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Imagerie optique de fluorescence dans le proche infrarouge
Généralités
Les techniques qui nous intéressent ici sont l’Imagerie Optique Diusive de Fluorescence (FDOI pour Fluorescence Diuse Optical Imaging ), et plus particulièrement la Tomographie Optique Diusive de Fluorescence (FDOT pour Fluorescence Diuse Optical Tomography) pour la localisation tridimensionnelle de cibles biologiques. Cette technique connaît un essor important ces dernières années au regard du nombre de publications sur le sujet depuis les années 2000. Elle dière de la DOT par l’utilisation de marqueurs uorescents injectés au patient et capables de se xer sur des cibles biologiques particulières. Les marqueurs uorescents permettent d’augmenter le contraste parfois trop faible en DOT entre les cibles biologiques et les tissus environnants. Les marqueurs uorescents une fois excités par une source extérieure à une longueur d’onde optimale, ont la particularité de ré-émettre un signal de uorescence à une longueur d’onde en général supérieure. Une fenêtre dite thérapeutique de longueurs d’onde dans le rouge et proche infrarouge est généralement privilégiée pour l’imagerie optique de uorescence. Cette notion sera présentée plus en détails par la suite. La FDOT s’intéresse à localiser précisément les marqueurs uorescents à plusieurs centimètres dans les tissus, avec une résolution aujourd’hui d’environ 1 mm [Ntziachristos 04]. Un eort est porté sur la localisation précise des marqueurs, au delà de leur simple détection dans le milieu. Quand la détection se contente de cartes en 2 dimensions (2D), on parle de topographie ; quand la localisation des marqueurs requiert elle une reconstruction en 3 dimensions (3D), on parle alors de tomographie.
Diagramme de Jablonski
La uorescence est un phénomène d’émission lumineuse intervenant lors de la désexcitation d’une molécule uorescente excitée par un éclairage externe. Une molécule est donc qualiée de uorescente si elle absorbe une onde lumineuse à une longueur d’onde spécique et qu’elle en réémet une à une longueur d’onde supérieure (décalage de Stokes [Lakowicz 99]) après un laps de temps de l’ordre de la nanoseconde (on parle du temps de vie de uorescence). La longueur d’onde absorbée est appelée longueur d’onde d’excitation et la longueur d’onde émise par la molécule est appelée longueur d’onde d’émission.
Le diagramme de Jablonski (cf. gure 1.11)) présente les niveaux d’énergie impliqués dans l’absorption et l’émission de lumière par une molécule uorescente.
Spectre d’absorption et de uorescence Un spectre est l’analyse de l’intensité lumineuse en fonction de la longueur d’onde. Dans le cadre de l’imagerie de uorescence, nous en distinguons deux types : le spectre d’émission de uorescence qui est l’intensité du rayonnement de uorescence émis par les molécules excitées en fonction de la longueur d’onde de uorescence et le spectre d’absorption ou d’excitation qui est l’intensité de uorescence en fonction de la longueur d’onde d’excitation.
Comme schématisé sur le diagramme de Jablonski présenté précédemment, l’énergie d’émission est typiquement plus faible que l’énergie d’absorption : la uorescence se produit en général à des énergies plus basses et donc à des longueurs d’onde plus élevées que l’absorption. Une autre propriété fondamentale de la uorescence est que le spectre d’émission est généralement indépendant de la longueur d’onde d’excitation.
Ce résultat, observé dès 1926 par Vavilov, est plus connu sous le nom de loi de Kasha [Kasha 50].
Lors de mesures de la uorescence d’un milieu, divers phénomènes perturbateurs peuvent interférer :
le spectre de uorescence parasite d’un constituant majoritaire du milieu de mesure dont les niveaux d’énergie sont très proches de la uorescence spécique, comme l’autouorescence des tissus par exemple.
la uorescence des ltres (ltre d’excitation, ou ltre de uorescence) et de tout autre élément du système.
Et de moindre importance :
le spectre Raman : lorsque la fréquence de l’onde électromagnétique est très diérente de toute fréquence de vibration de la molécule, il se produit un phénomène de diusion Raman, qui fait intervenir des niveaux énergétiques virtuels. Ce phénomène est de très faible intensité et ne gêne pas l’acquisition du spectre de uorescence. le matériel utilisé peut également être à l’origine de bruit de mesures parasites, tel que le courant noir. Nous détaillerons dans le second chapitre ce phénomène.
Marqueurs fluorescents
Marqueurs endogènes et exogènes
Les marqueurs uorescents (encore appelés uorophores ou agents de contrastes) sont indispensables à l’imagerie optique de uorescence. Il est dicile de décrire tous les uorophores tant ils sont nombreux, aussi nous proposons dans cette partie de présenter les uorophores les plus communs intervenant en imagerie optique de uorescence dans le rouge et proche infrarouge, leurs propriétés et applications.
Il existe deux classes de marqueurs uorescents : endogènes s’ils sont engendrés par le tissu biologique lui-même, ou exogènes s’ils sont étrangers au tissu considéré. Parmi les uorophores endogènes, nous pouvons citer le NADH (forme réduite du Nicotinamide Adénine Dinucléotide), la avine, ou encore la chlorophylle (cf. gure 1.12).
Les uorophores exogènes sont eux introduits dans un milieu an de produire de la uorescence spécique, lorsque aucun uorophore endogène ne peut fournir l’information de localisation d’une cible biologique par exemple, ou encore pour modier les propriétés spectrales du milieu. Les uorophores exogènes comptent parmi eux la uorescéine, la rhodamine et de nombreux autres produits. La famille de uorophores couramment utilisée dans les gammes de longueur d’onde du rouge et du proche infrarouge est la famille des cyanines, dans laquelle gure notamment l’Indocyanine Green (ICG), candidat approprié pour l’imagerie optique de uorescence puisque cet
agent de contraste hydrosoluble bénécie d’ores et déjà d’une autorisation d’injection de la Food and Drug Administration (FDA) ; il s’utilise notamment pour divers examens médicaux chez l’homme, comme les angiographies, ou l’imagerie vasculaire du cerveau, les premiers tests remontant déjà à plus de vingt ans [Frangioni 03].
Spécificité et stabilité des marqueurs exogènes
Fréquemment, les molécules d’intérêt (par exemple présentes au sein de tumeurs) ne sont pas uorescentes, ou leur uorescence intrinsèque n’est pas adaptée au système d’imagerie utilisé. Dans ce cas, des marqueurs uorescents sont injectés dans le but de pointer les molécules d’intérêt. Le nombre de uorophores pouvant être utilisés pour cibler les molécules est considérable ; un grand nombre est répertorié dans le catalogue Molecular Probes [Haugland 96].
Les uorophores exogènes peuvent être associés à des ligands spéciques an que l’ensemble ligand-uorophore (ou encore marqueur ) aille se xer à une cible conjuguée du ligand. Les uorophores peuvent également être associés à des vecteurs non spéciques (nous parlons alors habituellement de traceur pour l’ensemble vecteur- uorophore, mais le terme marqueur pourra être utilisé par abus de langage par la suite). Les dits traceurs n’ont pas la spécicité des marqueurs, mais ont tout de même tendance à s’accumuler autour des tumeurs qui demandent un apport en hémoglobine plus important pour croître.
Enn, même pour les marqueurs dits spéciques, capables de cibler la tumeur, les marqueurs et traceurs classiques sourent toujours de non-spécicité (marqueur uorescent injecté non xé sur sa cible biologique).
Ratio tumeur/tissu sain An de juger la spécicité des marqueurs uorescents, les biologistes et chimistes utilisent souvent la notion de ratio, que nous pouvons simplement dénir comme suit : le ratio rT;N entre une zone tumorale T et une zone saine N est égal à T N ( T et N sont généralement les intensités moyennes en photons par pixel des zones T et N sur l’image détectée). La uorescence mesurée sur la zone saine provient de l’autouorescence naturelle des tissus, mais également de la uorescence dite non spécique du marqueur qui ne s’est pas xé à sa cible.
La spécicité et les performances des marqueurs pourront être déduites de la valeur du ratio rT;N. Dans la bibliographie sur les marqueurs pour l’imagerie optique de uorescence, nous trouvons des ratios tumeur/tissu sain en géométrie de réexion variant globalement entre 3 (pour les traceurs non spéciques) et 15 [Jin 07] (pour les marqueurs plus spéciques, voir gure 1.13).
La spécicité est un premier critère important dans le choix des marqueurs en imagerie optique de uorescence ; leur résistance et la sauvegarde de leur propriétés uorescentes sous illumination constante est toute aussi importante. Quasiment tous les uorophores sourent de photoblanchiment (ou photobleaching en anglais) sous illumination constante, c’est-à-dire de destruction photochimique du uorophore. La photostabilité peut dépendre de l’environnement d’accueil du uorophore : par exemple, la photo-stabilité peut parfois être améliorée dans un milieu pauvre en oxygène, tandis que dans certains milieux la présence d’oxygène n’aura aucun eet [Lakowicz 99]. En pratique nous nous intéresserons à la photo-stabilité des marqueurs que nous utiliserons en expérimentation, et la testerons sous illumination constante.
De part la mise au point de marqueurs résistants face au phénomène de photoblanchiment, un eort important est apporté pour mettre au point des marqueurs uorescents au ciblage biologique performant en améliorant la brillance des marqueurs, ou encore en développant de nouveaux marqueurs dits activables.
Marqueurs activables
Comme expliqué dans la partie précédente, le contraste qu’ore la plupart des marqueurs uorescents s’avère souvent médiocre, et soure du problème de non-spécicité.
En eet, une large partie des marqueurs ne se xe pas à la cible biologique, mais reste en circulation dans le réseau sanguin, ou diuse dans divers organes. Diérentes solutions au problème de non-spécicité ont été proposées depuis 1999, notamment avec le travail de Weissleder et al. [Weissleder 99]. Ils ont mis au point des marqueurs dont la base est constituée de chaînes peptides : la uorescence des marqueurs n’est alors activée qu’une fois la chaîne peptide coupée. En imagerie du petit animal, la présence d’une activité enzymatique dite protéolytique (soit avec coupure de peptides) dans certaines zones du sujet a permis d’activer ces marqueurs .
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Table des matières
Introduction générale
1 Imagerie Optique en milieux diffusants
1.1 Introduction
1.1.1 Systèmes d’imagerie adaptés à l’oncologie
1.1.2 Imagerie optique de fluorescence dans le proche infrarouge
1.1.3 Marqueurs fluorescents
1.2 Interaction de la lumière avec les tissus biologiques
1.2.1 Absorption et fenêtre thérapeutique
1.2.2 Diusion
1.3 Propagation de la lumière
1.3.1 Luminance
1.3.2 Équation de transfert radiatif
1.3.3 Approximation de la diusion
1.4 Détection et localisation de tumeurs
1.4.1 Exemples : les cancers du sein et de la prostate
1.4.2 Détection et localisation
1.5 Élimination de l’autouorescence
1.5.1 Problématique
1.5.2 État de l’art
1.5.3 Solution proposée : la séparation de spectres
2 Dispositif expérimental et supports d’étude
2.1 Système d’acquisition
2.1.1 Matériel
2.1.2 Écartement sources-détecteurs
2.1.3 Acquisitions
2.2 Expérimentation
2.2.1 Fantômes optiques
2.2.2 Expérimentation in vivo sur souris
2.2.3 Marqueurs uorescents utilisés
2.3 Simulations : exemple du sein
2.3.1 Théorie
2.3.2 Exemple
3 Étude des sources fluorescentes
3.1 Fluorescence naturelle des tissus
3.1.1 Autouorescence dans le visible
3.1.2 Autouorescence dans le proche infrarouge
3.2 Origine de l’autouorescence dans le rouge
3.2.1 Origine exogène
3.2.2 Origine endogène
3.3 Comportement spectral de l’autouorescence
3.3.1 Variation des spectres
3.3.2 Inuence de l’illumination
3.4 Comportement spectral des marqueurs
3.4.1 Inuence du milieu sur les marqueurs
3.4.2 Inuence du système expérimental
4 Séparation de spectres
4.1 Séparation de spectres et autouorescence
4.1.1 Premières approches
4.1.2 Séparation de sources aveugle
4.2 Factorisation en Matrices Non-négatives
4.2.1 Algorithme classique
4.2.2 Non-unicité de la décomposition
4.2.3 Distorsion des spectres de uorescence
4.3 Propositions de régularisations
4.3.1 Étude de l’inuence de l’initialisation
4.3.2 Prise en compte de l’information a priori sur les spectres
4.3.3 Apport de contraintes de parcimonie spatiale
5 Résultats sur fantômes et données in vivo
5.1 Inuence de l’écart sources-détecteurs
5.1.1 Sur fantôme optique
5.1.2 Résultats in vivo
5.2 Un seul type de marqueur uorescent utilisé
5.2.1 Détection d’une seule tumeur
5.2.2 Détection de plusieurs tumeurs
5.3 Multiplexage
5.3.1 Deux marqueurs en capillaires
5.3.2 Injection sur souris
5.4 Séparation de spectres et reconstructions FDOT
5.4.1 Méthode de reconstruction
5.4.2 Exemple sur fantôme optique
Conclusion et perspectives
A Spectromètre Andor : che technique
B Caméra CCD Andor : che technique
C Caractérisation Spectro+CCD
C.1 Linéarité du système
C.2 Bruits de lecture et d’obscurité
C.2.1 Bruit de lecture
C.2.2 Bruit d’obscurité
C.2.3 Le courant d’obscurité
D Détermination des propriétés optiques
D.0.4 Présentation de la chaîne d’acquisition TCSPC
D.0.5 Interprétation des TPSF
D.0.6 Détermination des paramètres optiques à partir des TPSF
E Protocole d’expérimentation sur souris
F Caractéristiques du Vert d’indocyanine
G Comparaison des méthodes
G.0.7 La SVD
G.0.8 Méthode séparation bayésienne de sources positives (BPSS)
G.0.9 La FMN
H Démonstration du Théorème 1
I Exemple tumeur réelle marquée par de l’IR800
Liste des publications et communications
I.0.10 Revues à comité de lecture
I.0.11 Congrès internationaux
I.0.12 Congrès nationaux
I.0.13 Brevets
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