Les pathologies inflammatoires démyélinisantes primitives du système nerveux central (SNC)sont dominées par deux entités: la sclérose en plaques (SEP) et laneuromyélite optique (NMO). La sclérose en plaques (SEP) se caractérise par des atteintes de l’encéphale, de la moelle épinière et des voies optiques avec un polymorphisme clinique important.Dans le monde, le nombre de personnes atteintes par la SEP est estimé à 2,5millions[1]. Elle est la première cause de handicap moteur acquis non traumatique de l’adulte jeune en occi‐ dent [1, 2]. Elle débute dans environ 70 % des cas entre 20 et 40 ans [3]. La SEP est plus fréquente chez la femme que chez l’homme, dans un rapport de trois pour deux et ce rapport semble en voie d’augmentation dans certaines populations [3]. Quant à la neuromyélite optique (NMO), longtemps considérée comme une forme parti‐ culière de la SEP, il s’agit d’une pathologie inflammatoire démyélinisante dusystème nerveux central (SNC) qui se caractérise par l’association demyélite longitudinale et extensive et de névrite optique. Elle se différencie de la SEP du point de vue immunopa‐ thologique, pronostique mais aussi thérapeutique. L’évolution de la maladie se fait de manière rémittente dans plus de 90% des cas [4]. La deuxième poussée survient dans l’année pour 60% des patients et dans les 3 ans pour 90% d’entre eux [5]. Le début de maladie se situe habituellement entre 18 et 50 ans dans 74% des cas [6]. Elle représente 1,2% des pathologies inflammatoires démyélinisantes du SNC [7].Les populations non caucasiennes (africaines, asiatiques…) sont plus fréquemment atteintes, la NMO pouvant alors représenter jusqu’à48% des pathologies inflammatoires démyéli‐ nisantes du SNC dans ce sous‐groupe de population [4]. En Afrique subsaharienne la prévalence exacte de ces affections est mal connue, cepen‐ dant il semble d’après les données de la littérature que les cas de NMO seraient plus fré‐ quents que ceux des SEP classiques[8]. Au Mali peu de données existent sur ces pathologies, c’est dans cette dynamique que nous avons entrepris ce travail qui a pour objectif de déterminer le profil épidémiolo‐ gique, clinique et évolutif des pathologies inflammatoires démyélinisantes primitives du système nerveux central dans le service de Neurologie du CHU Gabriel Touré.
RAPPEL ANATOMIQUE
ORGANISATION GÉNÉRALE DU SYSTÈME NERVEUX
Le système nerveux est divisé en deux parties :
‐ le système nerveux central qui comprend l’encéphale (le cerveau, le tronc cérébral et le cervelet) et la moelle épinière ;
‐ le système nerveux périphérique formé par les nerfs crâniens et rachidiens.
ANATOMIE FONCTIONNELLE DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL
Le système nerveux central est composé de deux catégories de cellules : les neurones et les cellules de la névroglie ou cellules gliales.
Les neurones
Ils remplissent la plupart des fonctions spécialisées attribuées au système nerveux : la sensibilité, la pensée, la mémoire, l’activité musculaire et la régulation des sécrétions glandulaires. La plupart des neurones sont formés de trois principales parties :
‐le corps cellulaire qui contient le noyau et les organites cellulaires,
‐les dendrites
‐ et en fin l’axone qui peut être couvert ou pas par la gaine de myéline (axone myélinisé ou non). La myéline constitue un revêtement lipidique et protéique à couches multiples produit par les oligodendrocytes. Par intervalles, le long de l’axone, la gaine de myéline présente des brèches appelées nœuds de Ranvier. Sur le plan électrique la gaine de myéline isole l’axone d’un neurone et augmente la vitesse de conduction de l’influx ner‐ veux qui saute d’un nœud de Ranvier au suivant (conduction saltatoire).
La névroglie
Elle soutient, nourrit et protège les neurones, ce qui maintient l’homéostasie du liquide qui baigne ces derniers. La névroglie est composée de quatre types de cellules :
‐les astrocytes :
Les astrocytes sont des cellules étoilées dotées de nombreux prolongements. Ils partici‐ pent au métabolisme des neurotransmetteurs, maintiennent l’équilibre de l’ion K+, con‐ tribuent au développement de l’encéphale, aident à former la barrière hémato‐ encéphalique en vue de la régulation de l’entrée des substances dans l’encéphale et constituent un lien entre les neurones et les vaisseaux sanguins.
‐les oligodendrocytes : ce sont les cellules productrices de la gaine de myéline.
‐les microgliocytes :
Il s’agit de petites cellules phagocytaires dérivées des monocytes. Ils protègent le SNC en englobant les microbes envahisseurs et éliminant les débris de cellules mortes.
‐les cellules épendymaires :
Ce sont des cellules ciliées qui tapissent les ventricules cérébraux et le canal épendy‐ maire (système cavitaire du SNC où circule le liquide céphalo‐rachidien: LCR).
SCLÉROSE EN PLAQUES
HISTORIQUE
Dans des textes remontant pour les plus anciens à la fin du XIVème siècle, certains au‐ teurs identifient les premières descriptions de personnes possiblement atteintes de sclérose en plaques (SEP). Ce n’est qu’à partir du XIX » »‘ siècle que les progrès de la mé‐ decine permettront progressivement de distinguer les caractéristiques de cette maladie des autres affections du système nerveux. Il convient à ce titre de signaler les contribu‐ tions de Charles‐Prosper Ollivier d’Angers, qui a rapporté en 1824 le premier cas de SEP de la littérature médicale dans son traité consacré aux maladies de la moelle épinière, de Robert Carswell et de Jean Cruveilhier, à qui l’on doit les premières observations anatomo‐pathologiques en 1838 et 1841 respectivement, là encore essentiellement au niveau de la moelle épinière et du tronc cérébral. Ce n’est qu’en 1849 qu’un médecin allemand, Friedrich‐Theodor von Frerichs, établit le diagnostic de SEP (<<Hirnsklerose >>) du vivant d’un patient avec confirmation anato‐ mopathologique post‐mortem, ouvrant l’ère des études de corrélations anatomocli‐ niques. Les principales anomalies histologiques de la maladie (inflammation et démyélinisation avec relative préservation axonale) ont été établies dans les années 1860 : Eduard Rind‐ fleisch nota en 1863 la présence d’infiltrats inflammatoires périvasculaires au sein des plaques de sclérose, l’amenant à déduire que la maladie était de nature inflammatoire et vraisemblablement favorisée par une anomalie sous‐jacente de la vascularisation céré‐ brale et Charcot remarqua l’altération caractéristique des gaines de myéline. Cette entité a été décrite pour la première fois de manière extensive en 1868 par Char‐ cot [12].
Les études autopsiques détaillées de neuf patients permirent à l’écossais James Dawson de caractériser entre 1916 et 1924 la SEP comme étant une <<encéphalomyélite subai‐ guë disséminée>>. On assiste de nos jours à un regain d’intérêt pour les études anato‐ mo‐pathologiques dans la SEP, du fait notamment de l’essor des techniques de biologie moléculaire. Les apports de l’analyse du liquide céphalo‐rachidien (LCR), des potentiels évoqués vi‐ suels et surtout des techniques modernes d’imagerie médicale dont témoigne la place de l’imagerie par résonance magnétique dans le diagnostic de la sclérose en plaques ont révolutionné les connaissances sur cette pathologie.
ÉPIDEMIOLOGIE
Sclérose en plaques dans le monde
La SEP présente une distribution mondiale avec une répartition géographique hetéro‐ gène. La prévalence croît dans chaque hémisphère, de l’équateur vers les pôles. Ainsi la prévalence brute de la SEP varie d’un maximum compris entre 240 cas pour 100 000 habitants au Canada [13] et 224 pour 100 000 dans les iles des Orcades et Shetlands [14] à un minimum de 3 cas pour 100 000 en Afrique du Sud [15]. Cette apparenteaug‐ mentation de prévalence avec la latitude a été appelée le « gradient de latitude » [16]. Les zones de forte prévalence (>30 pour 100 000) incluent le nord de l’Europe, le nord des Etats‐Unis et du Canada, le sud de l’Australie et la Nouvelle Zélande. Les zones de moyenne prévalence (5‐30 pour 100000) comprennent le sud de l’Europe, le sud des Etats‐Unis et le nord de l’Australie. Des zones de faible prévalence (<5 pour 100 000) comprennent l’Asie, l’Amérique du sud. Alonso a réalisé une méta‐analyse reprenant les études sur l’incidence publiées entre1966 et 2007 et référencées sur MEDLINE ou EMBASE [17]. Cetteméta‐analyse révèle une association entre les fortes incidences de SEP et les latitudes les plusélevées. Pour chaque augmentation de 10 degrés de latitude, l’incidence de la SEP augmentede 30% chez les femmes et de 50% chez les hommes. Ce gradient de latitude semble s’atténuer après 1980 à cause de l’augmentation de l’incidence de la SEP dans les pays defaible latitude.
Par ailleurs on note une variation de la prévalence de la SEP dans une même région géo‐ graphique en fonction de l’ethnie : dans une étude nationale menée aux Etats‐Unis en 1976 [18], la prévalence de la SEP chez les sujets blancs étaient de 49 pour 100 000 et de 26 pour 100000 chez les sujets noirs ; au Kwazulu‐Natal, une des neuf provinces d’Afrique du sud, s’étendant du Swaziland et du Mozambique jusqu’au Cap‐Oriental, la prévalence standardisée sur la population mondiale, estimée à partir des données hospi‐ talières et des neurologues libéraux entre 1980 et 2005, était de 25,6 pour 100 000 parmi les blancs, 7,1 pour 100000 parmi les Indiens, 1,7 pour 100000 parmi les per‐ sonnes métisses et 0,2 pour 100000 parmi les noirs [19].
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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. OBJECTIFS
III. GÉNÉRALITÉS
A. RAPPEL ANATOMIQUE
B. SCLÉROSE EN PLAQUES
C. NEUROMYÉLITE OPTIQUE DE DÉVIC
IV. MÉTHODOLOGIE
V. OBSERVATIONS
VI. COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VII. CONCLUSION
VIII. RECOMMENDATIONS
IX. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
X. ANNEXE
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