Généralités
Depuis les années 90, l’Etat ne constitue qu’une entité abstraite, presque lointaine, qui n’arrive pas à protéger ses ressortissants. Les organes juridiques qui devraient constituer un rempart pour les salariés tendent à devenir des institutions qui les dépouilleraient presque. De l’autre coté, l’Entreprise leur prend leur force de travail. Cette situation est vécue comme une fatalité à laquelle il faut se résigner, puisqu’il n’y a rien d’autre à faire. Le fait est que ces salariés paraissent avoir été déterminés à vivre ces conditions (cela étant valable quand on considère leurs origines sociales, leurs parcours de vie, etc.). Il est entendu que tout cela n’ambitionne pas une généralisation abusive. En guise de contre partie à cette assertion, il faut dire que les efforts déployés par ces individus sont très louables, et les manières avec lesquelles ils vivent les difficultés de la vie, relèvent presque du miracle.
D’ores et déjà, il faut dire que le monde du travail, surtout celui de l’ouvrier est empreint de « dysfonctions » qui méritent une attention particulière. Il semble que le Malgache patine : il travaille beaucoup, mais il n’arrive pas à satisfaire ses besoins et à avoir une vie décente. Le marché est inondé de produits qui sont à priori à bas prix, mais tout le monde ne peut pas se les procurer. La classe dirigeante arbore et impose même des models de vie qui sont hors de portée de la population qui, pour avoir un peu de dignité, se rue vers des « sous produits », presque des déchets de la société de consommation (les friperies, les appareils électroménagers d’occasion, etc.). Ces éléments constituent en soi des preuves de la volonté d’atteindre la « modernité ». Nous nageons donc en pleine société de consommation de masse (une société de consommation de masse de « produits de seconde zone » ). Pourtant, Selon M. PARODI « le développement d’une consommation de masse est parallèle à l’expansion de la classe moyenne et à l’accroissement de son importance politique ». Il faut alors constater sur le terrain l’affirmation ou l’infirmation d’une telle assertion.
La société malgache et les problèmes de l’emploi à l’heure de la mondialisation
La crise de 2002 a beaucoup affecté le marché du travail à Madagascar. Selon l’INSTAT , 385 400 sont au chômage au cours de cette année. Aucun milieu n’a pu échapper à cette montée du chômage. Les femmes ont été les principales victimes de ce phénomène. Etant donnée cette situation, il nous a paru opportun de mener une étude sur l’état général du travail à Madagascar, mais surtout, sur les conditions de vie des salariés malgaches. Pour ce faire, il a fallu élaborer des démarches que nous avons voulu être scientifiques, dans le cadre de notre cursus dans le Département de Sociologie. Ainsi, cette première partie va traiter d’une part de la façon dont le phénomène de travail va être appréhendé, et d’autre part, la présentation de quelques aspects de la réalité concernant le travail. Dans la modernité, nous ne pouvons plus nous référer à des certitudes établies pour régler les conflits de valeurs. Le problème des limites et du fondement des limites des comportements individuels fait surgir un besoin de droit. Faute d’une conception unanimement acceptée du bien social, c’est en terme de justice que se pose le problème du lien social. La conception libérale de la société donne la priorité au juste sur le bien.
Pour les théories communautaristes de la société, l’individu est toujours socialisé, membre d’une communauté de vie intersubjective. Les individus sont constitués et pénétrés par la culture, les traditions et les institutions de la société à laquelle ils appartiennent. La liberté doit donc avoir un caractère communautaire. Son lieu n’est pas l’individu isolé, mais la société qui est le médium de l’individuation. La liberté réside dans les structures, les institutions, les pratiques et les traditions d’un tout social plus vaste que l’individu.
Ainsi, pour chercher sa subsistance, l’homme doit renoncer à une partie de sa vie, et l’offrir à l’Entreprise. Cette perspective amène à demander quelle partie de sa vie l’homme serait prêt à sacrifier et pour combien de temps.
Approche scientifique du travail
Le phénomène du travail ne peut être appréhendé sans mensuration, c’est à dire qu’il doit y avoir une quantification, pour pouvoir peser la profondeur d’un sujet donné. Selon des sociologues et des théoriciens, le temps de travail est l’élément le plus à même de rendre compte du phénomène de travail . Toutefois, l’évolution de la sociologie en général accorde une place plus importante aux considérations qualitatives, qui sont sensées rendre compte des phénomènes, avec plus de précision. Quoi qu’il en soit, la bataille entre les tenants de ces deux méthodes est encore d’actualité. Depuis les années 80, une série de travaux ont souligné l’ambiguïté inhérente à l’individualisme des sociétés démocratiques. D’une part, l’individu y est émancipé du poids des traditions et de la tutelle des hiérarchies ; il y gagne une liberté d’indépendance. Mais d’autre part, là où chaque individu tente de poursuivre ses buts en toute indépendance, il y a de moins en moins de tissu social, de plus en plus de conflits entre les intérêts particuliers. On assiste à une atomisation du social ou à ce que Durkheim nommait «l’anomie », c’est-à-dire la carence des institutions à fournir des normes assurant la coopération et le lien social.
Instruments d’analyse
Pour notre part, nous avons choisi de condenser ces deux éléments, afin d’obtenir plus de précision dans notre investigation. Voilà ce qui justifie l’existence des entretiens par questionnaire standardisé d’une part, des entretiens directs avec les enquêtés d’autre part, mais aussi les focus de groupe qui sont très importantes, dans la mesure où il existe plus d’interaction entre le chercheur et l’enquêté (ou les enquêtés).
Tout ceci pour dire que notre vision s’est voulue être très élargie, sans trop basculer vers des considérations qui nous dépassent encore. Alors, dans une perspective socio anthropologique, nous avons mené une étude comparative entre deux grandes sociétés malgaches (du moins en raison de leur implantation dans l’île. Par ailleurs nous verront plus loin qu’à la tête de ces deux géants, il y a des étrangers) qui sont des leaders dans leurs domaines respectifs.
Puisque notre domaine d’étude concerne le travail, les méthodes utilisées par la sociologie du travail, la sociologie des organisations (ce sont deux disciplines complémentaires) et la sociologie de l’Entreprise ont été exploitées. C’est ainsi que nous avons procédé par une analyse des institutions (l’Etat, la société civile, les syndicats, etc.), des systèmes (le mode de gestion, les relations, etc.) et aussi les opinions (les sollicitations, les critiques, etc.). Il s’agit ici d’une démarche structuro fonctionnaliste qui tente de cerner tous les éléments qui ont trait à la vie d’une société.
L’individualisme méthodologique est aussi un instrument très prisé. Il permet une approche plus « intimiste », et donc plus réaliste, puisque les gens sont analysés dans leur subjectivité, c’est à dire que le chercheur doit faire en sorte que la spontanéité des enquêtés se mette en scène. Par ailleurs, cela ne nous a pas empêché de porter un regard holistique sur le problème. Procéder par « le tout » pour atteindre « le particulier » constitue encore un moyen de connaître certains traits des faits sociaux. Ces points de vue croisés vont former nos analyses dans la présente étude.
Enfin, il y a la psychosociologie, très usitée dans la sociologie du travail, en ce sens qu’elle traite d’un groupe social restreint. Ce qui dans notre cas est très pratique, parce que étant donnée les moyens à notre disposition, de même qu’à notre niveau intellectuel, il n’est pas encore possible d’appréhender un groupe social plus vaste. N’oublions pas les éléments d’analyse de MARX qui selon nous est un grand précurseur dans l’étude du travail humain.
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : La société malgache et l’emploi, à l’heure de la mondialisation
Chapitre 1 : Approche scientifique du travail
Chapitre 2 : Etat des lieux sur la situation socioéconomique et du travail
Conclusion partielle
DEUXIEME PARTIE : La rupture du lien social comme conséquence de l’organisation du travail
Chapitre 3 : Les conditions socio-économiques de travail
Chapitre 4 : Les conditions techniques de travail
Chapitre 5 : Les stratégies pour affronter la pauvreté
Conclusion partielle
TROISIEME PARTIE : Les tentatives de promotion des conditions de vie
Chapitre 6 : Le monde du travail et ses évolutions à travers la mondialisation : perspective d’avenir
Chapitre 7 : Prospectives pour une amélioration du niveau de vie
Conclusion partielle
CONCLUSION GENERALE
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
ANNEXES