Immunité et trypanosomes

Les trypanosomoses, la trypanotolérance et le concept vaccin anti-maladie

Généralités sur les trypanosomoses

Les trypanosomoses humaines et animales sont des parasitoses dues à des protozoaires flagellés du genre Trypanosoma. Elles sévissent en Amérique latine, avec T. cruzi, responsable de la maladie de Chagas qui touche 20 millions de personnes, et en Afrique où ils provoquent la maladie du sommeil chez l’homme et le Nagana chez les animaux de production. Les trypanosomes africains sont essentiellement des parasites intra-vasculaires et extra-cellulaires mais peuvent avoir un tropisme plus large que le sang (système nerveux, cavités articulaires,…). Plus communément appelée maladie du sommeil, la trypanosomose humaine africaine est largement répandue sur la zone intertropicale du continent africain et est principalement due à T. brucei gambiense (Afrique de l’Ouest) et T. brucei rhodesiense (Afrique de l’Est). Les principaux agents pathogènes des trypanosomoses animales sont représentés par T. congolense, T. vivax et T. brucei brucei. T. congolense demeure le premier responsable des trypanosomoses bovines, T. vivax présente un pouvoir pathogène variable et T. brucei brucei ne devient préoccupant que lors d’infection mixte (17). La figure 1 indique les aires de répartition des bovins et des glossines sur le continent africain.

L’élevage bovin est rapidement limité par la présence des glossines, ainsi toute une partie de l’Afrique équatoriale ne présente aucune activité d’élevage malgré des conditions climatiques favorables. Cinquante millions de bovins demeurent exposés à l’infection au niveau des marges de l’aire de répartition des glossines. La présence de cette pathologie limite non seulement l’exploitation de zones pourtant favorables (Afrique équatoriale) mais en plus entrave largement la productivité des bovins dans les aires exploitées. La mortalité et la morbidité des animaux atteints (amaigrissement, retard de croissance, avortement,…) ainsi que le coût des opérations de dépistage et de traitement sont autant de pertes directement imputables à la trypanosomose. Enfin, les effets indirects sur l’alimentation humaine (déficit en production de lait et de viande) et sur l’agriculture (faiblesse du bétail de trait, fumier insuffisant,…) alourdissent encore l’impact économique de cette pathologie.

La trypanotolérance

La trypanotolérance est définie comme l’aptitude présentée par certaines races bovines à vivre et à produire dans des zones infestées par des glossines (29). Cette propriété se trouve essentiellement chez les taurins sans bosse et de petite taille (Bos taurus – figure 3) alors que les zébus à bosse (Bos indicus) sont généralement très sensibles à la trypanosomose. L’ensemble de ces races trypanotolérantes ne représente que 5% du cheptel bovin total et même dans les zones infestées, les éleveurs préfèrent les zébus pour leur format et pour leur apparente plus grande productivité. Des populations de bovins métis (produit du croisement trypanosensible * trypanotolérant) présentent des degrés de trypanotolérance intermédiaires et comptent pour 30% du cheptel trypanotolérant. Un métissage excessif entre les animaux sensibles et tolérants pourrait mettre en péril ce phénomène de résistance. Une meilleure aptitude à limiter l’ampleur et la fréquence des parasitémies, associée à un meilleur contrôle de l’anémie et une sensibilité réduite aux effets pathogènes des Cliché M.Desquesnes Cliché D.Belemsaga trypanosomes semble caractériser les individus trypanotolérants lors de réinfections (22,18).

La trypanotolérance est beaucoup moins nette lors de primo-infection. Comprendre les mécanismes de la trypanotolérance est devenu un véritable enjeu dans la recherche de nouvelles voies de lutte contre la trypanosomose (1). Ainsi, la trypanotolérance est probablement un phénomène à déterminisme multifactoriel complexe qui semble appeler des mécanismes à la fois immunologiques et non immunologiques. Le degré de résistance des taurins est directement corrélé à leur état physiologique ; surmenage, malnutrition, maladies intercurrentes ou réactions vaccinales favorisent le développement de la maladie. Des adaptations physiologiques liées au milieu tropical jouent probablement un rôle non négligeable dans la résistance à la maladie des taurins. Par exemple, une meilleure tolérance à l’humidité, une meilleure utilisation des aliments, une thermorégulation plus efficace, une meilleure conservation de l’eau et une peau plus épaisse avec moins de piqûres d’insecte en challenge naturel sont autant de facteurs qui contribuent au phénomène de trypanotolérance (21,26). Des facteurs sériques trypanolytiques ont également été détectés chez certains individus : le sérum du buffle et de l’élan contiendrait un facteur trypanotoxique susceptible d’agir sur les formes infectieuses du parasite dès leur pénétration dans le derme. Ces mécanismes non immunologiques sont encore mal connus et demeurent à l’étude. Des observations au cours d’infections expérimentales ou en milieu naturel laissent à penser que la principale composante de la trypanotolérance serait d’ordre immunologique.

Immunité et trypanosomes

Au moins deux types d’antigènes provoquent chez l’hôte définitif une réponse immunitaire conséquente : les antigènes variables de surface ou VSG (Variant Surface Glycoprotein) et les antigènes invariants. Les VSG sont des glycoprotéines de surface qui présentent une grande variabilité des structures primaires protéiques, notamment au niveau des parties externes. La structure tridimensionnelle montre que seule une petite partie de la protéine est exposée à la surface du parasite, la portion amine terminale (3). Les deux tiers de cette portion N-terminale sont très variants, contrairement au tiers de la zone C-terminale, qui, enchâssée dans la membrane cytoplasmique, représente la zone constante. Le rôle de ce manteau pourrait donc être en partie de masquer les antigènes membranaires invariants du trypanosome en présentant des antigènes variables immunodominants aux défenses immunitaires de l’hôte. (25).

L’infection est ainsi caractérisée par une succession de populations croissantes puis décroissantes, avec des poussées tous les 7 à 10 jours (16). L’hôte produit effectivement des anticorps contre la première population rencontrée et la détruit mais de nouveaux variants apparaissent et se multiplient avant que la nouvelle réponse immunitaire de l’hôte soit effective (figure 4). Ainsi, par ce mécanisme d’échappement à la réponse immunitaire de l’hôte, la parasitémie de l’animal infecté est constituée de successions de vagues séparées par des rémissions où la détection du parasite est difficile. Une population donnée de trypanosomes ayant le même répertoire antigénique forme un sérodème ou VAT (variant antigenic type). Ces composants de l’enveloppe externe du trypanosome ne sont présents que chez les formes infectieuses au niveau de l’hôte définitif (formes métacycliques après piqûre de la mouche puis formes sanguines).

Identification des antigènes responsables de la réponse humorale spécifique des animaux trypanotolérants Certains antigènes invariants des trypanosomes peuvent induire une réponse immune mais peu d’entre eux ont été identifiés. Les plus aptes à induire une réponse immune détectable sont des protéines à structure répétitive à fort pouvoir immunogène. Certains antigènes ne provoquent effectivement pas la synthèse d’anticorps en quantité suffisante pour être détectable, soit parce que présents à trop faible concentration, soit à cause de la compétition antigénique. Les meilleurs candidats sont ainsi soit les molécules accessibles par les anticorps soit les molécules intervenant dans le métabolisme parasitaire à turn-over important (enzymes, récepteurs, transporteurs,…). Trois antigènes majeurs, à la base de ces réponses humorales, ont été identifiés par les méthodes de Western Blotting et ELISA : l’antigène 23 kD (kiloDalton), l’antigène 69 kD et l’antigène 33 kD (5). L’antigène 23 kD est reconnu de façon identique par des animaux trypanosensibles et trypanotolérants et induit la synthèse d’IgG1. Sa reconnaissance n’est pas associée à des niveaux de parasitémie ou d’anémie différents. L’antigène 69 kD est reconnu par tous les animaux infectés et provoque des réponses IgM et IgG. Les animaux trypanosensibles synthétisent plutôt des IgM anti-69 kD alors que les animaux trypanotolérants présentent une réponse forte en IgG1 anti-69 kD (5).

Cet antigène présente une grande homologie avec les molécules HSP70 des mammifères qui jouent un rôle important dans le repliement des protéines nouvellement synthétisées et dans l’élimination des protéines anormales. Le rôle de la 69 kD demeure inconnu chez les trypanosomes. Cet antigène, détecté dans le plasma des animaux infectés, est impliqué dans la régulation de la réponse immune et dans les mécanismes physiopathologiques. Il représente donc un des antigènes invariants majeurs reconnus par le système immunitaire des bovins mais sa proximité antigénique avec des molécules de l’hôte entrave largement les recherches et travaux d’essais d’immunisations. Les antigènes 23 kD et 69 kD suscitent la formation d’anticorps chez tous les individus infectés et pourraient éventuellement participer à des méthodes de sérodiagnostic. L’antigène 33 kD suscite une production variable d’IgM, tous impliqués dans la formation des immuns complexes, et d’IgG1 libres. Lors de réinfections à T. congolense d’animaux trypanosensibles (Borans) et trypanotolérants (N’Damas), la reconnaissance de cet antigène a été variable selon les différents niveaux de pathologie. Les N’Damas ont tous exprimé des anticorps anti-33 kD alors que seuls les Borans retrouvant des valeurs d’hématocrite correctes ont présenté ces anticorps anti-33 kD. Les Borans qui n’ont pas reconnu cet antigène, ont atteint un degré d’anémie sévère et ont nécessité un traitement trypanocide pour éviter la mort (4).

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Table des matières

Résumé et mots-clés
Remerciements
Introduction
1 . Généralités sur les trypanosomoses, la trypanotolérance et le concept vaccin anti-maladie
1.1. Généralités sur les trypanosomoses
1.2 La trypanotolérance
1.3 Immunité et trypanosomes
1.3.1 Antigénicité des trypanosomes
1.3.2 Réponse immune de l’hôte
1.3.2.1Immunité humorale comparée des bovins trypanosensibles et trypanotolérants
1.3.2.2 Identification des antigènes responsables de la réponse humorale spécifique des animaux trypanotolérants
1.4 Identification de la congopaïne et essais d’immunisation
1.4.1 Identification de la congopaïne
1.4.2 Essais d’immunisation avec deux protéines recombinantes de la congopaïne
2.Projet INCO-CONGO
2.1 Objectifs du projet
2.2 Partenaires du projet
2.3 Rôles respectifs de chaque partenaire
2.4 Les activités du CIRDES
2.4.1 Contribution à l’étude du génome, au polymorphisme et à la diversité génétique des cystéines protéases
2.4.2 Contribution à la mise au point de tests sérologiques pour le diagnostic des trypanosomoses
2.4.3 Impact de l’immunisation à la congopaïne sur du bétail placé sous challenge trypanosomien naturel
3.Choix du site pour les essais d’immunisation sur le terrain
3.1 Matériel et méthode
3.2 Résultats
3.3 Discussion
4.Evaluation de la réponse immune chez des zébus, métis et Baoulés
4.1 Matériel et méthode
4.1.1 Choix des animaux
4.1.2 Choix de la protéine immunisante
4.1.3 Protocole d’immunisation
4.1.4 Suivi des animaux
4.1.5 Méthode d’analyse des résultats
4.2 Résultats
4.2.1 Résultats préliminaires des essais sur le test ELISA C2
4.2.2 Suivi des réponses immunes
4.2.2.1Première visualisation des résultats
4.2.2.2 Analyse des variances et covariances des données
4.2.2.3 Distinction de deux groupes répondant différemment à l’immunisation
4.2.3 Suivi de l’hématocrite et du poids
4.2.4 Réactions locales au point d’injection
4.3 Discussion
5.Epreuve d’infection et suivi post-infection des animaux parasités
5.1 Matériel et méthode
5.2 Résultat
5.2.1 Suivi de la parasitémie
5.2.2 Suivi de l’hématocrite
5.3 Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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