Importance des baobabs
A Madagascar les baobabs malgaches font objet d’exploitation.
Tronc : Le tronc est utilisé comme citerne pour le stockage d’eau (SANDRATRINIAINA, 2015). (Photo 1). Les arbres sont coupés pour faciliter le développement des champignons comestible pour Adansonia rubrostipa (RAZANAMAHERIZAKA, 2009).
Ecorce : L’écorce peut être exploitée de différentes manières soit pour usage médicinal soit pour l’obtention de feuilles fibreuses appelées localement « hafotse ». L’écorce externe est utilisée par la population locale pour le traitement traditionnel de l’hypocalcémie, pour le traitement de la fièvre et la désinfection de blessure, et l’écorce interne est utilisée pour la construction de cases (Photo 2), la confection de cordage, ou pour coudre des produits artisanaux tels que les paniers et les nattes. Les écorces provenant d’Adansonia grandidieri (Photo 3) sont les plus appréciées par la population à cause de leur meilleure qualité de fibre (RAVELOMANATSOA, 2010).
Feuilles : La feuille de baobab est une source d’éléments minéraux notamment le calcium, le fer et, dans une moindre mesure, le zinc (RANDRIANANTENAINA, 2012) Les jeunes feuilles sont consommées parfois crues ou bouillies (GSPM, 2010), mais le plus souvent, elles sont séchées pour être réduites en poudre. Cette dernière, appelée « lalo » au Sénégal, est incorporée aux céréales ou dans les sauces pour la préparation du couscous de mil. Elles sont très riches en calcium et en fer. Dans la pharmacopée traditionnelle, les feuilles sont employées en compresse ou en tisane. Elles sont également utilisées durant l’hivernage pour nourrir le bétail (RANDRIANANTENAINA, 2012). Les feuilles sont utilisées dans le traitement des coliques (GSPM, 2010).
Cabosses : Les fruits des baobabs sont appelées cabosses. La pulpe des fruits, est très riche en acide ascorbique (vitamine C) (RAZAFINDRALAMBO, 2013), et aussi des quantités importantes d’autres vitamines essentielles telles que la thiamine (vitamine B1), la riboflavine (vitamine B2). Les fruits sont récoltés et sont vendus sur les marchés locaux (BAUM, 1995) où ils sont utilisés pour la préparation des boissons (Photo 4).
Graines : Les graines sont utilisées pour l’extraction d’huile utilisée dans l’alimentation humaine et en cosmétique (Photo 5). Les graines peuvent être mangées fraîches ou grillées dans les cendres (RAVELOMANANTSOA, 2010) (Photo 6). La farine issue des graines peut fournir des protéines de bonne qualité, riches en lysine (RAKOTONINDRAINY, 2008). L’espèce fait également l’objet d’exploitation non extractive par le tourisme et autres usages qui lui confèrent des valeurs éthiques.
Description de l’espèce
Les descriptions botaniques de l’espèce ont été inspirées des travaux de BAUM (1995).
Section Longitubae : Arbres de petite à grande taille, à tronc cylindrique, fuselé ou encore en forme de bouteille. Ils sont orthotropes. La floraison s’effectue pendant la saison humide.
Adansonia rubrostipa : Arbre de 20 m de hauteur avec un diamètre qui varie de 80 cm à 190 cm, à tronc généralement en forme de bouteille (rarement cylindrique). Branche orthotrope à couronne irrégulière (Annexe 3). Ecorce généralement marron, foliacée. Feuilles formées de 5 (rarement 3) folioles, sessiles, de forme elliptique, dentées, pétioles glabres ; stipules caduques. Fleurs issues de boutons floraux allongés, vertes, disposées horizontalement. Calice à 5 lobes, linéaires, glabre, de couleur rouge à l’extérieur et rouge clair à l’intérieur, réfléchis et vrillés à la base des fleurs. Pétale 5 jaune clair à jaune oranger, nettement plus court que l’étamine. Etamine jaune surmontée par un long tube staminal de 6-10cm, à 100-150 filets libres de 10- 12cm de long au- dessus. Ovaire conique à poils dorés. Style rose clair s’effilant au fur et à mesure qu’il s’approche du stigmate. Stigmate rouge avec 5 à 8 lobes irréguliers. Fruit globuleux (Annexe 4), péricarpe épais muni de fibres longitudinales. Graines nombreuses et réniformes.
Choix des arbres
Pour examiner les effets de la fragmentation de la forêt sur la capacité reproductive d’Adansonia rubrostipa, la production de fruits ainsi que la production de graines des arbres dans deux conditions d’habitat différents: perturbé (hors forêt) et non perturbé (en forêt) ont été comparées. Tous les arbres choisis étaient à l’état mature. L’habitat d’une population est considéré perturbé s’il est entouré par des champs ou des pâturages, avec moins de trois arbres régénérant par hectare. Les populations dans un habitat non perturbé sont entourées de forêt naturelle généralement située dans les Aires Protégées (QUESADA et al., 2003). Dans les deux sites en forêt (La Réserve Spéciale d’Andranomena et la forêt d’Ampataka), 30 pieds d’individu pour chaque site ont été choisis, il en de même pour les deux sites hors forêt (Andranomena et Mangily) et chaque pied est géoréférencié (Annexes 6 et 7). Au total, 120 pieds dans les quatre sites considérés ont été étudiés où les graines et les fruits ont été récoltés et comptés.
La production de fruits de l’espèce
Les résultats de plusieurs études montrent que la fragmentation de forêt affecte négativement la reproduction des plantes en réduisant l’activité de pollinisateur (QUESADA et al., 2003), la déposition de pollens (CASCANTE et al., 2002 ; QUESADA et al., 2003), la production des fruits et des graines (FUCHS et al., 2003). Les résultats ont indiqué une augmentation de la production de fruits pour les individus hors forêt et une faible production de fruits pour les individus en forêt. Cette faible production de fruits en forêt s’explique par l’action des pollinisateurs d’Adansonia rubrostipa qui sont des sphingidae. En forêt, les branches entrecroisées se présentent comme des obstacles pour les pollinisateurs, ainsi les nombres des fleurs pollinisées diminuent réduisant la fructification. Par contre hors forêt, l’isolement des pieds d’Adansonia rubrostipa fait que les pollinisateurs puissent passer librement entre les fleurs, augmentant ainsi les nombres des fleurs pollinisées. De plus hors forêt, l’odeur florale se diffuse librement dans l’air par l’isolement des pieds d’Adansonia rubrostipa contrairement en forêt. RYCKWEART (2011) précise que les sphinx ne viennent aux fleurs que s’il y a un minimum de vent d’environ 5 km/h. L’émission des odeurs par les fleurs attirent les pollinisateurs (RAZANAMARO, 2016). En effet, les espèces de sphinx comme Agrius convolvuli et Coelonia solani sont les pollinisateurs qui contribuent efficacement à la pollinisation de quatre espèces des Longitubae (RASOAMANANA, 2015). Une étude sur Ceiba aesculifolia (Bombacaceae) qui a était faite pour identifier l’effet de la fragmentation des forêts, a montré un résultat similaire au résultat de cette présente étude sur la production de fruits qui tend à augmenter. Selon les résultats de HERRERIAS (2006), la production totale de fruits était plus grande pour les arbres dans les habitats perturbés (hors forêt) que dans les habitats non perturbés (en forêt). Pour KHAN et al., (2005), la grande production de fruits dans les habitats perturbés peut être attribuée à la disponibilité de ressources comme la lumière du soleil. La haute intensité solaire et la température élevée, augmentent la concentration de régulateurs de croissance, particulièrement la gibbérelline, qui stimule la floraison et la fructification (ROSS et al., 1983). Contrairement aux attentes, les espèces pollinisatrices visitent plus de fleurs dans les habitats perturbés que dans les habitats non perturbés.
La production de graines
Comme pour la production des fruits, la production des graines était significativement différente entre les conditions de l’habitat. La production de graine est élevée en forêt par rapport à la production de graine hors forêt qui est faible. Cela montre que la pollinisation est plus efficace en forêt que hors forêt car pour QUESADA (2003), la variation de production de graine s’explique par le nombre de pollens déposés sur le stigmate. Le nombre d’ovules fécondés augmente avec le nombre de pollens déposés sur le stigmate (RAZANAMARO 2016, RASOAMANANA 2015). Le passage des sphinx sur les fleurs des pieds d’Adansonia rubrostipa hors forêt est donc de très courte durée entrainant le faible dépôt de pollens sur le stigmate réduisant ainsi la production de graines. Car hors forêt les fleurs sont plus visibles exposant les pollinisateurs aux prédateurs ce qui réduit leurs passages sur les fleurs. Cette fragmentation d’habitat affecte négativement la production de graines d’Adansonia rubrostipa, qui sont les éléments vitaux pour la succession et la survie de l’espèce.
CONCLUSION
Adansonia rubrostipa a fait l’objet de cette première étude portant sur l’Impact de la fragmentation de l’habitat dans la région Menabe. Les études sur terrain ont permis de recueillir de nombreuses informations sur l’espèce, en particulier sur son habitat et sa biologie. L’espèce est exposée à des menaces dues principalement aux actions anthropiques comme la déforestation, les défrichements et les cultures sur brûlis. Les risques d’extinction sont donc élevés. De ce fait, Adansonia rubrostipa, est classée Vulnérable (VU). De plus, la disparition des grands animaux disperseurs potentiels comme le grand oiseau ratite (Aepyornis sp.) les lémuriens géants (Babakotia sp., Megaladapis sp.), les tortues géantes (Aldabrachelys grandidieri), entraine un déficit de régénération. On assiste alors à une population vieillissante. L’étude sur les caractéristiques de l’habitat a permis de montrer que l’habitat de cette espèce est perturbé dans les forêts étudiées. La perturbation se manifeste par l’absence de certaines classes de diamètre, ou par la présence des espèces indicatrices de dégradation comme Rhopalocarpus lucidus et Tamarindus indica dans la formation. Par ailleurs, la plupart de ces espèces se trouve hors forêt dans les zones habitations, les zones de cultures, les rizières, or les baobabs sont des espèces forestières. Une régression de leurs habitats naturels est constatée. Les rôles des aires protégées gérée par des ONG ou les organismes nationaux comme MNP sont les seuls qui maintiennent encore certains pieds dans leurs habitats naturels. Cette étude a permis d’évaluer la fructification et la production des graines de l’espèce dans deux habitats différents, en forêt et hors forêt. Les espèces en forêt produisent moins de fruits mais plus de graines contrairement aux espèces hors forêt qui produisent plus de fruits mais pas assez de graines. La fragmentation d’habitats peut entrainer un changement sur la fructification et la production de graines de l’espèce. En outre, la faible production de fruits dans l’habitat perturbé par rapport à celle de l’habitat non perturbé ne doit pas inciter à la destruction de la forêt. D’ailleurs ce sont surtout les graines qui assurent la succession et la survie des espèces. Cette étude est, cependant, loin d’être complète. Ce qui incite à formuler d’autres perspectives de recherche pour combler les lacunes constatées. Il est donc important d’entreprendre des études et des recherches plus approfondies. Et comme c’est la première étude faite sur l’impact de la fragmentation d’habitat chez les baobabs. De nouvelles perspectives de recherche sont à prendre en considération vis-à-vis de la conservation des espèces de baobabs. Une étude complète sur l’impact de la fragmentation d’habitats sur la phénologie et la capacité reproductive chez les baobabs s’avère donc indispensable afin de comprendre le fonctionnement de ces espèces dans les écosystèmes qui les abritent. Les investigations sont encore à élargir concernant les baobabs malgaches. Mais, avant toute chose, il est nécessaire et fondamental de mettre en place une stratégie de conservation, de gestion et d’information sur cette espèce pour assurer sa durabilité surtout à l’état sauvage, vu les lourdes menaces et pressions qui pèsent sur elle et sur son habitat naturel. Ces mesures concernent la conservation in situ et ex situ et l’exploitation durable de cette espèce de baobab. L’efficacité de la conservation nécessite la responsabilisation de toutes les parties prenantes depuis l’Etat jusqu’au niveau des communautés de base.
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Table des matières
Remerciements
LISTE DES CARTES
LISTE DES FIGURES
LISTE DE PLANCHE PHOTOGRAPHIQUE
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES ANNEXES
ACRONYMES ET ABREVIATIONS
GLOSSAIRE
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU MILIEU
I Présentation du milieu
I.1 Localisation géographique
I.2 Milieu physique
I.2.1 Climat
I.2.1.1 Précipitations
I.2.1.2 Température
I.2.2 Géologie, sol et hydrographie
I.3 Milieu biotique
I.3.1 Cadre phytogéographique
I.3.2 Végétation
I.3.3 Faune
I.3.4 L’Homme et ses activités
DEUXIEME PARTIE : MATERIEL ET METHODES
I Généralités sur les baobabs
I.1 Historique et origine phytogéographique des baobabs
I.2 Les Baobabs malgaches
I.3 Importance des baobabs
II Matériel biologique étudié
II.1 Position systématique
II.2 Description de l’espèce
II.3 Répartition de l’espèce
III Méthodes
III.1 Etudes préliminaires
III.1.1 Recueil bibliographique
III.1.2 Choix de site d’étude
III.2 Caractérisation des habitats
III.2.1 Caractérisation d’un site en forêt
III.2.1.1 Etude floristique
Choix de l’emplacement des relevés
Méthode de relevé
Paramètres des relevés
III.2.1.2 Etude structurale de la végétation
III.2.1.2.1 Etude de la structure verticale
Profil structural de la végétation
Profil schématique de la végétation
III.2.1.2.2 Etude de la structure horizontale
Surface terrière
Biovolume
III.2.1.3 Etude de la flore associée
Dispositif de relevé
III.2.2 Caractérisation d’un site hors forêt
Transect de Duvigneaud
III.3 Etude du sol
III.4 Méthode d’évaluation d’impact de la fragmentation sur la capacité reproductive d’Adansonia rubrostipa
III.4.1 Choix des arbres
III.4.2 Evaluation de la fructification en forêt et hors forêt
III.4.3 Evaluation de la production de graines suivant le gradient de la dégradation de l’habitat d’Adansonia rubrostipa
TROISIEME PARTIE : RESULTATS ET INTERPRETATIONS
I Caractéristiques des habitats de l’espèce étudiée
Caractéristiques des sites en forêt
I.1.1 Réserve Spéciale d’Andranomena
Caractères édaphiques
Richesse floristique
Spectre biologique
Flore associée
Physionomie de la végétation
Structure horizontale
I.1.2 Forêt d’Ampataka
Caractères édaphiques
Richesse floristique
Spectre biologique
Flore associée
Physionomie de la végétation
Structure horizontale
I.2 Caractéristiques des sites hors forêt
I.2.1 Andranomena
Caractères édaphiques d’Andranomena
I.2.2 Mangily
Caractères édaphiques de Mangily
IICapacité de fructification d’Adansonia rubrostipa en forêt et hors forêt
IIICapacité de production de graines d’Adansonia rubrostipa suivant le gradient de la dégradation de leurs habitats
QUATRIEME PARTIE : DISCUSSIONS
ISUR LES METHODES
IISUR LES RESULTATS
L’habitat d’Adansonia rubrostipa
La production de fruits de l’espèce
La production de graines
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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