Les anticorps et leur application au diagnostic
Les anticorps sont des molécules complexes, appartenant à la famille des immunoglobulines (ce qui explique que l’abréviation courante d’anticorps soit Ig) communes à tous les vertébrés. Ils sont fabriqués par les plasmocytes, des lymphocytes B activés [7]. Les anticorps ont une seule fonction : reconnaitre et se fixer de façon spécifique à une molécule nommée antigène.
Structure générale : Ils sont formés de 4 chaînes polypeptidiques ; de poids moléculaire 150.000 g.mol−1 : 2 chaînes lourdes (H pour heavy de 50.000 g.mol−1 chacune) et 2 chaînes légères (L pour light de 25.000 g.mol−1 chacune) qui sont reliées entre elles par un nombre variable de ponts disulfures. Ces ponts disulfures se trouvent aux extrémités des chaines lourdes et légères de l’anticorps, lui conférant ainsi une grande fléxibilité. L’ensemble est donc, malgré sa taille élevée, très déformable, ce qui facilite la reconnaissance. Ces chaînes forment une structure en Y et sont constituées de domaines immunoglobulines de 110 acides aminés environ. Chaque chaîne légère est constituée d’un domaine constant (C) et d’un domaine variable (V). Pour un anticorps donné, les deux chaînes lourdes sont identiques, de même pour les deux chaînes légères (figure 2.1).
Domaine constant : Les domaines constants sont caractérisés par une séquence en acides aminés très proche d’un anticorps à l’autre, caractéristiques de l’espèce et de la classe de l’immunoglobuline. Chaque chaîne légère en possède un exemplaire noté CL. Les chaînes lourdes comportent, selon la classe de l’anticorps, trois ou quatre domaines constants CH1, CH2, CH3 et CH4. Les domaines constants ne sont pas impliqués dans la reconnaissance de l’antigène, mais interviennent dans l’activation du système immunitaire. Ces parties seront également utilisées lors du greffage de l’anticorps sur les surfaces ; étape détaillée dans la partie suivante.
Domaine variable : Un anticorps possède quatre domaines variables situés aux extrémités des deux « bras ». L’association entre un domaine variable porté par une chaîne lourde (VH) et le domaine variable adjacent porté par une chaîne légère (VL) constitue le site de reconnaissance (ou paratope) de l’antigène. Ainsi, une molécule d’immunoglobuline possède deux sites de liaison à l’antigène, un au bout de chaque bras. Ces deux sites sont identiques d’où la possibilité de lier deux molécules d’antigène par anticorps.
Les anticorps polyclonaux et monoclonaux : Un agent pathogène (bactérie, virus, etc.) est reconnu par le système immunitaire par l’intermédiaire d’antigènes. On appelle antigène toute macromolécule reconnue par des anticorps et capable d’engendrer une réponse immunitaire. Un antigène possède généralement plusieurs sites de liaison aux anticorps, appelés épitopes (figure 2.2). Pour un même antigène, on peut classer une population d’anticorps selon sa capacité à reconnaître un seul ou plusieurs épitopes. On parle alors respectivement d’anticorps monoclonaux et polyclonaux. Ces anticorps sont produits par les mêmes cellules : les lymphocytes B. La différence réside dans le tri de ces lymphocytes B. Le choix des anticorps est primordial à la réussite d’un test car il est à l’origine de la détection.
Production des anticorps polyclonaux : Les anticorps polyclonaux portent ce nom car ils sont produits par différents lymphocytes B. Un lymphocyte B synthétise un seul type d’anticorps, déterminé par des réarrangements chromosomiques effectués au hasard pendant l’hématopoïèse. Quand un lymphocyte B reconnait l’antigène qui correspond à son anticorps, il va se diviser et les cellules filles vont se différencier en plasmocytes qui vont synthétiser l’anticorps. L’antigène à reconnaitre est injecté à l’animal. Il porte plusieurs épitopes, plusieurs lymphocytes B vont donc le reconnaitre et se diviser. Après quelques semaines, une prise de sang va permettre de récupérer le sérum contenant les anticorps synthétisés. Ils sont donc la production de plusieurs clones différents, d’où le nom de polyclonal. La technique polyclonale présente un certain nombre d’inconvénients : le sérum contient des anticorps dirigés contre la protéine à reconnaitre, mais aussi d’autres qui peuvent entrainer un parasitage du marquage. Par ailleurs, le type exact des anticorps produit par un lymphocyte est le fruit du hasard (présence d’IgG et IgM). D’un animal à l’autre, les anticorps résultant d’un même protocole d’immunisation peuvent être différents et les résultats être partiellement non reproductibles. Il n’est pas rare que la mort de l’animal entraine la disparition d’un anticorps polyclonal très efficace dont aucun équivalent ne pourra être retrouvé plus tard. De plus, la production du sérum par un seul animal limite sa diffusion. Enfin, la nécessité de prendre le sérum directement sur l’animal oblige à choisir des animaux de grande taille pour avoir une production suffisante. Le suivi de production d’un anticorps polyclonal est donc impossible. En revanche ces anticorps sont extrêmement sensibles en raison du nombre important d’épitopes reconnus sur un seul antigène.
Production des anticorps monoclonaux : Ils résolvent les inconvénients des anticorps polyclonaux. Ils sont en effet fabriqués par un seul clone de lymphocyte B. Ils sont donc tous identiques et reconnaissent un seul épitope. Ils gagnent donc en précision ce qu’ils perdent en sensibilité. A la fin des années 1970, César Milstein et Georges Köhler ont développé la technique des hybridomes [7] permettant la fabrication d’importants volumes d’anticorps monoclonaux très purs par culture cellulaire. Cette découverte permit des avancées considérables dans le domaine du diagnostic. Depuis 25 ans, des efforts très importants ont été consentis, pour générer par ingénierie moléculaire des anticorps de seconde génération ayant de meilleures affinités, une immunogénicité réduite – diminuant le risque de reconnaissance non spécifique dans le cadre des tests de diagnostic – et une stabilité accrue [5]. La sensibilité des tests s’est donc nettement améliorée. La première étape est la production d’un sérum polyclonal par la méthode précédente. Les plasmocytes sont récupérés et sont alors fusionnés in vitro avec des myélomes, qui sont des cellules tumorales ayant la propriété de se multiplier indéfiniment. La cellule hybride obtenue (dite « hybridome ») est sélectionnée puis multipliée dans un milieu de culture approprié et enfin purifiée. Ces anticorps peuvent être très sélectifs, sensibles à une modification structurelle de l’antigène due à un changement d’acide aminé, d’état d’oxydation ou de stéréoisomérie. Le choix initial de l’antigène injecté chez l’animal est primordial car il conditionne la spécificité de l’anticorps. Le choix de l’anticorps est également important car il est fonction de la technique utilisée. En effet, les anticorps utilisés pour les tests d’immunohistochimie, de bloquage immunologique (immunoblotting) ou de tri cellulaire avec un cytomètre de flux peuvent ne pas fonctionner pour les tests immunologiques. Ceci s’explique par la différence de la nature de l’échantillon, de la configuration de l’antigène – native, pour les anticorps conformationels ou dénaturés, pour les anticorps reconnaissant un épitope linéaire (enchainement d’acides aminés)- ou de son aspect libre ou lié à un composant du milieu. Un test de diagnostic a pour but de détecter la présence d’un analyte dans un milieu complexe. Cet analyte peut être une protéine, une hormone, un médicament, un peptide ou bien un acide nucléique. Dans cette partie, nous nous intéressons uniquement aux tests immunologiques. L’un des enjeux des tests immunologiques est d’associer un signal mesurable à chaque association spécifique anticorps-analyte (que l’on nommera antigène).
Les différents formats de tests : Les tests immunologiques se déroulent, soit en phase homogène où les antigènes liés et non liés à l’anticorps sont présents dans le milieu réactionnel lors de la mesure, soit en phase hétérogène où des étapes de lavage sont réalisées avant détection. Ces deux formats vont être présentés à l’aide de deux exemples historiques. Ces exemples s’appuient sur une mesure directe de l’antigène tout comme notre test d’agglutination qui sera détaillé dans la deuxième partie de ce chapitre. Les tests compétitifs seront ensuite présentés. Ces tests ont l’avantage de pouvoir doser des antigènes de très petites tailles contrairement aux tests précédents dits « directs ».
Phase homogène : La phase homogène est l’ancêtre des tests immunologiques. Dans les années 20, un simple test d’agglutination permettait de détecter le Bacille de Koch, bactérie responsable de la tuberculose. Le sérum du patient était mélangé à un échantillon sanguin de mouton contenant des anticorps spécifiques à la bactérie. Après quelques minutes, des agrégats, issus de la formation de complexes immuns, apparaissaient et étaient détectés par une simple mesure d’absorbance [8]. Dans les conditions de Rayleigh où la longueur d’onde est beaucoup plus grande que la taille des particules, la lumière diffusée par un objet est proportionnelle au carré de son volume. Ainsi, un agrégat diffuse plus la lumière que des anticorps libres. Afin d’obtenir une variation de signal mesurable, les agrégats doivent être suffisamment « gros » c’est à dire compris entre 50 et 100 nm (équivalant à 5-10 anticorps par complexe) [7]. Le temps de rencontre des entités et la taille minimale à atteindre pour détecter les complexes régissent le temps de ce test. Dans les années 1960, l’intensité de lumière diffusée par ces agrégats spécifiques d’antigène-anticorps a été amplifiée avec l’utilisation de billes [9]. Ces billes étaient principalement des billes de latex car leur protocole de synthèse était bien maitrisé, aboutissant à des particules très monodisperses et leur fonctionnalisation facile pour le greffage d’anticorps. Typiquement, cette technique permet de détecter des concentrations en analyte de l’ordre de la nanomole en une dizaine de minutes. Cette méthode est simple (une seule étape), rapide mais sensible aux interférants présents dans l’échantillon. De plus, un important travail de formulation est nécessaire pour conserver la stabilité colloïdale. Le bruit, inhérent au test homogène, peut être significativement diminué en ajoutant des phases de lavages entre les divers étapes de reconnaissances spécifiques. Les phases hétérogènes offrent cette possibilité.
Phase hétérogène : Ce format a l’avantage d’éliminer les interférants grâce aux étapes de lavage et de travailler en excès d’anticorps, accélérant la cinétique et déplaçant ainsi l’équilibre vers la formation de complexe spécifique (contrainte thermodynamique liée à la valeur de l’affinité du couple antigène-anticorps) sans générer de bruit. Le test le plus utilisé est le dosage d’immunoadsorption par enzyme liée ou ELISA (acronyme de Enzyme Linked ImmunoSorbent Assay). Le principe de ce test repose sur l’immobilisation de l’anticorps ou de l’antigène suivant la nature de la protéine à détecter. Le test ELISA non compétitif avec formation d’un sandwich direct est présenté dans ce paragraphe car il se rapproche du test d’agglutination magnétique mis au point au laboratoire de LCMD.
Première étape : immobilisation des anticorps : Une plaque en plastique (figure 2.3) comportant 96 puits (∅=6,5 mm ; H=2,5 mm ; 400 µL/puits) est fonctionnalisée en immobilisant des anticorps par simple interaction électrostatique (figure 2.4). Il s’agit très souvent d’anticorps monoclonaux, choisis pour leur sélectivité. Ils sont en excès par rapport à la quantité d’analyte à détecter. Cette étape est assez critique car l’adsorption des anticorps sur le support n’est pas contrôlée. Ils peuvent s’adsorber en quantité variable rendant le test plus ou moins sensible ou même s’adsorber dans une orientation non satisfaisante, c’est-àdire par la partie variable empêchant la fixation de l’antigène à détecter. La fixation de l’anticorps suivant sa nature a été étudiée. Un véritable travail d’ingénierie a permis de trouver les conditions optimales suivant l’anticorps. Certains résultats sont accessibles à travers les publications [10, 11, 12] mais la plupart relèvent du secret industriel [13]. D’autre part, la présence de cette surface solide génère des interactions non spécifiques avec l’antigène à doser ; fixation de l’antigène sur le support et non sur l’anticorps. Un choix judicieux de la nature des plaques permet de diminuer ces phénomènes en jouant sur les types d’interactions à la surface des puits. Par exemple, une surface en polystyrène est le siège d’interactions hydrophobes et si elle est irradiée, des interactions hydrophiles et covalentes viennent s’ajouter [14]. L’ajout d’agents tels que des solutions de protéines et/ou de surfactants après immobilisation des anticorps diminue également ces interactions non-spécifiques.
Deuxième étape : application de l’échantillon : L’antigène contenu dans l’échantillon va se lier spécifiquement aux anticorps (figure 2.5). Cette étape est limitée par sa diffusion dans le puits c’est-à-dire par le temps qu’il met pour être au contact des anticorps. Considérons un antigène de 5 nm de diamètre correspondant à un poids moléculaire compris entre 50 000 et 100 000 g.mol−1 , son coefficient de diffusion (D) est alors de 40 µm2.s−1. Son déplacement quadratique moyen (∆) vaut [15] :
∆2(τ )=6Dτ (2.1) avec τ représentant le temps de diffusion (en s)
Ainsi, une dizaine d’heures est nécessaire à l’antigène pour diffuser dans un puits de 2,5 mm de hauteur. Le volume du puits, le rapport volume du puits/surface fonctionnalisée et la concentration en analyte fixent le temps de diffusion. Ce temps de diffusion est assimilé au temps de réaction car on suppose que la réaction antigène/anticorps est uniquement limité par l’étape de diffusion. Plus la concentration en antigène à détecter est faible, plus le temps d’incubation augmente. Ce temps varie entre 1 heure et 1 jour.
Troisième étape : rinçage de la plaque : Le surnageant contenant d’éventuels antigènes libres et des interférants est éliminé. Une solution de lavage est ensuite ajoutée pour continuer la purification des puits. Les possibles interactions non spécifiques peuvent être rompues au cours de ces étapes. Le bruit de fond est ainsi diminué (figure 2.6).
Quatrième étape : révélation du complexe immun formé : Cette révélation se fait à l’aide d’un anticorps secondaire, généralement polyclonal, conjugué à une enzyme. Cet anticorps possède un paratope complémentaire à un épitope de l’antigène (figure 2.7). Il est ajouté en large excès afin de déplacer l’équilibre et d’accélérer la vitesse de réaction.
Cinquième étape : rinçage de la plaque et ajout du substrat : Tous ou presque tous les anticorps secondaires libres sont éliminés avant l’ajout de substrat (figure 2.8). Cependant un risque d’interaction non spécifique entre le support et/ou l’anticorps primaire et/ou l’antigène et l’anticorps secondaire existe, engendrant un signal supérieur à la quantité d’analyte fixée (faux positif). Au mieux, si ce bruit de fond est reproductible, il diminue la sensibilité du test.
Sixième étape : activation de l’enzyme : Les enzymes conjuguées aux anticorps clivent le substrat en signal chromogénique stable (figure 2.9). Il s’agit très souvent de l’alkaline phosphatase ou de la peroxydase du radis noir (HorseRadish Peroxydase HRP). Tant que le substrat n’est pas entièrement consommé, le signal est amplifié. Ainsi le seuil de détection est fonction du temps d’incubation. Pour chaque test, des solutions de calibration, de témoins positifs et négatifs sont mesurées. L’impact de la variabilité des volumes dispensés et de l’activité des réactifs sont réduits. Les tests ELISA sur plaque détectent la picomole mais sont complexes et lents. Ces deux inconvénients sont minimisés par son automatisation diminuant ainsi la durée du test en effectuant plusieurs analyses en parallèle. En revanche, tout comme le test en format homogène précédemment cité, il ne permet pas de doser des antigènes de petite taille.
Test compétitif : Les tests en dosage « direct » nécessite la présence de deux sites de fixation sur l’antigène. Une étude récente a montré qu’une molécule possédant deux épitopes de 300 Angströms2 séparés par 5 Angströms représentait la taille minimale pour la formation d’un sandwich [16]. En dessous de cette taille (cas rencontré pour certaines hormones et médicaments), la méthode par compétition est appliquée. L’antigène à doser doit « prendre la place » d’un autre antigène marqué, de concentration connue, au niveau de l’anticorps. Ce phénomène a pour conséquence de faire baisser le signal. Historiquement, le premier test a été développé par Rubenstein pour détecter l’insuline en 1972 [17]. Le principe repose sur la présence d’un complexe immun entre un anticorps spécifique à l’insuline et une insuline préalablement liée à une enzyme. Dans cette configuration, l’enzyme est inactivée. Après l’ajout de l’insuline, l’équilibre est déplacé. L’insuline non marquée (insuline à doser) va prendre la place au niveau de l’anticorps de l’insuline marquée. En présence de son substrat, l’enzyme liée à l’insuline libre en solution est active. Le principal inconvénient de cette méthode est sa sensibilité qui est fixée par l’affinité du couple antigène-anticorps à détecter. Pour une affinité de 1012M−1 et une erreur expérimentale de 1%, la limite théorique de sensibilité ne peut être inférieure à 10−14M.
Etat de l’art : Actuellement, la référence en terme de sensibilité, de rapidité et d’automatisation est le test ELISA sur billes magnétiques [18]. Ces billes ont un diamètre de 1 µm ou 3 µm et proviennent de Dynal-Invitrogen. Les anticorps ne sont plus immobilisés sur la surface des puits mais de particules magnétiques qui vont capturer l’antigène en solution. La suite est identique à celle des tests ELISA mais simplifiée en une seule étape. La révélation de l’antigène capturé par la bille se fait à l’aide d’un anticorps marqué par une enzyme, la HRP (figure 2.10). Cette enzyme va cliver le substrat pour donner naissance non pas cette fois-ci à un produit stable (test colorimétrique) mais à un intermédiaire réactionnel. Le retour à un état plus stable de cet intermédiaire émet une forte lumière. Cette méthode de détection rapide (signal visible et maximal après 5 minutes) est utilisée par les entreprises Beckman Coulter (Access Thyroid) et Biomérieux (Vidas) et est couplée à l’électrochimie par Roche Diagnostic (Cobas). Ainsi, une dizaine de femtomoles d’hormones stimulatrices thyroïdiennes (TSH) est détectée en 45 minutes. Ce test a su tirer profit de la maturité des divers tests déjà existant au niveau des billes magnétiques et de la chimiluminescence. Les colloïdes accélèrent la vitesse de reconnaissance par leur mouvement brownien et en augmentant le ratio surface fonctionnalisée/volume des puits par rapport à la phase solide. De plus, grâce au caractère superparamagnétique des billes, leur déplacement est contrôlé par l’application d’un champ magnétique extérieur facilitant ainsi les étapes de lavage. L’utilisation d’anticorps et la présence d’une surface solide nécessitent un réel savoir-faire au niveau de la physico-chimie afin d’optimiser au maximum les performances des tests immunologiques.
Les principaux problèmes engendrés par l’utilisation d’anticorps :
Le greffage des anticorps : Tous les tests immunologiques immobilisent les anticorps sur une surface solide. Ces phases solides peuvent être classées en trois groupes. La première catégorie regroupe toutes les phases en matière plastique. Le test ELISA appartient à cette catégorie. Le deuxième groupe correspond aux microparticules. Ces particules ont l’avantage d’avoir une plus grande surface spécifique que les plaques et augmente la cinétique de réaction grâce à leur mouvement brownien. La dernière catégorie Coulter pour détecter la TSH avec une sensibilité de 0,01 µIU/mL. Des microparticules magnétiques sont greffées avec des anticorps de chèvre anti-IgG de mouton ayant réagi avec des anticorps monoclonaux de mouton anti-hTSH. Ces billes sont ensuite mélangées avec l’échantillon contenant la hTSH et des anticorps secondaires de chèvre marqués avec de l’alkaline phosphatase. Après 30 minutes d’incubation à 36,5˚C, le sandwich billehTSH-anticorps secondaire est formé. Le milieu est lavé 3 fois. Le substrat est ajouté et le signal est visible après 5 min (Beckman Coulter). rassemble toutes les membranes. Leur pouvoir d’absorption est 100 à 1000 fois supérieur à celui du plastique en raison de leur grande surface interne et elles permettent de travailler en présence de flux, accélérant ainsi la diffusion des espèces. Elles peuvent être en ester de nitrate de cellulose (nitrocellulose), en nylon ou en polyvinylidène difluoride (PVDF). Le greffage des anticorps se fait, soit par adsorption physique (mécanisme peu contrôlé), soit par couplage covalent. La fonctionnalisation de la surface est une étape très critique car elle peut déboucher sur une diminution de l’affinité des anticorps due à :
– une altération des paratopes si l’attachement de l’anticorps a lieu près d’un paratope
– une dénaturation de l’anticorps
– un problème de gêne stérique si le nombre d’anticorps par unité de surface est trop important
Au laboratoire, un greffage de type covalent est choisi pour fonctionnaliser les particules magnétiques car il permet de contrôler l’orientation des protéines, d’éviter leur dénaturation et est stable dans le temps, contrairement au greffage par adsorption. Les paramètres jouant sur le greffage covalent sont principalement les concentrations relatives en anticorps, le temps et la température de réaction. Les conditions physico-chimiques sont aussi à considérer car on travaille avec des objets colloïdaux [19]. Les particules magnétiques sont polymérisées ainsi des fonctions carboxyles, époxy ou amines peuvent être présentes à la surface de cette couche de polymère. Ces fonctions sont utilisées pour former des liaisons peptidiques avec les protéines. Ces protéines sont, soit des anticorps spécifiques à l’analyte, soit des protéines A reconnaissant la partie constante des anticorps d’une ou plusieurs espèces, soit des protéines génétiquement modifiées [20] pour purifier des solutions d’anticorps monoclonaux et polyclonaux.
L’adsorption non spécifique : La présence d’une surface solide au sein de la réaction entre des ligands et leurs récepteurs nécessite d’inhiber ou de « bloquer » les interactions non spécifiques entre le ligand soluble et la phase solide où est immobilisé le récepteur. Les agents les plus utilisés sont les solutions de protéines et les surfactants non ioniques. Le choix de ces agents est guidé par la nature de la phase solide, du lien ligand-récepteur et des résultats empiriques. Les solutions de protéines, typiquement l’albumine sérique bovine (BSA), la caséine, le sérum foetal de bovin sont souvent utilisées après immobilisation des anticorps pour combler les espaces de la surface non occupés par les anticorps. La nature de la surface conditionne le choix de la solution de protéines. Par exemple, la caséine s’avère très efficace sur les surfaces en polystyrène et en nitrocellulose en raison de son faible poids moléculaire qui lui permettrait de combler de petits espaces. Les surfactants non ioniques sont généralement utilisés pour prévenir les adsorptions hydrophobes de protéines sur la surface solide et diminuer l’agrégation hydrophobe de macromolécules c’est-à-dire diminuer les interactions non spécifiques entre protéines. Leur mécanisme d’action est similaire à celui des protéines. Leur petite taille et leur nature amphiphile leur permettraient de solubiliser la protéine. Le surfactant s’intercalerait entre la protéine via sa partie hydrophobe et la couche de solvant avec sa partie hydrophile. Les surfactants les plus utilisés pour les tests immunologiques sont le Tween, le Triton et le Nonident-40. On note également une possible inhibition de la reconnaissance spécifique par les surfactants ioniques qui dénaturent les protéines. Cet effet a été observé avec du sodium dodecyl sulfate (SDS). En résumé, les agents de « blocage » des surfaces sont principalement des solutions de protéines et/ou de surfactants. Leur comportement dépend de la nature de l’interaction ligand-récepteur et de la surface solide. Ils peuvent également interférer avec des interactions spécifiques ou non. Nous n’avons pas utilisé d’agent de blocage c’est à dire un agent permettant de saturer la surface des billes mais un tensioactif afin de stabiliser les billes magnétiques après application du champ magnétique. Il s’agit du tensioactif non ionique, le polyoxyethylène de masse moléculaire environ 12 600 g.mol−1, commercialisé sous le nom de pluronic F-127 par Sigma Aldrich. L’utilisation de colloïdes nécessite également de prendre en considération certains paramètres physico-chimiques tels que la force ionique, le pH et la température pour les stabiliser et ainsi éviter toute agrégation due à une mauvaise formulation du milieu.
Les nanoparticules d’or adaptées à une dynamique de la lumière diffusée (DLS)
Les nanoparticules d’or ont été adaptées au test immunologique homogène et couplées à une dynamique de la lumière diffusée pour remonter à la taille et à la concentration des populations en solution. Ce test repose sur la formation d’un sandwich entre des nanoparticules. Ces nanoparticules sont, soit des sphères de 37 nm de diamètre, soit des nanotubes d’or de dimension 10 nm sur 40 nm. Les particules d’or ont l’avantage d’absorber fortement la lumière vers 520 nm. Elles sont greffées avec deux anticorps : un anticorps de détection et un anticorps de capture. Après une demi heure, ces particules s’agrègent spécifiquement à l’antigène (ici l’antigène prostatique PSA). Une simple mesure de l’intensité lumineuse permet de détecter 0,02 pM de PSA pour les particules sphériques et 0,4 pM pour les nanotubes [50]. Les nanoparticules ont également été mélangées afin d’amplifier le signal mais aucune réelle corrélation n’a été trouvée entre l’intensité moyenne diffusée et la concentration de PSA. Cette technique est intéressante car elle permet d’accéder à des seuils de sensibilité très élevés par une simple mesure de la lumière diffusée. Ce test est rapide et peut être multiplexé par l’utilisation simultanée de différentes tailles ou formes différentes de nanoparticules. Néanmoins, un problème de stabilité colloïdale assez prononcé existe en présence de fluides biologiques.
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Table des matières
1 Introduction générale
2 Tests immunologiques : principe et développement
2.1 Les anticorps et leur application au diagnostic
2.1.1 Structure générale
2.1.2 Les anticorps polyclonaux et monoclonaux
2.1.3 Les différents formats de tests
2.1.4 Etat de l’art
2.1.5 Les principaux problèmes engendrés par l’utilisation d’anticorps
2.2 Le diagnostic au LCMD
2.2.1 Présentation
2.2.2 Rôle de la diffusion
2.2.3 Dosage
2.2.4 Conclusion
2.3 Les tests présents et futurs
2.3.1 Tests commercialisés
2.3.2 Tests en cours de commercialisation
2.3.3 Tests en développement
2.4 Conclusion
3 La sensibilité du test d’agglutination magnétique : compréhension et amélioration
3.1 Les facteurs de la sensibilité
3.1.1 Le bruit
3.1.2 La pente de la droite
3.1.3 Conclusion
3.2 De la mesure moyenne au comptage individuel
3.2.1 Protocole
3.2.2 Résultats
3.2.3 Caractérisation
3.2.4 Discussions
3.3 Conclusion
4 Un nouveau format fluidique pour de meilleures performances
4.1 Introduction
4.1.1 Premier dimensionnement
4.1.2 Deuxième dimensionnement
4.2 Système de préconcentration
4.2.1 Fonctionnement
4.2.2 Montage magnétique et microfluidique
4.2.3 Résultat
4.3 Couplage avec la cytométrie en flux
4.3.1 Validation des principes
4.3.2 La détection
4.4 Conclusion
5 Elaboration d’un test de diagnostic
5.1 Choix des matériaux et du protocole de fabrication de la puce intégrée
5.1.1 Choix de matériaux
5.1.2 Fabrication de la puce intégrée
5.2 Définition de la puce intégrée
5.2.1 Enjeu de l’intégration : manipulation fluidique
5.2.2 Dimensionnement de la puce
5.2.3 Conception/Plan/Schéma
5.2.4 Résultat de l’intégration : la puce unique
5.3 Stratégie pour l’intégration
5.3.1 Thermalisation
5.3.2 Calibration du protocole
5.3.3 Protocole magnétique
5.3.4 Partie optique
5.4 Conclusion
6 Conclusion
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