Homogénéisation des populations cellulaires

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Cellules souches nerveuses fœtales humaines et Thérapie cellulaire du système nerveux central

La thérapie cellulaire consiste à réparer un organe ou un tissu lésé en y implantant des cellules capables de pallier partiellement ou totalement le dysfonctionnement. Cette stratégie est une alternative aux greffes d’organe et est directement liée aux avancées touchant les cellules souches. Ainsi, dès les années 70, les cellules souches hématopoïétiques permettaient de traiter, chez l’homme, des affections du sang telles que les leucémies.
Aujourd’hui, ces transplantations se sont largement développées aux autres tissus et un certain nombre a déjà fait ses preuves en usage clinique : greffe de cellules de peau pour le traitement des grands brûlés (Berthod and Damour, 1997), greffe de cellules neuronales d’origine fœtale dans le cas de la maladie de Parkinson (Lindvall et al., 1989) ou dans le cas de la maladie de Huntington (Bachoud-Levi et al., 2000), greffe d’îlots de Langerhans* chez un patient diabétique (Shapiro et al., 2000), greffe de cellules souches musculaires chez un patient insuffisant cardiaque (Menasche et al., 2001)… Les résultats obtenus récemment dans les modèles animaux laissent encore présager un élargissement du champ thérapeutique. Les perspectives les plus prometteuses concernent notamment le système nerveux central (SNC ; Figure I-8), en particulier pour les lésions de la moelle épinière et les maladies neurodégénératives (maladie d’Alzheimer, maladie de Huntington, sclérose en plaque, épilepsie…).
Connaître les cellules souches les plus adaptées au traitement des pathologies et savoir cultiver, amplifier, différencier et greffer ces cellules est donc devenu une étape indispensable pour accentuer l’essor avéré de la médecine régénératrice.

Atouts des cellules souches nerveuses fœtales

Les différentes catégories de cellules souches connues à ce jour et énumérées dans la partie « Source d’obtention des cellules souches » présentent chacune des propriétés originales et caractéristiques qui font d’elles des cellules candidates plus ou moins appropriées pour le traitement des lésions du SNC et des maladies neurodégénératives.
Les cellules ES prolifèrent de manière intensive et ont la capacité d’engendrer des cellules dérivant des trois feuillets embryonnaires* primitifs (Itskovitz-Eldor et al., 2000; Reubinoff et al., 2000). Cependant, leur différenciation in vitro désorganisée et variable au sein d’une même culture (Itskovitz-Eldor et al., 2000), associée à la formation fréquente de tumeurs lors de greffes dans le SNC (Molcayni et al., 2007) limitent leurs applications médicales. De plus, la technologie des cellules ES est nettement moins bien maîtrisée chez l’homme qu’elle ne l’est chez la souris (Amit et al., 2000; Odorico et al., 2001), attendu que des questions éthiques fondamentales telles que le clonage thérapeutique ou le problème des embryons surnuméraires, sont au centre de débats internationaux qui ralentissent les avancées potentielles et sont encore loin d’être résolus.
Les cellules EG sont équivalentes d’un point de vue fonctionnel aux cellules ES (Matsui et al., 1992), à l’exception de la formation de tératomes*. Cependant, les résultats obtenus avec ces cellules sont très variables selon l’âge et l’état du fœtus, et leur prolifération à long terme est compromise par l’instabilité de leur génome (Liu et al., 2004a; Turnpenny et al., 2003). Leur potentiel en thérapie cellulaire est donc très restreint.
Les cellules nerveuses extraites de tissus adultes semblent avoir une plus grande plasticité cellulaire qu’initialement pressenti (Bjornson et al., 1999; Clarke et al., 2000; Galli et al., 2000a). Cependant, leur présence dans l’organisme en faible quantité, leur accès difficile (stratégie de récolte invasive) (Fuchs and Segre, 2000) et leur amplification incertaine constituent des obstacles à leur utilisation in vivo.
Comparativement aux autres cellules souches, les cellules nerveuses extraites de tissus fœtaux, ou cellules neuroépithéliales fœtales, présentent un certain nombre d’avantages non négligeables pour le traitement des maladies neurodégénératives. Elles ont la particularité, comme chez le rongeur, d’être déjà partiellement orientées dans la voie de différenciation nerveuse (Davis and Temple, 1994; Williams et al., 1991). In vitro, elles peuvent être amplifiées, différenciées dans les trois lignages cellulaires principaux du SNC (neurones, astrocytes et oligodendrocytes) (Buc-Caron, 1995; Carpenter et al., 1999) et transduites avec différents types de vecteurs* tels que les AAV (Wu et al., 2002), les vecteurs adénoviraux (Corti et al., 1999; Sabate et al., 1995), rétroviraux (Flax et al., 1998), lentiviraux (Buchet et al., 2002b; Englund et al., 2000; Tamaki et al., 2002), ou baculoviraux (Sarkis et al., 2000). In vivo, un grand nombre d’expériences ont révélé le potentiel de ces cellules à survivre, migrer et se différencier après greffe chez l’animal (Buchet et al., 2002a; Flax et al., 1998; Fricker et al., 1999; Sabate et al., 1995). Elles apparaissent désormais comme un moyen efficace de remplacer des tissus nerveux lésés ou de transporter des gènes d’intérêt dans le SNC. D’autre part, l’utilisation de cellules fœtales humaines est moins soumise à controverse que celle des cellules ES humaines. Cette « tolérance » émane vraisemblablement du fait que les fœtus sont obtenus après IVG et qu’ils étaient considérés, encore récemment, comme des déchets post-opératoires.
Les cellules souches nerveuses fœtales humaines apparaissent donc comme l’outil approprié pour étudier, anticiper et optimiser le comportement des cellules lors de transplantations dans le SNC.

Caractéristiques des cellules souches nerveuses fœtales humaines in vitro et in vivo

Mise en culture et amplification

La méthode de mise en culture la plus couramment utilisée consiste à disséquer les vésicules télencéphaliques fœtales et à dissocier les cellules qui les constituent. Les précurseurs multipotents ainsi isolés sont ensuite amplifiés dans un milieu standard (DMEM/F12) en présence d’agents mitogènes (en général bFGF, EGF et/ou LIF) qui vont stimuler leur prolifération et leur maintien à l’état indifférencié (Buc-Caron, 1995). Les cultures peuvent être initiées sur substrat adhérent (Buc-Caron, 1995; Flax et al., 1998; Villa et al., 2000) ou en suspension sous forme de neurosphères* (Carpenter et al., 1999; Svendsen et al., 1998; Vescovi et al., 1999). Sur substrat adhérent, les cellules sont en général maintenues dans un état indifférencié, alors qu’en suspension, les neurosphères sont composées de types cellulaires hétérogènes allant des plus immatures (cellules souches) aux plus différenciées (neurones, astrocytes et oligodendrocytes).

Différenciation

La différenciation in vitro des cellules souches nerveuses fœtales humaines peut être induite par retrait des agents mitogènes du milieu (Carpenter et al., 1999; Vescovi et al., 1999; Villa et al., 2000), par ajout de sérum (Buc-Caron, 1995), par exposition à des facteurs mimant le développement nerveux in vivo (différenciation « épigénétique* ») (Figure I-9) et engageant la différenciation vers un lignage particulier (Caldwell et al., 2001; Galli et al., 2000b), ou plus récemment, par surexpression de gènes de différenciation (Cao et al., 2006; Liste et al., 2004). Cette dernière méthode est de plus en plus développée car elle permet un contrôle plus efficace, plus précis et plus reproductible de la différenciation.

Greffes de cellules souches nerveuses fœtales humaines

Des greffes de cellules souches nerveuses fœtales humaines ont été réalisées dans le cerveau sain de rongeur (rat et/ou souris) au stade embryonnaire (Brustle et al., 1998), post-natal (Englund et al., 2002; Flax et al., 1998; Rosser et al., 2000) et adulte (Buchet et al., 2002a; Fricker et al., 1999). Quel que soit le stade de développement, les cellules migrent à travers l’ensemble du cerveau, s’intègrent sans perturber l’organisation cellulaire et se différencient en fonction de leur site d’intégration. Chez l’adulte, les cellules acquièrent un phénotype préférentiellement neuronal dans les zones de neurogenèse* et préférentiellement astrocytaire dans les zones non neurogéniques (Fricker et al., 1999). Ainsi, les cellules souches nerveuses fœtales humaines présentent les caractéristiques nécessaires pour mener à bien une stratégie de greffe efficace, à savoir une survie à long-terme et une intégration au sein des tissus de l’hôte.
L’étape suivante, consistant à évaluer leur capacité à remplacer des cellules endommagées, se place dans une perspective de médecine régénérative. Ainsi, des transplantations de cellules souches nerveuses fœtales humaines dans le SNC lésé de rongeur ou de primate non humain ont montré des améliorations significatives dans des modèles de maladies telles que l’attaque vasculaire cérébrale (Chu et al., 2004c; Kelly et al., 2004; Roitberg et al., 2006), la maladie de Parkinson (Liker et al., 2003; Rafuse et al., 2005; Svendsen et al., 1996), la maladie de Huntington (Armstrong et al., 2000; Lee et al., 2005; McBride et al., 2004), les lésions de la moelle épinière (Cummings et al., 2005; Iwanami et al., 2005; Tarasenko et al., 2007) ou l’épilepsie (Chu et al., 2004b). Globalement, les cellules survivent de façon prolongée, migrent spécifiquement en direction des régions ciblées par la lésion, se différencient et établissent des connexions permettant une récupération fonctionnelle partielle (Figure I-11). Ces résultats encourageants sont l’étape initiale conduisant à de potentielles applications cliniques futures. Cependant, ils doivent être nuancés.
Abbréviations : MPTP, 1-methyl-4-phenyl-1,2,3,6-tetrahydropyridine ; 6-OHDA, 6-hydroxydopamine.
D’après Martino et Pluchino, 2006.
Un grand nombre de paramètres semblent influencer la survie, la migration et/ou la différenciation des cellules lors des transplantations. Parmi ces paramètres, on peut citer l’âge du fœtus, la nature et la durée d’exposition des cellules aux agents mitogènes, la durée d’amplification in vitro (Zietlow et al., 2005), le statut des cellules greffées (dissociées ou en neurosphères), le nombre de cellules utilisées pour la greffe, le site d’injection (l’environnement joue un rôle primordial), le modèle expérimental considéré, le délai entre l’initiation de la lésion et la greffe… Cette liste n’est pas exhaustive mais, au sein de celle-ci, l’hétérogénéité cellulaire apparaît clairement comme l’une des causes principales de variabilité.
Dans la majorité des travaux cités ci-dessus, les cellules utilisées sont des cultures primaires de cerveau fœtal humain amplifiées in vitro pendant un temps plus ou moins long et greffées sans modifications préalables. Les populations sont donc constituées d’un mélange hétérogène et variable de cellules immatures, de cellules partiellement engagées dans une voie de différenciation et de cellules matures de lignages différents et/ou de sous-types cellulaires différents. Cet ensemble hétéroclite répond de manière inégale aux signaux environnementaux du SNC lors des transplantations. Non seulement la discrimination de l’effet de tel ou tel type cellulaire comparativement à tel autre est impossible, mais la reproductibilité de l’expérience est également compromise. L’utilisation clinique potentielle des cellules nécessite donc une standardisation des protocoles, c’est-à-dire la mise au point de méthodes systématiques pour enrichir les populations en un type cellulaire d’intérêt.
Homogénéiser les cellules à greffer permet, dans certains cas, de réduire la variabilité, mais aussi et surtout de contrôler plus précisément le phénotype terminal des cellules transplantées et d’obtenir un nombre significatif de cellules fonctionnelles. Des travaux ont en effet démontré que les cellules prédifférenciées répondaient de manière plus efficace que les cellules neuroépithéliales immatures lors de transplantations (Lepore et al., 2004). D’autre part, les cellules restreintes à un lignage particulier survivent mieux, migrent de façon sélective, s’intègrent activement dans le SNC et limitent les effets délétères (tels que le sprouting ou l’allodynie) liés à l’intégration superflue de cellules des autres lignages (Andressen et al., 2001; Han et al., 2002; Hofstetter et al., 2005; Muramatsu et al., 2005; Windrem et al., 2004). Chacune de ces études recourt à des procédés différents et ne poursuit pas non plus le même objectif. Par exemple, Windrem cherche à sélectionner certaines cellules en particulier, les cellules A2B5+ (Windrem et al., 2004), alors que Hofstetter s’applique à éliminer un sous-type indésirable, les cellules astrocytaires (Hofstetter et al., 2005). Pourtant, les résultats obtenus s’accordent pour conclure que des transplantations de populations homogènes conduisent à une meilleure efficacité thérapeutique.
Ainsi, mettre en place des systèmes simples et efficaces pour se procurer les phénotypes cellulaires désirés et systématiser leur obtention à partir des cellules souches et progénitrices nerveuses fœtales en culture s’avère désormais nécessaire. Une telle recherche a donc fait l’objet de mon travail de thèse au sein du LGN.

Homogénéisation des populations cellulaires

Au cours de ma thèse, deux stratégies ont été envisagées afin d’homogénéiser les populations de cellules souches et progénitrices nerveuses fœtales à greffer. La première méthode consiste à orienter la différenciation des cellules vers un lignage voire un sous-type cellulaire donné par surexpression de gènes de développement impliqués dans le devenir neuronal versus glial des progéniteurs nerveux. La deuxième méthode cherche à sélectionner les cellules d’un lignage précis par expression de protéines rapportrices sous le contrôle de promoteurs spécifiques des différents lignages du SNC. Chacune de ces stratégies est fondée sur l’utilisation de vecteurs lentiviraux.

Orientation de la différenciation des cellules souches en culture

Justification de la stratégie

Au cours du développement du système nerveux central de mammifère, les progéniteurs multipotents produisent les cellules des trois lignages principaux –neurones, astrocytes et oligodendrocytes- à des temps et dans des endroits spécifiques (Temple, 2001). En général, la différenciation neuronale a lieu à des stades embryonnaires précoces (les marqueurs neuronaux sont détectés chez la souris à partir de E12 et affichent un pic à E15) alors que les deux autres lignages apparaissent plus tardivement (les marqueurs astrocytaires sont exprimés à partir de E16 et les oligodendrocytes matures émergent au stade post-natal). La détermination du devenir cellulaire a donc été décrite comme un choix binaire « neurone versus glie ». Dans notre stratégie d’orientation de la différenciation des progéniteurs nerveux fœtaux humains, l’étape critique réside, dès lors, dans la décision d’engendrer des cellules neuronales par opposition à des cellules gliales.
Des systèmes fondés sur des modèles développementaux ont récemment été élaborés pour orienter le devenir des cellules. Un certain nombre de protocoles a été établi in vitro pour engendrer des précurseurs neuronaux plutôt que gliaux et inversement, à partir de cellules ES principalement (Brustle et al., 1999; Li et al., 1998; Mujtaba et al., 1999; Okabe et al., 1996), mais également à partir de cellules souches neuroépithéliales (Johe et al., 1996; Kalyani et al., 1998; Mayer-Proschel et al., 1997). En outre, la différenciation in vitro de ces différentes classes de cellules a pu être poussée jusqu’au phénotype terminal. Ainsi, les cellules ES ont été spécialisées en neurones dopaminergiques (Lee et al., 2000), en neurones sérotoninergiques (Kim et al., 2002), en motoneurones (Wichterle et al., 2002) ou en neurones GABAergiques (Barberi et al., 2003), tandis que les cellules neuroépithéliales ont surtout produits des neurones dopaminergiques (Riaz et al., 2004; Storch et al., 2001) et des oligodendrodytes (Danesin et al., 2006). Les conditions permettant d’enrichir ces cultures en un sous-type neuronal précis ont été essentiellement choisies sur la base d’une exposition séquentielle à des signaux épigénétiques* (facteurs solubles tels que l’acide rétinoïque, Shh, BDNF, GDNF, IL-1, LIF…), qui miment le développement nerveux in vivo (Figure I-8). Ces protocoles de différenciation sont efficaces mais relativement lourds et fastidieux à mettre à place. Une autre technique permettant de contourner ces inconvénients consiste à amorcer la différenciation en surexprimant in vitro des gènes du développement.
Des cellules d’origines variées ont déjà permis d’expérimenter ce procédé. Par exemple, des précurseurs nerveux dérivant de la surexpression du gène Nurr1* dans des cellules ES de souris sont positifs pour la tyrosine hydroxylase (Kim et al., 2007; Kim et al., 2003a; Kim et al., 2003b). De même, des cultures de cellules souches nerveuses de rat ou de souris adultes transduites avec un vecteur rétroviral exprimant le gène Ngn2, empruntent à 90% une voie neuronale (Falk et al., 2002; Hofstetter et al., 2005). Ou encore la transduction d’une lignée de cellules souches nerveuses de souris avec un vecteur rétroviral surexprimant le gène Ngn1 conduit à l’apparition d’un phénotype GABAergique majoritaire (Muramatsu et al., 2005). Enfin, la surexpression du gène Bcl-XL dans des cellules souches nerveuses fœtales humaines induit la formation de neurones dopaminergiques (Liste et al., 2004). Cette nouvelle stratégie apporte des résultats intéressants et a motivé notre choix de tester et de comparer les effets, sur la différenciation des cellules souches nerveuses fœtales humaines en culture, de différents gènes du développement connus pour jouer un rôle dans la spécialisation neuronale : les gènes proneuraux (Nieto et al., 2001).

Orientation de la différenciation : les gènes proneuraux

Historique

Les premières études relatives aux gènes proneuraux remontent à la deuxième moitié du XXe siècle. A la fin des années 70, un groupe de gènes impliqué dans la régulation des premières étapes du développement nerveux a été identifié chez la drosophile (Garcia-Bellido, 1979). L’analyse moléculaire a permis d’isoler 4 gènes différents, achaete (ac), scute (sc), lethal of scute (lsc) et asense (ase) (Gonzalez et al., 1989; Villares and Cabrera, 1987) et a révélé une structure commune, un domaine « basic Helix-Loop-Helix » (bHLH ou hélice-boucle-hélice basique), pour l’ensemble de ces gènes (Murre et al., 1989). Le gène atonal (ato) s’est ajouté plus tardivement à cette liste (Jarman et al., 1993).
Sur la base de la conservation de séquences entre les espèces (Figure I-12), des gènes homologues ont ensuite été découverts chez les vertébrés puis clonés (Guillemot, 1999; Lee, 1997). Parmi ces gènes, on peut citer en particulier :
• le gène de la protéine Neurogénine 1 (ou Ngn1 ou Neurog1 ou Neurogenic Differentiation Factor 3 ou NeuroD3 ou Math4C) identifié pour la première fois chez les vertébrés (homme et souris) en 1996 (Ma et al., 1996; McCormick et al., 1996).
• le gène de la protéine Neurogénine 2 (ou Ngn2 ou Neurog2 ou Math4A ou Atoh4) identifié pour la première fois chez les vertébrés en 1996 (Gradwohl et al., 1996).
• le gène de la protéine Neurogénine 3 (ou Ngn3 ou Relax ou Math4B ou Atoh5) identifié pour la première fois chez les vertébrés (souris) en 1996 (Gradwohl et al., 1996; Sommer et al., 1996). En parallèle, une équipe de notre laboratoire a isolé le gène équivalent chez le rat en 1997 (Ravassard et al., 1997).
• le gène de la protéine Ash1 (ou Achaete-Scute complex Homolog-like 1 ou Ascl1) cloné pour la première fois chez les mammifères (rat) en 1990 (Johnson et al., 1990). Le gène de souris a été identifié en 1991 (Lo et al., 1991) et le gène humain en 1993 (Ball et al., 1993). Le gène ash1 est présent dans toutes les espèces analysées et porte un nom correspondant pour chacune d’entre elles (mash1 chez la souris, hash1 chez l’homme, cash1 chez le poulet et xash1 chez le xénope).

Rôle particulier des gènes Ngn1, Ngn2, Ngn3 et Mash1

Dans le contexte du développement de l’ectoderme (qui donne naissance au système nerveux) (Figure I-3), les gènes proneuraux constituent des éléments nécessaires et suffisants à l’apparition de progéniteurs engagés dans la voie de différenciation neuronale (Jan and Jan, 1994; Jimenez and Modolell, 1993). D’une manière générale, ils permettent d’amorcer la formation des lignages neuronaux, c’est-à-dire la neurogenèse*. Leur action passe non seulement par le choix du devenir neuronal versus glial, mais également par la régulation de l’identité du sous-type neuronal formé à partir des progéniteurs nerveux.
Dans une stratégie d’orientation de la différenciation des cellules souches nerveuses fœtales humaines en culture, l’utilisation de gènes présentant de telles propriétés revêt tout son intérêt. Quatre de ces gènes se distinguent de manière singulière en tant que candidats potentiels à la surexpression. Les gènes Neurogénines (1, 2 et 3) et Mash1 s’avèrent, en effet, être des acteurs majeurs de la neurogenèse* et ont inévitablement attiré notre attention.

Rôle des gènes proneuraux au cours du développement

Des analyses génétiques par perte et gain de fonction ont été capitales pour identifier les gènes bHLH présentant une activité proneurale et déterminer leur réelle implication dans le développement nerveux. Elles ont révélé une forte hétérogénéité de fonctionnement entre les différents gènes. L’étude particulière des gènes Ngn1, Ngn2, Ngn3 et Mash1 illustre parfaitement cette affirmation.

Rôle dans la neurogenèse

Au niveau du SNP, l’expression ectopique dans des cellules de la crête neurale des gènes bHLH Ngn1, Ngn2 et Mash1 est suffisante pour stimuler la différenciation neuronale des progéniteurs nerveux in vivo et in vitro (Cai et al., 2000; Farah et al., 2000; Fode et al., 2000; Ma et al., 1996; Mizuguchi et al., 2001). En particulier, l’expression des gènes Ngn1 et Ngn2 conduit à la formation de neurones sensitifs (Ma et al., 1998; Perez et al., 1999; Sun et al., 2001), tandis que la surexpression de Mash1 induit la synthèse de neurones autonomes (Lo et al., 2002). Des expériences de perte de fonction ont démontré plus précisément que l’inactivation du gène Ngn1 prévient le développement des neurones sensoriels proximaux alors qu’à l’opposé, celle du gène Ngn2 touche la sous-classe des neurones sensoriels distaux (Fode et al., 1998; Ma et al., 1998). Une inhibition ciblée du gène Mash1 chez la souris perturbe le développement de plusieurs classes de neurones autonomes (sympathiques et parasympathiques) (Guillemot and Joyner, 1993).
Au niveau du SNC, les gènes Ngn1 et Mash1 contrôlent des étapes distinctes de la différenciation des neurones sensitifs de l’épithélium olfactif (Cau et al., 2002; Ma et al., 1997). Le gène Ngn2 permet d’engendrer des neurones dopaminergiques du mésencéphale (Andersson et al., 2006; Kele et al., 2006; Thompson et al., 2006), des neurones glutamatergiques (Parras et al., 2002) et, en coopération avec le gène bHLH Olig2, des motoneurones (Mizuguchi et al., 2001; Novitch et al., 2001). De plus, quand le gène Ngn2 est inséré au niveau du locus du gène Mash1, par une stratégie de knock-in, les neurones du télencéphale ventral se différencient normalement et ne présentent pas de changements majeurs du phénotype. Ainsi, Ngn2 semble agir comme un facteur permissif qui nécessite la combinaison avec d’autres facteurs pour spécifier le phénotype neuronal (Parras et al., 2002). D’autre part, l’inhibition de Ngn2 entraîne une expression ectopique de Mash1 au niveau du télencéphale dorsal, stimulant la neurogenèse ectopique de neurones GABAergiques dans cette région (Fode et al., 2000; Parras et al., 2002). De même, quand Mash1 remplace le gène Ngn2 au niveau du locus de Ngn2, les progéniteurs présents dans la zone dorsale du télencéphale ne suivent pas leur voie de différenciation classique mais au contraire, deviennent des neurones GABAergiques (Chapouton et al., 2001). Par ailleurs, l’expression ectopique du gène Mash1 dans la moelle épinière de poulet stimule l’expression des marqueurs spécifiques des neurones sérotoninergiques (Pattyn et al., 2004). Enfin, dans des embryons mutés pour Mash1, des précurseurs neuronaux sont produits mais leur développement est bloqué avant l’étape de différenciation terminale (Sommer et al., 1995).
Ainsi, ces études indiquent qu’en plus d’agir comme des déterminants neuronaux, les gènes Neurogénines et Mash1 jouent un rôle dans la spécification de l’identité neuronale, c’est-à-dire qu’ils définissent des populations distinctes de progéniteurs dans le système nerveux en développement. La combinaison de plusieurs gènes proneuraux peut, de surcroît, induire la formation de sous-types neuronaux différents de ceux induits par les gènes proneuraux seuls (Miyoshi et al., 2004; Mizuguchi et al., 2001; Novitch et al., 2001), ce qui, associé à une expression spatiale et temporelle adéquates, peut expliquer que l’ensemble des sous-types neuronaux de l’organisme puisse être synthétisé à partir d’un nombre restreint de facteurs bHLH. Il semblerait qu’au cours de la neurogenèse des mammifères, les toutes premières étapes impliquent l’expression d’un petit nombre de gènes proneuraux bHLH qui amorcent une cascade d’événements d’activation conduisant, finalement, à l’expression des gènes de la différenciation terminale (Ma et al., 1997). Malgré une implication considérable, le rôle des gènes proneuraux ne se limite, cependant, pas à la neurogenèse.

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Table des matières

Introduction
I. Cellules souches : généralités
A. Définitions
1. Cellules indifférenciées
2. Prolifération
3. Potentiel de différenciation
B. Source d’obtention des cellules souches
1. Cellules souches embryonnaires
2. Cellules souches foetales
3. Cellules souches adultes
4. Précurseurs
II. Cellules souches nerveuses foetales humaines et Thérapie cellulaire du système nerveux central
A. Atouts des cellules souches nerveuses foetales
B. Caractéristiques des cellules souches nerveuses foetales humaines in vitro et in vivo
1. Mise en culture et amplification
2. Différenciation
3. Greffes de cellules souches nerveuses foetales humaines
III. Homogénéisation des populations cellulaires
A. Orientation de la différenciation des cellules souches en culture
1. Justification de la stratégie
2. Orientation de la différenciation : les gènes proneuraux
a) Historique
b) Structure et propriétés biochimiques des gènes proneuraux
c) Rôle particulier des gènes Ngn1, Ngn2, Ngn3 et Mash1
(1) Patrons d’expression
(i) Localisation spatiale chez la souris
(ii) Localisation temporelle chez la souris
(2) Rôle des gènes proneuraux au cours du développement
(i) Rôle dans la neurogenèse
(ii) Rôle dans l’arrêt du cycle cellulaire
(iii) Rôle dans la différenciation gliale
(iv) Autres fonctions des gènes proneuraux
d) Mécanisme d’action et régulation : la voie Notch
B. Méthode de tri cellulaire
1. Justification de la stratégie
2. Description des promoteurs
3. Principe de la stratégie
C. Les vecteurs lentiviraux
1. Structure des lentivirus
2. Multiplication
3. ADN proviral
4. Squelette du vecteur lentiviral
5. Vecteurs lentiviraux utilisés comme outils pour enrichir les populations
Matériel et Méthodes
I. Cultures de cellules souches nerveuses foetales
A. Fondement légal
B. Mise en culture et amplification
II. Vecteurs lentiviraux
A. Construction des plasmides de différenciation
B. Construction des plasmides traceurs
C. Production
III. Dot-Blot
IV. Transduction lentivirale des cellules en culture
A. Transduction avec les vecteurs de différenciation
B. Transduction avec les vecteurs traceurs
V. Immunocytochimie
VI. Analyse par cytométrie en flux
VII. Statistiques
Résultats
I. Effet des gènes proneuraux
A. Efficacité de transduction des vecteurs de différenciation
B. Caractérisation de la population initiale
1. Phénotype initial de TFH7
2. Phénotype initial de TFH6
C. Effet de la surexpression des gènes proneuraux
1. Effet de la surexpression des gènes proneuraux sur la prolifération cellulaire
2. Effet des gènes proneuraux sur la différenciation cellulaire
a) Effet de la surexpression du gène Ngn1
b) Effet de la surexpression du gène Ngn2
c) Effet de la surexpression du gène Ngn3
d) Effet de la surexpression du gène Mash1
e) Différenciation terminale
D. Rôle du bFGF
1. Effet du bFGF sur le phénotype de la population TFH7 non transduite
2. Influence du bFGF après transduction des cellules avec le vecteur contrôle
3. Effet de la surexpression des gènes proneuraux en absence de bFGF
a) Effet sur la prolifération
b) Effet sur la différenciation
II. Spécificité des promoteurs des différents lignages
A. Capacité des vecteurs traceurs à transduire des cellules en culture
B. Analyse de la spécificité d’expression induite par les promoteurs
1. Spécificité d’expression des différents promoteurs à une dose de 50 ng p24/puits
a) Phénotype de la population globale
b) Phénotype des cellules fluorescentes
2. Rôle de la dose de vecteur sur la spécificité d’expression
Discussion
I. Première stratégie : orientation de la différenciation des progéniteurs nerveux humains par surexpression de gènes proneuraux
A. Effets comparés des gènes Ngn1, Ngn2, Ngn3 et Mash1
1. Effet sur la prolifération des cellules
2. Effet sur la différenciation des cellules
3. Phénotype terminal des cellules
4. Influence du bFGF sur l’effet des gènes proneuraux
B. Pathologies ciblées
C. Limites de la technique
1. Durée de la surexpression des gènes proneuraux
2. Choix du vecteur viral
3. Phénotype in vivo difficilement prévisible
II. Seconde stratégie : tri des cellules d’intérêt par expression d’une protéine rapportrice sous le contrôle d’un promoteur choisi
A. Justification de la non-spécificité
B. Brèche dans la spécificité du promoteur Nestine
C. Solutions pour améliorer l’efficacité du tri cellulaire
D. Conclusion
III. Avenir de la thérapie cellulaire dans le SNC
A. Choix des cellules
1. Avantages des cellules foetales
2. Limites des cellules foetales
a) Effets de l’amplification in vitro
b) Matériel difficilement accessible
B. Choix de la stratégie thérapeutique
1. Greffe de cellules dans le système nerveux central
a) Caractéristiques des cellules à greffer
b) Limites de la stratégie de greffe de cellules
2. Stratégie des « cellules souches intelligentes »
3. Stratégie de stimulation des cellules souches endogènes
Conclusion
Lexique
Annexes
Références bibliographiques

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