), reprise de l’alimentation solide bien tolérée, reprise du transit à type de gaz, mobilisation normale, absence de signe d’infection (température T <38 °C, leucocytes < 10000 G/L, pouls< 120/min), et accord du patient pour la sortie. Il n’y avait pas de dosage de protéine C-réactive (CRP) réalisé dans le service. Un bilan biologique de contrôle était réalisé à J2 post opératoire puis en fonction des signes cliniques.

Notre étude suggère que la mise en place d’un protocole RAAC bénéficie aux patients présentant une CPO après colectomie pour cancer, souvent considérée comme un échec du protocole dans la littérature. On observe une tendance à la diminution de la DTS et de la sévérité des complications selon la classification de Dindo-Clavien. Compte tenu de leur hétérogénéité, cette différence est non significative lorsqu’on évalue les populations avant/après RAAC toutes CPO confondues. La seule conclusion qui peut être tirée sur l’ensemble de la population est l’absence de sur-risque lié à la RAAC et à une éventuelle sortie précoce. Nous avons donc évalué la prise en charge des patients présentant une CPO spécifique comme les complications anastomotiques et l’IPO. De manière générale, on observe un délai diagnostique plus court avec une prise en charge plus rapide dans le groupe RAAC. En cas d’IPO, une sonde nasogastrique est posée plus fréquemment dans le groupe RAAC, le délai de reprise du transit est plus court et les troubles ioniques et rénaux moins fréquents, probablement grâce à une meilleure évaluation du 3e secteur qui est mieux compensé. Concernant les complications anastomotiques, on observe une diminution du délai de reprise chirurgicale de 7,1 jours dans le groupe standard à 4,2 jours dans le groupe RAAC (p=0,04). Cette diminution est partiellement expliquée par un changement de pratiques : en effet, un tiers des patients ayant présenté une FA n’ont pas eu de scanner avant reprise chirurgicale dans le groupe RAAC. Une cœlioscopie exploratrice était réalisée chez tous les patients qui présentaient des symptômes « précoces » (douleurs abdominales résistantes aux analgésiques de palier 2 et/ou fièvre, intolérance alimentaire, examen clinique anormal) dans les 72 premières heures sans attendre le scanner. On peut effectivement se poser la question de la valeur diagnostique d’un épanchement liquidien ou d’un pneumopéritoine résiduel sur un scanner dans un court délai après une chirurgie par cœlioscopie. Toutes les cœlioscopies exploratrices réalisées sans scanner préalable ont mis en évidence une complication chirurgicale. Dans le groupe RAAC, trois patients (20%) ont bénéficié d’un traitement conservateur avec réalisation d’une stomie d’amont et 7 reprises (47%) ont pu être réalisées par cœlioscopie exclusivement. Dans le groupe standard, quatre patients (36,3%) ont eu un lavage-drainage de la cavité abdominale par laparotomie probablement du fait d’un diagnostic plus tardif.

Nous pensons que cette modification de pratique est liée à la « démédicalisation » précoce du patient, ce qui démasquerait plus vite les complications (douleur moins facilement évaluable chez un patient alité, à jeûn, sous morphiniques…) mais aussi à la standardisation des pratiques qui permet une meilleure formation des équipes médicales et paramédicales au dépistage de ces complications.

Afin d’évaluer la perte de chance chez les patients présentant des CPO à domicile, on observe un délai de reprise chirurgicale et une durée de séjour comparables entre les trois patients réadmis pour FA et les autres patients ayant présenté une FA pendant l’hospitalisation initiale. La gestion des complications est au moins aussi importante que leur prévention. Ainsi, les résultats postopératoires sont meilleurs dans les hôpitaux dits « à haut volume »(19,20). Le taux de complications en tant que tel n’y est pas plus faible, mais les équipes ont une plus grande expérience dans le dépistage et la gestion des CPO. Cette standardisation permet également une meilleure éducation des patients qui passe par une information adaptée avant l’hospitalisation, pendant mais aussi après. La sécurisation de la sortie précoce est un des enjeux majeurs dans la mise en place d’un protocole RAAC. Une fois de plus, nous ne réalisons pas de bilan biologique systématique. En revanche, les patients sortent avec un journal de bord qui rappelle quotidiennement aux patients les symptômes nécessitant un avis auprès de notre équipe chirurgicale et le numéro de téléphone d’urgence dédié. Il remplit ce journal en présence de son infirmier à domicile qui a, lui aussi, reçu une information adaptée avant même l’hospitalisation du patient.

Ainsi, on notait ainsi une tendance à un délai de réadmission plus précoce dans le groupe RAAC (7,2 vs 10,3 jours ; p=0,54) grâce à une meilleure éducation du patient et un lien ville-hôpital renforcé. En parallèle, on observe une tendance à l’augmentation du nombre de consultations non-programmées post opératoires 13/520 (2.5%) ; (p=0,65) dans le groupe RAAC vs 6/300 (2%) dans le groupe standard ce qui reflète une sécurisation du parcours de soins et du retour à domicile et non un échec du protocole RAAC. Ces consultations concernaient principalement la gestion de la douleur (n=4) et l’aspect des cicatrices (n=12), les autres motifs de consultations étaient une rétention aigue d’urine (n=1), une anémie symptomatique (n=1) et la présence de diarrhées (n=1).

La mise en place d’un protocole RAAC ne permet pas d’éviter toutes les CPO mais semble accélérer leur diagnostic et leur prise en charge grâce à une démédicalisation précoce et une standardisation des pratiques. Si elles rallongent la durée de séjour, les CPO ne doivent pas être considérées comme un échec de la RAAC. En effet, nos résultats suggèrent que les protocoles RAAC bénéficient aux patients présentant une CPO, avec une meilleure récupération et une diminution des conséquences à court terme.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATÉRIELS ET MÉTHODES
1. Conduite de l’étude
2. Protocoles de prise en charge
Information et optimisation préopératoire
Protocoles de soins péri-opératoires
Critères et modalités de sortie
3. Recueil de données et suivi
4. Rappel sur les classifications utilisées dans l’étude
5. Analyses statistiques
RÉSULTATS
1. Population
2. Principales complications post-opératoires
Complications anastomotiques
Iléus post-opératoire
3. Réadmissions
DISCUSSION
CONCLUSION
RÉFÉRENCES 

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