Impact de la crise casamançaise sur la situation économique des ménages

Partout dans le monde, en Europe orientale, en Asie et en Afrique, on a assisté depuis la fin de la guerre froide à une vaste escalade de conflits violents. Au cours de la période 1982-1990, il y a eu 33 conflits armés dont les victimes se comptaient par milliers. Un seul de ces conflits était une lutte entre des Etats (la guerre (Iran-Irak). Tous les autres étaient des guerres civiles, c’est à dire des conflits entre des groupes ethniques, religieux ou autres dans le même Etat. Ces conflits ont fait un très grand nombre de victimes, en Inde au cours de la période 1989 -1991, le nombre de personnes tuées lors de conflits ethniques se serait élevé à 12 261, dans l’ancienne Yougoslavie, le nombre de morts dans les récents conflits ethniques et religieux jusqu’à la mi – 1992 atteignait 6000. Il en est de même en Casamance ou partout ailleurs en Afrique. Ainsi des millions de gens ont vu leur gagne-pain et leurs foyers détruits de par le monde, et beaucoup parmi eux ont été obligés de devenir réfugiés ou personnes déplacées. Les conflits détruisent les conditions nécessaires au développement économique et social et détournent les ressources des tâches urgentes d’alimentation, d’éducation et de logement de populations désespérément pauvres. Dans nombre de cas, la cohésion des Etats est menacée par de violentes luttes ethniques, religieuses, sociales et culturelles. En Afrique, la situation n’a rien de neuf. Au cours de la période 1960-1976, après l’octroi de l’indépendance à un grand nombre de pays, 21 guerres internes et frontalières pour la plupart, ont été menées en Afrique. Dix autres se sont ajoutées à la liste dans les années 80, et cette liste continue de s’allonger du fait de nouveaux conflits qui ont éclaté dans les années 90.

Si l’on se réfère pour ainsi dire à l’histoire des peuples d’Afrique, après les indépendances, on se rend compte que ces peuples ont plus souffert des indépendances que quand ils étaient sous la domination du colonisateur; mais partant de ces constats on remarque que certaines situations ne sont que le fruit de beaucoup de facteurs parmi lesquels l’embourgeoisement de la nouvelle classe dirigeante, et les attentes non satisfaites des populations. De ces situations naîtront des mouvements de contestation qui toucheront toutes les parties du continent africain : Au Liberia, au Soudan, en Angola au Sierra- Léone et partout ailleurs sur le continent africain. Ces conflits dont les conséquences sont d’actualité sont parfaitement illustrés par la Casamance et la Côte d’Ivoire.

Position théorique du problème 

Problématique 

Hegel  disait que ce qui est familier, n’est pas pour autant connu. Voilà une maxime qui pourrait justifier notre réflexion sur la Casamance. C’est pourquoi s’il apparaît évident que la crise en Casamance comporte inéluctablement des conséquences sur les populations de Ziguinchor en particulier, il reste cependant que ces conséquences ne sont connues qu’à titre empirique. Notre étude part du concept d’anomie, forgé par Durkheim qui lui a donné sa consécration actuelle notamment dans son ouvrage  » De la division du travail social » qui est la situation où se trouvent les individus lorsque « les règles sociales qui guident leurs conduites et leur aspiration perdent leur pouvoir sont incompatibles entre elles ou lorsque, minées par les changements sociaux, elles doivent céder la place à d’autres » . La théorie de l’anomie a ici son importance quand on évoque des situations comme la guerre en Casamance. En effet, les changements impliquent des dérèglements au niveau des comportements ainsi qu’au niveau des existences. Il serait important de savoir dans quelle mesure le changement entraîne effectivement la démoralisation prévue par Durkheim et dans quelle mesure cette dernière conduit à son tour à une détérioration des institutions. La théorie de l’anomie devrait donc pouvoir être appliquée à l’analyse du comportement des individus et du fonctionnement des institutions en situation de changement, comme elle a été appliquée à celles des conduites déviantes et des transplantations sociales. Nous ne voulons affirmer que la Casamance se trouve dans une situation d’anomie, mais à cause de cette crise, nous remarquons des dysfonctionnements dans différentes institutions sociales et ces dernières semblent revêtir la forme d’anomie : éclatement de familles, exode massif des jeunes vers Dakar, exode massif des jeunes filles vers les zones touristiques, ampleur grandissante des phénomènes comme le trafic de produits de tout genre, le banditisme, le déséquilibre des rapports d’échange entre le milieu rural et la ville. De cette dernière situation, découle une montée en puissance des prix des denrées de première nécessité, un point de vue que nous aurons à démontrer tout au long de notre travail. C’est dans cette vision que nous avons choisi d’étudier la situation économique qui prévaut dans la commune de Ziguinchor. En effet, beaucoup d’ouvrages ont été écrits, plusieurs études ont été menées sur la Casamance pour comprendre le pourquoi de cette crise qui frappe la région.

Les causes de ce conflit ont été décrites par plusieurs auteurs, de nombreux articles publiés. C’est ainsi que Vincent FOUCHER dans « Le Sénégal contemporain  » de Momar Coumba DIOP, évoque plusieurs causes de frustrations. Il a d’abord abordé les domaines tels que le sport. En prenant l’équipe du Casa Sport comme exemple, il évoque la finale du 10 août 1980 où cette équipe a perdu la coupe contre la Jeanne d’Arc de Dakar après des erreurs d’arbitrage. Certains mouvements reprirent cet incident pour en faire un motif de réunion où la thèse de la ségrégation orchestrée fut amplifiée. Cet incident avait eu des conséquences si graves qu’on pourrait dire que ce fut la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase. C’est ainsi que des réunions seront tenues et des tracs distribués, constituant ainsi pour FOUCHER le point de départ de cette crise.

Ensuite la cause de la frustration fut évoquée dans le contexte politique par l’accession de Monsieur Abdoulaye SY, né d’un père toucouleur et d’une mère diola comme premier magistrat de la ville. Il s’était présenté aux élections municipales contre Etienne Carvalho, originaire de la cité et dont SY avait été le premier adjoint à la mairie. C’est à partir de cette accession qu’on a commencé à noter l’importance du vote ethnique dans la ville. Certains politiciens affiliés au Parti socialiste de l’époque ont joué sur le vote autochtone. Foucher soutient qu’un certain nombre d’élus du Sud notamment ceux qu’il a nommés  » les évolués » Diolas avaient commencé déjà à dénoncer les réseaux nordistes.

Enfin le même auteur a noté que ces tensions politiques sont doublées de problèmes fonciers graves précisément avec l’application de la loi sur le domaine national de 1964. C’est ainsi qu’on a assisté à des litiges fonciers sur l’attribution de terrains à des « étrangers ». L’auteur a évoqué notamment le cas de l’hôtel Nema Cadior dont l’implantation accompagnée de plusieurs autres conflits fonciers dans la commune de Ziguinchor poussera les « évolués » à participer à la naissance du Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC).

Présentation géographique de la région

les données physiques 

Etendue sur 28360 km2, soit un septième de la superficie totale du Sénégal, et situé à l’extrême ouest du continent africain, à peu prés à mi-chemin entre l’équateur et le tropique du cancer, Ziguinchor s’étend sur la rive sud du fleuve Casamance à quelques 60 km de son embouchure. La Casamance sur une carte est étroite et allongée, d’Est en Ouest de part et d’autre d’un fleuve de trois cents kilomètres qui lui a donné son nom. Ses limites tiennent à la fois de la nature et de l’histoire : L’ancienne Gambie britannique et la Guinée-Bissau portugaise. Les voies de communication les plus directes avec le reste du Sénégal et notamment avec Dakar passent par le territoire gambien. Le relief surprend par sa monotonie et deux éléments essentiels définissent le milieu naturel qui a servi de cadre au développement de Ziguinchor : un climat chaud et particulièrement humide, un site fluvial fait de dépression inondable et de bas plateaux.

Voies de pénétration de la région 

la voie fluviale 

La principale voie de pénétration de la Casamance est son fleuve. Ce dernier marque une nette séparation dans sa partie inférieure entre les pays du Nord et du Sud. Long de 300 km, le fleuve Casamance prend naissance à l’Est de Kolda, par la réunion de plusieurs cours d’eau, prés du village de Kafakuru. De ce lieu à l’Océan Atlantique, le fleuve a une pente très faible de 7 cm par kilomètre. La marée remonte longuement la vallée jusqu’à Sédhiou. Le cours peut se diviser en trois sections :
– de Kolda à Jana Malary, 80 kilomètres, le lit du fleuve est étroit . En saison sèche, il y a très peu d’eau. La navigation fluviale est alors impossible pendant cette période. Pendant l’hivernage seulement les barques à fond plat peuvent circuler sur le cours d’eau.
– de Jana Malary à Ziguinchor, le fleuve s’élargit, mais seuls des cotres et des chalands ayant au plus un tirant d’eau de un mètre peuvent l’utiliser. La navigation est rendue difficile à cause des bancs de sable que se situent entre Adéane et Ziguinchor. Face à Adeane, la Casamance reçoit son affluent principal de la rive droite : le Soungrougou. Né dans le Sonkodu, il rejoint le fleuve à Jao et la confluence donne l’impression d’un grand lac circulaire de 3 à 4 km de diamètre .

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Table des matières

Introduction
1ére partie : position théorique du problème
I. Chapitre I : partie théorique
I. Problématique
II. Modèle théorique
III. Hypothèse de travail
IV. Justification du choix du sujet
V. Revue de la littérature
2e partie : méthodologie
Chapitre I : cadre de l’étude
I. Présentation géographique de la région
II. Historique de la région de la Casamance
III. Esquisse de la crise casamançaise
II. Chapitre II : Les techniques d’investigation
I. La population cible
II. Recherche documentaire
III. Consultation des personnes ressources
IV. Procédure d’échantillonnage
V. Présentation des techniques d’enquête
VI. Les difficultés rencontrées
3e partie : analyse et interprétation des données
Chapitre I : Attitude dans les comportements des ménages
I. Les comportements économiques
II. La pauvreté et le statut du travail
III. Niveau d’aspirations
IV. La prise en compte de la pluri – activité et des activités informelles
III. Chapitre II : Les conditions de vie
IV. Niveau de vie général liée à la crise armée
V. Impact sur le revenu des familles et l’emploi
VI. Genre de vie : des exemples explicatifs
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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