Impact de la limitation explicite en oxyg`ene de la d´ecomposition oxique sur les stocks de carbone et les flux de CH4 et de CO2 

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Flux de carbone entre biosph`ere continentale, atmosph`ere et le sol.

Dans l’atmosph`ere, le carbone est majoritairement sous forme de dioxyde de car-bone, responsable d’environ 60 % de l’effet de serre (IPCC, 2013). Les flux de car-bone entre les surfaces continentales et l’atmosph`ere sont la r´esultante de deux flux contraires : d’un cˆot´e, l’assimilation de carbone par la v´eg´etation op´er´ par la photo-synth`ese, de l’autre l’´emission de carbone via la respiration. Ces flux de carbone sont op´er´es par la v´eg´etation qui, a` partir d’eau et d’´energie solaire, transforment le C O2 atmosph´erique en carbone organique via la photosynth`ese. Sous apport d’´energie des photons (S), cette ´equation s’´ecrit : 6CO2 + 12H2O →− C6H12O6 + 6O2 + 6H2O
Le flux brut de carbone assimil´e par photosynth`ese est appel´ GPP (Gross Pri-mary Production). Cette assimilation n’a lieu que de jour, et d´epend des conditions environnementales : ´eclairement, humidit´e de l’air, humidit´e du sol, temp´erature, ac-cessibilit´ en ´elements nutritifs (phosphore, azote, etc.) et du type de v´eg´etation. A l’´echelle globale, elle repr´esente environ 120 GtC an−1. Une fraction de ce flux est rejet´ee dans l’atmosph`ere sous forme de C O2 par respiration : on parlera de RA (Respiration Autotrophe). Cette respiration est issue de la d´egradation des glucides produits par photosynth`ese, fournissant l’´energie n´ecessaire a` la plante pour sa survie, son entre-tien, et aussi sa croissance lorsque la saison est favorable. On repr´esente la respiration autotrophe comme : C6H12O6 + 6O2 −→ 6CO2 + 6H2O + ENERGIE
On d´efinit la NPP (Production Primaire Nette), repr´esentant le flux net de carbone entre l’atmosph`ere et la v´eg´etation, comme : NPP = GPP − RA (1.1)
Le signe de la NPP indique si la v´eg´etation joue un rˆole de puits ou de source de carbone : une NPP positive indique que la v´eg´etation absorbe plus de carbone qu’elle n’en rejette.
Une partie de la mati`ere organique assimil´ee par la v´eg´etation sera transf´er´ee vers le sol et la liti`ere, par s´en´escence et mortalit´e de la v´eg´etation. On parlera de turnover pour d´ecrire ce flux de carbone provenant de la v´eg´etation alimentant les r´eservoirs du sol. Ce carbone sous forme de n´ecromasse est en partie rejet´ dans l’atmosph`ere sous forme de C O2 via respiration des organismes h´et´erotrophes, ne pouvant s’alimenter que de constituants organiques pr´e-´existants. Ce second type de respiration, issu de la d´ecomposition de la mati`ere organique dans et sur le sol, est tr´es d´ependante des condi-tions environnementales : temp´erature, humidit´e, et surtout la teneur en oxyg`ene du sol. On parlera de RH (Respiration H´et´erotrophe) du sol. Le flux net de carbone echang´e (NEE, Net Ecosystem Exchange) entre le composite sol/v´eg´etation et l’atmosph`ere est alors d´efini comme : NEE = RA + RH − GPP = RECO − GPP (1.2)
avec la respiraton de l’´ecosyst`eme REC O ´etant la somme de RA et RH . Une NEE n´egative indique un stockage de carbone sup´erieur aux flux sortants : l’´ecosyst`eme se comporte comme un puits.
L’´equation (1.2) repr´esente les ´echanges de carbone sous forme de C O2. Cependant, la d´ecomposition naturelle de la mati`ere organique dans le sol peut ´egalement produire du m´ethane sous certaines conditions. Bien que les ´emissions naturelles de m´ethane dues `a la d´ecomposition de mati`ere organique soient beaucoup plus faibles que les flux de dioxyde de carbone dˆus a` la respiration de l’´ecosyst`eme (125 5 TgC.an−1 en ´equivalent carbone (Saunois et al., 2016) contre environ 120 PgC.an−1), le m´ethane est un puissant gaz a` effet de serre et ses ´emissions ont ainsi un fort impact sur le bilan radiatif du syst`eme Terre.

Le m´ethane : bilan atmosph´erique, puits et sources

Le m´ethane est l’un des plus puissants gaz a` effet de serre pr´esent dans l’atmosph`ere terrestre, avec le dioxyde de carbone (C O2) et la vapeur d’eau. En tant que gaz `a effet de serre, il absorbe le rayonnement infrarouge ´emis par la surface terrestre et parti-cipe au d´es´equilibre du bilan radiatif de notre plan`ete, influencant ainsi le changement climatique global. Bien que sa concentration soit bien plus faible que celle du C O2, son potentiel de r´echauffement global est de 28 a` 34 fois plus grand, int´egr´ sur une p´eriode d’un si`ecle (Myhre et al., 2013). Ainsi, il participe `a environ 21 3% du for¸cage anthropique pour le changement climatique lors de l’ann´ee 2011 (IPCC, 2013). Jus-qu’au d´ebut des ann´ees 1980, ce gaz ´etait consid´er´ comme un composant stable et invariant de l’atmosph`ere terrestre (Khalil, 2000). Nous savons d´esormais, a` travers des mesures effectu´ees sur des bulles d’air emprisonn´ees dans des carottes de glace, que la concentration atmosph´erique de m´ethane a au contraire vari´e entre 320 et 770 ppbv (part per bil lion in volume) au cours des derni`eres 650 000 ann´ees (Chappellaz et al., 1990). Sur l’´echelle de temps bien plus courte de ces deux derniers si`ecles, sa concentration a augment´ drastiquement, surpassant tous les maxima atteints lors des six derniers cycles glaciaires (Spahni et al., 2005). Depuis l’´epoque pr´e-industrielle, la concentration atmosph´erique de m´ethane a augment´ de 140 %, passant de 772 ± 25 ppbv en 1750 a` 1803 ± 2 ppbv en 2006 (IPCC, 2013). Apr`es un hiatus au d´ebut du 21° si`ecle, cette concentration continue de croˆıtre. Cette r´ecente dynamique dans le budget atmosph´erique du m´ethane n’est pas enti`erement comprise (Saunois et al., 2016), et la trajectoire future de sa concentration, ainsi que son rˆole dans le changement climatique global sont encore incertains. A l’heure d’´ecriture de cette th`ese, les derniers relev´es de la NOAA 1 donnent une concentration globale moyenne de 1859, 7 ppbv en Janvier 2018 (Figure 1.2).
Ces concentrations atmosph´eriques sont le produit de sources et puits de m´ethane, pouvant ˆetre d’origine anthropique comme naturelle. La table 1.1 r´esume ces diff´erentes sources sur la p´eriode 2000-2009. Les sources naturelles sont tr`es vari´ees, et sont majo-ritairement d’origine biog´enique. Sur la d´ecennie 2000-2010, les sources naturelles ont contribu´e a` 35-50% des ´emissions globales (Ciais et al., 2013). Parmi ces sources na-turelles, la plus grande source est le m´ethane biog´enique issu de la d´ecomposition de mati`ere organique dans des environnements ana´erobiques et satur´es en eau, tels que marais ou tourbi`eres (Saunois et al., 2016). On parlera plus g´en´eralement de zones humides. Ce sont ces ´emissions qui sont majoritairement responsables de la variabilit´e inter-annuelle des concentrations globales de m´ethane atmosph´erique. On estime que les zones humides des hautes latitudes fournissent entre un tiers et la moiti´e des ´emissions de m´ethane globales issues des zones humides (Schlesinger and Bernhardt, 2013). Ces estimations varient entre 127 et 202 T gC H 4 −1 (Saunois et al., 2016). Ces zones humides sont non seulement les sources de m´ethane vers l’atmosph`ere les plus impor-tantes, mais aussi celles sur lesquelles p`esent le plus d’incertitudes, en climat pr´esent comme en climat futur. Les zones humides de haute latitude sont particuli`erement sen-sibles : on s’attend en effet a` ce que les impacts du climat futur soient plus marqu´es dans ces r´egions, et la mani`ere dont ces zones r´epondront `a ces changements est encore incertaine (Riley et al., 2011).
Les sources anthropiques sont responsables des 50-65% des ´emissions annuelles glo-bales restantes. Ces sources dues `a l’activit´e humaine sont vari´ees : biog´eniques, ther-mog´eniques ou pyrog´eniques. Elles incluent l’´elevage de ruminants, la riziculture, la combustion de biomasse, le traitement des d´echets et la production d’´energie : mines de charbon, industrie p´etroli`ere et gazif`ere. Ces ´emissions anthropiques ont contribu´e d’environ +0, 5 W −2 au forcage radiatif global entre l’`ere pr´e-industrielle et 2005, alors que les sources naturelles sont rest´ees relativement constantes au cours des 250 derni`eres ann´ees (Forster et al., 2013).
Concernant les puits de m´ethane, le plus important (528 T gC H 4 −1) est son oxida-tion chimique, ayant lieu dans la troposph`ere (Ciais et al., 2013). Le m´ethane r´eagit avec le radical hydroxyle (OH• ) et, suivant une cascade de r´eactions interm´ediaires, est finalement transform´e en dioxyde de carbone ou en monoxyde de carbone (C O). Dans la troposph`ere, la dur´ee de vie du m´ethane d´epend donc de la concentration en radical hydroxyle et est estim´ee `a 9 1 ± 0 9 ans (Prather et al., 2012). Le seul puits biologique connu de m´ethane atmosph´erique a lieu dans les sols, en condition oxique, o`u des bact´eries m´ethanotrophes oxydent ce dernier. Ces bact´eries consomment entre 9 et 47 T gC H 4 −1 (Curry, 2007; Dutaur and Verchot, 2007; Spahni et al., 2011; Ito and Inatomi, 2012).
Les concentrations atmosph´eriques de C H4 et de C O2 ont vari´e de fa¸con synchrone avec les temp´eratures au cours des derniers 650 000 ans (Spahni et al., 2005). En p´eriodes interglaciaires, ces concentrations ´etaient elev´ees tandis que les p´eriodes glaciaires correspondaient `a de faibles concentrations. En l’´etat actuel des connaissances, une des explications les plus probables a` cette oscillation synchrone est la variation des ´emissions venant des zones humides (van Huissteden, 2004). En effet, plusieurs ´etudes de mod´elisation ont essay´ de reconstruire ces ´emissions, et ont montr´e que ces faibles concentrations atmosph´eriques de m´ethane durant le dernier maximum glaciaire ne peuvent ˆetre expliqu´ees que par une diminution des sources jointe a` une augmentation des puits dans ces r´egions (Valdes et al., 2005; Kaplan et al., 2006). Comprendre les ´echanges de m´ethane entre les surfaces terrestres et l’atmosph`ere est donc important du point de vue du budget radiatif et de la chimie de l’atmosph`ere. Les zones hu-mides jouent un rˆole cl´e dans dans les fluctuations des concentrations atmosph´eriques de m´ethane et sont donc de premier int´erˆet.

Zones humides, tourbi`eres et perg´elisols

D´efinitions

Les zones humides sont des zones satur´ees en eau ou inond´ees de mani`ere per-manente, saisonni`ere ou encore irr´eguli`ere. Ce terme reste cependant assez vaste, et recouvre une large vari´et´ d’´ecosyst`emes : plaines d’inondation, marais et mar´ecages, tourbi`eres, lacs peu profonds. La distribution spatiale de ces zones humides est vaste : du haut-Arctique aux tropiques, et des basses zones cˆoti`eres aux hauts plateaux. Au cours de ces derni`eres d´ecennies, plusieurs groupes de recherche ont compil´e de nom-breuses informations sur leur distribution et leur classification, d´eriv´ees majoritaire-ment de donn´ees satellitaires (Matthews and Fung, 1987; Aselmann and Crutzen, 1989; Prigent et al., 2001; Lehner and Doell, 2004). Malgr´e tout, les cartes ainsi disponibles restent ´etonnamment incompl`etes : les bases de donn´ees de zones humides sous-estiment l’´etendue de ces ´ecosyst`emes de 44 − 55 %, et certaines cartes d´eriv´ees de donn´ees satel-litaires sous-estiment leur superficie de 77− 98 % (Frey and Smith, 2007). Les probl`emes li´es au contrˆole de ces superficies sont d’une part dˆus `a leur saisonnalit´e, et leur nature inaccessible et/ou dispers´ee. Leur ´etude, sur le terrain ou par satellite, est ainsi diffi-cile et coˆuteuse. Depuis une dizaine d’ann´ees, des approches multi-satellites semblent avoir r´esolu un certain nombre de ces probl`emes et sont ainsi relativement fiables, en superficie comme en temporalit´ (Prigent et al., 2007; Frey and Smith, 2007). Bien que mieux contraintes, les incertitudes concernant les superficies des zones humides n’en restent pas moins importantes. Les superficies de zones humides simul´ees par les mod`eles participant au projet d’intercomparaison WETCHIMP (Melton et al., 2013) sont ainsi de 8 6 − 26 9 × 106 km2, et la litt´erature utilis´ee dans ce mˆeme projet rap-porte des superficies de 4 3 − 12 9 × 106 km2. Ces incertitudes sur la superficie des zones humides p`esent ainsi sur les ´emissions simul´ees de m´ethane, evalu´ees entre 141 et 264 T gC H 4 −1 par le projet WETCHIMP (Melton et al., 2013). Malgr´e tout, il est av´er´ que plus de la moiti´e des zones humides sont pr´esentes dans les hautes la-titudes de l’h´emisph`ere Nord. De plus, les types de zones humides les plus communs dans les r´egions arctiques et bor´eales sont les tourbi`eres (Aselmann and Crutzen, 1989).
Les tourbi`eres sont un type particulier de zones humides, satur´ees en permanence. Comme pour ces derni`eres, le terme tourbi`ere contient de nombreux sous-types d’´ecosyst`emes, qui diff´erent d’apr´es la provenance de l’eau (stagnante ou issue de cours d’eau, …), leur teneur en mati`ere organique, ou encore leur acidit´e. La langue fran¸caise n’a pas de mots sp´ecifiques pour ces diff´erences, contrairement `a la langue anglaise (bog, fen, pocosins, mire,…). Dans ces ´ecosyst`emes, le taux d’accumulation de mati`ere organique est ma-joritairement sup´erieur au taux de d´ecomposition, ce qui en fait donc un important r´eservoir de carbone du sol. Le taux d’accumulation des tourbi`eres d´epend de la po-sition du niveau hydrostatique, de la temp´erature du sol et de la production primaire nette (net primary production, ou NPP). Dans ces tourbi`eres, les conditions anoxiques aboutissent `a des d´ecompositions lentes. Au-dela de 40°N, les tourbi`eres recouvrent une ´etendue d’environ 3 2 × 106 km2, et on estime leur stock de carbone a` 400 − 500 PgC (Roulet, 2000). Au niveau du budget radiatif global, on estime leur effet sur le climat entre −0 2 et −0 5 W −2, soit un effet refroidissant : les effets de la s´equestration surpassent les effets des ´emissions de m´ethane.
Les perg´elisols, aussi appel´es permafrost, constituent une autre source naturelle de m´ethane. Les perg´elisols sont d´efinis comme des sols dont la temp´erature se maintient en permanence sous 0 °C, pendant une p´eriode minimale de deux ans. Ces conditions de gel inhibent les processus de d´ecomposition de la mati`ere organique (Smith, 2004; Zimov, 2006; Schirrmeister et al., 2011). Ainsi, les perg´elisols sont particuli`erement riches en mati`ere organique, souvent ancienne, qui s’est accumul´ee au fil du temps. A l’´echelle globale, les sols sont le plus grand r´eservoir de carbone terrestre : on estime actuellement `a 2000 Pg ces stocks sur les deux premiers m`etres (Shangguan et al., 2014). En particulier, les r´egions perg´elisol´ees, pourtant minoritaires en superficie (en-viron 15% des surfaces terrestres, et jusqu’`a 25 % en ne consid´erant que l’h´emisph`ere Nord), repr´esentent une grande fraction de ces stocks : entre 1400 et 1850 PgC d’apr´es Tarnocai et al. (2009) et 1100 − 1500 PgC d’apr´es Hugelius et al. (2014), soit bien plus important que le r´eservoir atmosph´erique de 730 PgC. La majeure partie est stock´ee sur les trois premiers m`etres, et 272 Pg suppl´ementaires en profondeur dans les perg´elisols profonds, comme par exemple le Yedoma (Hugelius et al., 2014). La dynamique de gel et de d´egel dans ces r´egions est un des facteurs principaux expliquant la dynamique des flux de m´ethane observ´es, a` la fois saisonniers comme interannuels. En effet, la plus grande partie du m´ethane ´emis du sol vers l’atmosph`ere provient de processus ayant lieu dans la couche de surface soumise au gel et au d´egel saisonnier. Cette couche est appel´ee couche active.
Les liens entre zones humides, tourbi`eres et perg´elisols sont importants, car ces derniers influent sur les propri´et´es hydrologiques et thermiques des sols. En effet, les sols gel´es -en particulier quand ils sont riches en eau- contiennent de la glace. Cette eau gel´ee empˆeche l’eau liquide provenant des pr´ecipitations, de la fonte des neiges ou encore du ruissellement de surface de s’infiltrer par drainage dans les couches plus pro-fondes du sol. Si, de surcroˆıt, la topographie du terrain est suffisamment plate pour pr´evenir tout ruissellement , des conditions satur´ees voire inond´ees sont courantes dans les terrains perg´elisol´es. D’autre part, les tourbi`eres et sols fortement organiques af-fectent aussi la dynamique des perg´elisols par leurs propri´et´es thermiques particuli`eres. Pour exemple, en Am´erique du Nord, 36 % de la superficie totale des tourbi`eres ont une base perg´elisol´ee (Bridgham et al., 2006).

Processus responsables des ´emissions de m´ethane des zones humides et des perg´elisols

Comme dit pr´ec´edemment, les zones humides sont le principal contributeur des ´emissions de m´ethane naturelles. Historiquement, le m´ethane a d’ailleurs et´ d´ecouvert via ses ´emissions provenant des rives du Lac Majeur (Volta, 1778). Les ´emissions de m´ethane provenant des tourbi`eres et, plus g´en´eralement, des zones humides sont le produit final de trois classes de processus : la production microbienne de m´ethane, l’oxydation microbienne de m´ethane, et le transport vers l’atmosph`ere. Ces ´emissions sont grandement d´etermin´ees par le climat qui influence `a la fois la v´eg´etation et la NPP, et les processus de surface li´es a` la temp´erature et l’hydrologie du sol, et -dans le cas des perg´elisols- de la profondeur de la couche active. La figure 1.4 sch´ematise ces diff´erents processus pour une zone humide non perg´elisol´ee, et ces processus ont ´egalement lieu dans la couche active des perg´elisols.
Production de m´ethane `a partir de mati`ere organique Le m´ethane est l’un des produits terminaux de la d´egradation de la mati`ere organique par des processus biochimiques. Il est g´en´eralement produit par des arch´ees m´ethanog`enes en conditions ana´erobies ; bien que de r´ecentes ´etudes montrent la possibilit´e d’une m´ethanogen`ese en condition a´erobie (Serrano-Silva et al., 2014). Certains types de m´ethanog`enes peuvent ´egalement exister dans des environnements oxiques, mais sont en ´etat de dormance jusqu’`a ´etablissement de conditions anoxiques. Le m´ethane est donc majoritairement produit sous la profondeur de p´en´etration de l’oxyg`ene dans le sol, qui est tr´es corr´el´ee avec le niveau hydrostatique (water table). Le substrat organique pr´ef´erentiellement d´ecompos´ par les m´ethanog`enes est un m´elange de mati`eres carbon´ees, d´eriv´ees de la d´ecomposition des exudats des racines et liti`ere. Il faut noter que l’ensemble du pro-cessus m´ethanog´enique est complexe, et fait intervenir une suite de diff´erents processus biog´eochimiques : hydrolyse, transformation du substrat en une suite de compos´es in-term´ediaires pr´ecurseurs du m´ethane, etc. D’autre part, plusieurs voies m´etaboliques diff´erentes sont responsables de la production du m´ethane selon le type de substrat (Conrad, 2007). Cons´equemment, il n’existe pas d’´equation de r´eaction chimique unique ou simplifi´ee rendant compte du processus de m´ethanogen`ese, et le lecteur int´eress´ pourra consulter Conrad (2007); Billard (2016). Au cours de cette th`ese, on consid´erera la m´ethanogen`ese comme une simple transformation de la mati`ere organique en condi-tion ana´erobique, comme le font la tr´es grande majorit´e des travaux de mod´elisation existant.
Oxydation du m´ethane dans le sol L’oxydation biologique du m´ethane en condi-tion a´erobie, appel´ee m´ethanotrophie, est r´ealis´ee par des bact´eries m´ethanotrophes. Cette m´ethanotrophie permet l’utilisation du m´ethane comme source de carbone et d’´energie. Comme pour la m´ethanogen`ese, le processus d’oxydation du m´ethane est complexe et fait intervenir 4 ´etapes successives durant lesquelles le m´ethane est trans-form´e en m´ethanol (CH3OH), puis en formald´ehyde (CH2O), en formiate (HCOOH), et finalement en dioxyde de carbone. L’´equation simplifi´ee, ne faisant pas apparaitre ces transformations, s’´ecrit comme : CH4 + 2O2 −→ CO2 + 2H2O
De mˆeme que pour la m´ethanogen`ese, on d´enombre diff´erentes voies m´etaboliques pour la m´ethanotrophie, se distinguant par diff´erentes voies d’assimilation du formald´ehyde. Une description biog´echimique d´etaill´ee des processus sous-jacents est donn´ee dans Billard (2016).
Une fois le m´ethane produit dans la colonne de sol, on d´enombre trois principaux processus de transport du sol vers l’atmosph`ere : la diffusion, l’´ebullition et le transport par les plantes et les racines .
Diffusion dans le sol La diffusion est le processus de migration d’une esp´ece chi-mique, transport´ee via des chocs al´eatoires de mol´ecules (Crank, 1975). Cette diffusion mol´eculaire tend a` uniformiser le profil de gaz dans le sol : le gaz est en effet transport´e des r´egions aux concentrations les plus fortes vers les r´egions de faible concentration. La vitesse de la diffusion d´epend de l’esp`ece chimique consid´er´ee, de la temp´erature, de la pression, mais aussi du milieu dans lequel s’effectue ce transport : en milieu aqueux, la diffusion est quatre ordres de grandeur plus lente qu’en milieu gazeux. Des trois processus de transport de m´ethane vers l’atmosph`ere, il s’agit du plus lent.
Ebullition Si la concentration de gaz dans l’eau liquide d´epasse un certain seuil, il est possible que des bulles se cr´eent. Ces bulles sont transport´ees vers le haut par ´ebullition. Ce processus peut transporter d’importantes quantit´es de m´ethane en peu de temps, et est par essence discontinu. La physique derri`ere la formation des bulles et leur transport en milieu poreux est complexe. Transport par les plantes et racines Les plantes des zones humides se sont adapt´ees aux conditions satur´ees en d´eveloppant des aerenchymes, qui sont des canaux remplis d’air dans le tissu v´eg´etal. Ces canaux sont destin´es `a transporter du dioxyg`ene vers les racines et la rhizosph`ere, mais permettent aussi le transport du m´ethane et du dioxyde de carbone de la zone racinaire versl’atmosph`ere.
La production, l’oxydation et le transport du m´ethane dans le sol sont influenc´es par de nombreux facteurs environnementaux et biotiques. Ces processus sont incertains, et de nombreuses r´etroactions entre ces derniers peuvent survenir comme nous le verrons par la suite.

Mesures et observations des flux de m´ethane

Les flux de m´ethane provenant des zones humides sont mesur´es majoritairement selon deux types de m´ethode : par tour de flux, et par chambres de flux statiques.
A l’´echelle de la parcelle, les tours de flux mesurent les ´echanges turbulents entre le sol et l’atmosph`ere. Ces tours ´echantillonnent a` haute de fr´equence des donn´ees de vent et de diff´erentes grandeurs scalaires, comme la concentration de m´ethane dans les couches limites turbulentes atmosph´eriques. Les flux verticaux de m´ethane sont ensuite d´etermin´es par m´ethode de covariance des turbulences (Foken et al., 2012).
Les chambres statiques sont abondamment utilis´ees pour mesurer directement les ´echanges de m´ethane et de dioxyde de carbone `a l’interface sol/atmosph`ere pour diff´erents ´ecosyst`emes. Sch´ematiquement, il s’agit d’une boite plac´ee `a la surface du sol, ou-verte en sa base, qui pendant un court intervalle de temps mesure les changements de concentration `a l’int´erieur. A la fin de chaque mesure, le couvercle de la chambre statique s’ouvre bri`evement afin de revenir en condition d’´equilibre avec l’atmosph`ere. Les s´eries temporelles r´esultantes sont ensuite trait´ees pour estimer les flux l`a ou la chambre est install´ee. On utilise souvent une r´egression polynomiale du premier-ordre, lin´eaire, bien que cette hypoth`ese soit en partie critiquable (Pirk et al., 2016a). Ce type de mesure point-par-point `a l’avantage d’ˆetre particul`erement pr´ecis : la zone etudi´ee est spatialement bien plus restreinte que la m´ethode de covariance des turbulences. Cette pr´ecision spatiale peut cependant s’av´erer probl´ematique : les ´emissions de m´ethane peuvent ˆetre tr´es diff´erentes entre deux points proches de quelques m`etres `a cause de variations microtopographiques (Pirk et al., 2017), et un point de mesure particulier ne sera pas forc´ement repr´esentatif de la zone d’int´erˆet. Il est donc recommand´ d’utiliser plusieurs chambres closes en parall`ele pour l’´etude d’un syst`eme particulier.
Concernant les concentrations atmosph´eriques de m´ethane, il existe de nombreuses m´ethodes d’observations. Ces concentrations peuvent ˆetre utilis´ees pour d´eduire les ´echanges de m´ethane entre surface et atmosph`ere (voir section 1.5), mais elles ne sont pas le sujet principal de cette th`ese. Aussi on se limitera `a nommer les principales m´ethode : observations atmosph´eriques directes des profils verticaux (a´eronefs, ballonsondes), t´el´ed´etection infrarouge, ou encore par produits satellitaires majoritairement bas´es sur spectrom´etrie infrarouge qui se sont multipli´es ces derni`eres ann´ees. Pour plus de d´etails, le lecteur pourra se r´ef´erer a` Kirschke et al. (2013); Saunois et al. (2016).

R´etroactions potentielles des ´emissions bor´eales et arc-tiques de m´ethane sur le climat

Tant que les perg´elisols restent gel´es, la mati`ere organique qu’ils contiennent reste inerte et ne peut ˆetre d´ecompos´ee. Dans le contexte de changement climatique global, les perg´elisols ne restent cependant pas inertes et leur d´egradation est d´eja un fait av´er´. Ces ´ecosyst`emes sont ainsi tributaires des conditions climatiques, mais peuvent aussi influencer le climat `a travers de nombreuses r´etroactions :
i Le d´egel des perg´elisols a pour cons´equence d’augmenter la profondeur de la couche active. La mati`ere organique pr´ec´edemment gel´ee devient alors mobilisable pour ˆetre d´ecompos´ee, produisant ainsi des gaz a` effet de serre (majoritairement C O2 et C H4 , selon que la d´ecomposition se fasse en milieu oxique ou anoxique). Ceci est une r´etroaction positive, r´esultant en un effet net r´echauffant.
ii Le r´echauffement et l’augmentation de la profondeur de la couche active qui s’en suit peut favoriser le d´eveloppement de la v´eg´etation sous forme d’arbustes et de buissons, diminuant ainsi l’albedo et augmentant l’absorption de rayonnement solaire entrant. L’augmentation des temp´eratures locales qui en r´esulterait abou-tirait a` un approfondissement de la couche active, r´esultant ´egalement en un effet net r´echauffant.
iii Cette plus grande abondance de v´eg´etation peut ´egalement augmenter l’absorp-tion nette de C O2 par cette derni`ere. Ceci est une r´etroaction n´egative,r´esultant en un effet net refroidissant.
iv Des plus grandes temp´eratures du sol peuvent aboutir `a des vitesses de d´ecomposition plus rapides, aboutissant a` une production accrue de gaz a` effet de serre, contri-buant ainsi encore plus au r´echauffement climatique.
v Le d´egel des perg´elisols peut ´egalement entrainer des conditions plus s`eches, aug-mentant ainsi la probabilit´e d’incendies. Cette fr´equence accrue de feux relacherait du C O2, accroissant ainsi le r´echauffement.
Des estimations actuelles ´evaluent entre 160 et 290 PgC de carbone la quantit´e ´eventuelle relach´ee dans l’atmosph`ere sous forme de C O2 ou C H4 suite au d´egel du perg´elisol et la min´eralisation microbienne r´esultante. Cela repr´esente une des r´etroactions potentielles les plus importantes sur le climat, et a et´ d´ecrite comme une ”bombe `a retardement” lors de la conf´erence de Doha de 2012. Cependant, ces estimations sont sujettes `a de grandes incertitudes. D’une part, l’´evolution du r´egime thermique du perg´elisol n’est pas enti`erement comprise et d´etermin´ee. D’autre part, le devenir de ces stocks de carbone fait intervenir de nombreux processus physiques, chimiques et biolo-giques qui sont complexes et entremˆel´es.
Il a et´ envisag´ que les ´emissions de m´ethane des zones humides septentrionales peuvent augmenter drastiquement au cours du 21°si`ecle : sous certains sc´enarios, les augmentations de temp´eratures dans ces r´egions pourraient atteindre les 5 °C. Ces aug-mentations des ´emissions peuvent survenir soit via un effect direct des temp´eratures sur la production de m´ethane, soit de mani`ere indirecte via le d´egel des perg´elisols indui-sant des changements sur la v´eg´etation et l’hydrologie de ces sols, donc la production de m´ethane. Par exemple, Koven et al. (2015) estiment une augmentation des ´emissions de m´ethane de +35 % sous le sc´enario RCP8.5 (correspondant a` un for¸cage radiatif additionnel de 8 5 W −2) entre 2010 et 2100, ce qui correspondrait approximative-ment a` une augmentation de 10 a` 27 % de for¸cage en gaz `a effet de serre. La revue de Schuur et al. (2015) estime qu’`a l’horizon 2100, 2 3 % des ´emissions de carbone issues du d´egel du perg´elisol se feront sous la forme de C H4, le reste sous forme de C O2. Par rapport a` 100 % d’´emissions sous forme de C O2, cette r´epartition estim´ee provoquerait un r´echauffement additionnel de 35 `a 48 %.
En r´esum´e, dans un contexte de changement climatique, les stocks de carbone ac-tuellement inertes des perg´elisols ont ainsi un rˆole critique `a jouer dans les r´etroactions terrestres si ils deviennent mobilisables. Les ´emissions de m´ethane li´ees ont le potentiel d’accroitre encore le r´echauffement climatique, cr´eant de fait une boucle de r´etroaction positive (Schaefer et al., 2014; Schuur et al., 2015; MacDougall et al., 2012; Burke et al., 2012, 2013; Schneider Von Deimling et al., 2015).
L’amplitude et la temporalit´ de ces flux de carbone restent cependant hautement incertaines, d’une part `a cause d’observations encore incompl`etes, d’autre part parce que la mod´elisation des processus associ´es est encore `a am´eliorer (Saunois et al., 2016). Vu la complexit´ et la diversit´ de ces m´ecanismes, la mod´elisation num´erique est un outil n´ecessaire.

Mod`elisation des ´emissions naturelles de m´ethane

Il existe deux grandes cat´egories de mod`eles con¸cus pour simuler les ´emissions de m´ethane. Les mod`eles dits bottom-up repr´esentent de mani`ere m´ecaniste les processus responsables des ´emissions de m´ethane, tandis que les mod`eles top-down r´esolvent des probl`emes inverses en utilisant l’observation des concentrations atmosph`eriques et des mod`eles de transport-r´eaction pour remonter aux sources d’´emissions. Ces deux grandes familles ont chacun leur sp´ecificit´ : les mod`eles top-down ne repr´esentent pas les proces-sus biog´eochimiques responsables des ´emissions de m´ethane, et ne d´ependent donc pas des incertitudes pesant sur la repr´esentation math´ematique de ces processus. Cepen-dant, ils restent limit´es par construction dans la pr´ediction des futures ´emissions car ils prennent en entr´ee la concentration atmosph´erique. Inversement, les mod`eles bottom-up peuvent directement ˆetre compar´es a` des mesures de terrain et des exp´eriences sur sites. Leur approche m´ecanistique permet ´egalement une compr´ehension d´etaill´ee des processus mis en oeuvre, leurs interactions et surtout les effets du climat et des facteurs environnementaux sur les ´emissions de m´ethane a` travers des exp´eriences de sensibilit´ et des simulations forc´ees par des sc´enarios futurs. Ces diff´erentes approches peuvent cependant se compl´eter l’une et l’autre : les mod`eles top-down pouvent aider a` mieux contraindre les r´esultats des mod`eles bottom-up lorsqu’ils sont utilis´es sur des grandes ´echelles spatiales.

Bilan d’´energie `a la surface des continents

Les ´echanges d’´energie entre la terre et l’atmosph`ere sont contrˆol´es par le rayon-nement solaire : les radiations ni absorb´ees ni r´efl´echies par l’atmosph`ere atteignent la surface continentale. Ce rayonnement solaire incident Rg (W.m−2) est en partie r´efl´echi par la surface en fonction de son alb´edo (α), d´ependant des caract´eristiques de surface. La surface absorbe ´egalement le rayonnement infra-rouge ´emis par l’atmosph`ere. Suivant la loi de Stefan-Boltzmann, cette ´energie est en partie r´e´emise par la surface sous forme de rayonnement infra-rouge. En notant ǫ l’´emissivit´ de la surface, σ (W.m−2.K−4) la constante de Stefan-Boltzmann et Ts (K) la temp´erature de surface, le bilan radiatif a` la surface s’´ecrit : R n = R (1−α)+ǫ(R a − σT4) (2.1)
avec Rn (W.m−2) le rayonnement net, Rg (1 − α) le rayonnement solaire absorb´e et ǫ(Ra − σTs4) le rayonnement atmosph´erique intra-rouge absorb´e.
En plus de ces ´echanges radiatifs, la surface et l’atmosph`ere ´echangent de l’´energie via des ph´enom`enes turbulents, et la surface ´echange de l’´energie avec le sol par diffusion de chaleur. Les flux turbulents sont dˆus a` des mouvements verticaux de l’air chauff´e par la surface -c’est le flux de chaleur sensible H (W.m−2)-, et de vapeur d’eau evapor´ee a` la surface et/ou transpir´ee par les plantes -c’est le flux de chaleur latente LE (W.m−2). Par conservation de l’´energie, le bilan d’´energie de la surface s’´ecrit donc : Rn = H + LE + G (2.2)
avec G (W.m−2) le flux de chaleur vertical dans le sol. H est directement pro-portionnel `a la diff´erence de temp´erature entre le sol Ts (K) et l’atmosph`ere Ta (K). Similairement, LE est proportionel `a la diff´erence entre les humidit´es sp´ecifiques de l’air qa et du sol qs (kg kg−1). On a ainsi pour du sol nu :
H = cρρaCH Va(Ts − Ta) (2.3)
LE = Lv ρaCH Va(qs − qa) (2.4)
avec ρa (kg m−3) la densit´ de l’air, Va (m s−1) la vitesse du vent et CH un coefficient d’´echange adimensionn´ d´ependant de la stabilit´e de l’atmosph`ere. cρ (J kg−1 K−1) et Lv (J kg−1) sont respectivement la chaleur sp´ecifique de l’air et la chaleur latente de vaporisation.

Cycle hydrologique et bilan hydrique

Cycle hydrologique Le cycle hydrologique recouvre l’ensemble des mouvements de l’eau dans le syst`eme Terre, sous ses trois formes : liquide, solide et gazeuse. Ces mouve-ments donnent lieux a` des ´echanges de masse d’eau entre les diff´erents r´eservoirs d’eau que sont l’atmosph`ere, les oc´eans, les glaciers, les surfaces continentales et les eaux souterraines. De mˆeme que pour les ´echanges d’´energie, le moteur des ´echanges d’eau est le rayonnement solaire. L’apport d’´energie provenant du Soleil favorise l’´evaporation de l’eau des oc´eans et des continents, et entraine ainsi les ´etapes successives du cycle de l’eau. La vapeur d’eau, transport´ee par circulation atmosph´erique, est restitu´ee aux continents et aux oc´eans sous forme de pr´ecipations solides et/ou liquides. La neige va fondre et/ou se sublimer sous l’effet du rayonnement solaire. Sur les surfaces continen-tales, une partie de ces pr´ecipitations est intercept´ee par la v´eg´etation au niveau de la canop´ee. L’eau liquide peut ensuite s’´ecouler en surface, via ruissellement, ou s’infil-trer dans le sol. On d´efinit le ruissel lement total comme la somme du ruissellement de surface et du drainage en profondeur. L’eau infiltr´ee peut-ˆetre stock´ee temporairement dans le sol, pour ensuite alimenter des horizons plus profonds par percolation ou drai-nage, ou ˆetre restitu´ee directement a` l’atmosph`ere par ´evaporation, soit directe, soit issue de la transpiration des plantes. On regroupe sous le terme d’´evapotranspiration ces deux contributions. L’eau douce ruissellant en surface et drain´ee en profondeur est majoritairement restitu´ee aux oc´eans. Elle peut aussi ˆetre temporairement stock´ee dans les nappes, aquif`eres, lacs ou zones humides pour ensutie s’infiltrer, s’´evaporer ou ruisseler a` nouveau. La figure 2.3 repr´esente de mani`ere simplifi´e le cycle hydrologique continental.
Bilan hydrique L’estimation des quantit´es d’eau echang´ees lors du cycle hydrolo-gique peut ˆetre quantifi´e par un bilan d’eau, exprimant l’´equilibre entre la quantit´e pr´esente dans un r´eservoir et les flux d’eau entrants et sortants. Notez que ce bilan d’eau est habituellement effectu´ `a l’´echelle du bassin versant, unit´e hydrologique fon-damentale, mais peut tout aussi bien s’appliquer a` d’autres syst`emes hydrologiques de diff´erentes ´echelles comme par exemple les continents ou la parcelle. Dans cette th`ese, on se placera `a l’´echelle de la parcelle. Pour un syst`eme hydrologique, ce bilan d’eau effectu´ sur une p´eriode Δt s’´ecrit : ΔW = P − Qs − Qg − ET (2.5)
avec P les pr´ecipitations, Qs le ruissellement de surface, Qg le drainage et ET l’´evapotranspiration, tous exprim´es en kg m−2 s−1. Le terme ΔW repr´esente ainsi les Δt variations de masse d’eau `a l’int´erieur du syst`eme hydrologique consid´er´e, ramen´ `a sa surface.
Les ´ecoulements d’eau dans le sol : loi de Darcy, loi de Richards L’´etat energ´etique de l’eau dans le sol est caract´eris´ par le potentiel hydrique ψ (m), d´efini comme la somme de l’´energie cin´etique et de l’´energie potentielle de l’eau du sol. Les vitesses de l’eau dans le sol ´etant g´en´eralement faibles, la contribution de l’´energie cin´etique peut ˆetre n´eglig´ee. On d´efinit alors la charge hydraulique H (m) comme ´etant la somme du potentiel gravitationnel z (m) et du potentiel hydrique ψ (m) : H = z + ψ = z + p (2.6)
avec z l’altitude, p (Pa) la pression de l’eau par rapport a` la pression atmosph´erique, g (m2.s−1) l’acc´el´eration de la pesanteur et ρw (kg.m−3) la masse volumique de l’eau.
L’´ecoulement de l’eau dans le sol s’effectue selon le gradient de la charge hydraulique, de la charge la plus elev´ee vers la moins elev´ee. Cet ´ecoulement en milieux poreux est repr´esent´ par la loi de Darcy, ´etablissant la proportionnalit´e entre la vitesse de l’´ecoulement →− (m.s−1) et le gradient hydraulique : V V = kgrad(H ) →− −−→ (2.7)
Le coefficient de proportionnalit´e k (m.s−1), appel´ conductivit´e hydraulique ou perm´eabilit´e, caract´erise la facilit´e avec laquelle l’eau traverse le milieu poreux sous l’effet du gradient hydraulique. Ce coefficient, ainsi que le potentiel hydrique, sont reli´es au contenu en eau du sol et a` la texture du sol. Ils sont explicit´es en section 2.2.1.4.
Dans le cadre d’un ´ecoulement vertical unidimensionnel, le flux d’eau par unit´e de surface dans le sol q (m.s−1) s’´ecrit ainsi : q(z) = k ∂ [ψ + z] = k ∂ψ + 1 (2.8)
En combinant la conservation de la masse, exprimant que sur un volume infinit´esimal l’´evolution temporelle de l’humidit´e du sol wg (m3 m −3) est ´egale au bilan des flux entrants et sortants, et la loi de Darcy, on obtient l’´equation de Richards qui d´ecrit l’´ecoulement vertical de l’eau dans un milieu poreux homog`ene : ∂wg = − ∂q = − ∂ k(wg ) ∂ψ(wg ) − ∂k(wg ) (2.9)
C’est sur cette ´equation que repose la repr´esentation de l’eau du sol dans tout les LSMs. Notez que les ´equations (2.9) et (2.8) sous cette forme ne prennent pas en compte de nombreux processus de sources/puits d’eau liquide. Elles peuvent ˆetre complexifi´ees afin de traiter les processus de gel ou d´egel, les termes sources (pr´ecipitations, etc), ou encore les ´echanges de vapeur d’eau dans le sol, comme d´ecrit en section 2.2.1.4).

Le mod`ele ISBA

ISBA (Interaction Sol Biosph`ere Atmosph`ere) est le mod`ele de surface du CNRM, d´evelopp´ initialement par Noilhan and Planton (1989). Il reposait sur une physique de type ”bucket” et un nombre restreint de param`etres d´ecrivant le type de sol et de v´eg´etation pour mod´eliser les flux d’eau et d’´energie. La derni`ere version du mod`ele physique est une version multicouche qui r´esout explicitement les ´equations de transfert de chaleur et de masse d’eau dans le sol sur une grille plus fine, commune a` l’hydrolo-gie et la thermique (Boone et al., 2000; Decharme et al., 2011, 2013). ISBA comprend ´egalement un sch´ema multicouche de neige, d´evelopp´ par Boone and Etchevers (2001) et am´elior´ par Decharme et al. (2016), d´ecrivant de mani`ere explicite les processus intrins`eques au manteau neigeux.
Concernant l’int´egration du cycle du carbone dans le mod`ele de surface, la premi`ere repr´esentation des flux de carbone dans ISBA a et´ int´egr´ee par Calvet et al. (1998), et la version plus r´ecente (Gibelin, 2007) repr´esente les r´eservoirs de carbone dans la v´eg´etation et dans les sols, sous le nom ISBA-CC pour Carbon Cycle.
ISBA est toujours en perp´etuel d´eveloppement et plusieurs versions coexistent au sein du CNRM. Cette section pr´esentera la version sur laquelle les travaux de th`ese se sont bas´es.

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Table des matières

Introduction g´en´erale
1 Echanges de carbone entre surfaces continentales et atmosph`ere sous forme de m´ethane 
1.1 Pr´eambule
1.2 Cycle du carbone
1.2.1 R´eservoirs et ´echanges de carbone `a l’´echelle globale
1.2.2 Flux de carbone entre biosph`ere continentale, atmosph`ere et le so
1.3 Le m´ethane : bilan atmosph´erique, puits et sources
1.4 Zones humides, tourbi`eres et perg´elisols
1.4.1 D´efinitions
1.4.2 Processus responsables des ´emissions de m´ethane des zones humides et des perg´elisols
1.4.3 Mesures et observations des flux de m´ethane
1.4.4 R´etroactions potentielles des ´emissions bor´eales et arctiques de m´ethane sur le climat
1.5 Mod`elisation des ´emissions naturelles de m´ethane
1.5.1 Quelques mod`eles de processus
1.5.2 Vers un nouveau mod`ele de m´ethane
2 Mod´elisation des surfaces continentales au CNRM 
2.1 Pr´eambule
2.1.1 Mod`eles de surface continentales
2.1.2 Bilan d’´energie `a la surface des continents
2.1.3 Cycle hydrologique et bilan hydrique
2.2 Le mod`ele ISBA
2.2.1 R´esolution de la physique du sol
2.3 Mod´elisation du cycle du carbone continental
2.3.1 Repr´esentation du cycle du carbone dans la v´eg´etation
2.3.2 Repr´esentation du cycle du carbone sur et dans le sol
3 D´eveloppement d’un nouveau mod`ele biog´eochimique : description et ´etude du mod`ele
3.1 Pr´eambule
3.2 A new process-based soil methane scheme in the ISBA land-surface model : evaluation over Arctic field sites
3.2.1 Introduction
3.2.2 Model description
3.2.3 Site description, Material and Methods
3.2.4 Results
3.2.5 Discussions
3.2.6 Conclusions
3.3 Compl´ements
3.3.1 Indices hydrologiques
3.3.2 Sensibilit´e `a la perm´eabilit´e de l’aerenchyme
3.4 Conclusion partielle
4 Stocks de carbone dans le sol : ´etude du mod`ele et comparaisons avec des mesures sur site 
4.1 Pr´eambule
4.2 Etude de terrain : mesures de carbone du sol `a Nuuk
4.2.1 Mesures topographiques et couche s´edimentaire
4.2.2 Mesures de temp´erature et d’humidit´e en surface du sol
4.2.3 Pr´el`evements d’´echantillons de sol le long des transects
4.2.4 Premiers r´esultats : pourcentages massique de carbone
4.2.5 Estimations et d´etermination de la masse volumique apparente du sol
4.2.6 Densit´e de carbone du sol et profils mesur´es
4.2.7 Stocks de carbone total
4.2.8 R´esum´e et conclusion partielle
4.3 Etude des stocks et profils de carbone mod´elis´es
4.3.1 Stocks de carbone et tendance annuelle
4.3.2 Impact de la limitation explicite en oxyg`ene de la d´ecomposition oxique sur les stocks de carbone et les flux de CH4 et de CO2 
4.3.3 R´etroactions avec le module biog´eochimique
4.3.4 R´epartition sur la verticale des diff´erents r´eservoirs de carbone
4.3.5 La repr´esentation encore incertaine de la dynamique verticale du carbone sous-terrain pour d’autres mod`eles
4.3.6 R´esum´e et conclusions partielles
4.4 Comparaison des stocks et profils de carbone observ´es et mod´elis´es ; ´etude des flux r´esultants et calibration du mod`ele de carbone du sol
4.4.1 Profils de carbone observ´es et mod´elis´es
4.4.2 Flux de CH4 et de CO2 simul´es par le mod`ele for¸c´e avec les profils de carbone mesur´es
4.4.3 Tests de sensibilit´e aux taux de d´ecomposition
4.4.4 Tests de sensibilit´e `a la vitesse d’advection
4.5 R´esum´e du chapitre et conclusions principales
5 Conclusion et Perspectives 
A R´esolution de l’´equation des gaz par un sch´ema de Crank-Nicholson 
A.0.1 Sch´ema de Crank-Nicholson
A.0.2 Condition de Dirichlet `a l’interface sol/atmosph`ere
A.0.3 Condition de Neumann `a la derni`ere couche de sol
A.0.4 Syst`eme tridiagonal final

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