Historique de la tuberculose
La tuberculose a été décrite depuis le temps d’HIPPOCRATE sous le terme grec « phtisis », avec une connotation de dépérissement progressif des malades qui en étaient atteints. ARISTOTE avait soupçonné sa nature contagieuse, observant « l’air pernicieux » et la « production de maladie ». Cependant la tuberculose n’a été reconnue comme problème majeur de santé publique qu’à partir de la révolution industrielle. Au 18e et 19e siècle la tuberculose était responsable de 25% des décès dans les villes européennes [72]. Le caractère microbien de la tuberculose, soupçonné dès 1865 par Villemin, a été formellement démontré en 1882 par Robert KOCH qui colore et fait pousser le bacille responsable sur sérum coagulé. La même année, ELRICH met en évidence son acido alcoolo résistance qui est révélé dès 1883 par la méthode de coloration de ZIEHL et NEELSEN. En 1887, NOCARD et PROUX montrent que l’addition de glycérine stimule la croissance du bacille. Les travaux de RIVOLTA et de MAFFUCCI en 1889- 1890 conduisent à différencier le bacille tuberculeux aviaire du bacille tuberculeux humain et en 1894, ceux de THEOBALT SMITH, le bacille tuberculeux bovin du bacille tuberculeux humain. Les bacilles tuberculeux pathogènes, humains, bovins et aviaires, sont dès lors individualisés. De nombreux bacilles acido-alcoolo-résistants présents dans l’environnement, appelés bacilles para tuberculeux, sont également décrites. BUHLER et BOLLAK découvrent le pouvoir pathogène occasionnel de certaines espèces de bacilles para tuberculeux qui changent de nom et s’appelle désormais mycobactéries atypiques. De 1908 à 1920, CALMETTE et GUÉRIN mettent au point le vaccin qui porte leur nom. En 1944, WOMAN découvre la streptomycine, premier antibiotique actif sur le bacille tuberculeux [23,32].
Puis viennent en 1949, l’acide para-amino-salicylique (PAS) ; en 1952, isoniazide et la rifampicine en 1967. En 1968, enfin BOIS VERT et COLL [51] découvrent une variété africaine de bacille tuberculeux élevée au titre d’espèce sous le nom de Mycobacterium africanum. D’abord séparées en espèces différentes, M. tuberculosis, M. bovis et M. africanum sont maintenant regroupés sous le nom de complexe tuberculosis en raison de plus de 95% de similarité génomique.
Historique de l’infection à VIH
Le premier signe documenté d’infection par le VIH chez l’homme remonte à 1959 [30], année où une prise de sang est effectuée sur un homme à Léopold Ville (actuelle Kinshasa) dans le Congo Belge ; suivent alors plusieurs patients atteints de maladies rares (maladie de kaposi), aujourd’hui considérées comme maladie opportunistes dans les cas d’infections par le VIH. En 1969, aux USA, un adolescent de 15 ans meurt à l’hôpital de Saint-Louis (Missouri) d’une forme de maladie de KAPOSI. Un test VIH est effectué en 1987 par des chercheurs de l’université Tulane qui détectent la présence du VIH1 dans le sang de l’adolescent. En 1976, un matelot norvégien, sa femme et leur fille (09 ans) meurent des suites du SIDA, le matelot avait présenté les premiers signes dès 1966, soit 04 ans après un séjour en Afrique de l’Ouest. En 1977, un chirurgien danois, le Dr Grethe Rask, décède des suites du SIDA, après un séjour au Congo dans les années 1970. C’est le 05 Juin 1981 que commence officiellement l’épidémie du SIDA lorsque le CDC note dans sa revue « Morbidity and Mortality weekly Report » une recrudescence de pneumocystose chez cinq hommes homosexuels à los-Angeles [68]. Plusieurs autres cas sont recensés dans d’autres villes du pays et il est noté chez plusieurs de ces personnes un état d’immunodépression.
Comme les premiers malades sont exclusivement homosexuels, le syndrome est appelé le « gay-related immunodéficiency disease » (GRID) mais les autorités sanitaires se sont rendus compte que ce syndrome touchait les hémophiles, les usagers de drogue par injection intraveineuse, les hétérosexuels. Cette dénomination fut alors remplacée par le terme de « Acquired immune deficiency syndrome » (AIDS) [21], SIDA en français. La découverte en 1983 de l’agent infectieux, le Virus de l’immunodéficience humaine (VIH) marque le début de la recherche sur ce Virus. En 1986, un deuxième virus du SIDA est découvert à l’institut pasteur et sera nommé VIH2, il est majoritairement présent en Afrique de l’ouest. La même année, l’activité antivirale de l’AZT est en mise en évidence. En 1990, apparaissent les premières associations ARV sous le nom de multithérapie.
Historique de la co-infection
A partir de 1952, avec l’apparition d’une chimiothérapie efficace, le déclin de la tuberculose était réel. Dans les pays industrialisés, le risque d’infection déclinait de 10 à 15% par an et le seuil d’éradication était fixé vers 2005-2030. Dans les pays en développement, le taux de déclin était de 5 à 10% par an en Amérique Latine, dans les Caraïbes et en Afrique du nord. Il était au maximum de 3% par an en Afrique sub saharienne et en Asie du sud-est, du même ordre que le taux de croissance démographique [17]. Cependant, l’avènement de l’infection à VIH/SIDA, est venu compromettre l’un des gros espoirs en matière de santé. En effet, alors qu’on avait commencé à espérer une élimination voire une éradication de la tuberculose dans plusieurs régions du monde, notamment dans les pays développés, cette pandémie est venue complètement modifier les belles courbes de régression de la tuberculose [25]. On a assisté, dès 1986, à une recrudescence de la tuberculose dans le monde. C’est aux Etats -Unis que l’augmentation du nombre des cas avait été d’abord signalée (3% en 1986, 6% en 1990) et le rôle de l’infection à VIH paraissait très vraisemblable dans cette résurgence. En Afrique Noire et en Asie du sud-est, l’importance de l’endémie tuberculeuse et la prévalence élevée de l’infection à VIH ont rendu cette situation plus fréquente qu’ailleurs [7]. Ainsi la tuberculose, connue depuis les temps les plus reculés de l’humanité, par la terreur et la mort qu’elle avait semé à travers des siècles et qui avait été maîtrisée vers les années [60-80], voit aujourd’hui sa résurgence avec l’avènement de l’infection à VIH/SIDA.
EPIDEMIOLOGIE
EPIDEMIOLOGIE DU VIH
En 2013, 35 millions de personnes [33,2 millions–37,2 millions] vivaient avec le VIH. Depuis le début de l’épidémie environ 78 millions de personnes [71 millions–87 millions] ont été infectées par le VIH et 39 millions de personnes [35 millions–43 millions] sont décédées de maladies liées au SIDA. Les nouvelles infections à VIH ont chuté de 38% depuis 2001. Dans le monde, 2.1 millions de personnes [1,9 million–2,4 millions] ont été nouvellement infectées par le VIH en 2013, contre 3,4 millions [3,3 millions–3,6 millions en 2001. Les nouvelles infections à VIH parmi les enfants ont diminué de 58% depuis 2001. Dans le monde, 240 000 enfants [210000–280 000] ont été nouvellement infectés par le VIH en 2013, contre 580 000 [530 000–640 000] en 2001. Les décès liés au SIDA ont chuté de 35% depuis le pic de 2005. En 2013, 1,5 million de personnes [1,4 million–1,7 million] sont décédées de causes liées au sida dans le monde, contre 2,4 millions [2,2 millions–2,6 millions] en 2005.
En 2013, environ 12,9 millions de personnes vivant avec le VIH avaient accès à la thérapie antirétrovirale. Cela représente 37% [35%-39%] de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH. Les adultes vivant avec le VIH représentent 38% [36%-40%] qui bénéficient d’un traitement. Cependant seuls 24% [22%-26%] de l’ensemble des enfants vivant avec le VIH bénéficient des médicaments salvateurs. En 2013, 24,7 millions [23,5 millions – 26,1 millions] de personnes vivaient avec le VIH en Afrique subsaharienne. Les femmes représentent 58% du nombre total des personnes vivant avec le VIH. ONUSIDA estimait à 1,5 million [1,3 million – 1,6 million] le nombre des nouvelles infections à VIH, avec une diminution de 33% entre 2005 et 2013. La mortalité liée au SIDA était de 1,1 million [1,0 million – 1,3 million] en 2013. Entre 2005 et 2013, le nombre des décès liés au SIDA en Afrique subsaharienne a chuté de 39%. La couverture du traitement est de 37% de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH. Trois personnes sur quatre sous traitement antirétroviral vivent en Afrique subsaharienne. En 2013, il y a eu 210 000 [180 000 – 250 000] nouvelles infections à VIH parmi les enfants en Afrique subsaharienne. Depuis 2009, il y a eu une diminution de 43% des nouvelles infections à VIH parmi les enfants dans les 21 pays prioritaires du Plan mondial en Afrique. Le Sénégal est un pays à épidémie concentrée avec une prévalence de 0,7% dans la population générale et des prévalences de 18,5% chez les professionnelles du sexe, de 21,8% chez les MSM et de 9,2% chez les injecteurs de drogues intra-veineuses. Derrière ce faible taux de prévalence du VIH au niveau de la population générale (0,7%) se cachent certaines disparités notamment :
– La féminisation de l’épidémie avec un taux de prévalence chez les femmes âgées de 15 et 49 ans supérieur à celui des hommes de la même tranche d’âges (0,8% contre 0,5%) avec un ratio de 1,6 (EDSV) en 2010.
– Une prédominance de l’épidémie dans les régions du sud (Ziguinchor, Kolda, Sédhiou) du Sud-est (Tambacounda, Kédougou) et du centre (Kaolack).
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Table des matières
INTRODUCTION
I-HISTORIQUE
I.1 Historique de la tuberculose
I.2 Historique de l’infection à VIH
I.3.Historique de la co-infection
II- EPIDEMIOLOGIE
II.1-EPIDEMIOLOGIE DU VIH
II.2- EPIDEMIOLOGIE DE LA TUBERCULOSE
II.2.1 Dans le monde
II 2.2 En Afrique
II.2.3 Au Sénégal
II.2.4 Facteurs favorisants
II.3- EPIDEMIOLOGIE DE LA CO-INFECTION TB-VIH
III. PHYSIOPATHOLOGE
III.1- PHYSIOPATHOLOGE DU VIH
III.1.1 – L’Agent pathogène
III.1.2 – DIAGNOSTIQUE VIROLOGIQUE
III.1.3 – TRANSMISSION
III.2 – PHYSIOPATHOLOGE DE LA TUBERCULOSE
III.2.1 – GERME
III.2.2 TRANSMISSION
III.2.3 Terrain
III.2.4 Pathogénie
III.3 PHYSIOPATHOLOGIE DE LA CO-INFECTION TB/VIH
III.3.1 Impact de la tuberculose sur le VIH
III.3.2 Impact du VIH sur la tuberculose
IV SIGNES
IV. 1 VIH
IV. 1.1 Primo-infection
IV.1.1.1 Manifestations Cliniques et Biologiques
IV. 1.1.2 Diagnostic Positif
IV.1.2 PHSASE D’INFECTION CHRONIQUE OU PHASE ASYMPTOMATIQUE
IV.1.3 PHASE DE SIDA MALADIE
IV.2 TUBERCULOSE
IV.2.1 Type de description : Tuberculose pulmonaire commune dans sa forme chronique
IV.2.1.1 Clinique
IV.2.1.2 Para clinique
IV.2.1.3 Evolution
IV.2.2 Les formes cliniques
IV.2.2.1 Formes évolutives
IV.2.2.1.1 Tableau aigu
IV.2.2.1.2 Tuberculose miliaire
IV.2.2.2 Formes topographiques
IV.2.2.2.1 Tuberculose des séreuses
a) Pleurésie tuberculeuse
b) Tuberculose cérébroméningée
c)Tuberculose péritonéale
d) Péricardite tuberculeuse
IV.2.2.2.2 Tuberculose hépatique, splénique et hématopoïétique
IV.2.2.2.3 Tuberculose ganglionnaire
IV.2.2.2.4 Tuberculose intestinale
IV.2.2.2.5 Tuberculose ano-rectale
IV.2.2.2.6 Tuberculose rénale
IV.2.2.2.7 Tuberculose génitale
a) Chez la femme
b) Chez l’homme
IV.2.2.2.8 Tuberculose ostéo-articulaire
a) Tuberculose vertébrale : Mal de Pott
b) La tuberculose des articulations
IV.3 CO-INFECTION TUBERCULOSE/VIH
IV.3.1 Circonstances de diagnostic
IV.3.2 Clinique
IV.3.3 Paraclinique
V. TRAITEMENT
V .1 TRAITEMENT VIH
V.1.1 TRAITEMENT CURATIF
V.1.1.1 Buts
V.1.1.2-Les Moyens
V.1.1.3 Indication
V.1.2 – TRAITEMENT PREVENTIF
V.1.2 1- Prévention Primaire
V.1.2.2- Prévention Secondaire
V.2- TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE
V.2.1- TRAITEMENT CURATIF
V.2.1.1-Buts
V.2.1.2-Moyens
V.2.2 Indication Du Traitement
V.2.3 Surveillance de la Chimiothérapie
V.3 TRAITEMENT DE LA CO-INFECTION
V.3.1 Buts
V.3.2 Moyens
V.3.3 Conduite du Traitement
V.3.4 Traitement Préventif
CONCLUSION