Imagerie optique biomédicale et contraste optique

Les méthodes optiques connaissent un développement spectaculaire dans le cadre de l’imagerie biomédicale. Parmi ces méthodes l’OCT (pour Optical Coherence Tomography) a joué un rôle particulier : dès les années 1995 cette méthode publiée en 1991 faisait l’objet d’un développement commercial et équipait les premiers hôpitaux (par exemple l’hôpital des XV − XX à Paris). Ce développement concernait l’ophtalmologie et plus précisément les diagnostics rétiniens. De nombreuses équipes ont tenté d’étendre le champ de l’OCT à d’autres diagnostics en dermatologie et en cancérologie. Pour ces tissus très diffusants le chemin était plus périlleux et les résultats ne font pas encore partie des méthodes utilisées de façon routinière à l’hôpital. A l’institut Langevin (Paris) a été développée une approche particulière de l’OCT : l’OCT Plein Champ (FF-OCT pour Full Field OCT). Cette approche se démarque de l’OCT traditionnelle par sa résolution qui est supérieure de plus d’un ordre de grandeur dans les trois dimensions. Cette résolution est de l’ordre du micromètre. Elle est très voisine de celle que les pathologistes utilisent pour analyser les lames d’histologie. De ce fait, depuis quelques années, l’institut Langevin et la startup LLTech ont entrepris de nombreuses études en collaboration avec des hôpitaux français ou étrangers pour réaliser des « coupes virtuelles » dans des tissus sains ou pathologiques de différents organes  . Les résultats obtenus sont plus qu’encourageants en termes de sensibilité et de spécificité. Les sensibilités et spécificités atteignent des valeurs comprises entre 80 et plus de 90 %. Cependant, pour introduire une nouvelle méthode apte à susciter l’intérêt du monde médical il faut pouvoir faire beaucoup mieux que les méthodes actuelles. Si c’est le cas en ce qui concerne le temps de mesure (par rapport aux coupes histologiques) les pourcentages de sensibilité et de spécificité doivent être encore améliorés. Au cours des travaux de recherche décrits dans cette thèse nous nous sommes attachés à développer de nouvelles approches tomographiques, conduisant à de nouvelles formes de contraste susceptible d’enrichir les images d’OCT plein champ pour une meilleure qualité du diagnostic.

Imagerie des milieux biologiques

Utiliser la lumière afin d’étudier les milieux biologiques est une idée qui remonte à plusieurs siècles. Au 19e siècle de premières études en transmission ont été effectuées sur des tissus testiculaires et mammaires. Cependant, ce n’est que depuis une vingtaine d’année que l’application de l’optique à l’imagerie médicale fait l’objet d’une recherche intensive. Malgré de nombreuses avancées, il n’existe actuellement que peu de méthodes optiques utilisées de manière courante par les médecins. Pour les examens médicaux ils préfèrent l’utilisation de méthodes comme l’échographie acoustique, l’imagerie à résonnance magnétique (IRM) ou les rayons X. Cette difficulté d’application de l’optique à l’imagerie médicale vient de la complexité de la propagation des ondes électromagnétiques aux longueurs d’onde du visible ou proche infra-rouge dans les milieux biologiques. En effet, les milieux biologiques possèdent une très grande variété de structures aux tailles et propriétés optiques différentes (cellules, noyaux cellulaires, organelle, protéines, collagènes, etc.). Chacune de ces structures va absorber et diffuser la lumière de manière différente. Cette différence rend difficile la description exacte de la propagation des ondes lumineuses dans les tissus biologiques. Dans ce chapitre, nous allons tout d’abord introduire les grandeurs qui rendent compte de la propagation des ondes dans les tissus : l’absorption, la diffusion et son anisotropie. Ces grandeurs sont essentielles pour décrire statistiquement l’optique des milieux biologiques. Ensuite, nous présenterons brièvement les principales méthodes d’imagerie optique actuellement développées pour les milieux biologiques .

Ondes en milieu biologique et grandeurs optiques moyennes

La description exacte de la propagation de la lumière dans les milieux biologiques est un problème très complexe. Afin de simplifier la description de ces milieux la démarche communément utilisée est de considérer uniquement le flux d’énergie qui se propage dans le milieu et de décrire cette propagation grâce à principalement 4 coefficients décrivant les propriétés moyennes du milieu : l’indice de réfraction, le coefficient d’absorption, le coefficient de diffusion et le coefficient d’anisotropie.

L’indice de réfraction

L’indice de réfraction n est une grandeur sans dimension dépendante de la longueur d’onde. Sa partie réelle décrit la vitesse de phase de la propagation la lumière dans un milieu. Cette grandeur est importante, elle permet notamment de définir la notion de chemin optique. Dans les milieux biologiques qui sont principalement composés d’eau, pour les longueurs d’onde du visible et du proche infra-rouge, l’indice optique est compris entre 1, 33 (l’indice de l’eau) et 1, 5 pour les tissus peu hydratés [1].

Le coefficient de diffusion
La diffusion  caractérise le phénomène par lequel un milieu va dévier une fraction de l’énergie d’un flux incident initialement dans une direction vers une autre direction sans l’absorber. A l’échelle locale, le phénomène de diffusion peut être décrit comme l’interférence entre le champ électromagnétique incident et le champ électromagnétique généré par l’oscillation locale des charges due au champ incident. Ainsi, le phénomène de diffusion est étroitement lié à la géométrie du diffuseur ainsi qu’à son indice de réfraction.

Ainsi, le coefficient de diffusion µd correspond à l’inverse d’une longueur caractéristique de diffusion nommée libre parcours moyen de diffusion ld. Il correspond à la distance moyenne entre deux évènements de diffusion. A l’aide du libre parcours moyen de diffusion, en fonction de l’épaisseur du milieu traversé L on peut distinguer trois régimes de propagation dans les milieux diffusant :
L ≪ ld : régime balistique : le flux d’énergie incident est très peu dévié de sa direction initiale. L’optique géométrique s’applique et les méthodes d’imagerie classique peuvent être utilisées.
L ∼ ld : régime de diffusion simple
L ≫ ld : régime de diffusion multiple : les photons subissent plusieurs évènements de diffusion. Dans ce cas, la répartition de l’énergie dans le milieu peut être calculée de manière simplifiée par la résolution d’une équation de diffusion.

Dans les tissus biologiques le coefficient de diffusion µd varie en général de 50 à 500 cm−1 (sauf dans certains cas particuliers comme l’œil).

Techniques d’imagerie optique des milieux biologiques 

De nombreuses méthodes optiques ont été développées afin de pouvoir imager à l’intérieur des milieux diffusants comme les milieux biologiques. Ces méthodes peuvent être distinguées en 2 grands groupes. Le premier groupe rassemble les méthodes qui utilisent les photons multi-diffusés afin de construire une image dans le milieu. Le second groupe utilise les méthodes qui cherchent à sélectionner uniquement les photons qui n’ont été diffusés qu’une seule fois. Cela permet d’utiliser l’optique géométrique et des méthodes d’imagerie «classique». Dans ce chapitre nous allons faire un bref inventaire des principales méthodes existantes.

Imagerie des photons multi-diffusés 

Tomographie et spectroscopie optique diffuse 

La Tomographie Optique Diffuse (DOT) [6] est une technique purement optique. Son principe est de cartographier le coefficient de diffusion réduit µ′d et le coefficient d’absorption µa à l’intérieur du milieu diffusant. Cette cartographie s’effectue à partir de la mesure de la réflectance en surface ou parfois de la transmittance. Ensuite l’estimation des deux coefficients s’effectue habituellement par la résolution d’un problème inverse à partir de l’Equation de Transfert Radiatif (ETR) ou de l’une de ses approximations comme l’équation de diffusion. A l’aide de ce type de méthode, la résolution accessible est une fraction de la profondeur d’imagerie (par exemple, une résolution de 1 cm à 5 cm de profondeur). Cette résolution est moins bonne que celle des techniques comme l’IRM ou l’échographie mais l’avantage est de pouvoir accéder aux propriétés optiques. Notamment, cette méthode s’applique bien à la localisation de sources de fluorescence. Couplée à de la spectroscopie (Spectroscopie Optique Diffuse (DOS)) elle permet de faire de l’imagerie fonctionnelle. Elle est très utilisée dans le cas du cerveau [7], notamment en mesurant localement le taux d’oxygénation de l’hémoglobine.

Imagerie multimodale : optique/acoustique 

Comme nous l’avons mentionné, l’un des principaux désavantages de la tomographie optique diffuse est le fait que la résolution est dégradée avec la profondeur. Afin d’améliorer la résolution en profondeur, des approches multimodales ont été développées (avec notamment l’acousto-optique et la photo-acoustique). L’idée de ces méthodes est de coupler l’optique à l’acoustique. Le but est d’accéder aux propriétés optiques dans les milieux diffusants avec une résolution donnée par l’acoustique (typiquement du millimètre à 5 cm dans les tissus biologiques).

L’acousto-optique Le principe de l’imagerie acousto-optique a été introduit par D. Dolfi et F. Micheron [8] en 1989. L’idée est d’utiliser les ultrasons afin de marquer les photons passant par le point focal ultrasonore et de les détecter de manière optique. En effet, les photons passant par le point focal acoustique vont subir une modulation de leur phase. Cette modulation est due, d’une part, à l’effet Doppler engendré par le déplacement des diffuseurs et d’autre part, à la modulation locale de l’indice de réfraction due aux cycles de compression-détente à la fréquence acoustique de l’onde ultrasonore. Ainsi, en ne détectant que les photons décalés en fréquence, il est possible d’obtenir une résolution millimétrique (donnée par la tâche focale acoustique) avec un contraste optique à des profondeurs allant jusqu’à 5 cm. Cependant, la difficulté principale de cette méthode réside dans la détection sélective des photons modulés. Les techniques développées à cette fin sont nombreuses, une revue complète de ces techniques est disponible aux références [9,10].

La photo-acoustique De la même manière que pour l’imagerie acousto-optique, l’imagerie photo-acoustique a pour but de tirer avantage de la bonne résolution acoustique en profondeur tout en ayant accès à un contraste optique. Le principe est basé sur l’effet photo-acoustique connu depuis les années 1880 [11]. Cet effet décrit comment, lorsqu’un milieu est illuminé de manière non-stationnaire, les absorbeurs présents dans le milieu (qui convertissent la majorité de l’énergie absorbée en chaleur) engendrent localement une élévation de température et donc une dilatation locale du milieu qui génère une onde acoustique détectable à l’aide d’un transducteur acoustique. Ainsi, cette méthode permet de détecter de manière acoustique un contraste optique d’absorption avec la résolution de l’acoustique. De plus, la simplicité de la détection acoustique a grandement aidé au développement de cette technique. A l’heure actuelle elle est de loin la plus développée en optique diffuse avec notamment de très bons résultats in vivo [12].

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Table des matières

Introduction
I Imagerie optique biomédicale et contraste optique
1 Imagerie des milieux biologiques
1.1 Ondes en milieu biologique et grandeurs optiques moyennes
1.1.1 L’indice de réfraction
1.1.2 Le coefficient d’absorption
1.1.3 Le coefficient de diffusion
1.1.4 Le facteur d’anisotropie
1.1.5 Le coefficient d’extinction
1.2 Techniques d’imagerie optique des milieux biologiques
1.2.1 Imagerie des photons multi-diffusés
1.2.2 Imagerie des photons balistiques
2 OCT plein champ et contrastes accessibles
2.1 Principe de la tomographie de cohérence optique
2.1.1 Interférométrie et cohérence temporelle
2.1.2 Tomographie de cohérence optique « classique »
2.1.3 Différentes approches de tomographie de cohérence optique à balayage
2.2 L’OCT plein champ
2.2.1 Principe
2.2.2 Performances
2.2.3 OCT plein champ dans les milieux biologiques
2.2.4 Applications
2.3 OCT plein champ : contrastes optiques accessibles
2.3.1 Polarisation et biréfringence
2.3.2 Mesure des indices de réfraction locaux
2.3.3 Mesure des coefficients de diffusion locaux
3 Les nanoparticules d’or : nouvel agent de contraste pour l’OCT plein champ
3.1 Propriétés optiques des nanoparticules d’or
3.1.1 Résonnance de plasmon localisé de nanoparticules sphériques : absorption et diffusion
3.1.2 Les nanoparticules d’or comme source thermique locale
3.2 Détection de nanoparticules d’or unique par OCT plein champ à 2 longueurs d’ondes
3.2.1 Principe
3.2.2 Montage expérimental
3.2.3 Résultats
3.3 Modulation locale de l’indice de réfraction par chauffage de nanoparticules d’or
3.3.1 Principe
3.3.2 Montage expérimental
3.3.3 Résultats
II Contraste mécanique
4 Mécanique dans les milieux biologiques
4.1 Introduction à la mécanique des milieux élastiques mous
4.1.1 Les modules mécaniques
4.1.2 Propagation d’ondes mécaniques
4.2 Elastographie et imagerie biomédicale
4.2.1 Méthodes statiques
4.2.2 Méthodes quasi-statiques
4.2.3 Méthodes dynamiques
5 Elastographie statique par corrélation d’image numérique
5.1 Principe de la corrélation d’images
5.1.1 Corrélation et estimation du déplacement
5.1.2 Méthode locale de corrélation d’images
5.1.3 Méthode globale de corrélation numérique 3D
5.1.4 Quelques mots sur les performances
5.2 Montage et méthode expérimentaux
5.2.1 Montage expérimental
5.2.2 Méthode expérimentale
5.3 Résultats expérimentaux
5.3.1 Corrélation d’images 2D classique
5.3.2 Corrélation d’images 3D basée sur une méthode d’éléments finis
5.3.3 Vers une amélioration du montage d’élastographie statique
6 Elastographie quasi-statique par modulation des interférences locales
6.1 Mesure de déplacements par interférométrie LASER homodyne
6.1.1 Principe de l’interférométrie homodyne
6.1.2 Mesure de petits déplacements
6.1.3 Mesure de déplacements quelconques
6.1.4 Quelques mots sur l’interférométrie hétérodyne
6.2 Mesure de déplacement par OCT plein champ
6.2.1 Problématique
6.2.2 Solutions proposées
6.2.3 Simulations numériques et résultats expérimentaux
6.3 Application à l’élastographie
6.3.1 Résultats sur échantillons fins : déformation globale
6.3.2 Résultats avec une modulation magnétique in situ : déformation locale
7 Elastographie par suivi de la propagation des ondes de cisaillement par OCT plein champ
7.1 Estimation du module de cisaillement à partir du film de la propagation de l’onde
7.1.1 Etat de l’art
7.1.2 Les ondes guidées
7.1.3 Cas de l’OCT plein champ
7.2 Montage expérimental et génération de l’onde de cisaillement
7.2.1 Génération d’onde de cisaillement par pression de radiation
7.2.2 Montage expérimental
7.2.3 Performances
7.2.4 Méthode
7.3 Détection de l’onde de cisaillement par OCT plein champ et mesure de la vitesse locale
7.3.1 Détection de l’onde de cisaillement par OCT plein champ
7.3.2 Estimation de la vitesse locale
7.3.3 Quelle résolution attendre ?
7.4 Résultats expérimentaux
7.4.1 Résultats sur les échantillons tests
7.4.2 Résultat sur des échantillons biologiques : échantillons de cerveau de rat ex vivo
Conclusion

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