Définition
Encore appelée thyroïdite granulomateuse, thyroïdite à cellules géantes, thyroïdite pseudo-tuberculeuse ou thyroïdite virale, il s’agit d’un processus inflammatoire de la thyroïde probablement d’origine virale, non suppurative, ce qui la distingue de la thyroïdite aigue et non auto-immunitaire. Elle se traduit par une intumescence de la glande, des symptômes inflammatoires, et une atteinte de l’état général d’intensité variable [48].
Historique
La thyroïdite subaiguë, (aussi appelée thyroïdite de DE QUERVAIN (DQT), ou encore thyroïdite granulomateuse) a été décrite pour la première fois par l’otorhino-laryngologiste danois Holger Mygind en 1895. Il avait présenté 18 cas de « Thyroïdite aigue simple » [53]. C’est en avril 1902 que le chirurgien suisse, Johann Friedrich « Fritz » de Quervain, présentera au congrès de la société allemande de chirurgie son travail sur une forme encore inconnue d’atteinte inflammatoire de la thyroïde « thyroïdite subaiguë non suppurative ». En 1904 il publiera le travail au complet sur ce sujet. Plus tard cette pathologie sera alors adoptée sous le nom de thyroïdite de De Quervain [42, 60].
Rappels sur la glande thyroïde
Embryologie
Le diverticule thyroïdien apparaît dès la troisième semaine entre le premier et le deuxième arc branchial. Il s’enfonce dans le mésoblaste sous-jacent et descend à l’avant de l’intestin pharyngien par le canal thyréoglosse sous forme d’un diverticule bilobé. Ensuite l’ébauche thyroïdienne migre en direction caudale et ventralement par rapport à l’os hyoïde et aux cartilages du larynx pour atteindre à la septième semaine sa situation définitive à l’avant de la trachée. La thyroïde est alors composée d’un petit isthme médian et de deux lobes. Tout au long de sa migration la thyroïde reste connectée à la langue par le canal thyréoglosse, mais celui-ci finit par s’oblitérer. La thyroïde est fonctionnelle dès le troisième mois. Les cellules produisant la thyroxine T4 et la tri- iodothyroxine T3 sont dérivées de l’endoderme. Les cellules produisant la calcitonine proviennent de la fusion de la thyroïde avec les corps ultimobranchiaux préalablement infiltrés par des cellules de la crête neurale. Les vaisseaux sanguins et la capsule de tissu conjonctif, quant à eux, proviennent du mésoderme splanchnique entourant le diverticule thyroïdien. Tout au long de la descente embryologique de la thyroïde, l‟organe peut interrompre sa descente et nous pouvons alors avoir une thyroïde à position ectopique.
Anatomie de la glande thyroïde
Anatomie descriptive
Morphologie
La glande thyroïde a la forme d’un papillon. Elle est formée de deux lobes latéraux réunis par un isthme large et mince donnant à l’ensemble un aspect en H [6, 63]. La pyramide de La louette qui naît le plus souvent soit de l’isthme, soit du lobe gauche est inconstante [11, 16]. Elle présente 3 faces pour chaque lobe : médiane, latérale et postérieur. Elle est de couleur rose tirant sur le rouge clair. Sa consistance est molle, dépressible et friable avec une surface lisse [6, 73]. Une glande thyroïde normale mesure environ 6 cm de hauteur, 6 cm de largeur et 3 cm d’épaisseur [6].
Situation
La thyroïde est une glande médiane impaire, située à la face antérieure du cou dans la région sous-hyoïdienne [6, 63, 73]. Elle s’étend du cartilage thyroïde à la partie haute de la trachée, plaquée sur la face antérieure de la filière laryngotrachéale et débordant latéralement de manière bilatérale. Elle est contenue dans la loge thyroïdienne, limitée en avant par les muscles sterno-thyroïdiens, sterno-hyoïdiens et le chef sterno- mastoïdien du muscle sterno-cléido-mastoïdien, en arrière par la trachée et l’œsophage, latéralement par le fourreau neuro-vasculaire carotido-jugulo vagal droit et gauche [6, 73, 75, 70].
Fixité
Le parenchyme de la thyroïde est entouré d’une capsule fibreuse, dépendante de la gaine viscérale du cou. Celle-ci est maintenue par des ligaments à la trachée et à la gaine vasculaire par les ligaments thyro-trachéaux, un médian et deux latéraux, dits aussi ligaments de Grüber.
Rapports profonds
Ils sont constitués essentiellement par :
Axe aéro-digestif
Le corps thyroïde se moule sur les faces antérieures et latérales de cet axe, constitué par le larynx et la trachée en avant et l’œsophage en arrière. L’isthme est fixé au deuxième anneau trachéal par le ligament de Gruber médian. La face profonde de la partie isthmique inférieure est séparée de la trachée par le plexus isthmique à l’origine des veines thyroïdiennes médianes [11, 22]. Il faut retenir ici le danger veineux du décollement inférieur [71]. Les lobes latéraux entrent en rapport avec l’axe aéro-digestif par leur face postéro-interne et leur bord postérieur.
Axe vasculo-nerveux latéral du cou
Il entre en rapport avec la face postéro-externe des lobes latéraux et est formé au niveau du corps thyroïde par :
– L’artère carotide primitive en dedans.
– La veine jugulaire en dehors.
– La chaine lymphatique jugulo-carotidienne située sur la face antéroexterne de la veine.
– Le nerf pneumogastrique placé dans l’angle dièdre postérieur formé par la carotide et la jugulaire.
– L’anse du nerf grand hypoglosse.
Vascularisation
Les artères
La thyroïde est la plus grande des glandes endocrines, elle est richement vascularisée, ce qui rend délicat les interventions chirurgicales à son niveau.
La vascularisation artérielle de la thyroïde est assurée essentiellement par :
– Deux artères thyroïdiennes supérieures droite et gauche
– Deux artères thyroïdiennes inférieures droite et gauche
– Une artère accessoire, impaire et inconstante, l’artère thyroïdienne moyenne ou artère de Neubauer.
L’artère thyroïdienne supérieure
La plus volumineuse, elle naît de la carotide externe, et descend verticalement le long de l’axe viscéral vers le pôle supérieur de la glande où elle se trifurque :
➤ Une branche interne, ou sus-isthmique, qui traverse le bord supérieur de l’isthme, et s’anastomose avec son homonyme controlatéral formant ainsi l’arcade sus-isthmique.
➤ Une branche postérieure qui suit la face postérieure et s’anastomose avec l’inférieure homolatérale.
➤ Une branche externe qui pénètre dans le parenchyme thyroïdien. L’artère thyroïdienne supérieure vascularise les 2/3 supérieurs des lobes thyroïdiens.
L’artère thyroïdienne inférieure :
Elle naît du tronc thyro-bicervico-scapulaire, branche de l’artère sous-clavière, elle décrit tout d’abord une courbe à concavité inférieure, passant devant l’artère vertébrale et derrière l’artère carotide commune. Après un trajet descendant variable, elle remonte au pôle inférieur du lobe latéral de la glande thyroïde où elle se divise en trois branches terminales : inférieure, postérieure et profonde. Ses branches collatérales sont l’artère laryngée inférieure (ou postérieure), les artères œsophagiennes supérieures, des rameaux trachéaux et des rameaux musculaires pour le pharynx [11, 59]. L’artère thyroïdienne inférieure vascularise le 1/3 inférieur des lobes thyroïdiens.
|
Table des matières
I. INTRODUCTION
1. Définition
2. Historique
3. Epidémiologie
3.1. Prévalence
3.1.1 Dans le monde
3.1.2.En Afrique
3.2. Terrain de survenue
II. Rappels sur la glande thyroïde
1. Embryologie
2. Anatomie de la glande thyroïde
2.1 Anatomie descriptive
2.1.1. Morphologie
2.1.2 Situation
2.1.3 Fixité
2.2. Rapports de la thyroïde
2.2.2. Rapports profonds
2.2.2.1 Axe aéro-digestif
2.2.2.2 Axe vasculo-nerveux latéral du cou
2.3. Vascularisation
2.3.1. Les artères
2.3.1.1 L’artère thyroïdienne supérieure
2.3.1.2 L’artère thyroïdienne inférieure
2.3.1.3 L’artère thyroïdienne moyenne (accessoire)
2.3.2. Les veines
2.3.2.1 La veine thyroïdienne supérieure
2.3.2.2 La veine thyroïdienne moyenne
2.3.2.3 La veine thyroïdienne inférieure
2.3.3. Les lymphatiques
2.3.3.1 Le réseau thyroïdien
2.3.3.2 Le compartiment central du cou
2.3.3.3 Les compartiments latéraux du cou
2.4. Innervation
2.4.1 Nerf laryngé inférieur
2.4.2 Nerf laryngé supérieur
3. Histologie de la glande thyroïde
4. Rappels physiologiques
4.1. La cellule thyroïdienne
4.2. Structure des hormones thyroïdiennes
4.3. Rôle de l’iode
4.4. Hormonosynthèse
4.5. Distribution et métabolisme des hormones thyroïdiennes
4.6. Régulation de la fonction thyroïdienne
4.7. Action des hormones thyroïdiennes
4.7.1.Rôle dans le développement fœtal
4.7.2.Effets sur le métabolisme
4.7.3.Effets osseux
4.7.4.Effets cardiovasculaires
4.7.5.Effets sur le muscle squelettique
4.7.6.Effets sur le système nerveux
3 ETIOPATHOGENIE
1. Hypothèse virale
2. Hypothèse génétique
3. Hypothèse médicamenteuse
4 DIAGNOSTIC
1. Diagnostic positif
1.1. Circonstances de découverte
1.2. Manifestations cliniques
1.2.1 La douleur cervicale antérieure
1.2.2 Le syndrome de thyrotoxicose
1.2.3 Le goitre
1.2.4 Les signes généraux
1.3. Manifestations biologiques
1.3.1 Le syndrome inflammatoire
1.3.2 Fonction thyroïdienne
1.3.3 Autres manifestations biologiques
1.4 Examens morphologiques
1.4.1 Echographie thyroïdienne
1.4.2 La scintigraphie thyroïdienne au technétium 99
1.4.3 La tomographie par émission de photons au 18F-fluorodeoxyglucose
1.4.4 Anatomo-pathologie
2. Diagnostic différentiel
2.1 Devant la douleur cervicale antérieure
2.1.1 Thyroïdite aigue suppurée
2.1.2 Thyroïdite de Hashimoto douloureuse
2.1.3 Une hémorragie intra-kystique de la thyroïde
2.1.4 Goitre amyloïde
2.2 Devant la fièvre prolongée d’étiologie indéterminée
5 PATHOLOGIES ASSOCIEES
1. La maladie de basedow
2. Autres pathologies associées
2.1 Un cancer papillaire de la thyroïde
2.2 Une thyroïdite de Riedel peut aussi survenir à la suite de la thyroïdite de De Quervain
6 Evolution
1. Modalités évolutives
7 Prise en charge
1. Buts
2. Les moyens
2.1 Les anti-inflammatoires non stéroïdiens
2.2 Les glucocorticoïdes de synthèse
2.3 Les bétabloquants
2.4 Lévothyroxine
3. Conduite thérapeutique
CONCLUSION