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L’épithélium
On distingue trois épithéliums : l’épithélium oral, l’épithélium sulculaire, l’épithélium jonctionnel
L’épithélium oral
L’épithélium oral représente le versant vestibulaire, lingual ou palatin de l’épithélium sulculaire. Il commence au sommet de la gencive marginale pour se terminer à la jonction muco-gingivale. Il est classiquement composé de quatre couches cellulaires qui sont la couche basale, spineuse, granuleuse et cornée. A sa surface, on décrit des kératinocytes et des mélanocytes. Ces dernières sont des cellules dendritiques contenant de la mélanine protectrice contre les radiations ionisantes et donnant, chez certains sujets comme les Asiatiques, les Africains et les Hispaniques, une gencive « Pigmentée » (51, 31). L’épithélium oral recouvre les gencives marginales (dite aussi libre) et attachées. Il est stratifié, acanthosique et peut être recouvert d’une couche de kératine provoquée par la stimulation provenant des forces masticatoires. Sa plus grande épaisseur se situe au niveau du palais. La hauteur de cet épithélium est évidemment dépendante de la hauteur du tissu conjonctif sous-jacent appartenant à la gencive attachée. Cette hauteur tend à augmenter avec l’âge (1). II faut environ 10 jours pour que les cellules de la couche basale parviennent à la surface (31). On observe également des cellules de Langerhans dont le rôle est crucial dans la présentation des antigènes aux cellules immunocompétentes (42). Les cellules sont réunies entre elles par des desmosomes et des ponts cellulaires.
L’épithélium sulculaire
L’épithélium sulculaire représente la partie interne de l’épithélium oral gingival non attaché à la surface dentaire. Il comprend les quatre couches cellulaires épithéliales classiques mais sans couche cornée bien définie. L’épithélium sulculaire commence au-delà des cellules les plus coronaires de l’épithélium de jonction et se termine au sommet de la gencive marginale. L’épithélium sulculaire est squameux pluristratifié non kératinisé et donc relativement fragile. Il est en contact constant avec le biofilm bactérien sous-gingival ainsi qu’avec tous les éléments du fluide gingival avec lesquels il interagit de manière constante. La longueur de l’épithélium sulculaire sain varie de 0 à 4 mm selon les sujets, les dents et les sites (51).
L’épithélium de jonction
L’épithélium de jonction (aussi appelé épithélium jonctionnel) se compose des quelques couches de cellules épithéliales squameuses de type basal ou supra-basal parallèles à la surface dentaire et interposées entre la dent et le tissu conjonctif gingival. L’épithélium de jonction assure la sertissure du parodonte à la dent, isole et renseigne les autres tissus parodontaux sur la nature des éléments du milieu extérieur (51).
Les cellules de l’épithélium de jonction s’interposent entre la structure dentaire (email) et le tissu conjonctif gingival sous-jacent qu’elles protègent et informent. L’épithélium de jonction est sous le microscope, clairement diffèrent de l’épithélium sulculaire. Il est non kératinisé, non différencié et ne présente pas de digitations acanthosiques (53). On observe entre l‘email et l’épithélium de jonction une lame basale de 60 à 150 nm, sans lamina densa ou lamina lucida bien distincte. Cette lame basale est composée de collagène de type VIII, de laminine, de protéoglycanes sulfatés et de glycosaminases sulfatées (39, 53). Parfois, on peut observer entre la lame basale et la surface dentaire, une cuticule de 15 u.m dense aux électrons et probablement d’origine sérique. A côté de cette « colle biochimique », la jonction cellules épithéliales/email est renforcée par des structures appelées hémidesmosomes (59). La jonction entre les cellules épithéliales est assurée par des desmosomes. Malgré ce système d’attache à la surface dentaire, la résistance au détachement de l’épithélium de jonction est relativement faible (quelques dizaines de grammes) (39). Dans sa partie interne, l’épithélium de jonction est attaché aux cellules du tissu conjonctif gingival par l’intermédiaire d’hémidesmosomes et d’une lame basale identique à celle qui sépare deux tissus d’origine embryologique différente : présence d’une lamina densa et d’une lamina lucida avec hémidesmosomes. Dans la partie apicale de l’épithélium de jonction, on observe une à trois couches de cellules alors que, dans sa partie coronaire, on compte jusqu’à quelques dizaines de cellules épithéliales. Son épaisseur est d’environ 100 nm et sa longueur de 2 mm (29).
Le renouvellement des cellules épithéliales se fait par remplacement constant à partir des couches basales vers les couches superficielles par un mécanisme de desquamation (52). Sa desquamation est 50 à 100 fois plus rapide que celle de l’épithélium oral (53). Il faut noter que la moitié des cellules de l’épithélium de jonction est renouvelée entre 5 et 11 jours, ce qui le place en tête de tous les épithéliums de l’organisme humain (25). Il est restauré en 5 jours environ après avoir été détruit (gestes thérapeutiques chirurgicaux et non chirurgicaux) (51).
L’épithélium de jonction sain (ou assaini) est constamment infiltré de cellules inflammatoires (polymorphonucleaires neutrophiles, monocytes, macrophages, cellules de Langerhans) qui occupent de 1 à 3 % des espaces intercellulaires et attestent des sollicitations continues auxquelles sont soumis les tissus parodontaux (bactéries, virus, stimulations mécaniques au cours de la mastication de la phonation, des soins dentaires) (17).
Le tissu conjonctif
Le tissu conjonctif est constitué principalement par des fibres de collagène, une matrice interstitielle, des cellules, des vaisseaux sanguins et des rameaux nerveux. Les fibres de collagène maintiennent fermement la gencive marginale contre les dents et procurent une jonction serrée de la gencive attachée à la racine dentaire et à l’os alvéolaire. Elles sont classées en fibres inter-dentaires, circulaires et trans-septales (44).
Les fibroblastes gingivaux constituent les principales cellules du tissu conjonctif gingival, ils synthétisent et secrètent un certain nombre de protéines de haut poids moléculaire dont la plus abondante est le collagène. Plusieurs types de collagène constituent la partie fibreuse des tissus conjonctifs gingivaux (type I, II, III et IV) (11). A côté des fibroblastes, le tissu conjonctif gingival contient des leucocytes (neutrophiles, macrophages, monocytes, lymphocytes, mastocytes, plasmocytes) (38, 44). Ces cellules baignent dans une substance fondamentale composée principalement de glycoprotéines et polysaccharides (52).
Les fibroblastes participent à la physiologie des tissus conjonctifs par des processus successifs de construction/destruction en étant capables de synthétiser et de détruire le collagène (31). Chez l’individu ayant une bonne santé parodontale, les gènes codant la synthèse du collagène sont activés alors que ceux qui codent la production de métallo-protéinases (collagénases) ne sont activés que pour détruire le collagène vieilli (5). Lorsque le parodonte est sain, les fibroblastes synthétisent autant de collagène qu’ils en détruisent. Le capital de tissu conjonctif reste ainsi constant et suffisant pour remplir sa fonction.
Au cours de l’accroissement gingival cet équilibre est rompu ; l’accumulation de collagène en quantité importante dans la matrice extracellulaire serait due à une activité accrue des fibroblastes gingivaux associée à une diminution du taux de dégradation de la matrice extracellulaire (63). Cependant le mécanisme biologique exact de cette accumulation de collagène reste non élucidé.
Vascularisation et Innervation de la gencive (32)
La vascularisation de la gencive provient des branches des artères alvéolaires supérieures et inférieures : les artérioles supra-périostées, les artérioles inter-dentaires et les artérioles du desmodonte. Ces branches proviennent de l’artère maxillaire, branche de la carotide externe. Le drainage lymphatique suit habituellement la vascularisation et se fait essentiellement vers les ganglions sous-mandibulaires.
L’innervation de la gencive est assurée par des branches collatérales des branches maxillaires supérieures et inférieures du trijumeau.
Aspect clinique d’une gencive saine (6,7)
La gencive saine ou assainie apparait à l’examen clinique comme rose pâle, saumon ou corail. Cette coloration peut être modifiée en fonction de l’appartenance ethnique, du degré de kératinisation, de l’épaisseur du tissu conjonctif et de la richesse du plexus veineux sous-papillaire. Son aspect est piqueté en peau d’orange et fermement attaché aux structures sous-jacentes. Sa consistance est souple et élastique pour la partie libre, ferme et adhérente pour la gencive attachée. La gencive remplie l’espace inter-dentaire en formant une papille inter-dentaire qui prend la forme d’une pyramide lorsque les dents possèdent un point de contact. Le bord gingival est mince (en lame de couteau), réalisant une architecture déflectrice aux aliments.
L’introduction délicate d’une sonde parodontale avec une pression n’excédant pas 50g objective une attache épithéliale se situant à la jonction couronne/racine et une profondeur du sulcus se situant entre 0 et 2 mm selon les sites examinés.
Pour la gencive attachée, sa hauteur est variable en fonction de l’âge et des secteurs de l’arcade, de 0 à plusieurs millimètres, sans qu’il y ait d’incidence sur la santé parodontale au-delà de 1mm.
Une gencive saine ou assainie ne saigne pas lors du sondage.
Physiologie de la gencive (34)
La gencive joue un rôle important au sein de la cavité buccale. Elle permet grâce à sa situation de préserver les tissus sous-jacents (os alvéolaire, desmodonte, cément) contre les agressions du milieu buccal.
Cette protection est possible grâce à la disposition en strates de son épithélium, aux jonctions inter cellulaires et à la kératinisation qui rendent l’épithélium gingival imperméable et résistant.
Elle assure également un rôle de défense assuré grâce aux macrophages, leucocytes et lymphocytes présents dans le chorion gingival.
L’aspect festonné et biseauté de la gencive libre lui confère une architecture déflectrice aux débris alimentaires. En plus la gencive est recouverte par un épithélium pavimenteux stratifié à renouvellement rapide, entraînant avec lui les substances toxiques qui auraient pu s’y trouver.
Le tissu conjonctif par sa vascularisation terminale confère à la gencive son rôle émonctoire.
Enfin, les fibres nerveuses gingivales et les cellules de Merkel assurent le rôle sensoriel de la gencive.
Maladies gingivales
On regroupe sous le terme de maladies gingivales ou gingivopathies, toutes les affections atteignant le tissu parodontal superficiel. Elles peuvent être inflammatoires, dégénératives ou tumorales.
Définition
Les gingivopathies sont de maladies inflammatoires localisées ou généralisées au niveau du parodonte superficiel. Elles sont induites par le biofilm dentaire et peuvent être aggravées par des troubles systémiques, hormonaux, médicamenteux ou d’autres facteurs locaux (7).
Etiopathogénie
L’étiologie principale des gingivites est le biofilm bactérien, cependant d’autres éléments peuvent les favoriser comme les modifications hormonales, la prise de médicaments et les thérapeutiques iatrogènes. L’évolution vers la rupture de l’homéostasie gingivale peut être divisée en trois étapes, on parle de lésion initiale, précoce et établie (35,43).
Lésion initiale
La lésion initiale apparaît au niveau de la gencive après 2 à 4 jours de dépôt de plaque. Le dépôt bactérien provoque une légère inflammation. Celle-ci se traduit par l’augmentation de l’apport sanguin et une légère sécrétion de fluide gingival sulculaire. Ce fluide contient des marqueurs de l’inflammation. Les leucocytes polynucléaires migrent des vaisseaux vers le sulcus à travers l’épithélium jonctionnel et s’y accumulent empêchant ainsi la formation de la plaque bactérienne. Les lymphocytes restent confinés dans les tissus gingivaux (33).
La protection est assurée par l’immunité innée sécrétoire et les immunoglobulines (Ig A) sécrétées. Ces deux moyens de défense agissent contre la colonisation bactérienne et la formation du biofilm sous-gingival (45).
Lésion précoce
La lésion précoce survient environ une semaine après le dépôt de plaque c’est la gingivite débutante. Il est à noter une augmentation de la vascularisation de la zone. L’épithélium jonctionnel et sulculaire forment des invaginations devenant de plus en plus profondes. La perméabilité de l’épithélium jonctionnel est augmentée permettant aux neutrophiles de plus en plus nombreux de se diriger vers le sulcus gingival. Ils sont attirés par les produits bactériens. Leur rôle protecteur est dû à la phagocytose qui est facilitée par l’opsonification des bactéries. La population lympho-plasmocytaire est faible à ces stades réversibles de la maladie parodontale et dominée par les lymphocytes T. L’infiltrat inflammatoire augmente. Certains fibroblastes commencent à dégénérer et des fibres de collagène sont détruites sans qu’il y ait pour autant de perte d’attache ou d’os. La flore pathogène se met en place et la profondeur du sillon gingivo-dentaire augmente (fausse poche) (33).
Lésion établie
La lésion établie correspond à la gingivite établie. L’exposition plus longue des tissus aux microorganismes augmente l’état inflammatoire. L’épithélium devient de plus en plus perméable. L’exsudation du fluide gingival sulculaire et la migration des PMNs (polymorphonucleaires neutrophiles) dans les tissus et le sulcus augmentent. La formation d’un œdème entraîne l’augmentation de la profondeur de la fausse poche. La destruction du collagène se poursuit, et on note également une forte présence de plasmocytes dans le tissu conjonctif. Ce type de lésion peut être stable pendant plusieurs mois ou années (33).
Etiolopathogénie (46, 20, 54)
L’accroissement gingival présente des étiologies multiples. Il peut être d’origine inflammatoire, provoqué par le biofilm bactérien, les facteurs favorisants l’accumulation du biofilm ou entravant l’hygiène bucco-dentaire (malpositions dentaires, traitements orthodontiques, restaurations et prothèses iatrogènes). La respiration buccale, ainsi que la mastication unilatérale sont également mises en relation avec l’exacerbation de l’inflammation gingivale et l’apparition d’hypertrophies gingivales. D’autres facteurs peuvent également intervenir dans l’étiologie de l’accroissement gingival comme la prédisposition génétique, les hormones sexuelles, les maladies hématologiques dont la plus importante est la leucémie. Celle-ci peut être décelée précocement par une hyperplasie gingivale. Plusieurs médicaments sont susceptibles de provoquer un accroissement gingival (cyclosporine, antagonistes calciques et certains antiépileptiques).
La pathogenèse de l’accroissement gingival est complexe et peut se faire par différents mécanismes selon les étiologies.
Elle peut se développer par la persistance de l’inflammation gingivale grâce à des facteurs locaux favorisant, un assèchement de la gencive dans le cas d’une respiration buccale et donc une diminution de sa résistance. Au cours de la puberté, la grossesse et la prise des contraceptifs oraux, le facteur hormonal joue un rôle dans la formation de l’accroissement gingival grâce à des récepteurs gingivaux spécifiques aux hormones, une immunosuppression et l’effet sur les vaisseaux sanguins et la kératinisation épithéliale.
L’hyperplasie gingivale d’origine médicamenteuse est due à une augmentation de la composition matricielle collagénique et non collagénique et à une action sur les cytokines.
Pour la leucémie, l’hyperplasie gingivale est l’un des symptômes de cette maladie, et concernant les médicaments, il y a une augmentation de la composition matricielle collagénique et non collagénique de la gencive, une diminution de la mort des fibroblastes et une action sur les cytokines. Et pour la fibromatose gingivale héréditaire l’étiologie est inconnue, toutefois on peut dire que des facteurs héréditaires semblent intervenir sans qu’ils soient formellement établis.
Diagnostic
Description clinique (8, 37)
Dans le cas de l’hypertrophie gingivale, l’accroissement gingival est de nature inflammatoire. La gencive va alors présenter un aspect œdémateux, luisant, hyperthermique, de consistance molle ou dans certains cas fibro- œdémateuse.
Le volume de la gencive est augmenté perturbant le contour festonné des collets et recouvrant une partie des dents. Les papilles inter-dentaires paraissent turgescentes et l’épaisseur de la gencive marginale est augmentée créant un rebord arrondi, épaissi et boursouflé. Cette architecture ne permet pas une déflection alimentaire correcte et favorise la stagnation alimentaire et l’accumulation bactérienne. La couleur de la gencive apparait rouge bleutée ou violacée, saignant facilement au brossage et au sondage, et sa surface apparait lisse et brillante.
En opposition, l’hyperplasie gingivale se caractérise par un accroissement gingival qui est lui de nature non inflammatoire, bien qu’un processus inflammatoire puisse se greffer par-dessus. Elle est caractérisée cliniquement par une gencive de consistance ferme et fibreuse, dense, peu douloureuse.
Le volume de la gencive se trouve considérablement augmenté, pouvant arriver jusqu’au recouvrement presque total des couronnes dentaires dans certains cas, la gencive marginale se trouve épaissie formant un bourrelet ferme et fibreux et la profondeur du sillon gingivo-dentaire se trouve également augmentée formant une poche gingivale (figure 5).
Description histologique (3, 8,9)
Hyperplasie gingivale
C’est un accroissement dû à une hyperplasie du tissu conjonctif et de l’épithélium avec des digitations épithéliales au sein du chorion fibreux, on observe aussi une multiplication excessive des fibroblastes, une augmentation de la synthèse du collagène, une substance extracellulaire amorphe abondante, un plasma cellulaire développé, avec une vascularisation abondante. Les lésions qui sont relativement fermes et roses ont un plus grand composant fibrotique avec une abondance de fibroblastes et de fibres de collagène.
L’hypertrophie gingivale
L’accroissement de la gencive prend un aspect exsudatif et prolifératif dû à l’inflammation chronique. En microscopie, on observe une prépondérance de cellules inflammatoires, avec un engorgement vasculaire, une nouvelle formation capillaire et des changements dégénératifs associés.
La différence entre l’hypertrophie gingivale et l’hyperplasie gingivale s’effectue sur le plan histologique.
Formes cliniques
Nous ne décrirons dans ce travail que les formes étendues non inflammatoires.
Hyperplasies gingivales iatrogènes médicamenteuses
Certains médicaments associés à une mauvaise hygiène bucco-dentaire peuvent être à l’origine, de la survenue d’une hyperplasie gingivale. Trois types sont décrits.
l’hyperplasie gingivale liée à la prise de nifédipine (Adalate ®)
La nifédipine ou Adalate® est un médicament utilisé dans le traitement de l’hypertension, de l’angor et des phénomènes de Raynaud. Il bloque l’entrée du calcium dans les cellules cardiaques et artérielles, favorisant ainsi leur relaxation, la baisse de la pression artérielle et une meilleure oxygénation du cœur. Il fait partie des inhibiteurs calciques de la famille des dihydropyridines. Elle comprend de nombreux médicaments comme l’amlodipine (Amlor®), la felodipine (Flodil®) ou la nilardipine (Loxen®), qui peuvent eux aussi être responsables d’hyperplasies gingivales similaires à celles provoquées par la nifédipine (2).
L’hyperplasie gingivale due à la nifédipine est tantôt de consistance molle avec un liseré gingival érythémato-hémorragique et une lyse de l’os alvéolaire, tantôt de consistance ferme et lobulée (figure 6). Elle apparaît 2 à 4 mois après le début du traitement, et reste modérée. Cependant, il existe une gêne liée à son caractère fortement hémorragique. Après l’arrêt du traitement, elle régresse rapidement en moins de 3 mois, mais réapparaît dès les premiers jours de la reprise de nifédipine (2, 37, 60).
l’hyperplasie gingivale liée à la prise de cyclosporine A (Néoral®)
La Cyclosporine A (Néoral®, Sandimmum®) est un immunosuppresseur utilisé comme traitement anti rejet des allogreffes. C’est un polypeptide cyclique, issu d’un champignon microscopique (Tolypocladium inflatum Gams) qui a une capacité à inhiber la réponse immunitaire. Il bloque la calcineurine permettant ainsi de réduire la production par certains lymphocytes T4 de certaines cytokines dont l’interleukine 2. Cette dernière est un messager intervenant dans l’activation de nombreuses cellules immunitaires. Il peut aussi être utilisé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, le syndrome néphrotique, le psoriasis, la dermatite atrophique, l’uvéite ou encore l’aplasie médullaire.
L’hyperplasie gingivale due à la cyclosporine A est élective : Elle atteint essentiellement les papilles inter dentaires. Elle peut être diffuse ou localisée. Elle est de couleur rose pâle et de consistance ferme (figure 7). Elle survient, chez un grand nombre de patients traités, 3 à 4 mois après le début du traitement avec une intensité dépendante de la dose (2, 61).
l’hyperplasie gingivale liée à la prise de diphénylhydantoïnate de soude (Dihydan®)
Le Diphénylhydantoïnate de Soude ou Dihydan® est un médicament utilisé dans le traitement des crises d’épilepsie. Il agit comme un régulateur de la conduction nerveuse et empêche les décharges répétitives et prolongées.
L’hyperplasie gingivale due au diphenylhydantoïnate de soude est très importante. Elle apparaît 2 à 3 semaines après le début du traitement, croit pendant 1 an avant de se stabiliser et régresse partiellement en 4 mois après son arrêt. Elle peut être généralisée ou affecter les deux tiers antérieurs du maxillaire ou de la mandibule. Sa fréquence est mal appréciée (3 à 72 %), mais semble plus élevée chez le jeune de moins de 25 ans (37).
Elle est de consistance ferme, de couleur rose, et contient en proportion variable de tissus fibreux et d’infiltrats inflammatoires. Des formes essentiellement fibreuses peuvent être retrouvées avec une importante activité fibroblastique (10, 12, 23).
Hyperplasies gingivales d’hémopathies (9,36, 49)
Les hémopathies sont des maladies touchant les différents éléments cellulaires du sang. Ce sont particulièrement les leucémies, les proliférations malignes des tissus hématologiques qui peuvent avoir des répercussions buccales.
Les hyperplasies gingivales liées aux hémopathies présentent des aspects cliniques variés. L’hyperplasie peut être diffuse ou localisée, de couleur souvent rouge bleutée, saignant lors du moindre traumatisme. Elle est observée en cas de leucémie aiguë myélo-monocytaire ou monoblastique, mais plus rarement dans le cadre des autres leucémies. Elles sont observées chez l’adulte et résultent de l’infiltration médullaire par des cellules leucémiques. Les caractéristiques cliniques de cette atteinte sont essentiellement la fatigue, la pâleur des téguments, la fièvre, la survenue d’infections, de syndromes hémorragiques ou tumoraux.
Sur le plan histologique, la gencive est le siège d’un infiltrat leucémique. Sur le plan clinique, le diagnostic est posé devant la pâleur des muqueuses dues à une anémie, l’existence d’épistaxis, de gingivorragies, ou de pétéchies permettant de suspecter une thrombopénie, la présence de candidose, et la palpation d’une splénomégalie ou d’adénopathies. Il existe d’autres lésions associées aux hémopathies notamment des ulcérations. La confirmation du diagnostic sera effectuée par un service spécialisé, par la réalisation d’une NFS (Numération Formule Sanguine), d’une ponction sternale et éventuellement d’une biopsie gingivale.
Fibromatose gingivale héréditaire
Appelée également gencive éléphantiasique ou hyperplasie gingivale héréditaire (64) est une pathologie gingivale d’origine génétique caractérisée par une prolifération lente et progressive de la gencive kératinisée (14). Elle affecte les deux sexes avec une fréquence de 1 pour 750 000 (57). L’hyperplasie gingivale héréditaire est une maladie rare, d’étiologie inconnue, mais pour laquelle des facteurs héréditaires semblent intervenir sans qu’ils soient formellement établis. La fibromatose gingivale héréditaire se transmet en général selon le mode autosomique dominant avec pénétrance incomplète mais la transmission autosomale récessive a également été rapportée (15). Elle peut être isolée ou en tant qu’élément d’un syndrome. La fibromatose gingivale syndromique est associée à d’autres symptômes telles que l`hypertrichose, le retard mental, l’épilepsie, la perte d’audition neurosensorielle progressive et les anomalies des extrémités, en particulier des doigts et des orteils.
Les formes autosomique dominantes de fibromatose gingivale, qui sont habituellement non syndromique ont été génétiquement en rapport avec l’affection sur le chromosome 2p au niveau de la région 21 (55, 66) ou le chromosome 5q au niveau des régions 13 et 22 (65). Sans pour autant déterminer le type de l’altération génétique.
L’hyperplasie peut être généralisée ou localisée à un ou plusieurs cadrants et l’atteinte est souvent plus prononcée en regard de la tubérosité maxillaire et de la face palatine des segments postérieurs des arcades dentaires, et dans ce cas, les tissus hyperplasiques forment des extensions bilatérales symétriques (figure 8). Dans les cas sévères, la fibromatose gingivale peut entraîner un problème esthétique, perturber la fonction masticatoire, retarder l’éruption dentaire et rendre délicat le maintien d’une hygiène buccale adéquate favorisant ainsi une activité carieuse élevée.
L’augmentation du volume gingival est souvent associée à l’éruption des dents permanentes mais peut parfois apparaître dès la denture temporaire ou plus rarement dès la naissance (18). Selon Bozzo, l’évolution de l’affection est rapide pendant la phase active de l’éruption dentaire et diminue à la fin de celle-ci (14). Il semble aussi que la présence des dents semble être nécessaire pour le développement de la pathologie puisque celle-ci régresse ou disparaît avec la perte de ces dernières (14, 22, 28).
La gencive fibromateuse présente une couleur rose normale. Elle est de consistance ferme et présente un état de surface lisse ou légèrement piquetée.
Il n’y a pas de saignement et généralement pas de symptomatologie. Cette fibrose affecte la gencive jusqu’à la jonction muco-gingivale.
L’analyse ultra structurale du tissu conjonctif montre la présence d’une quantité importante de matrice extra-cellulaire renfermant du collagène, de la fibronectine et des glycosaminoglycanes (4). Cependant, le mécanisme biochimique exact responsable de cette accumulation de collagène reste non élucidé. Selon Tipton et coll (63), cette accumulation élevée serait due à l’activité accrue des fibroblastes gingivaux associée à une diminution du taux de dégradation de la matrice extra-cellulaire.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LA GENCIVE ET LES MALADIES GINGIVALES
I- La gencive saine
1. Anatomie
1.1.La gencive marginale
1.2 La gencive papillaire
1.3 La gencive attachée
2. Histologie
2.1. L’épithélium
2.1.1. L’épithélium oral gingival
2.1.2. L’épithélium sulculaire
2.1.3. L’épithélium de jonction
2.2. Le tissu conjonctif
3. Vascularisation et innervation de la gencive
4. Aspect clinique d’une gencive saine
5. Physiologie de la gencive
II. Maladies gingivales
1. Définition
2. Etiopathogénie
2.1. Lésion initiale
2.2. Lésion précoce
2.3. Lésion établie
3. Classification des maladies gingivales
CHAPITRE II : ACCROISSEMENT GINGIVAL
1. Définition
2. Etiolopathogénie
3. Diagnostic
3.1 Description clinique
3.2 Description histologique
4. Formes cliniques
4.1. Hyperplasies gingivales iatrogènes médicamenteuses
4.2. Hyperplasies gingivales d’hémopathie
4.3. Fibromatose gingivale héréditaire
5. Traitement
5.1. But
5.2. Moyens
5.2.1. Moyens non chirurgicaux : thérapeutique non chirurgicale
5.2.2. Moyens chirurgicaux : thérapeutique chirurgicale
CHAPITRE III : ETUDE DE CAS CLINIQUE
1. Presentation du patient
2. Anamnese
3. Examen exo-buccal
4. Examen endo-buccal
5. Paraclinique : radiographie, bilan biologique
6. Traitement
7. Discussion
Conclusion
Références
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