L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) est l’une des rares affections urologiques qui sont spécifiquement liées à l’âge avancé. Cette affection est extrêmement fréquente. Elle constitue la première cause d’obstruction cervico-urétrale chez l’homme dont l’âge et le statut hormonal du patient constituent les facteurs de risque les plus incriminés [4]. La prévalence de l’HBP augmente avec l’âge et continue d’augmenter du fait du vieillissement de la population [38], ce qui fait de cette pathologie un problème de santé publique et une préoccupation croissante pour l’ensemble des praticiens intervenant dans sa prise en charge : médecins généralistes, urologues, gériatres, anesthésistes. C’est une tumeur qui reste étroitement liée à l’âge, ayant des manifestations Cliniques imprévisibles et variables dans le temps, et cela sans aucun parallélisme entre l’importance des signes fonctionnels et les lésions anatomiques. En Afrique, selon certaines études, l’adénomectomie prostatique vient au premier rang des activités chirurgicales des services d’urologie [19]. Le diagnostic de l’HBP est clinique. Les examens para cliniques n’ont d’intérêt que pour apprécier le retentissement sur le haut appareil urinaire, et surtout pour éliminer un cancer associé. En Mauritanie nous n’avons pas pu trouver une étude sur la question durant notre recherche. L’objectif de notre étude était de rapporter notre expérience concernant la prise en charge de cette affection.
Rappels anatomiques
Anatomie descriptive
La prostate est une glande génitale située dans la partie antérieure du pelvis, d’une quinzaine de grammes chez l’adulte jeune, ayant la forme d’une châtaigne. Elle possède à la fois une anatomie interne (zonale) très complexe et une anatomie topographique longtemps restée inconnue, dans la mesure où elle est profondément située dans le petit bassin, fixe entre pubis en avant, vessie en haut, rectum en arrière et plancher pelvien en bas.
Anatomie zonale
Dès 1912, Lowsley a décrit sur la prostate fœtale cinq lobes prostatiques: deux lobes latéraux, un lobe antérieur, un lobe postérieur et un lobe médian. Cette description a été régulièrement modifiée. La description admise actuellement est la description zonale [39] qui divise la prostate en cinq zones (figure 1) :
– une zone antérieure constituée de stroma fibromusculaire et dépourvue de glandes. Elle est en continuité avec le sphincter lisse de l’urètre. Elle ne subit aucun processus pathologique ;
– une zone périphérique entourant la quasi-totalité de l’urètre distal sauf en avant, et se prolongeant vers le haut et l’arrière. Elle constitue la majeure partie du poids prostatique (70 %) et de la «coque » prostatique laissée en place après énucléation d’une hypertrophie bénigne. Elle est le lieu privilégié de l’émergence de cancers ;
– une zone centrale constituant 25 % du poids de la glande prostatique. Elle a une forme triangulaire et vient se caler en arrière de l’urètre proximal, dans l’angle dièdre qu’il forme avec la prostate périphérique. Elle est traversée par les canaux éjaculateurs. L’histologie de cette zone ressemble à celle des vésicules séminales, suggérant son origine wolffienne et donc mésoblastique. Elle est à l’origine des 10 % des cancers de la prostate ;
– une zone « de transition » forme les 5 % de tissu prostatique restant. Elle est constituée de deux petits lobes situés autour de l’urètre juste audessus du veru montanum. Cette zone donne toutefois naissance à 25 % des cancers de la prostate, ce qui explique la nécessité d’examiner les copeaux de résection endoscopique [39].
– la zone des glandes péri-urétrales se situe dans la paroi musculaire lisse de l’urètre. Elle représente moins de 1 % du tissu prostatique.
Vascularisation
Artères
La prostate est principalement irriguée par l’artère vésicale inférieure, branche de l’artère iliaque interne. La distribution vasculaire de la prostate est intrinsèque et est faite de 2 groupes de vaisseaux :
– vaisseaux capsulaires,
– vaisseaux urétraux.
Le groupe des artères urétrales se développe de façon importante en cas d’HBP pour irriguer l’ensemble de cette néoformation. L’artère hémorroïdaire moyenne contribue à la vascularisation de la prostate.
Veines
Les veines forment un plexus qui entoure les faces antérieure et latérale de la capsule prostatique. Ces veines reçoivent des branches de la veine dorsale de la verge et communiquent avec le plexus honteux et vésical et se drainent dans la veine iliaque interne.
Drainage lymphatique
Les lymphatiques de la prostate se jettent dans les ganglions hypogastriques, sacrés et surtout iliaques externes.
Innervation
La prostate et les vésicules séminales reçoivent une innervation mixte (sympathique et parasympathique) à partir des plexus pelviens.
Rappels cliniques
Circonstances de découverte
Les symptômes liés à l’HBP évoluent de façon lente et insidieuse sur plusieurs années. Le terme anglo-saxon de LUTS (LowerUrinary Tract Symptoms) traduit en français par Troubles Urinaires du Bas Appareil (TUBA) a été proposé afin d’éviter la relation d’équivalence automatique entre prostate et trouble de la miction. En effet, la variation du volume de la prostate n’influe pas toujours sur le degré de sévérité des troubles urinaires.
Examens paracliniques
Explorations urodynamiques
Une dysurie peut être en rapport avec un obstacle sous vésical, organique ou fonctionnel, une insuffisance de contraction du détrusor ou une combinaison des deux. Si l’obstacle organique peut facilement être mis en évidence chez un patient dysurique et dont le seul élément clinique est une hypertrophie prostatique au toucher rectal, il n’est pas de même lorsque le patient présente des pathologies associées pouvant altérer la fonction vésicale et ou sphinctérienne. Dans ces cas le bilan urodynamique est fort utile car il peut modifier la décision thérapeutique.
La débitmètrie urinaire
Il s’agit d’un examen simple, fiable, que l’on doit utiliser en pratique urologique quotidienne pour vérifier les données de l’interrogatoire et préciser objectivement la dysurie.
– Technique
Elle consiste à enregistrer les mictions et ses différents paramètres, en particulier le débit maximum exprimer en millilitre par seconde (ml/sec) celui-ci se situe chez l’homme entre 15 et 25 ml/sec, pour une interprétation valable il faut un volume urinaire d’au moins 150ml. Le système récepteur est relié à un module qui précise les différents paramètres et permet l’enregistrement de l’ensemble de la miction (Figure 2) La courbe a un aspect en dôme dont le sommet est d’autant plus étendu que le volume mictionnel est important, le segment descendant est souvent moins abrupt. L’analyse de la débitmétrie doit tenir compte du fait que le débit urinaire est le résultat de deux forces :
● La puissance du muscle vésical d’une part,
● Le degré de relaxation ou résistance des structures sous vésicales d’autre part.
Enfin d’enregistrement il est souhaitable d’apprécier un éventuel résidu post-mictionnel grâce au sondage habituellement réalisé pour compléter le bilan et permettre en particulier la cystomanométrie.
– Résultats
On définit la débitmètrie par quatre paramètres principaux :
● Le débit maximum : sommet de la courbe.
● Temps de la miction.
● Le débit moyen : débit total rapporté au temps de la miction.
● Le temps et le volume du débit maximum.
Ces paramètres sont en relation linéaire avec le volume vésical chez le même sujet.
● Si le débit maximum est inférieur à 10 ml / sec, la majorité des patients présente une obstruction sous vésicale.
● S’il est compris entre 10-15 ml /sec, l’obstruction peut ou ne pas être présente.
● S’il est supérieur ou égal à 15 ml/sec, il n’y a pas d’obstruction. Un débit maximum supérieur à 20 ml/s élimine toute possibilité d’obstruction.
Intérêt et indication
D’après le comité international de consensus sur L’HBP établi en 1994, la débitmètrie est recommandée lors du bilan initial du patient et au cours du suivi, post-thérapeutique
● Avant l’intervention
La débitmètrie apprécié objectivement la dysurie, mal évaluée par le patient. On parle de dysurie si le débit maximum est inférieur à 15 ml/ sec à condition que le volume urinaire soit supérieur à 150 ml
● Après l’intervention
La débitmètrie est le moyen le plus sûr pour contrôler l’efficacité de l’intervention sur la dysurie. Elle doit retrouver une valeur normale supérieure à 20ml/ sec.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1. Rappels anatomiques
1.1. Anatomie descriptive
1.2. Anatomie zonale
1.3. Vascularisation
1.3.1. Artères
1.3.2. Veines
1.3.3. Drainage lymphatique
1.4. Innervation
2. Rappels cliniques
2.1. Circonstances de découverte
2.1.1. Signes fonctionnels
2.1.2. Complications
2.2. Examen clinique
2.3. Examens paracliniques
3. Rappels thérapeutiques
3.1. Le traitement médical
3.2. Le traitement chirurgical
3.2.1. Résection trans-urétrale de prostate
3.2.1.1. La résection trans-urétrale de prostate classique mono polaire
DEUXIEME PARTIE
1. Cadre de l’étude
2. Matériel et méthode
2.1. Matériel
2.2. Méthode
3. Résultats
3.1. Epidémiologie
3.1.1. Age
3.1.2. Profession
3.1.3. Provenance
3.2. Données cliniques
3.2.1. Motif de consultation
3.2.2. Les antécédents médicaux
3.2.3. Les antécédents chirurgicaux
3.2.4. Traitements médicaux
3.2.5. Les types du traitement médical
3.2.6. Les affections chirurgicales associées
3.2.7. Le toucher rectal
3.3. Données biologiques
3.3.1. La fonction rénale
3.3.2. L’Examen cytobactériologique des urines
3.3.3. Le PSAT
3.4. Données de l’imagerie
3.4.1. Echographie des voies urinaires
3.5. Traitements
3.5.1. Les types du traitement chirurgical
3.5.2. Les types du traitement reçu après la chirurgie
3.6. Les suites opératoires
3.6.1. La morbidité
3.6.2. La durée d’hospitalisation
3.6.3. La durée de port de la sonde vésicale
4. Discussion
4.1. Epidémiologie
4.1.1. Fréquence
4.1.2. Age
4.2. Les antécédents
4.3. Données cliniques
4.3.1. Motif de consultation
4.3.1.1. Les troubles urinaires du bas appareil
4.3.1.2. Les rétentions d’urine
4.3.1.3. L’hématurie
4.3.1.4. Les infections urinaires
4.3.2. Le toucher rectal
4.3.3. Les affections chirurgicales associées
4.4. Données para-clinques
4.4.1. Données biologiques
4.4.1.1. Dosage de la créatininémie
4.4.1.2. PSA sérique
4.4.1.3. Examen cytobactériologique des urines
4.4.2. Echographie des voies urinaires
4.5. Traitement chirurgical
4.6. Les suites opératoires
4.6.1. La dure d’irrigation
4.6.2. La durée d’hospitalisation
4.6.3. Les complications postopératoires
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES