Endométriose pelvienne externe
Nous avons noté 23 cas soient 49% des patientes. Les différentes localisations pelviennes ont été les suivantes :
o Endométriomes ovariens : 09 cas (soient 19%). (Figure 5, page 13) L’atteinte ovarienne était bilatérale chez 06 patientes, avec notion de Kissing ovaries (Figure 6, page 13).
o Endométriose pelvienne profonde : 12 cas (soient 25%). Parmi ces localisations profondes on notait pour le torus utérin 05 cas (Figure 7, page 15), les ligaments utéro-sacrés 04 cas, la cloison recto-vaginale 02 cas et le sigmoïde 01 cas (Figure 8, page 15).
o Endométriose tubaire : 03 cas (soient 06%) ont été notés. (Figure 5, page 13).
o Endométriose de la paroi pelvienne : dans 2 cas (soient 04%)
EPIDEMIOLOGIE
Dans notre série nous avons enregistré 47 dossiers de patientes sur une période de 27 mois. La prévalence de l’endométriose est mal connue car le diagnostic positif de certitude est histologique et nécessite donc une intervention chirurgicale. En plus, les études épidémiologiques sur la population générale sont rares ou biaisées car portant sur des groupes sélectionnés [7]. On estime néanmoins que l’endométriose, toutes formes confondues, affecterait 10 à 15 % des femmes en âge de procréer et 20 à 50 % des femmes infertiles [5,6]. Cependant les chiffres rapportés lors du congrès mondial sur l’endométriose à Sao Paulo en 2014 sont plus proches de 20 % que de 10 %, reflétant probablement une augmentation de la prévalence de cette maladie [7]. Les données épidémiologiques sur la prévalence de l’endométriose en Afrique Sub-saharienne sont maigres. Dans quelques-unes des rares études publiées, notamment celle de Strathy JH et al en 1982, l’endométriose a été rapportée dans 15,7% des laparoscopies réalisées dans le cadre d’une recherche étiologique d’infertilité [8, 9]. En Afrique du Sud, Wiswedel et al ont rapporté en 1989 une prévalence de 2% chez les femmes africaines de race noire qui se présentaient dans une clinique d’infertilité, contre 4 à 6% chez les Sud-africaines de race blanche ou métissée [10]. Au Nigéria, une prévalence de 4 à 8% a été signalée chez des femmes dans un programme de reproduction assistée [9, 11, 12]. Cette faible prévalence de l’endométriose dans la population africaine a été attribuée à une culture et à des styles de vie différents en particulier, l’âge précoce à la première grossesse, la tachymultiparité et les tabous autour de la menstruation et la douleur. Tout ceci favorise le développement de maladies pelviennes inflammatoires chroniques avec des risques d’obstruction tubaire [13, 14], mais ces facteurs contribueraient aux retards dans l’expression des symptômes et limiteraient le nombre de cycles menstruels avec menstruation rétrograde qui est positivement associé au risque de développer l’endométriose [13, 14]. D’autres auteurs ont attribué la faible prévalence de l’endométriose en Afrique sub-saharienne à une faible sensibilisation sur la maladie, l’accès encore médiocre aux outils de diagnostic et à une formation insuffisante du personnel de santé sur la prise en charge de la maladie [8, 15]. Dans notre série l’âge moyen était de 39,5 ans avec des extrêmes de 18 ans et 55 ans. Dans la littérature il est rapporté que l’adénomyose est classiquement retrouvée chez la femme de 40 ans multipare [16].
Endométriomes ovariens
Dans notre série les ovaires ont été sièges d’endométriomes chez 09 patientes soient 23% des cas d’endométriose extra utérine et 19% des cas globaux. Les ovaires sont un site fréquent (20 à 40 % des cas) [16]. L’atteinte peut se manifester par des adhérences fibreuses au niveau de la fossette ovarienne ou par des kystes chroniques dus à la rétention de saignement chronique donnant des endométriomes. L’échographie seule suffit le plus souvent au diagnostic avec une sensibilité, une spécificité, des valeurs prédictives positives et négatives proches de 90% pour l’échographie endovaginale [26]. L’IRM peut être réalisée pour éliminer une endométriose pelvienne profonde associée ou permettre le diagnostic différentiel entre endométriome et autres kystes ovariens (kyste fonctionnel, kyste lutéinique hémorragique, tératome…). Togashi et al [27] ont montré dans une cohorte de 374 patientes avec des signes cliniques de masses annexielles, que l’imagerie par résonance magnétique (IRM) permettait un diagnostic précis de 77 sur 86 endométriomes et l’exclusion du diagnostic d’endométriome chez 263 sur 268 autres masses gynécologiques avec ou sans hémorragie intra-kystique. Ils retrouvaient pour le diagnostic global, une sensibilité, une spécificité et une précision respectives de 90%, 98% et 96 %. Les endométriomes (> 1 cm) ou micro-endométriomes (< 1 cm) se caractérisent par une atteinte intra-ovarienne de signal variable généralement en hypersignal T1 persistant de façon quasi pathognomonique sur les séquences avec suppression de graisse, le plus souvent en hyposignal T2 réalisant le phénomène de « shading » chute de signal, avec parfois des niveaux déclives en miroir. L’aspect classique en « grain de café́ » est également généralement attribué aux endométriomes ovariens [28]. L’injection de produit de contraste ne montre pas de rehaussement annulaire réalisant le « ring sign » permettant de les différencier des kystes folliculaires hémorragiques. [28]. Des atteintes péri-ovariennes adhérentielles, d’aspect stellaire, rétractile et de signal variable peuvent être associées au niveau des fossettes ovariennes et peuvent dans certains cas ramener les ovaires en région médiane réalisant le phénomène de kissing ovaries [28]. Nous avons observé ce phénomène chez 06 patientes.
Endométriose pelvienne profonde (EPP)
Dans notre étude, 12 cas d’EPP ont été notés soient 52% des cas d’endométriose pelvienne extra utérine et 25 % de tous les cas d’endométriose pelvienne. La théorie expliquant le mieux l’origine et la localisation des lésions d’endométriose profonde est la théorie de l’implantation, proposée dans les années 1920 par Sampson, qui est fondée sur le reflux menstruel [1]. Ce reflux menstruel permettrait à des cellules endométriales viables de se retrouver dans la cavité pelvienne, par régurgitations au travers des trompes utérines, et de s’implanter ensuite au niveau du péritoine. Pourtant si près de 90% des femmes ont des débris menstruels présents dans la cavité péritonéale au moment de leurs règles, toutes ne développent pas d’endométriose. Plusieurs explications ont été proposées pour expliquer ce paradoxe : quantité de sang régurgitée plus importante, endomètre normal, environnement péritonéal altéré, déficit immunitaire, adhésion et angiogénèse augmentée. A ce jour, aucune étude biologique n’a pu clarifier les mécanismes générant l’endométriose qui demeure une maladie mal comprise et mal connue, tant par les praticiens que par les patientes. Ce qui explique probablement le délai très long entre le début des symptômes, le diagnostic et la prise en charge. Il est maintenant admis et bien démontré que des facteurs génétiques peuvent contribuer au risque de développer une endométriose [1]. Les études d’expression des gènes et celles visant à identifier des gènes de susceptibilité apportent une alternative intéressante aux études biologiques mécanistiques. Elles ont permis de mettre en évidence de nouvelles voies de signalisation impliquées dans la maladie et élucider la physiopathologie complexe de l’endométriose. Ainsi, les rôles de l’inflammation, de l’hyper œstrogènie locale et de la résistance à la progestérone sont maintenant bien démontrés et corroborent les données montrant que les polymorphismes génétiques des récepteurs à la progestérone et aux œstrogènes peuvent conférer une susceptibilité accrue à développer la maladie. De même si le risque de dégénérescence maligne reste débattu, il semble minime aux vu des mécanismes de protection récemment mis en évidence dans les lésions d’endométriose : répression quasi systématique des gènes du cycle cellulaire et régulation spécifiques des gènes HOX. Il reste néanmoins indispensable de trouver les marqueurs moléculaires qui permettront d’identifier précocement les patientes les plus à risque de développer une endométriose sévère, en particulier digestive et urétérale. Une telle stratégie permettrait à l’avenir d’éviter à ces patientes une chirurgie lourde « quasi carcinologique » certes efficace, mais non dénuée de risques.
CONCLUSION
Ce travail avait pour but de décrire les aspects morphologiques en imagerie par résonance magnétique de l’endométriose pelvienne (adénomyose et endométriose externe). Il s’est déroulé en rétrospectif à l’Hôpital principal de Dakar. L’endométriose pelvienne est constituée de l’adénomyose (encore appelée endométriose interne) et l’endométriose extra utérine. Quarante-sept (47) dossiers de patientes ont été inclus. L’âge moyen était de 39,5 ans, avec des extrêmes de 18 ans et 55 ans. Les indications cliniques étaient variables, dominées par la douleur pelvienne : 18 cas soient 38%. La prédominance de la douleur pelvienne témoigne du caractère souvent handicapant de la pathologie endométriale bénigne (adénomyose et endométriose externe). Nous avons noté 01 seul cas d’infertilité clairement précisé dans les indications ; ceci pouvant être expliqué par le caractère rétrospectif de l’étude et le fait que les bulletins de demandes d’IRM à notre disposition n’aient pas toujours été bien renseignés, notamment par rapport à l’existence ou non d’une infertilité. Chacune des patientes avait bénéficié d’un examen d’imagerie par résonance magnétique du pelvis réalisé avec un appareil de marque Siemens® Avanto® muni d’une antenne superficielle en réseau phasé : Il a été réalisé les séquences suivantes :
o Séquence pondérée en T2 dans les trois plans : axial, sagittal et coronal.
o Séquence pondérée en T1 sans et avec suppression de graisse, sur les plans axial et sagittal.
o Le balisage rectal et vaginal de même que l’injection de produit de contraste n’étaient pas réalisés de façon systématique. Une patiente a bénéficié d’une IRM avec injection de gadolinium en séquence T1 Fat Sat.
L’IRM pelvienne avait trouvé une lésion évocatrice d’endométriose chez chacune des patientes. L’étude analytique des résultats avait montré les données suivantes :
– L’adénomyose (encore appelée endométriose utérine) était trouvée chez 32 patientes.
Elle s’est traduite sous deux formes. La première forme trouvée chez 31 patientes était traduite par un épaississement de la zone jonctionnelle (entre endomètre et myomètre), une asymétrie myométriale, des microkystes sous endométriaux. La seconde forme était une adénomyose kystique hémorragique, de signal hétérogène T2 et en hypersignal T1 persistant après FatSat ; encore appelée adénomyome hémorragique, trouvée chez 01 patiente.
– L’endométriose pelvienne externe était trouvée chez 23 patientes avec les localisations suivantes :
o 09 localisations ovariennes (endométriomes ovariens : traduits par des kystes ovariens à contenu hématique, en hypersignal T1 (de signal supérieur à celui de la graisse), persistant après saturation du signal de la graisse, hypo signal ou signal intermédiaire en T2 réalisant le phénomène de « Shading » chute de signal).
o 12 cas d’endométriose pelvienne profonde (lésions en hyposignal T2, contenant des spots en hypersignal T1 FatSat, des épaississemnt fibreux) intéressant le torus utérin dans 05 cas, les ligaments utérosacrés dans 04 cas , la cloison recto-vaginale dans 02 cas, et le colon sigmoïde dans 01 cas (c’est chez cette patiente que l’injection de gadolinium en pondération T1 FatSat a été réalisée et montré un rehaussement diffus de la lésion pariétale du colon sigmoïde),
o 03 cas d’endométriose tubaire traduite par un hématosalpinx (dilatation tubaire à contenu en hypersignal T1 FatSat),
o 02 cas d’endométriose de la paroi abdominale antérieure (implants dermo hypodermiques et en hypersignal T1 Fat Sat),
– 08 cas associés ont été observés, dont à 03 associations d’endométriomes ovariens et d’endométriose tubaire, 01 association d’adénomyose et d’endométriose pelvienne profonde.
L’imagerie par résonance magnétique a permis une bonne description de l’adémomyose de même que l’endométriose pelvienne extra utérine, ainsi qu’un bon bilan de différentes localisations pelviennes de la maladie, afin de permettre une prise en charge adéquate. La prise en charge thérapeutique de l’endométriose varie selon la plainte principale (douleurs pelviennes ou infertilité), l’âge et le désir ultérieur de grossesse. A titre indicatif chez notre patiente suivie pour infertilité, le traitement devait être exclusivement médicamenteux, ou complété d’une chirurgie conservatrice per laparoscopique. Ce traitement conservateur pouvait être également indiqué chez nos patientes souffrant de douleur pelviennes minimes à modérées, d’endométriomes ovariens, d’endométriose tubaire. Chez nos patientes non désireuses de grossesse ultérieure, dont la symptomatologie était handicapante, la chirurgie pouvait être radicale avec hystérectomie et exérèse des implants d’endométriose. Cette attitude thérapeutique s’explique par le pronostic incertain de la maladie car elle a parfois une évolution chronique avec possibilité de récidives. Une ablation chirurgicale complète et soigneuse, complétée au besoin d’une prise médicamenteuse, est la meilleure protection contre les récidives. Compte tenu du caractère handicapant de la maladie chez bon nombre de patientes et de la nécessité d’un bilan lésionnel et topographique exhaustif afin de proposer un traitement adéquat, nous recommandons :
o La formation d’un plus grand nombre de radiologues dans ce domaine.
o La prescription de l’IRM pelvienne en cas de suspicion d’endométriose pelvienne avec échographie pelvienne non concluante ou insuffisante pour un bilan exhaustif.
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Table des matières
INTRODUCTION
NOTRE ETUDE
I. BUT
II. PATIENTES ET METODES
II.1. Cadre d’étude
II.2. Type d’étude
II.3. Patientes
II.4. Méthode
III. RESULTATS
III.1. Résultats globaux
III.2. Etude descriptive
COMMENTAIRES
I. EPIDEMIOLOGIE
II. ADENOMYOSE
III. ENDOMETRIOSE PELVIENNE EXTERNE
III.1. Endométriomes ovariens
III.2. Endométriose tubaire
III.3. Endométriose pelvienne profonde (EPP)
III.4. Endométriose de la paroi pelvienne
III. 5. Implications thérapeutiques
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
RESUME
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