Identification et taxonomie des parasites du genre Leishmania

Historique de la leishmaniose

Le parasite, Leishmania fut découvert par Sir William Leishman en 1900 dans des frottis de la rate d’un soldat mort à Dum-Dum en Inde. En 1903, Charles Donovan, en poste dans un service médical indien, identifia le même parasite dans une biopsie de la rate. Le parasite fut nommé Leishmania donovani en leur hommage [2]. L’étude de la transmission de la leishmaniose connaîtra une avancée significative en 1921 grâce aux travaux d’infection expérimentale sur l’homme (avec des phlébotomes infectés) réalisés à l’Institut Pasteur d’Alger dirigé à l’époque par les frères Edmond et Etienne Sergent et leurs collaborateurs. Trois ans plus tard, Knowless et al (1924), dérivaient les différentes étapes de l’évolution du parasite (espèce et genre) dans le tube digestif de P. argentipes gorgé sur un malade atteint de leishmaniose viscérale.

Taxonomie et morphologie du vecteur

Les vecteurs de la leishmaniose sont des insectes qui appartiennent à l’ordre des Diptères, à la famille des Psychodidae et à la sous-famille des Phlebotominae, comportant environ 700 espèces. Seuls les genres Lutzomyia et Phlebotomus se trouvent impliqués dans la transmission des leishmanioses. Le premier se subdivise en 16 sous-genres et le second en 8 [19]. Le genre Phlebotomus se rencontre dans les régions subtropicales, arides et semi-arides de l’Asie, de l’Afrique et du sud de l’Europe. Le genre Lutzomyia est présent dans les régions tropicales et subtropicales de l’Amérique [20]. Ces insectes sont de petites tailles. Ils mesurent environ 3 mm de long, possèdent un corps mince et allongé. Leurs couleurs s’étendent du jaunâtre au noir. Seules les femelles sont hématophages (nécessaire à la ponte des oeufs) et responsables de la transmission de la leishmaniose (Figure 1) [21]. Leur durée de vie est fonction de la température et de l’humidité. En général, les femelles vivent entre deux semaines à deux mois.

Identification et taxonomie des parasites du genre Leishmania

Les agents responsables de la leishmaniose parasitaire appartiennent à la famille des Trypanosomatidae et à l’ordre des Kinetoplastida. Depuis la description du genre Leishmania par Ross en 1903, les différentes classifications ont été proposées, dont celle ci-dessous proposée par Levine et collaborateurs en 1980 [2, 19] (Tableau I). Le développement du parasite dans le tube digestif du vecteur (au niveau du pylore) est le critère qui a permis de diviser le genre Leishmania en deux sous-genres. D’une part, la section Suprapylaria, caractérisée par la multiplication dans l’intestin moyen et antérieur, devient le sous-genre Leishmania. D’autre part, la section Peripylaria, caractérisée par la multiplication dans la partie postérieure suivie d’une migration antérieure, devient le sous-genre Vannia [19]. Le genre Leishmania est composé de plusieurs espèces morphologiquement similaires. Elles causent une panoplie de manifestations cliniques allant d’affections cutanées qui se résorbent d’elles-mêmes à des infections viscérales fatales en passant par des exacerbations inflammatoires causant de graves défigurations. Ce genre regroupe habituellement les espèces de Leishmania en « complexes » selon les similarités biochimiques (Tableau II).

Actuellement, 20 espèces du genre Leishmania sont connues responsables de cette maladie et sont distribuées le long des régions tropicales et subtropicales dans 88 pays de quatre continents. Selon les données statistiques de l’Organisation Mondiale de la Santé, dans les régions endémiques 350 millions d’individus sont à risque d’infection, 12 millions sont atteints et 1,5 à 2 millions de nouveaux cas sont recensés par an. Les formes cutanées de cette maladie touchent environ 1 à 1,5 millions de personnes chaque année et la forme viscérale 0,5 millions d’individus [22, 23]. Dans les différentes régions, l’augmentation des cas de leishmaniose a pris une ampleur importante. Par exemple pour les cas de leishmaniose cutanée au Brésil 21 800 individus étaient atteints en 1998. Ce chiffre est passé à 40 000 en 2002. La même pathologie à Kaboul, en Afghanistan, a touché 14200 personnes en 1994 et en 2002, 65 000 cas étaient recensés. De même à Ouagadougou, au Burkina Faso, le nombre de cas de la leishmaniose cutanée a augmenté de 28 cas en 1995 à 2375 cas en 2000. Pour la leishmanie viscérale au nord du Brésil en 1998 il y a eu 1 840 cas et 6 000 cas en 2002 ont été enregistrés [24]. Le nombre de cas de L.C contractés en Guyane en 2003 s’est élevé à 269. Trente sept souches isolées ont été identifiées. L’espèce L. guyanensis a été l’espèce la plus fréquemment identifiée, avec 25 souches (13 de zymodème MON-45, sept de zymodème MON-131, un de zymodème MON-47, et quatre de zymodème non précisés). Toutefois sept souches de L. braziliensis ont été identifiées (six de zymodème MON-43 et un de zymodème MON-44) [25].

Relation immunologique homme-vecteur

L’effraction du derme et des vaisseaux sanguins par les pièces buccales des insectes, ainsi que la sécrétion de protéines salivaires par le vecteur induisent une réponse immunitaire de la part de l’homme. La salive peut ainsi être responsable d’une immunomodulation locale qui, par un effet adjuvant ou immunosuppresseur, va influencer le développement de la réponse immune innée et adaptative, de l’homme. Le développement de cet effet immunomodulateur a ainsi des conséquences sur la transmission des pathogènes et le développement des pathologies associées [4]. Cet effet de la salive semble toucher plusieurs paramètres de l’immunité tels que les cellules présentatrices d’antigène (CPA), des cytokines, des lymphocytes T (LT), des lymphocytes B (LB) et le complément (voie classique et voie alternative). La durée du contact homme-vecteur ainsi que la manière de prélever le sang (telmophagie/solénophagie) influence les effets immunomodulateurs induits par la salive des vecteurs. En plus de cette influence immunomodulatrice sur l’immunité innée et adaptative, certaines protéines salivaires ont des propriétés immunogéniques qui induisent la production d’anticorps (Ac) dirigés spécifiquement contre ces protéines (IgM, IgE et IgG) [5, 6]. La composition isotypique de cette réponse anticorps spécifique aux protéines salivaires peut être modifiée dans le temps. Plusieurs facteurs tels que les antécédents d’exposition, l’intensité d’exposition et la physiologie de l’hôte peuvent influencer le développement de la réponse immune anti-salive [15].

L’étude des protéines salivaires et de leurs effets immunomodulateurs sur la réponse immunitaire de l’homme représente une voie de recherche qui permet de mieux caractériser les mécanismes de transmission des pathogènes et la relation homme-vecteur dans l’optique d’un contrôle plus efficace des maladies à transmission vectorielle. A ce titre, l’étude des réponses Ac spécifiques aux protéines salivaires est une voie de développement de nouvelles stratégies vaccinales contre la transmission des pathogènes du vecteur à l’homme. Les données les plus récentes et les plus complètes concernent l’influence de la piqûre de Lutzomia longipalpis et de Phlebotomus papatasi sur l’immunomodulation locale et sur la transmission de Leishmania major dans le modèle animal expérimental [8]. Ce modèle expérimental murin a été largement étudié car la pathologie induite est cutanée, facilement quantifiable et la réponse immune associée semble clairement définie.

Inhibition de l’agrégation plaquettaire

L’agrégation plaquettaire est la première ligne de défense de l’homme pour éviter la perte de sang lors d’une blessure. Elle se met en place très rapidement. La lésion de l’endothélium par les pièces buccales entraîne une libération d’Adénosine Di Phosphate (ADP) par les cellules endommagées et de collagène par les cellules sous endothéliales. Les plaquettes, présentes dans le sang, réagissent à cette augmentation d’ADP en s’adhérant entre elles et au sous endothélium, et s’activent. La salive des insectes contient des molécules anti-agrégantes pour fluidifier le sang et permettre ainsi une prise du repas sanguin plus rapide et complète. Les différents travaux ont montré l’existence d’une diversité de nature, de structure et du mode d’action de ces protéines en fonction des espèces. L’apyrase est la protéine la plus communément retrouvée chez les espèces hématophages. Elle a été décrite chez de nombreuses espèces d’arthropodes. Elle hydrolyse l’ADP et l’ATP en AMP (Adenosine monohosphate) et en phosphate inorganique, permettant ainsi de diminuer le taux d’agoniste ADP au niveau du site de lésion et donc de minimiser l’activation des plaquettes. Elle intervient également dans l’inhibition de la réaction inflammatoire [28]. Cette protéine est retrouvée chez de nombreux d’insectes hématophages dont les simulies [29], Lutzomyia longipalpalis [30], les moustiques [31, 32], Rhodnius [33] et Glossina morsitans [34]. Elles diffèrent suivant les espèces par leur pH optimal d’action et de la nature des cations divalents requis pour leur activation (Ca2+ ou Mg2+) [35]. Un autre type d’apyrase, n’appartenant pas à la famille des 5’ nucléotidase, a été identifié chez Cimex lectularius [36]. Elle présente des similitudes avec celle des phlébotomes et des humains. L’apyrase a une grande importance dans le comportement alimentaire des moustiques.

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Table des matières

1-Introduction
2-Objectif
2.1-Objectif général
2.2-Objectifs spécifiques
3-GENERALITE
3.1-Historique de la leishmaniose
3.1.1-Taxonomie et morphologie du vecteur
3.2-Identification et taxonomie des parasites du genre Leishmania
3.3-Epidémiologie de la leishmaniose
3.3.1-Répartition géographique de la leishmaniose cutanée au Mali
3.3.2-Réservoirs de parasite de la leishmaniose cutanée
3.4-Cycle de transmission de la leishmaniose cutanée
3.4.1-Parasite chez l’hôte mammifère
3.4.2-Parasite chez le phlébotome
3.5-Physiopathologie de la leishmaniose cutanée
3.6-Relation immunologique homme-vecteur
3.6.1-Quelques rôles pharmacologiques des protéines salivaires des phlébotomes
3.6.1.1-Inhibition de l’agrégation plaquettaire
3.6.1.2-Inhibition de la coagulation
3.6.1.3-Vasodilatation
3.6.1.4-Inhibition de la réaction inflammatoire
3.6.2-Immunomodulation par la salive: de la réponse immune innée à la réponse adaptative
3.6.3-Effet d’une pré-exposition répétée aux antigènes salivaires des vecteurs sur le développement de l’infection
3.7-Diagnostic de la leishmaniose cutanée
3.7.1-Diagnostic d’orientation ou clinique
3.7.2-Diagnostic biologique
3.7.2.1-Mise en évidence du parasite
3.7.2.2-L’examen direct après coloration
3.7.2.3-Culture
3.7.2.4-PCR
3.7.2.5-Sérologie
3.7.2.6-Diagnostic immunologique
3.7.2.7-Intradermoréaction à la leishmanine ou réaction de Monténégro (LST
3.8-3.8-Traitement des leishmanioses
3.8.1-Médicaments
3.8.1.1-Sels d’antimoine pentavalents (SbV)
3.8.1.2-Sels de pentamidine
3.8.1.3-Amphotéricine B et ses formulations lipidiques
3.8.1.5-Autres traitements
3.8.2-Indications
3.8.2.1-Leishmaniose cutanée
3.8.3-Moyens
3.8.4-Thermothérapie
3.9-Prophylaxie des réservoirs et des vecteurs
3.9.1-Prophylaxie individuelle
3.10-Approche vaccinale
4-MEHODOLOGIE
4.1-Cadre d’étude
4.2-Historique des sites d’étude
4.2.1-Relief
4.2.2-Climat
4.2.3-Végétation
4.2.4 La faune
4.3-Population d’étude
4.4-Type et période d’étude
4.5-Echantillonnage
4.5.1-Critères d’inclusion
4.5.2-Critères de non inclusion
4.6-Collecte des données
4.6.1-Prélèvement de sang
4.6.2-Identification des arthropodes hématophages
4.6.3-Extraction de la glande salivaire des arthropodes hématophages
4.6.4-Obtention de l’homogénat de la glande salivaire
4.6.5-Contrôle de qualité des pools salivaires
4.6.5.1-Dosage des protéines totales
4.6.5.2-Electrophorèse sur gel
4.6.6-Dosage du taux d’anticorps anti-salive de P. duboscqi par ELISA
4.6.6.1-Principe du test
4.6.7-Détermination de la spécificité du taux d’anticorps anti-salive
P. duboscqi
4.6.7.1-Analyse de réaction croisée par la technique d’ELISA
4.6.7.1.1-Mode opératoire
4.6.7.2-Analyse de réaction croisée par la technique de Western blot
4.6.7.2.1-Migration des protéines salivaires
4.6.7.2.2-Transfert des protéines sur la membrane
4.6.7.2.3-Blocage
4.6.7.2.4-Anticorps primaire
4.6.7.2.5-Anticorps secondaire
4.6.7.2.5-Révélation des protéines salivaires
4.7-Gestion et analyse des données
4.8-Considérations éthiques
5-RESULTATS
5.1-Caractéristiques sociodémographiques de l’échantillon μg/paire
5.2-Répartition du nombre de paires de glandes salivaires par arthropodes hématophages et la concentration protéique des pools
5.2.1-Dosage des protéines totales dans la salive
5.2.2-Analyse de l’expression des protéines salivaires
5.3-Détermination du taux anticorps anti-salive de P. duboscqi dans la population de Sougoula et de Kéména
5.5-Détermination de la spécificité de l’anticorps anti-salive de
P. duboscqi
5.5.1-Analyse de réaction croisée entre les protéines salivaires de P. duboscqi et An gambiae sl ou de C. quinquefasctus
5.5.1.1-Analyse de réaction croisée par la technique d’ELISA
5.5.1.2-Analyse de réaction croisée par la technique par Western Blot
6-Commentaires et discussion
7-Conclusion et recommandations
8-REFERENCES BIBLOGRAPHIQUES

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