L’histoplasmose est une mycose profonde due à des champignons dimorphiques appelés Histoplasma capsulatum. Il en existe deux variétés, une forme américaine à petite levure nommée Histoplasma capsulatum var capsulatum (H.capsulatum) et une autre africaine, à grande levure appelée Histoplasma capsulatum var duboisii (H.duboisii). Elles diffèrent par leurs répartitions géographiques et leurs expressions cliniques. La forme américaine sévit en Amérique latine, en Asie et en Océanie [1, 2] tandis que L’histoplasmose africaine est rencontrée en Afrique, de part et d’autre de l’équateur entre la 15° latitude nord et la 15° latitude sud et à Madagascar. [3]. Cette dernière fait l’objet de notre étude. Sa prévalence réelle est actuellement inconnue [4]. Les études faites sur cette affection ne portent que sur des observations cliniques [4,5]. Avant 1993, 237 cas avaient été rapportés dans la littérature [4] et 300 cas en 2000 [6]. De 2000 à nos jours 61 cas ont été décrits en Afrique notamment au Mali, au Congo, au Burkina, en Côte d’ivoire, au Togo, au Benin et au Gabon [4, 7, 8, 9, 11, 12, 13]. Au Sénégal, deux publications portant sur trois observations ont été déjà faites entre 1998 et 2010 [5, 14]. L’hôte de l’agent pathogène n’est pas connu quoi qu’une origine tellurique soit suspectée [1, 2,3]. Il en est de même de son mode de contamination qui n’est pas totalement élucidé, mais serait en rapport avec les déjections de pigeon et de sauve-souris [3, 15]. Plusieurs organes peuvent être atteints notamment les os, les ganglions et la peau où l’histoplasmose africaine revêt un véritable polymorphisme. Au plan cutané, les aspects cliniques sont multiples. Il peut s’agir de lésions molluscum contagiosum like, d’ulcère et de gomme [1, 2, 5]. Sur le ganglion la maladiepeut présenter un aspect pouvant être confondu à tout point de vue à une tuberculose ou un lymphome dont leurs diagnostics sont parfois portés à tort [7].
Historique
C’est en en 1919 que Lécène décrivait le premier cas probable sur une biopsie [15]. Trois ans plus tard, Blanchard et Lefrou, obtenaient la culture du champignon et réussissaient l’inoculation au cobaye. [3, 15]. Dubois et Vanbreuseghem autonomisaient l’espèce H.duboisii, décrivant la levure, sa culture, son pouvoir pathogène expérimental et objectivaient les différences avec H.capsulatum. Ils ont montré que les levures d’H. duboisii sont de grande taille (5-20) localisées dans des cellules géantes ou extracellulaires dans le pus d’abcès (fig1) [6, 15]. Les premières descriptions cliniques détaillées de la maladie ont été faites par Duncan en 1958 [1, 2, 6] alors qu’un an plus tôt, les discussions sur le bienfondé des deux espèces furent closes par J.Kwon Chung qui réussissait le croisement fertile entre H.capsulatum et H.duboisii, montrant ainsi qu’il s’agissait de variétés et non d’espèces différentes [15].
Epidémiologie
Prévalence
Depuis sa première description en Afrique en 1945, au Soudan français [7], plusieurs publications ont été rapportées dans le continent et en Europe. Sur le continent européen, des cas importés avec des formes disséminées sur immunodépression ont été décrits en Suisse [16] et en France [17]. L’histoplasmose africaine est endémique en Afrique de l’ouest, du centre et à Madagascar. Avant 1993, 237 cas avaient été rapportés dans la littérature [4] et 300 cas en 2000 [6]. Cette prévalence semble être plus importante au Congo, où 58 cas ont été dénombrésentre 1993 et 2017. Il s’agissait tous de formes disséminées, dont 08 patients étaient séropositifs au VIH avec des âges compris entre 03 et 58 ans. [11, 18, 19, 20, 21]. Au Madagascar, 05 cas étaient rapportés dont une forme disséminée chez un patient immunocompétent en 2010 avait été publiée [22]. De nos jours, seules quatre observations d’histoplasmose africaine sont décrites en Côte d’ivoire [9, 23, 24, 25]. Au Mali, trois formes disséminées ont été rapporté avant 2014 [7, 8, 26] de même qu’au Burkina [4, 27, 28]. Plus récemment en 2016 et 2017 deux cas ont été notés au Togo et au Bénin respectivement [29, 30, 31]. Au Gabon une seule observation avait été décrite en 2011 jusqu’à ce jour, chez un sujet immunocompétent présentant une forme disséminée d’HA [10]. Au Sénégal sur plus de trente cas diagnostiqués, deux ont fait l’objet de publications en 1998 [5] et 2010 [14]. Ces dernières portaient sur 03 cas disséminés.
Répartition géographique
La répartition géographique des lieux de contamination montre la diffusion de l’HA exclusivement dans les régions de l’Afrique tropicale, du Centre et de l’Ouest entre +20° de latitude Nord et -20° de latitude Sud, et à Madagascar [3, 15, 16]. Les cas observés en France montrent que l’infection n’est pas une maladie du touriste mais du résident. La durée moyenne de séjour en Afrique est supérieure à deux ans [17]. La durée d’incubation peut durer plusieurs années Il ne semble pas y avoir de guérison spontanée [3].
L’agent pathogène
H. duboisii est une levure de plus grande taille, intra cellulaire, de 8 à 15 μm de diamètre avec une paroi épaisse et très réfringente lui donnant parfois un aspect pseudo-capsulé en « verre de montre », également avec un bourgeonnement à base étroite. [1,2, 3, 6]. Ce champignon saprophyte qui a une croissance di morphique présente :
– Une forme filamenteuse caractéristique du genre Histoplasma obtenue après incubation à 25-30°C. Le développement à la culture, est lent (10 à 30 jours) et montre une colonie duveteuse blanche puis ocrée à revers blanc à marron, plane à centre surélevé. En microscopie, on observe les filaments septes portant des spores à base tronquée formées directement ou sur un court pédoncule. Les macro conidies de grande taille (10 à 25 μ) sont à paroi lisse et échinulée (aspect verruqueux) .
– La forme mycélienne, qui seule à température ambiante, produit les spores infestant.
– La forme levure sera obtenue à partir des produits pathologiques ou de la forme mycélienne à 37°C, sous humidité de 100 % et atmosphère enrichie en CO2, avec des repiquages réguliers [1, 3].
L’Hôte
Son biotype est mal connu [3]. H. duboisii n’a pas été isolé dans la nature. Il existe de rares exceptions avec un isolement dans le sol et le guano de sauves souris dans une grotte au Nigéria [15].
La Transmission
La contamination est présumée d’origine aérienne mais les manifestations pulmonaires semblent être plus rares que dans l’histoplasmose américaine et aucune primo-infection pulmonaire n’a été rapportée [3, 15, 16]. Une origine transcutanée par blessure tellurique a été incriminée de même digestive [3, 6, 15, 16]. Il n’y a pas de transmission d’homme à homme, mais essentiellement par inhalation de poussières riches en spores (zones rurales, déjections d’oiseaux et de chauve-souris, visite de grottes).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
RAPPELS
I. Historique
II. Epidémiologie
II.1. Prévalence
II.2. Répartition géographique
II.3. L’agent pathogène
II.4. L’Hôte
II.5. La Transmission
II-6. La Pathogénie
II.7. Terrain
III. Aspects cliniques
III.1. Les manifestations dermatologiques
III.1.1 Les manifestations cutanées
III.1.2 Les manifestations muqueuses
III.2. Les manifestations extra dermatologiques
III.2.1. Ganglionnaires
III-2-2. Osseuses
III.2.3. Pulmonaires
III.2.4. Viscérales
III.2.5. Les complications neurologiques
IV. Les aspects paracliniques
IV.1. Aspects mycologiques
IV.1.1. Le Prélèvement
IV.1.2. l’examen direct
IV.1.3. La culture
IV.2. Aspects histologiques
IV.3. Les réactions immunologiques
IV.4. La sérologie aspergillaire galactomanane
V. Traitement
V.1. But
V.2. Moyens
V.2.1. Curatifs
V.2.1.1. Médicaux
V.2.1.2. Chirurgicaux
V.2.2. Adjuvants
V.3. Indications
V.4. Traitement préventif
VI. Evolution pronostic
V.1. Evolution
V.2. Pronostic
DEUXIEME PARTIE
NOS OBSERVATIONS
DISCUSSION
I. Aspects épidémiologiques
II. Aspects cliniques
III. Aspects évolutives
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES