Dans les prochaines années, l’Univers sera observé avec une précision sans précédent avec le radio-interféromètre Square Kilometre Array (SKA) par exemple. Également d’autres télescopes seront mis en service comme Euclid et Vera C. Rubin pour le sonder. La finalité est de récolter des données afin d’apporter des éléments de réponse à des questions de domaines de recherche actifs en astrophysique, telles : Comment se forment et évoluent les galaxies ? Comment est répartie la masse dans l’Univers ? La première est associée au domaine de la formation et évolution des galaxies et la deuxième est associée à la cosmologie. Dans les deux cas, la forme de la galaxie est une information majeure ; en effet, dans le premier domaine cette information est utile pour classifier la galaxie. Dans le second domaine, cette information permet de déduire la carte de masse dans l’Univers. En effet, considérons un amas de galaxies dans l’espace, dans le régime du lentillage gravitationnel faible, un corps céleste massif, situé entre l’amas et l’observateur, induit un cisaillement gravitationnel des galaxies dans l’amas. En mesurant la forme de celles-ci, il est possible d’estimer le cisaillement et par conséquent la masse du corps massif. Il est nécessaire que l’estimation soit de haute précision puisque la contribution du cisaillement dans la mesure de forme d’une galaxie est de l’ordre de 1%. Les images brutes obtenues par les télescopes sont floutées par des effets instrumentaux et corrompues par un bruit additif provenant du fond du ciel observé, ce qui complique davantage l’estimation de la forme. En effet, il s’agit d’un problème inverse mal posé, plus spécifiquement mal conditionné. Avec les méthodes de reconstructions d’images standards, l’information sur la forme de la galaxie et les autres grandeurs physiques comme le flux ne sont pas préservées.
Imageries optique et radio
Imagerie optique
L’histoire des civilisations est marquée par la présence du ciel, comme une source de questionnement et de mythes. Des lumières jusqu’à aujourd’hui, c’est avec des instruments toujours plus puissants que l’astronomie et l’astrophysique ont pu progresser. En effet, pour comprendre la nature de ces astres et de leur mouvement, Galilée développa la lunette astronomique vers la fin du XVIe siècle, pour scruter le ciel en allant ainsi au-delà de l’observation à l’œil nu. De cet élan en 1610, il put alors observer pour la première fois les satellites de Jupiter. L’étude du mouvement relatif de la planète et des satellites permit à ce dernier de déduire que la Terre tourne autour du Soleil. Cette expérience fut l’acte de naissance de l’astronomie moderne. Depuis, les outils d’observations sont en constante amélioration, rendant de nos jours, l’observation à l’œil obsolète pour l’étude approfondie des objets astrophysiques. En effet, les caméras actuelles dans les télescopes permettent aujourd’hui par exemple d’avoir des observations à différents temps de pose (de l’imagerie ultrarapide à l’imagerie longue pose) et de capter des longueurs d’onde en dehors du domaine visible. Toujours avec une d’améliorer la précision et notamment avec l’avènement du numérique, ces images sont prétraitées afin de prendre en compte les effets liés à la chaîne d’acquisition du signal (biais, bruits, déformations, etc.).
Les télescopes optiques
Pour avoir des observations de plus en plus précises, les télescopes optiques sont généralement placés à l’abri de perturbations humaines et atmosphériques sur les sommets des montagnes ou des volcans comme les observatoires du Mauna Kea à Hawaï, allant même jusqu’à les placer dans l’espace comme le Hubble Space Telescope (HST). Néanmoins le principe de fonctionnement est le même. Dans cette partie, nous allons voir comment l’instrument fonctionne d’une part et d’une autre part, l’influence du milieu de propagation des ondes entre le télescope et l’objet observé.
Le système optique
Les télescopes sont constitués des éléments suivants :
– Miroir primaire : il s’agit d’un miroir concave qui va faire converger les rayons vers l’oculaire en passant par le miroir secondaire . Contrairement à la lunette astronomique dans laquelle la lumière subit des réfractions à travers un ensemble de lentilles, le miroir réfléchit les ondes et permet au télescope d’être totalement achromatique. – Miroir secondaire : ce miroir permet de réfléchir les ondes venant du miroir primaire et de les rediriger vers le foyer du système optique, dont l’image est faite au travers d’un oculaire, si l’on observe à l’œil. Dans le cas d’un télescope de Newton, le miroir secondaire est plan.
– Oculaire : l’oculaire agit comme une loupe et permet d’agrandir l’image. Sa distance est réglable afin de faire coïncider son foyer objet avec le foyer image de l’objectif, rendant ainsi le télescope afocal. Notons que l’oculaire est généralement omis lorsque l’observation est faite avec une caméra.
– Monture : La monture est un support mobile de l’instrument qui permet de l’orienter de manière à pouvoir déplacer l’axe optique vers une cible. La monture est généralement motorisée, sur un télescope amateur haut de gamme ou professionnel.
Limite de diffraction et Fonction d’Étalement du Point
En astrophysique, la séparation angulaire entre les objets observés est souvent très faible. Pour augmenter la résolution angulaire, il est possible d’augmenter la distance focale de l’instrument. Mais la capacité à distinguer deux points proches lors d’une observation est limitée par la résolution de l’instrument. La résolution est liée à la diffraction produite, au niveau de l’ouverture du télescope, par les fronts d’onde des rayons émis par l’objet observé. Dans le cas d’une ouverture circulaire, le motif de diffraction observé est un disque d’Airy [Carroll et Ostlie 2007]. Chaque point source donne comme image la Fonction d’Étalement du Point (FEP) . Considérons une source étendue, celle-ci peut-être exprimée comme un ensemble de sources ponctuelles. Les images de chacune de ces sources se somment l’une à l’autre pour former l’image de la source étendue, il s’agit d’une opération de convolution. Dans notre étude, nous considérons des images de support suffisamment réduit pour que la convolution soit localement linéaire et invariante par rapport à la translation.
Effets atmosphériques
La résolution d’un télescope au sol ne peut s’améliorer indéfiniment avec la taille du miroir principal. C’est dû aux turbulences atmosphériques qui sont causées par des différences de température et densité sur des distances de plusieurs centimètres voire plusieurs mètres. Nous obtenons ainsi des zones où la lumière est réfractée dans des directions quasialéatoires. L’image obtenue contient un flou supplémentaire qui est mis en relief dans le cas des sources ponctuelles. Au passage, pour cette raison, les étoiles scintillent le soir. La qualité de l’image d’une source pour une localisation donnée au sol est appelée seeing. En présence d’atmosphère turbulente, le trajet non droit des rayons étale davantage la réponse du télescope, ce qui dégrade la résolution angulaire du télescope. Le modèle de Kolmogorov [Tatarskii 1961] est communément utilisé pour décrire la statistique de la turbulence. Pour limiter les effets atmosphériques, les télescopes sont construits à haute altitude et les télescopes spatiaux s’affranchissent complètement de ces effets [Carroll et Ostlie 2007].
CFHT2HST
J’ai développé le jeu de données CFHT2HST pour obtenir à la fois des données réalistes et adaptées pour l’apprentissage profond. L’idée est d’utiliser des images vérité terrain, également appelées images cibles, qui correspondent à de vraies galaxies. Cette approche est limitée par le fait que toutes les images de galaxies qui existent sont floutées et contaminées par du bruit. Par contre, d’un instrument à l’autre, la qualité de l’observation peut considérablement varier. Alors nous avons choisi d’avoir des images vérité terrain obtenues avec le télescope spatial HST qui possède une résolution élevée donc une FEP avec un support réduit, et ses observations sont relativement peu bruitées. Pour générer les images observées, également appelées images d’entrée, nous avons simulé des observations semblables à celles du télescope Canada-France-Hawaï (Canada France Hawaii Telescope (CFHT), en anglais) qui est au sol. Le jeu de données est formé de :
– galaxie cible : la galaxie cible sert de vérité terrain. Dans un contexte d’apprentissage machine, nous avons choisi des galaxies obtenues à partir de vraies images de galaxies. Il s’agit des images du catalogue COSMOS qui correspondent à des observations par HST convoluées par la FEP cible qui détermine ainsi la résolution de l’image (voir point suivant). Les images réelles permettent d’éviter les biais de modélisation, cependant celles-ci sont contaminées par un léger bruit additif correspondant au bruit de fond réel dans l’espace. La présence de ce bruit dans la vérité terrain est problématique pour la comparaison des performances de différentes méthodes de reconstruction. En effet, ce bruit biaise les mesures de qualités. À cette fin, nous avons également créé un jeu de donnée avec des galaxies cibles paramétriques ajustées sur les galaxies réelles.
– FEP cible : La FEP cible permet de définir la résolution de la galaxie cible. En effet, dans un souci de réalisme, comme il n’existe pas d’image de galaxie réelle à une résolution infinie, le rôle de la FEP est de restreindre la résolution de la galaxie cible à une résolution qui pourrait être obtenue avec un vrai télescope. De plus, comme les variations de la FEP cible sont minimes vis-à-vis de celles de la FEP d’entrée, nous avons créé une FEP cible unique qui permet d’obtenir toutes les galaxies cibles.
– galaxie d’entrée : cette galaxie correspond à une observation au sol qui est considérablement plus floue et plus bruitée que l’image de la galaxie cible. Ces images sont obtenues en convoluant les images du catalogue COSMOS avec la FEP d’entrée puis en ajoutant un bruit avec le même écart-type pour toutes les images. La valeur de l’écart type est calculée en tenant compte des conditions d’observation et des propriétés du télescope CFHT .
– FEP d’entrée : c’est la FEP utilisée pour obtenir l’image d’entrée. Cette FEP est générée en utilisant le modèle de Kolmogorov[Racine 1996].
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Table des matières
Introduction
1 Imageries optique et radio
1.1 Imagerie optique
1.1.1 Les télescopes optiques
Le système optique
1.1.2 Limite de diffraction et Fonction d’Étalement du Point
Effets atmosphériques
Système d’acquisition
1.1.3 Les jeux de données visibles
COSMOS paramétrique
CFHT2HST
1.1.4 Conclusion
1.2 Imagerie Radio
1.2.1 Antenne et Réseau d’Antennes
Antenne
Réseau d’antennes
1.2.2 Interféromètre à deux antennes
Source ponctuelle
Source étendue
Systèmes de coordonnées (u, v, w) et (l, m, n)
1.2.3 Des visibilités à l’imagerie
Image observée et problème inverse
Méthodes classiques de déconvolution
1.2.4 Jeu de données
Catalogue
Génération des données
1.2.5 Conclusion
2 Problème inverse de déconvolution
2.1 Problème inverse
2.1.1 Définition d’un problème inverse
2.1.2 La déconvolution
2.2 Régularisation des problèmes inverses
2.2.1 Utilité de la régularisation
2.2.2 Exemples de régularisation
Régularisation de Tikhonov
Variation totale
Projection sur un ensemble
2.3 Méthodes proximales
2.3.1 Opérateur proximal
2.3.2 Algorithmes proximaux
Algorithme Forward-Backward Splitting
Algorithme des directions alternées
2.4 Conclusion
3 Parcimonie et ondelettes
3.1 Parcimonie
3.1.1 Aperçu sur la parcimonie
3.1.2 Représentation parcimonieuse des signaux
3.2 Transformée en ondelettes
3.3 Ondelettes continues
3.4 Ondelettes orthogonales
3.4.1 Multi-résolution
3.4.2 Décomposition pyramidale
3.4.3 Ondelettes bi-orthogonales bi-dimensionnelle (2D)
3.5 Starlet
3.5.1 Transformée en ondelette à trous
3.5.2 Transformée en starlet
3.5.3 Deuxième Génération de Starlet
3.6 Conclusion
4 Reconstruction parcimonieuse et contrainte de forme
4.1 Contrainte de forme
4.1.1 Nécessité de la forme en astrophysique
4.1.2 Développement de la contrainte de forme
Ellipticité
Des ellipticités aux produits scalaires
Fenêtrage
4.1.3 Reformulation de la contrainte
4.2 Algorithme SCORE
4.2.1 Déconvolution parcimonieuse
4.2.2 SCORE
4.3 Expériences numériques
4.3.1 Implémentation
4.3.2 Résultats
4.3.3 Conclusion
5 Reconstruction avec Apprentissage Profond
Conclusion