Hydratation et développement des propriétés physiques et mécaniques d’une pâte de ciment

Présentation du VCCTL

     Comme son nom l’indique, le VCCTL est un laboratoire numérique virtuel d’essais sur ciments, mortiers et bétons. Son intérêt tient à deux caractéristiques principales. La première est qu’il permet à l’utilisateur de créer et de faire évoluer des microstructures 3D de pâtes de ciment, mortiers ou bétons sous des conditions de cure contrôlées [14]. Il faut préciser que si cette caractéristique est si intéressante, c’est parce que les microstructures générées ne sont pas des microstructures simplifiées mais elles intègrent les phases majeures du clinker et peuvent même comporter d’autres phases comme le gypse. D’autre part, un autre intérêt majeur est la richesse des paramètres qui vont pouvoir intervenir sur l’hydratation des microstructures 3D. La seconde caractéristique est que l’on peut utiliser ces microstructures pour accéder à tout un ensemble d’informations et de propriétés du matériau. Ceci, soit directement à partir des microstructures hydratées, soit en soumettant ces microstructures à divers « essais numériques » à partir d’autres fonctionnalités du logiciel. Parmi les informations accessibles directement à partir de la microstructure hydratée on peut citer :
• quantité des différentes phases,
• quantité de porosité,
• solides connectés,
• porosité connectée
• …
Afin de mieux comprendre les résultats présentés dans la suite du manuscrit, il est utile ici d’apporter quelques précisions sur la porosité accessible par le modèle du VCCTL. Ce qui est défini en tant que porosité dans le VCCTL se limite à la porosité capillaire. Ainsi, les porosités plus fines ne sont pas prises en compte. Les microstructures générées par le VCCTL permettent d’accéder à toute la porosité capillaire, qu’elle soit ouverte ou fermée. Les autres propriétés accessibles à partir de fonctionnalités supplémentaires dépendent d’autres codes qui peuvent être inclus ou non dans le VCCTL afin de calculer :
• le module élastique,
• la diffusivité,
• résistance à la dégradation,
• rhéologie.
Le VCCTL est développé par le NIST depuis plus de quinze ans. Actuellement son développement dans le cadre d’un consortium d’industriel se fait au rythme de mises à jour annuelles qui sont l’occasion d’incorporer de nouvelles fonctions. Les membres du consortium sont principalement des cimentiers (Holcim-USA, ATILH-France…), des adjuvantiers (SIKASuisse…), des fabricants de béton prêt à l’emploi (National Ready Mixed Concrete Association-USA…). L’ATILH (Association Technique de l’Industrie des Liants Hydrauliques) représentée par l’école des Mines de Douai fait parti du Consortium. Ainsi le département Génie Civil et Environnemental est le seul en France à posséder les dernières versions non publiques du VCCTL. Les membres du consortium se réunissent régulièrement (2 réunions par an dont une au NIST-USA) pour faire le point sur le logiciel et se concertent régulièrement par des réunions téléphoniques. Le VCCTL s’appuie sur des données expérimentales sur les matériaux considérés. Le logiciel dispose à cet effet d’une base de données diverses associées à chaque ciment, mortier ou béton. Ainsi, la mise au point et le développement du logiciel nécessitent deux composantes principales :
• de nombreuses données expérimentales pour la calibration initiale du modèle,
• des utilisateurs qui testent le logiciel, aident à corriger les erreurs et orientent le développement des fonctionnalités.
Pour faire une présentation complète du logiciel du point du vue général, il faut présenter la manière dont le logiciel s’utilise. La communication de l’utilisateur avec le logiciel se fait au moyen d’interfaces HTML [62] visualisables avec un navigateur de pages internet. Le menu principal est représenté sur la Figure 7.

Les automates cellulaires

     D’un point de vue général, les automates cellulaires sont utilisés pour représenter l’évolution de systèmes dans le temps [93]. Ces systèmes sont constitués de briques élémentaires appelées cellules. L’évolution d’un système entre deux instants va correspondre à l’ensemble des variations de toutes les cellules qui le composent entre les deux instants suivant des règles définies. L’évolution de l’état d’une cellule entre deux instants t1 et t2 va être conditionnée par l’état de ses cellules voisines à l’instant t1. S. Wolfram [61] fut le premier à montrer que la complexité du comportement des automates cellulaires pouvait être utilisé afin d’expliciter des phénomènes physiques complexes même si ces derniers sont induits par des règles élémentaires. Dans le paragraphe précédent, on a vu que les espèces étaient considérées par volumes élémentaires. Chaque unité de volume va correspondre à une cellule du système. La microstructure totale représentant le système est formée de l’ensemble des cellules soit au minimum 1 million de cellules dans une microstructure VCCTL. Au niveau de sa structure de données, la microstructure est conservée sous forme d’image composée d’un certain nombre de voxels. Chaque voxel est associé à une cellule et donc à une unité élémentaire de matière soit à une phase et une seule. Dans le VCCTL, les cellules peuvent aller de (0.25)3 µm3 à 1 µm3 . Le processus d’hydratation est matérialisé par les changements d’états (ici des changements de phase) successifs des voxels de la microstructure. Bien entendu, ce sont les règles utilisées pour déterminer ces changements d’état qui vont constituer l’implémentation du mécanisme de dissolution, diffusion/réaction présenté dans le paragraphe précédent. L’hydratation est réalisée par des cycles successifs. Au niveau des automates, chaque cycle correspond au passage d’un état à un autre. Au niveau du logiciel, chaque cycle est divisé en deux phases :
• la dissolution,
• la diffusion / réaction.
Chaque phase s’intéresse à des espèces (des phases) différentes et constitue à chaque fois un passage d’un état à un autre pour toutes les phases concernées (Figure 14). Dans la phase de dissolution, le logiciel parcourt chaque voxel de la microstructure et ne considère que les voxels qui correspondent à des phases solubles. Ces voxels correspondent à ceux qui sont en contact avec l’eau (pixels de surface de grains). L’évolution des voxels concernés pour le cycle suivant va alors être déterminée par un ensemble de coefficients probabilistes et par leur environnement. Par exemple, si l’on considère le voxel contenant une croix de la Figure 14, ce dernier peut :
• Soit être dissout : le voxel rouge est transformé en présence d’eau (voxel vert) et donne, dans la direction choisie pour sa dissolution, un voxel bleu d’espèces dissoute diffusante,
• Soit rester à sa place et ne pas se dissoudre : rien n’est modifié pour l’état suivant.
Dans la phase de diffusion/réaction, le logiciel parcourt à nouveau chaque voxel de la microstructure et ne considère cette fois-ci que les voxels qui correspondent à des espèces diffusantes, donc des espèces précédemment dissoutes. Encore une fois, l’évolution des voxels concernés pour ce cycle va être déterminée par un ensemble de coefficients probabilistes et par leur environnement. Ici deux possibilités s’offrent à l’espèce diffusante :
• Réagir avec un autre voxel d’espèce diffusante dans le cadre d’une réaction chimique intervenant dans l’hydratation. Bien entendu, ceci seulement si l’autre espèce est à son voisinage direct.
• Continuer son déplacement dans l’eau contenue dans la porosité si aucune espèce avec qui il peut réagir se trouve à son voisinage direct.
Si on considère à nouveau la Figure 14 pour illustrer ceci, on voit que le voxel diffusant peut :
• Soit continuer à diffuser dans l’une des trois directions qui lui sont offertes,
• Soit réagir à la surface de la phase solide proche et précipiter à son tour en un nouveau voxel d’espèce solide.

Action sur la consommation des aluminates

        Le résultat de la modification apportée au modèle par l’ajout de cette nouvelle réaction est présenté sur la Figure 20. Cette figure présente l’évolution des pourcentages volumiques des phases issues de la consommation des aluminates en fonction des cycles d’hydratation. La simulation est effectuée sur un ciment Portland standard. Il est important de noter que le modèle utilisé comporte la précédente modification présentée (le critère C pour la formation de C3AH6) en plus de l’équation de formation de l’AFm riche en fer. On peut constater que  les évolutions des quantités des deux types d’ettringites sont similaires. En revanche, les évolutions des quantités des deux types d’AFm sont différentes. Si les deux AFm commencent à se former en même temps, on voit que l’AFm riche en fer se forme en plus grande quantité que l’AFm sans fer. Cette différence s’explique par les choix algorithmiques faits pour l’implémentation de la nouvelle réaction. En effet, on a vu que la formation de l’AFm riche en fer pouvait résulter de trois types de contacts ce qui favorise la probabilité d’occurrence de cette réaction dans le milieu. Ceci par rapport à celle de formation de l’AFm sans fer qui ne peut résulter que d’un seul contact, celui d’une phase C3A diffusante (DIFFC3A) avec de l’ettringite diffusante (DIFFETTR) ou solide (ETTR). On voit aussi qu’une valeur fixée à 2000 pour le critère C est trop stricte et que C3AH6 ne peut pas se former. Une telle valeur aurait permis cette formation avec le modèle n’intégrant pas l’équation de formation de l’AFm riche en fer. On retrouve ici la nécessité d’amélioration de ce critère et la raison de sa non utilisation pour la validation de la méthodologie SNAS. Par contre, toujours à propos de C3AH6, on voit qu’à l’issue du dernier cycle, la formation massive porte le pourcentage volumique de cette phase à environ 3.5 %. On a bien une diminution de cette quantité finale par rapport aux simulations présentées sur les figures précédentes effectuées avec le modèle n’intégrant pas la formation de l’AFm riche en fer. Ces simulations étaient bien entendu réalisées avec le même ciment (ciment CemA) et avec les mêmes autres paramètres d’hydratation. On voit donc que l’insertion de l’équation de formation de l’AFm riche en fer apporte bien l’effet recherché en diminuant la quantité d’aluminates diffusants dans le milieu.

Cendres volantes de lit fluidisé circulant (CVLFC)

        Les cendres volantes sont des matériaux couramment employés dans la fabrication des ciments au même titre que les laitiers de haut fourneau. Ce sont des résidus de la combustion du charbon dans les centrales thermiques. Il existe plusieurs types de cendres en fonction de la nature du combustible et du procédé de combustion. Etant un ajout employé et réglementé, les cendres volantes ont été très largement étudiées. Les cendres volantes de lit fluidisé circulant (CVLFC) constituent un type de cendre particulier. Leur particularité vient du type de centrale thermique dans lesquelles elles sont produites. Ces centrales utilisent un processus différent des centrales thermiques « classiques » qui produisent les cendres volantes « classiques » employés dans la fabrication des ciments. Ces centrales utilisent un procédé de lit fluidisé circulant (qui donne leur nom aux cendres). L’originalité du procédé repose sur le fait que les cendres produites sont réinjectées dans le foyer mélangées avec de la chaux pulvérisée. Ce procédé a été mis en place dans une optique de réduction de l’impact environnemental de l’activité des centrales thermiques par réduction des émissions de soufre. L’injection de chaux en addition des cendres dans le foyer va avoir pour effet de piéger le soufre dans les cendres en combinant ce dernier au calcium dans une phase anhydrite [57]. Une autre caractéristique importante de ces centrales utilisant les lits fluidisés circulants est la température du foyer de combustion. Cette dernière est relativement basse : 800-950°C. Ceci par contraste avec les centrales traditionnelles dans lesquelles la température de foyer se situe entre 1200 et 1400°C [58]. Cette donnée est importante car elle est responsable des différences de minéralogie et de morphologie des CVLFC par rapport aux cendres volantes « classiques ». Comme dans le cas des cendres volantes de centrales thermiques « classiques », les caractéristiques et les propriétés des CVLFC dépendent de la nature du combustible utilisé ainsi que du procédé luimême. Ces relations ont été étudiées par D. Ferrand [59] et P. A. Andreani [60] dans leurs travaux de thèse. La production et l’exploitation de ces cendres étant relativement récentes, leur emploi dans la fabrication des ciments n’a pas encore été largement étudié. D’autre part, leur forte teneur en soufre les place pour l’instant en dehors des cadres normalisés d’utilisation dans les ciments. Les études existantes visent surtout à leur emploi en techniques routières. Elles constituent donc un choix adapté d’ajout innovant dans le cadre de ce travail. La CVLFC utilisé dans le travail de thèse est commercialisée par la société Surschiste et est produite par la centrale thermique de Carling. Elle est issue de la combustion de houille et peut être qualifiée de silico-alumineuse car elle présente de forts pourcentages de SiO2 et de Al2O3 dans sa composition en oxydes.

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Table des matières

Introduction
Conventions d’écriture
Partie I : Mise au point de la méthode sélection de nouveaux ajouts par simulation (SNAS); Choix des logiciels et adaptation de ces dernier
Introduction
CHAPITRE 1 Virtual Cement and Concrete Testing Laboratory
1.1 Description et compréhension du VCCTL
1.1.1 Principe détaillé de fonctionnement
1.1.1.1 Présentation du VCCTL
1.1.1.2 Le module d’hydratation : CEMHYD3D
1.2 Amélioration du modèle standard
1.2.1 Evaluation du modèle à la lumière de la bibliographie
1.2.1.1 Les équations générales d’hydratation
1.2.2 Amélioration du modèle standard : les équations
1.2.2.1 Fonctionnement du VCCTL du point de vue informatique / Structure logicielle du VCCTL
1.2.2.2 L’implémentation du mécanisme d’hydratation dans CEMHYD3D / Travail de compréhension du code
1.2.2.3 Travail de modification du code à la lumière de la bibliographie
1.3 Ajout de fonctionnalités
1.3.1 Prise en compte de nouveaux ajouts ; Modèle d’hydratation générique
1.3.1.1 Le modèle d’hydratation des laitiers du NIST
1.3.1.2 Modèle d’hydratation générique développé
1.3.2 Prise en compte de la forme des grains des ajouts
1.3.2.1 Traitement des formes de grain dans le modèle du NIST
1.3.2.2 Modification du modèle pour le traitement des formes de grain
CHAPITRE 2 HYTEC
2.1 Le logiciel HYTEC
2.1.1 Principes algorithmiques
2.1.2 HYTEC du point de vue utilisateur
2.1.3 Passage de l’étape 2 à l’étape 3 : Le lien HYTEC-VCCTL
2.2 Choix des conditions pour l’étape 3
Conclusion
Partie II : Mise en œuvre de la méthodologie  : Application a un laitier HF et une cendre volante de lit fluidisé circulant
Introduction
CHAPITRE 1 Application de la méthode sur le CEM I
1.1 Caractérisation du CEM I
1.1.1 Composition chimique
1.1.2 Minéralogie
1.1.3 Répartition granulaire
1.1.4 Autres caractéristiques physiques
1.2 Mise en œuvre de la méthodologie sur le CEM I
1.2.1 Première étape
1.2.2 Deuxième étape
1.2.2.1 Génération et hydratation des microstructures VCCTL
1.2.2.2 Pertinence de la simulation
1.2.3 Troisième étape
1.2.3.1 Résultats de la lixiviation en eau pure pendant 10 ans
1.2.3.2 Résultats de l’attaque sulfatique pendant 10 ans
CHAPITRE 2 Application de la méthodologie sur les deux ajouts
2.1 Bibliographie sur les ajouts
2.1.1 Laitiers H.F
2.1.2 Cendres volantes de lit fluidisé circulant (CVLFC)
2.2 Caractérisation des ajouts
2.2.1 Composition chimique
2.2.2 Minéralogie
2.2.2.1 Minéralogie pour le laitier H.F
2.2.2.2 Minéralogie pour la CVLFC
2.2.3 Répartition granulaire
2.2.4 Morphologie des grains des ajouts
2.2.5 Autres caractéristiques physiques
2.3 Mise en œuvre de la méthode sur les deux ajouts
2.3.1 Première étape : Compatibilité chimique
2.3.1.1 Réactivité complète de l’ajout et du clinker
2.3.1.2 Réactivité partielle de l’ajout
2.3.1.3 Conclusion
2.3.2 Deuxième étape
2.3.2.1 Génération et hydratation des microstructures VCCTL
2.3.2.2 Pertinence de la simulation
2.3.3 Troisième étape
2.3.3.1 Utilisation des données numériques fournies par le VCCTL
2.3.3.2 Utilisation des données expérimentales en remplacement de certaines données issues du VCCTL
2.3.3.3 Conclusion
Conclusion
Conclusion générale et perspectives
Références bibliographiques

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