La circulation pulmonaire est une circulation à basse pression (pression artérielle pulmonaire moyenne (PAPm) 14 +/- 3 mmHg) et à faible résistance [49,64]. L’hypertension artérielle pulmonaire HTAP est une maladie progressive caractérisée par une augmentation des pressions et des résistances artérielles pulmonaires, conduisant à une dysfonction ventriculaire droite et généralement vers le décès [133]. La définition chez l’enfant est la même que celle proposée dans la littérature chez l’adulte: pression moyenne dans l’artère pulmonaire supérieure ou égale à 25 mmhg au repos [58, 114,49]. Sur le plan pratique on parle d’hypertension artérielle pulmonaire lorsque la pression systolique pulmonaire est supérieure à la moitié de la pression systolique artérielle. L’hypertension artérielle pulmonaire est une pathologie rare et sévère. Le diagnostic repose sur une démarche clinique rigoureuse incluant les données de l’interrogatoire, de l’examen clinique, et les résultats d’explorations complémentaires : l’échographie cardiaque transthoracique couplée au doppler, l’examen non invasif le plus fiable, permet dans la très grande majorité des cas d’éviter le cathétérisme cardiaque diagnostique [122], le cathétérisme qui est l’examen de référence pour le diagnostic positif. Malgré ses multiples étiologies ayant permises une classification très élaborée ; l’HTAP de l’enfant a des spécificités. Il existe des formes sévères néonatales, les HTAP idiopathiques avec une incidence plus faible et les HTAP secondaires à une cardiopathie, elles sont les plus fréquentes dues à une augmentation de débit précapillaire dans les shunts gauche-droites ou à un obstacle postcapillaire voire l’association des deux [58]. L’importance, la rapidité d’installation de l’HTAP dans ces cardiopathies dépendent de chaque type de cardiopathie mais aussi de certains terrains telles que les pathologies syndromiques ou chromosomiques comme la trisomie 21[58]. Les progrès quant à la compréhension physiopathologique des mécanismes de l’HTAP ont été, ces dernières années, importants permettant des évolutions notables dans la prise en charge thérapeutique [66], la qualité de survie et le pronostic vital. L’amélioration majeure de la mortalité et la morbidité des enfants atteints d’HTAP sévère des malformations cardiaques est la prise en charge chirurgicale précoce, dans les premiers mois de vie, pour prévenir la maladie vasculaire pulmonaire. Le pronostic est plus réservé lorsque l’HTAP est disproportionnée au vu de l’importance du shunt gauche droite. Dans ces situations il est important de rechercher des mécanismes intriqués responsables de l’HTAP, voire une évaluation de la réactivité vasculaire pulmonaire par cathétérisme. Chez les enfants atteints d’obstruction des voies aériennes supérieures entraînant une hypoxie et une hypercapnie, une prise en charge thérapeutique adaptée permet la régression de l’HTAP. Les recommandations européennes préconisent une prise en charge de la maladie orientée par des objectifs thérapeutiques. Idéalement, ces objectifs thérapeutiques devraient correspondre à l’obtention sous traitement spécifique d’un état clinique stable et satisfaisant répondant à la plupart des critères cliniques, fonctionnels et hémodynamiques de bon pronostic. La surveillance de ces enfants atteints d’HTAP doit être rapprochée et réalisée dans des centres spécialisés de cardiologie pédiatrie.
GENERALITE
DEFINITION
L’hypertension artérielle pulmonaire HTAP est une maladie progressive caractérisée par une augmentation des pressions et des résistances artérielles pulmonaires, conduisant à une dysfonction ventriculaire droite et généralement vers le décès .
Epidémiologie
L’HTAP est une maladie rare qui, selon les estimations, toucheraient environ 260 000 personnes, avec une prévalence de 30 à 50 personnes par million d’habitants dans le monde. Cette prévalence est probablement sous-estimée du fait de la faible spécificité des signes cliniques dominés par la dyspnée d’effort. Cependant, les progrès récents de l’échographie cardiaque transthoracique couplée au doppler ont grandement facilité le dépistage de la maladie .
Rappel
Embryologie
L’ensemble de l’appareil respiratoire se développe à partir du diverticule respiratoire qui dérive de l’intestin primitif antérieur à la quatrième semaine du développement. Ce diverticule endodermique est à l’origine de l’épithélium qui borde la lumière des voies respiratoires et des alvéoles pulmonaires. Les autres constituants des voies aériennes, comme du parenchyme pulmonaire, dérivent du mésenchyme et des vaisseaux environnant. Le développement de l’appareil respiratoire s’étale sur toute la durée de la grossesse et se poursuit même au delà de la naissance.
FORMATION DES VOIES AERIENNES
Le diverticule respiratoire
Le diverticule respiratoire apparaît à la 4ème semaine sous la forme d’une gouttière de la face ventrale de l’intestin pharyngien dans sa partie caudale. Cette gouttière, ouverte en arrière se sépare de l’intestin primitif qui lui a donné naissance du fait de la prolifération de deux zones de mésenchyme qui s’insèrent entre les deux structures et progressent en direction caudale. L’ébauche forme alors un tube rectiligne, borgne à son extrémité caudale, qui reste en communication avec la cavité de l’intestin pharyngien par son extrémité céphalique. Cet orifice de communication devient l’orifice laryngé, séparé de la base de la langue par l’épiglotte .
Les bourgeons bronchiques
Dès son individualisation, le diverticule respiratoire se divise à son extrémité caudale en deux bourgeons, les bourgeons bronchiques droit et gauche qui seront à l’origine des bronches souches tandis que le segment rectiligne sera à l’origine de la trachée. Pendant la 5ème semaine les bourgeons bronchiques vont se diviser à leur tour mais de façon asymétrique : à gauche, le bourgeon bronchique se divise en deux bourgeons bronchiques secondaires qui correspondent aux futures bronches lobaires gauches tandis qu’à droite le bourgeon bronchique est à l’origine de trois bourgeons qui correspondent aux futures bronches lobaires droites.
Dès lors les bourgeons lobaires vont être le siège de division successive en deux branches (mode dichotomique qui vont donner naissance, entre la 5ème et la 17ème semaine, à des éléments bronchiques dont le calibre diminue au fur et à mesure des divisions. Ce mécanisme aboutit à la constitution de l’ensemble des voies aériennes depuis les bronches lobaires jusqu’aux bronchioles (divisions de 17ème ordre) avec cependant des variations individuelles fréquentes. De façon accessoire, les dernières divisions peuvent intervenir au delà de la naissance .
Les parois des voies aériennes
Les parois des voies aériennes résultent de la différenciation du mésenchyme au contact de l’extrémité des bourgeons du fait d’un mécanisme d’induction réciproque endoderme/mésenchyme. Cette différenciation est à l’origine des constituants des parois : tissus conjonctifs, musculaires et cartilagineux qui vont prendre des aspects différents selon le calibre bronchique.
FORMATION DU PARENCHYME PULMONAIRE
Le parenchyme pulmonaire se constitue progressivement autour des voies aériennes, ce qui conduit à décrire quatre périodes successives qui se chevauchent selon le stade de développement et l’aspect histologique.
La période pseudo-glandulaire
La période pseudo-glandulaire correspond à la formation des voies aériennes jusqu’aux bronchioles (de la 5ème à la 17ème semaine). Celles-ci sont bordées par un épithélium cubique avec, au niveau des bronchioles dites respiratoires, de rares alvéoles .
La période canalaire
La période canalaire correspond à l’apparition des canaux alvéolaires (de la 17ème à la 25ème semaine) : les nombreux alvéoles circonscrivent le canal dont la lumière est bordée d’un épithélium aplati au niveau des minces cloisons interalvéolaires .
La période du »sac terminal »
La période du « sac terminal » correspond à la formation des premiers sacs alvéolaires constitués d’alvéoles juxtaposés (la bordure bronchique n’est plus présente). Cette période commence vers la 24ème semaine au cours de laquelle apparaît la sécrétion de surfactant par les cellules alvéolaires (pneumocytes de type II). Le nombre d’alvéoles et la maturation du produit sécrété autorise la survie d’un prématuré à partir de la 26ème semaine .
La période alvéolaire
La période alvéolaire correspond à la fin de la grossesse et continue au delà de la naissance. Elle se caractérise par la constitution des sacs alvéolaires définitifs et l’augmentation progressive du volume pulmonaire. Les espaces très réduits restant entre les alvéoles sont occupés par les restes du mésenchyme qui va donner un tissu conjonctif fin, l’interstitium, où cheminent les vaisseaux sanguins .
FORMATION DES VAISSEAUX SANGUINS
Les vaisseaux avant le deuxième mois
Avant le deuxième mois : Au moment de l’individualisation du diverticule respiratoire, sa vascularisation dépend de celle de l’intestin primitif antérieur dont il dérive. Il s’agit d’un plexus afférent venant des branches ventrales des aortes dorsales et d’un réseau efférent drainé par les branches des veines cardinales antérieures. Ces réseaux se ramifient dans les travées de mésenchyme au cours de la ramification des voies aériennes et de l’organisation du parenchyme .
Au cours du deuxième mois
Au cours du deuxième mois : les vaisseaux afférents et efférents vont se modifier :
– La segmentation du cono-truncus aboutit à la constitution du tronc de l’artère pulmonaire qui entre en communication avec la partie proximale du sixième arc aortique gauche. Ce nouveau trajet afférent s’abouche au plexus initial du diverticule respiratoire dont il devient la source dominante constituant le trajet des artères pulmonaires. Les branches afférentes venues des aortes dorsales régressent, sauf les plus crâniales d’entre elles qui deviennent les artères bronchiques.
– La paroi dorsale de l’oreillette donne naissance à quatre évaginations (deux à droite et deux à gauche) qui entrent en connexion avec le réseau efférent de l’ébauche pulmonaire. Ces évaginations correspondent aux veines pulmonaires qui drainent de façon préférentielle la circulation efférente vers l’oreillette gauche. Quelques veines primitives de l’ébauche persistent et deviennent les veines bronchiques qui s’abouchent dans la veine cave supérieure. Dès lors l’ébauche de l’appareil respiratoire est le siège d’une double circulation l’une passant par les vaisseaux pulmonaires, l’autre par les vaisseaux bronchiques. Pendant le reste de la grossesse cette circulation reste uniquement nourricière, les échanges gazeux se font au niveau du placenta .
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Table des matières
INTRODUCTION
1-GENERALITE
1.1.DEFINITION
1.2.Epidémiologie
1.3.Rappel
1.3.1. Embryologie
1.3.1.1 FORMATION DES VOIES AERIENNES
1.3.1.1.1. Le diverticule respiratoire
1.3.1.1.2. Les bourgeons bronchiques
1.3.1.1.3. Les parois des voies aériennes
1.3.1.2. FORMATION DU PARENCHYME PULMONAIRE
1.3.1. 2.1. La période pseudo-glandulaire
1.3.1.2.2. La période canalaire
1.3.1.2.3. La période du »sac terminal »
1.3.1.2.4. La période alvéolaire
1.3.1.3. FORMATION DES VAISSEAUX SANGUINS
1.3.1.3.1. Les vaisseaux avant le deuxième mois
1.3.1.3.2. Au cours du deuxième mois
1.3.1. 3.3. A la naissance
1.3.2. Anatomie
1.3.2.1 Les poumons
1.3.2.2 L’arbre bronchique
1.3.2.3 Les plèvres
1.3.2.4 VASCULARISATION
1.3.2.4.1Fonctionnelle
1.3.2.4.2 Nourricière
1.3.2.5 Innervation
1.3.3 Physiologie cardio-pulmonaire
1.4 Cardiopathies congénitales à shunt gauche droite
1.4.1. Communication inter auriculaire
1.4.2 Communications inter-ventriculaire (CIV)
1.4.3. Persistance du canal artériel
1.4.4 Canal atrioventriculaire complet
1.4.5 Tronc artériel commun
1.4.6 Fenêtre aortopulmonaire
1.4.7 Artère pulmonaire droite naissant de l’aorte
1.4.8 Oreillette unique
1.5 Physiopathologie de l’hypertension artérielle pulmonaire
1.5.1 Physiopathologie de l’hypertension artérielle pulmonaire dans les shunts gauche droite
1.5.1.1Modification du débit cardiaque
1.5.1.2 Adaptation vasculaire
1.5.1.3 Adaptation intracardiaque
1.5.2 Conséquences cliniques
1.5.2.1 Shunt ventriculaire et artériel
1.5.2.2 Shunt auriculaire
2. DIAGNOSTIC
2.1 Positif
2.1.1 Circonstances de découverte
2.1.2 Signes cliniques
2.1.3 Signes paracliniques
2.1.3.1 Radiographie thoracique
2.1.3.2Electrocardiogramme
2.1.3.3Echographie-Doppler cardiaque
2.1.3.4 Cathétérisme droit
2.1.3.5 Angioscanner
2.1.3.6 IRM cardiaque
2.1.3.7 Biopsie pulmonaire
2.2 Diagnostic de gravité et CAT d’urgence
2.2.1 Poussée d’insuffisance cardiaque droite
2.2.2 Troubles du rythme cardiaque
2.2.3 Hémoptysie
2.2.4 Affections intercurrentes
2.2.5 Complications psychologiques et psychiatriques
2.3 Diagnostic étiologique
2.3.1 HTAP précapillaires
2.3.2 HTAP postcapillaires
2.3.3 Classification de Venise
3-Traitement
3-1- Buts
3-2- Moyens
3.2.1 Education thérapeutique et adaptation du mode de vie
3.2.2 Traitement médicamenteux spécifique
3.2.2.1 Inhibiteur calcique
3.2.2.2Dérivés de la prostacycline
3.2.2.3 Antagonistes des récepteurs del’endothéline
3.2.2.4. Inhibiteurs de laphosphodiestérase de type 5
3.2.3 Traitement médicamenteux non spécifique
3.2.3.1Anticoagulation au long cours
3.2.3.2. Diurétiques
3.2.4 Traitement non médicamenteux
3.2.4.1Transplantation
3.2.4.2 Atrioseptostomie
3.2.4.3 Thromboendartériectomie pulmonaire
3.2.5 Traitement de la cardiopathie congénitale
3.2.5.1 Traitements médicamenteux
3.2.5.2 Cathétérisme interventionnel
3.2.5.3 Traitements chirurgicaux
3.2.6 Autres moyens
3.3 Indications
3.3.1 Recommandations actuelles
3.3.2 Traitement particulier
3.3.2.1 Traitement de l’insuffisance cardiaque
3.3.3.1 Objectifs
3.3.3.2 Rythme et contenu des visites
4- PRONOSTIC DE L’HTAP
CONCLUSION