Organisation du cursus long et du cursus court
Dans les cantons suisses , il existe deux types de cursus qui amènent à l’obtention de la maturité gymnasiale : le cursus long et le cursus court. En général, la durée des études se déroule sur une période allant de 12 à 14, voire même 15 ans pour certains cantons, dont 14 ans au moins dans le système HarmoS5. Au niveau structurel, nous retrouvons le cursus long qui s’étend sur six ans à la suite de l’enseignement primaire. Le cursus court, quant à lui, s’étend sur quatre ans au moins à la suite de la 10e ou 11e HarmoS6 et prévaut en Suisse romande et italienne (Centre suisse de la coordination pour la recherche en éducation (ci- après CSRE, 2014, p. 148). Le cursus long, héritier d’une longue tradition, a été entièrement adopté par les cantons de NW, OW et UR et partiellement par la Suisse centrale et orientale. Au sein d’un même canton, nous pouvons même retrouver les deux types de cursus (dans 8 cantons : AI, GL, GR, LU, SG, SO, ZG, ZH, ce qui constitue environ 1/3 des cantons). L’annuaire de l’instruction publique en Suisse, datant de 1910, mentionnait déjà une durée hétérogène des études. Les exemples de ZH et de TG nous permettent d’observer ce propos7. En effet, en 1910, le canton de ZH proposait uniquement un gymnase en 4 ans, alors que maintenant il est possible de suivre les deux cursus. Le canton de TG, quant à lui, offrait une structure gymnasiale en 6 ans et, aujourd’hui, ne propose plus que le cursus court d’une durée de 4 ans. Ceci prouve que les différents cursus au sein des cantons peuvent évoluer. C’est pourquoi nous avons trouvé qu’il était nécessaire de réaliser une synthèse des différents cursus au gymnase pour chaque canton, afin d’avoir une vue d’ensemble sur la situation en Suisse. Pour ce faire, nous nous sommes basées sur la mise à jour du rapport concernant le cursus conduisant à la maturité gymnasiale mandaté en 2006 par l’association valaisanne des professeurs de l’enseignement secondaire (ci-après AVPES) (AVPES, 2006).
Ce rapport traite des différents cursus et structures en 12 ou 13 ans que les élèves suisses suivent dans les différents cantons. Ces données n’étant plus complètement à jour, nous avons réadapté le tableau en nous basant sur le rapport 2014 du CSRE ; sur deux rapports disponibles sur le site de la CDIP (Passage de l’école obligatoire aux écoles de maturité gymnasiale (2015) et Structures scolaires cantonales en Suisse (2015)), qui détaillent les structures scolaires cantonales en Suisse ; et sur les sites internet des différents gymnases. Nous avons ainsi créé un tableau avec plusieurs entrées, en séparant tout d’abord le cursus long du cursus court. Puis, à l’intérieur même du cursus court, nous avons détaillé la durée propre à chaque structure. Le cursus long, dans la partie supérieure du tableau est composé d’une structure en 6-6, c’est-à-dire six ans de primaire (partie verte), suivis de six ans de gymnase (partie bleue). Le cursus court, dans la partie inférieure, comprend trois structures principales : 6-2-4 ; 6-3-3 ; 6-3-4, soit pour chacune six ans de primaire (partie verte), suivis de deux ans de secondaire I (partie rouge), puis de trois ou quatre ans de gymnase (partie bleue).
Nous pouvons également observer au sein de ce cursus court deux autres cas particuliers : le VS avec une structure de 6-2-5, six ans de primaire, deux ans de secondaire I et cinq ans de gymnase et le TI avec une structure de 5-4-4, cinq ans de primaire, quatre ans de secondaire I et quatre ans de gymnase. En regroupant les cantons en fonction de ces critères, nous pouvons mieux nous rendre compte des disparités entre les cursus et les durées des gymnases. De ce tableau, nous pouvons observer une nouvelle fois que certains cantons offrent les deux types de cursus de formation gymnasiale (AI, GL, GR, LU, SG, SO, ZG, ZH). Nous avons démontré, grâce à l’emploi des couleurs (verte et bleue), qu’à l’intérieur du cursus long, les élèves suivant la filière gymnasiale n’ont pas de secondaire I. Cependant, cela s’applique uniquement aux gymnasiens, les étudiants s’orientant vers une formation professionnelle doivent, quant à eux, passer par le secondaire I. Nous remarquons également que la majorité des cantons propose une formation totale de 12 ans, alors que pour cinq cantons (AG, FR, GE, VS, TI), elle se déroule en 13 ans.
Hypothèses sur le choix des structures
Suite au tableau précédent, qui montre un manque d’harmonisation à travers la Suisse, nous nous sommes interrogées sur ces différentes structures et allons émettre nos hypothèses sur la question. Premièrement, nous nous sommes demandé si ces structures au sein du cursus court étaient liées aux autres niveaux (secondaire I et/ou tertiaire), qui pourraient influencer la durée du gymnase. Certains cantons pensent peut-être qu’il est préférable d’avoir une année supplémentaire au secondaire I, avant de pouvoir accéder au gymnase, pour permettre aux élèves d’être plus matures et mieux préparés, et diminuer le taux d’échec et d’abandon. En effet, beaucoup d’élèves valaisans, qui ont des notes suffisantes pour accéder au gymnase, terminent leur dernière année de scolarité obligatoire (11e HarmoS) par la première année de gymnase. A l’âge de 15 ans et, ne sachant quelle voie choisir, ils optent pour cette solution mais arrêtent parfois après la première année. Nous soulevons par là un manque de maturité de la part des élèves, qui conduit à l’abandon de leur formation gymnasiale. Cela n’aurait peut-être pas lieu d’être si ces élèves avaient effectué leur dernière année de scolarité obligatoire au secondaire I. A l’inverse, il se pourrait que d’autres cantons préfèrent un gymnase plus long afin que les élèves réussissent mieux leurs études tertiaires.
Les élèves seraient donc mieux préparés à l’Université ou aux Hautes Ecoles, ce qui impliquerait une réduction du taux d’échec et d’abandon au niveau supérieur. Cette hypothèse peut être également rapprochée à la sélectivité des étudiants. En effet, nous pouvons constater qu’une sélection sociale s’exerce car seuls les meilleurs élèves peuvent accéder au gymnase après deux ans de secondaire I. Cependant, ceux qui n’ont pas les notes nécessaires devront, quant à eux, suivre une année supplémentaire au secondaire I et auront donc un total d’années de formation plus long8. Notre deuxième hypothèse est liée à la superficie de chaque canton ainsi qu’au taux de maturité. En fonction de la densité du canton, il y aura une plus grande demande de scolarisation et donc un plus grand nombre de gymnases pour lesquels il faudra trouver des fonds et engager du personnel enseignant. Cette hypothèse repose sur la question du coût qu’il est nécessaire de se poser pour comprendre les choix des cantons. Par exemple, les cantons ayant un faible taux de maturité pourraient proposer un cursus long de six ans car les coûts ne seraient pas autant élevés que dans les cantons avec un fort taux de maturité. Cependant, nous allons devoir vérifier les réponses à ces interrogations à l’aide des informations sur les cantons, sur les gymnases et sur l’évolution commune de la structure d’enseignement.
Constats résultant d’un gymnase de trois ou d’au moins quatre ans Nous allons à présent justifier nos hypothèses concernant la durée des études au gymnase et tenter de les valider en nous basant sur certains auteurs. Par la même occasion, nous mettrons en évidence les constats résultant d’une structure de trois ou quatre ans au sein du cursus court. Notre première hypothèse liée aux niveaux inférieur et supérieur au secondaire II doit être mise en lien avec la qualité de la formation, la sélectivité et le taux d’abandon. Concernant la qualité de la formation, les élèves au bénéfice d’une maturité en quatre ans démontrent moins de stress et de craintes de redoublement (AVPES, 2006, p. 7). Cet avantage est renforcé par les propos des enseignants qui trouvent qu’il n’est pas possible d’offrir une éducation de même qualité avec un an de moins au secondaire II. Ils évoquent également le manque de maturité psychologique des élèves après seulement trois ans. Bien que ces élèves aient la possibilité d’entrer plus vite sur le marché du travail et d’être sur le même plan que les étudiants étrangers, ils risquent de rallonger leurs études en s’accordant une année sabbatique avant d’entreprendre leur cursus universitaire. Par conséquent, le choix de la durée reste entre les mains de l’élève et non du gymnase (AVPES, 2006, p. 8).
De plus, il existe aussi un critère de sélectivité qu’il faut prendre en considération. En effet, le choix de la formation dépend également de l’intérêt des élèves et de leurs parents mais aussi de leurs origines socioéconomique et culturelle. Ce choix est lié à l’entrée au gymnase et à l’égalité des chances, qui demandent de bons résultats à la suite de la scolarité obligatoire (CSRE, 2014, p. 110 et p. 156). Il est intéressant de constater que le taux de maturité a également une influence sur l’accès au gymnase. En effet, dans certains cantons où le taux de maturité est faible, même les bons élèves ne sont pas assurés d’avoir leurs places au gymnase. Ils devront peut être effectuer une année supplémentaire de secondaire I avant de poursuivre leurs études gymnasiales (CSRE, 2014, pp. 144-145). Quant au taux d’abandon, il n’existe pas de chiffres précis qui permettent de montrer une influence sur le choix de la durée. Cependant, il existe des données montrant qu’il y a une corrélation entre les taux de maturité et les départs précoces (annexe 2). Par exemple, il existe un plus grand taux d’abandon dans les cantons de GE et du TI où les taux de maturité sont plus élevés (CSRE, 2014, p. 156). Les cantons proposant le début du gymnase après trois ans de secondaire I sont en accord avec les réformes proposées par HarmoS et permettent une meilleure intégration et harmonisation nationale. Cependant, certains gymnases utilisent ce prétexte pour diminuer les coûts de la formation.
Selon le rapport de 2006 sur le cursus conduisant à la maturité gymnasiale (AVPES, 2006, p. 5) : « L’argument principal du raccourcissement reste économique, mais les réformes du secondaire I et du degré primaire lui donnent un utile prétexte ». Il est donc vrai que la question des coûts est la raison essentielle d’une diminution de la durée des études gymnasiales pour améliorer les finances publiques. L’organisation très hétérogène des gymnases en trois ou quatre ans ne dépend ni du taux de maturité par classe d’âge, effectif dans chaque canton, ni de la densité. En effet, l’annexe 3, représentant la répartition des élèves selon le type d’école et le canton, montre que la formation gymnasiale n’est pas le choix premier des élèves suisses, surtout dans les cantons suisse-allemands, qui préfèrent une formation professionnelle. Nous pouvons dès lors nous demander si le taux de maturité est en corrélation avec le nombre de gymnases par canton. En prenant le cas de ZH, selon l’annexe 3, nous observons un taux de 20 % pour un canton bénéficiant de plusieurs gymnases, alors que le JU avec un seul gymnase, compte un taux de plus de 25 %. Le cas de GE, par contre, pourrait valider cette interrogation, mais n’est pas suffisant pour généraliser une influence du taux de maturité sur le nombre de gymnases en Suisse par canton (CSRE, 2014, p. 109). De plus, afin de répondre à la question de la densité, certains cantons n’ont qu’un seul gymnase (AR, AI, GL, JU, NW, OW, SH, UR), alors que d’autres en comptent beaucoup plus (ZH, GE, LU). Ces derniers coûtent donc plus chers mais n’impliquent pas un gymnase d’une durée plus courte (Eberle & Brüggenbrock, 2013, p. 39).
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Table des matières
Introduction
1. Historique des gymnases suisses
1.1. De la réforme de 1925au règlement de 1995
1.2. Changements apportés suite au règlement de 1995
2. Durée des études gymnasiales dans les cantons suisses
2.1. Organisation du cursus long et du cursus court
2.2. Hypothèses sur le choix des structures
2.3. Constats résultant d’un gymnase de trois ou dau moins quatre ans
3. EVAMAR II : point de départ des débats actuels ?
3.1. EVAMAR II : résultats
3.2. Projet 5et avis divergents
3.3. Débats actuels par des exemples Vaud-Valais)
3.4. Harmonisation possible ou partielle ?
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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