Identification taxonomique à l’aide d’outils moléculaires

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Réponses des organismes face à ces modifications

Ces nombreux changements exercent une pression considérable sur les populations.
Face à ces modifications brutales de leur environnement, le devenir des organismes dépend de leur capacité à répondre, c’est-à-dire de leur aptitude à s’accommoder et à s’adapter à ces changements, afin d’éviter l’extinction.

Les différentes réponses

Plusieurs types de réactions peuvent être attendus en réponse à ces modifications, dont la gamme et l’amplitude diffèrent selon les organismes.
Ils peuvent migrer vers un habitat plus favorable, lorsque les corridors biologiques sont présents (Araujo et al., 2006; Bancroft et al., 2008). Une étude qui a évalué les impacts du réchauffement climatique et de la fragmentation de l’habitat sur plusieurs espèces d’herbacées forestières observe un décalage de l’aire de distribution vers le Nord (Skov, Svenning, 2004)
(Figure 1.5). Le même genre d’observation a été noté chez de nombreux organismes, tels les lépidoptères (Hill et al., 2002; Mikkola, 1997), les amphibiens (Araujo et al. 2006), et les oiseaux (Thomas, Lennon, 1999).
Figure 1.5 : a : Localisation actuelle des 26 espèces d’herbacées forestières (points), et les migrations futures (flèches) suite au réchauffement climatique ; b : corridors biologiques potentiels pour la migration des aires de répartitions selon le modèle élaboré par (Skov, Svenning, 2004)
Un décalage phénologique est aussi observé en réponse aux modifications de leur environnement, particulièrement face au réchauffement climatique. Plusieurs critères indiquent l’allongement de la saison de croissance végétative chez les plantes de l’hémisphère Nord par exemple (Parmesan, 2006), comme le bourgeonnement précoce des cerisiers du Japon, ou encore les période de récolte de raisins en Europe (Menzel, Dose, 2005). La date d’émergence des papillons étant fortement corrélée aux températures, de nombreuses études ont observé un décalage phénologique suite aux réchauffement climatique (Roy, Sparks, 2000). Certains amphibiens sont capables de décaler leur période de reproduction (Blaustein et al., 2001; Carroll et al., 2009), comme la grenouille Rana sylvatica qui face au réchauffement climatique, parade et se reproduit plus tôt (Beebee et al., 2002; Gibbs, Breisch, 2001).
Face à des modifications de leur environnement, la grande majorité des organismes montrent une variation de leurs traits d’histoire de vie. Des paramètres morphologiques tels une taille réduite à la métamorphose, des variations de la longueur des membres postérieurs ont été observé chez les amphibiens (Blouin, Brown, 2000; Brady, Griffiths, 2000; Negovetic et al., 2001). En réponse au réchauffement climatique, le morphotype réticulé est plus fréquemment observé que le linéaire chez le lézard vivipare (Figure 1.6) (Lepetz, 2009; Lepetz et al., 2009).
Figure 1.6 : Variation du pattern dorsal chez le lézard vivipare. Morphotype linéaire à gauche, réticulé à droite (Lepetz, 2009).

Les processus mis en place

La nature de ces réponses est différente. Certaines sont dues à des mécanismes de plasticité phénotypique, tandis que d’autre sont dues à de l’évolution génétique et donc à de l’adaptation locale (Davis et al., 2005; Jump, Penuelas, 2005). Depuis quelques années, l’origine de ses variations est devenue une question centrale en écologie évolutive ainsi qu’en génétique (Gotthard, Nylin, 1995). Cet intérêt se traduit par de nombreuses études expérimentales et théoriques sur le sujet, sur une large gamme de taxa et de traits, incluant les caractères morphologiques et d’histoire de vie (Groot et al., 2005; Lind, Johansson, 2007; Newman, 1992; Newman, 1988; Plenet et al., 2000a; Sultan, 1996). Lorsque les variations environnementales sont rapides et à court terme, seuls les organismes capables d’une grande plasticité phénotypique pourront survivre (Scheepens et al., ; Tully, Ferriére, 2008). En revanche, à moyen et long terme, ils peuvent s’adapter au nouvel environnement par microévolution.

La Plasticité phénotypique

La plasticité phénotypique est définie comme l’aptitude d’un organisme à réagir aux ressources environnementales disponibles en changeant de forme, d’état, de mouvement, ou de taux d’activité (West-Eberhard, 2003). Cette plasticité, appelée aussi acclimatation ou accommodation, permet à un génome d’ajuster ses traits à des conditions environnementales différentes (Sultan, 2000). En effet, c’est la capacité d’un génotype à produire différents phénotypes en réponse à un changement des conditions environnementales (Garland Jr, Kelly, 2006), qu’il s’agisse de paramètres abiotiques tels que la pluie, la température, la lumière ou la disponibilité en nourriture, ou de paramètres biotiques tels que la présence de compétiteurs ou encore de prédateurs. C’est donc une variation intra-individuelle sous l’influence à la fois du génome et de l’environnement (Williams, 1992). Ainsi, elle permet une acclimatation plus rapide et flexible aux changements environnementaux que l’adaptation génétique (Sultan, 2000). Une faible variabilité génétique entraine une faible plasticité, car le génome sera en mesure de produire peu de phénotypes (Chevin et al., 2010). La plasticité peut être une réponse active lorsque le changement de phénotype atténue l’effet du niveau sub-optimal des ressources, ou passive lorsque le changement est simplement une fonction d’une réduction ou d’une augmentation des ressources (West-Eberhard, 2003). La plasticité permet souvent à l’individu d’améliorer sa survie et/ou sa fitness dans différentes conditions (Marshall et al., 1986; Scheiner, 1993; Sultan, 1996; Sultan, 2001), mais pas toujours (définition de la « plasticité à fitness neutre ») (Schlichting, Pigliucci, 1998). Cette réponse positive, est souvent appelée « plasticité adaptative », néanmoins, certains auteurs préférant éviter toute confusion avec « adaptation » au sens génétique du terme utilisent plutôt l’expression « plasticité bénéfique » (Gotthard, Nylin, 1995). Tous les organismes n’ont pas les mêmes sensibilités, ni la même capacité d’acclimatation, de même, un individu n’est pas toujours apte à faire face à toutes les conditions environnementales : la plasticité a donc des limites (détection des modifications, fonctionnelles, de temps).
Le concept de « norme de réaction » permet de mesurer et de visualiser la plasticité (Gotthard, Nylin, 1995; Schmalhausen, 1949), et peut être définie comme « l’ensemble des phénotypes exprimés par un seul génotype pour toute une gamme de conditions environnementales » (Figure 1.7).
Figure 1.7: Normes de réaction de 4 génotypes (1à 4) placés dans 3 environnements (E1, E2, et E3) (modifiée d’après Dingemanse et al. 2010). a) : les 4 génotypes sont doués de la même plasticité phénotypique. b) pas de plasticité phénotypique, absence d’interaction environnement x génotype. c) il y a une interaction entre les génotypes et l’environnement, ce qui montre la même plasticité. d) plasticité d’intensité et de sens différents. La différence entre les 4 génotypes est plus grande en E3 qu’en E1. 1 et 2 sont plastiques, et ont une plus forte valeur du trait en E3, tandis que 3 et 4 ont une plus faible valeur en E3 e) Les génotypes 1 et 3 ont une plus forte valeur du caractère dans E1, tandis que les 2 et 4 sont plus forts en E3. Le génotype 3 n’est pas plastique.
La plasticité phénotypique peut se traduire par des ajustements comportementaux, physiologiques, et morphologiques (Pigliucci, 2001; West-Eberhard, 2003). Elle peut induire des réponses réversibles, variations journalières ou saisonnières comme le bronzage chez l’homme : on parle alors de « flexibilité » (Williams, 1992). Dans d’autres cas, elle induit des réponses irréversibles (Stearns, 1989), comme des modifications morphologique induites durant les premiers stades de l’ontogénèse. C’est le cas des coraux par exemple, qui lorsqu’ils sont placés dans un milieu plus profond, vont être capable de modifier leur morphologie de manière irréversible durant leur croissance, avec des calices plus profonds et des septa plus petits (Ow, Todd, 2010). Ces réponses plastiques peuvent s’exprimer à des échelles de temps différents. En effet, elles peuvent être instantanées, c’est le cas d’un comportement, ou demander un certain délai comme dans le cas d’un changement de morphologie qui s’effectue généralement pendant le développement.
Cette plasticité phénotypique peut avoir un coût, constitutif ou induit. Le cas de la réponse des têtards d’amphibiens face au réchauffement climatique est un exemple de coût constitutif. En réponse à l’augmentation rapide de la température de l’eau de leur milieu perçue comme le signal d’un potentiel assèchement de la mare (Pounds et al., 2006), le développement larvaire est accéléré et la métamorphose et plus rapide, leur permettant de s’affranchir du milieu aquatique. Or, cette métamorphose plus rapide qui est un bénéfice immédiat, se traduit par une taille plus petite, et par un système immunitaire plus faible, ce qui, à long terme, pourrait avoir de lourdes conséquences (Berven, 1981; Gervasi, Foufopoulos, 2008; Smith, 1987b). Il s’agit dons d’un cas de plasticité phénotypique qui a pour « coût » une réduction de la fitness de l’individu qui dépend du degré de plasticité (Chevin et al., 2010). En revanche, un coût induit va réduire la fitness d’un individu en fonction de la somme des variations phénotypiques.
Cette capacité de réponse à des modifications rapides est dépendante de l’organisme, du trait concerné, du moment pendant lequel il se produisent dans le cycle de vie et aussi de la durée d’exposition à une modification environnementale. C’est un processus particulièrement important dans le contexte actuel de changement global auquel il faut répondre rapidement pour éviter l’extinction, surtout chez les organismes ayant un cycle de vie complexe, comme les amphibiens.

Adaptation (plus de citations)

Les réponses des organismes face aux modifications de leur environnement peuvent être le fruit de processus adaptatifs, c’est-à-dire à de l’adaptation au sens génétique du terme.
En effet, lorsque l’environnement change, les individus peuvent être soumis à de nouvelles pressions sélectives qui vont alors favoriser un phénotype plutôt qu’un autre (Rose, Lauder, 1996). Ce phénomène est lié à la sélection naturelle, qui est un processus adaptatif fondé sur le différentiel de survie et de reproduction des individus. La sélection naturelle n’est pas la survie du meilleur, mais la contre-sélection du moins apte. Ce processus s’applique sur les phénotypes dans une population, et est responsable de l’évolution adaptatrice.
La sélection naturelle repose sur trois principes : celui de la variation, de l’héritabilité, et de l’adaptation. A l’échelle populationnelle, il y a une variabilité génétique plus ou moins importante pour chaque caractère. Plus la variation est importante, et plus la population pourra potentiellement faire face aux modifications environnementales (Chevin et al., 2010).
Le principe de l’hérédité, c’est-à-dire de la transmission à sa descendance via le patrimoine génétique des caractères, permet de maintenir cette variabilité génétique au sein des populations. Selon le principe d’adaptation, les individus les plus aptes ont un meilleur succès reproducteur, transmettent leurs avantages sélectifs à leurs descendants, et se retrouvent en majorité dans leur population au fils des générations (Jump, Penuelas, 2005). C’est via ce processus de sélection que certaines populations ou espèces sont dites « spécialisées », et présentent des adaptations locales (Rose, Lauder, 1996). Le cas de spéciation allopatrique par sélection naturelle le plus cité est celui des pinçons des Galapagos observés par Darwin qui, selon leur niche écologique, ont des becs de différentes formes et tailles due à des pressions de sélections (Figure 1.8). Celles-ci s’exercent différemment d’une espèce à l’autre, ou d’un milieu à l’autre. L’adaptation génétique peut être lente dans un environnement hétérogène à l’échelle spatiale et temporelle.
Figure 1.8 : Gravure représentant un échantillon des différents morphotypes des pinçons des îles Galapagos.
Les réponses dues à de l’adaptation génétique sont du même ordre que celles résultant de la plasticité phénotypique : morphologiques, physiologiques, et comportementales.
L’exemple de l’évolution des morphotypes chez la phalène du bouleau due à un processus de sélection naturelle est un cas d’école. Ces papillons de jour étaient majoritairement de couleur claire jusqu’au début du dix-neuvième siècle. Puis, au court du XIXème siècle, des morphotypes plus sombre (forme mélanique) ont été observés, et sont devenu les formes dominantes. Ainsi, en 1895, 98% des phalènes étaient mélaniques dans la banlieue de Manchester (Grant, Wiseman, 2002). Haldane a noté que ce changement de proportion de couleur était lié à l’industrialisation fleurissante de l’époque, dont la conséquence était la pollution de l’environnement qui a noirci le tronc des bouleaux. Les papillons les plus clairs ont alors été plus facilement repérés par leurs prédateurs, alors que les papillons sombres bénéficiaient d’un avantage adaptatif. On voit donc que des événements aléatoires et contingents comme dans ce cas, la pollution industrielle (Kettlewell, 1958), ont des effets directs sur la sélection et l’adaptation, et donc sur l’évolution de l’espèce.

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Table des matières

Chapitre 1 : Introduction
1.1. Le changement global
1.1.1. Une planète en pleine mutation
1.1.2. Conséquences sur la Biodiversité
1.2. Réponses des organismes face à ces modifications
1.2.1. Les différentes réponses
1.2.2. Les processus mis en place
1.2.2.a. La Plasticité phénotypique
1.2.2.b. Adaptation
1.2.2.c. Distinction entre plasticité et adaptation
1.3. Le cas particulier des organismes asexués
1.4. Intérêt du groupe modèle
1.4.1. Les complexes d’hybridations en France
1.4.2. L’origine des grenouilles vertes
1.4.3. La systématique
1.4.4. L’identification taxonomique
1.4.5. La répartition
1.4.6. Partition de niche
1.5. Les objectifs de la thèse
Chapitre 2 : Matériels et méthodes
2.1. Description du modèle biologique
2.1.1. Morphologie
2.1.2. La biologie
2.1.3. Statuts réglementaires de protection
2.2. Description des zones d’études
2.2.1. L’Argonne Ardennaise
2.2.2. L’Anjou
2.2.3. Les sites annexes
2.3. Les campagnes d’échantillonnage
2.4. Caractérisation de l’habitat
2.4.1. Habitat et étude paysagère
2.4.2. Les paramètre physico-chimiques
Chapitre 3 : Identification taxonomique à l’aide d’outils moléculaires
Introduction
3.1. Identification des grenouilles vertes du complexe P. esculentus grâce à la méthode PCR-RFLP sur la région ITS2
3.1.1. Mise au point d’une nouvelle technique d’identification
3.1.1.1. Introduction
3.1.1.2. Matériels et méthodes
3.1.1.3. Résultats et Discussions
3.1.1.4. Conclusions et perspectives
3.1.2. Identification taxonomique des grenouilles vertes échantillonnées dans la Nord de la France
3.1.2.1. Introduction
3.1.2.2. Matériels et méthodes
3.1.2.3. Résultats
3.1.2.4. Discussion
3.1.2.5. Conclusion
3.2. Identification des grenouilles vertes du complexe P. esculentus grâce aux marqueurs microsatellites
3.2.1. Introduction
3.2.2. Matériels et méthodes
3.2.3. Résultats
3.2.4. Discussion
3.2.5. Conclusion
Conclusion
Chapitre 4 : Sexuality vs clonality: preliminary results of larval performance of P. perezi, P. kl. grafi and P. ridibundus (Ranidae, Pelophylax).
4.1. Introduction
4.2. Materiels and methods
4.3. Results
4.4. Discussion
4.5. Conclusion
Chapitre 5: Utilisation de l’habitat
5.1. Introduction
5.2. Matériels and méthodes
5.2.1. Contexte de l’étude
5.2.2. Les paramètres physico-chimiques
5.2.3. Les grenouilles vertes
5.2.4. Les analyses statistiques
5.3. Résultats
5.3.1. Analyse des caractéristiques de l’habitat
5.3.2. Caractéristiques des différents types d’habitat
5.3.3. Le peuplement en grenouilles vertes
5.3.4. Relation entre le peuplement et l’habitat
5.3.5. Effet de l’habitat sur la morphologie des grenouilles vertes
5.4. Discussion
5.4.1. Le type d’habitat aquatique
5.4.2. Analyse des peuplements
5.4.3. Partition de niches
5.4.4. Effet de l’habitat sur la morphologie
5.5. Conclusion
Chapitre 6 : Phenotypic plasticity and adaptation ability: Larval performances of Pelophylax esculentus (Amphibia, Ranidae) tadpoles from two different habitats
6.1. Introduction
6.2. Materiels and methods
6.2.1. Field
6.2.2. Experimental crosses
6.2.3. Experimental procedure
6.2.4. Measures of performances
6.2.5. Statistical analyses
6.3. Results
6.3.1. Temperature effect
6.3.2. Habitat of origin effect
6.4. Discussion
6.4.1. Larval performance and relation to fitness
6.4.2. Temperature effect
6.4.2. Habitat of origin effect
6.5. Conclusion
Chapitre 7: Discussion et Perspectives
7.1. L’identification taxonomique
7.2. L’utilisation de l’habitat chez le complexe P. esculentus
7.3. Fitness hybride et heterosis
7.4. Le devenir évolutif des grenouilles vertes
7.4.1. L’hybridogénèse : un modèle biologique en péril
7.4.2. La propagation du génome R
7.4.3. Biologie de la conservation
Bibliographie
Annexes
Annexe 1: Fiche “caractérisation de l’habitat”
Annexe 2: A new PCR-RFLP-based method for an easier systematic affiliation of European water frogs

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