Histoire de l’enseignement du français en Chine

Histoire de l’enseignement du français en Chine 

Naissance : avant la libération de la Chine 

Aux yeux de beaucoup d’historiens et de linguistes chinois, l’arrivée du jésuite Nicolas Trigault à la fin de la Dynastie des Ming, au seizième siècle, passe pour la première rencontre des Chinois avec la langue française. (ZHANG Shiwei, 2010 : 11) Cependant, jusqu’à la défaite de la guerre Jiawu entre le Japon et la Dynastie des Qing, la Chine commença à attacher de l’importance aux nouvelles techniques des pays étrangers. Le premier bureau de français fut fondé en 1863 avec l’installation de la première université chinoise (Jingshi daxuetang) dans un contexte de réforme administrative, inspirée du modèle japonais (CHEN Xiangyang, 2005 :77-86). En 1902, ce fut la fin de la première université, pourtant le bureau de français fut conservé dans une nouvelle université, dont le nom fut Jingshidaxuetang, à l’origine de l’Université de Beijing. Bien que les historiens chinois considèrent cet essai comme un échec à cause de l’opposition des gouverneurs conservateurs, nous ne négligerons pas l’importance historique du développement du français. Pendant cette période, le français devint la deuxième langue étrangère après l’anglais, et cet essai favorisa la véritable naissance de l’enseignement universitaire du français en Chine. Une autre preuve de cette influence est l’appellation « Université de l’Aurore » qui vient de la formule « Per Auroram ad lucem » pour désigner cette université. Le deuxième département de français fut créé en 1903 à l’Institut Zhendan de Shanghai, Université de l’Aurore, dont le fondateur fut un jésuite chinois MA Xiangbo. Cet établissement supérieur était indépendant du Ministère de l’Éducation chinois : il n’accepta que le soutien financier de l’Église et du gouvernement français. À l’intérieur de cet établissement, tout est inspiré du modèle universitaire français comme les cours et le diplôme délivré. Bien qu’il y ait eu pendant cette période beaucoup d’établissements d’enseignement soutenus par l’Eglise, les exemples de réussite ne furent pas très nombreux. En fait, au-delà du programme d’enseignement scientifique, c’est l’enseignement laïque qui devenait l’enjeu.

À l’Aurore, les étudiants de première année suivirent leurs cours en chinois et en français, et à partir de la deuxième année, tous les cours furent obligatoirement en français. En 1918, le gouvernement français confirma la validité du diplôme de l’Aurore. Sans aucun doute, le développement de l’Aurore fut considéré comme un grand succès dans l’histoire de l’enseignement supérieur dans l’époque moderne chinoise, même s’il fut influencé par les deux guerres mondiales et la Guerre de Libération en Chine. En 1952, le gouvernement de la République Populaire de Chine récupéra le contrôle de cet institut. Pendant ces dernières années, nous avons vu paraître en Chine nombre d’ouvrages et d’articles qui présentaient l’histoire de l’Aurore : Study on the History of Modern Higher Education Exchang between China and France, ZHANG Shiwei ; Aurora university and Chinese-French educational exchange, WANG Weijia(2008: 92-98) ; Concurrence culturelle dans l’histoire moderne de Shanghai entre la France et les Etats-Unis, WANG Weijia(2007 : 116 124,200-201). Grâce à leurs recherches, nous pouvons trouver facilement les preuves convaincantes de la réussite de cette université tant quantitativement que qualitativement.

Mis à part le nombre des étudiants, l’enseignement de l’Université était de bonne qualité, surtout dans le domaine de la médecine. Jusqu’en 1934, l’Aurore a formé 89 docteurs en médecine. Dans les années 1940, au moins 75% de médecins chinois vinrent de l’Aurore. L’Aurore devint clairement un bon exemple de la coopération universitaire entre la France et la Chine et contribua beaucoup à la société chinoise.

En ce qui concerne la deuxième plus grande université financée par l’église française en Chine, l’Université de commerce et de technologie de Tianjin, il n’y eut que 1272 diplômés entre 1923 et 1951, avant d’être récupérée par la Chine nouvelle. En fait, à partir de l’année 1927, l’Université de commerce et de technologie de Tianjin décida d’utiliser l’anglais comme langue de cours au lieu du français. Pour cette raison, bien qu’il y eût pas d’autres départements de français dans les universités chinoises pendant cette période, leur réputation, leur influence et leur compétence d’enseignement n’est pas comparable à celles de l’Aurore.

Dès la fin de la Dynastie des Qing, au cours du 19ème siècle et du 20ème siècle, la Chine était devenue une société semi-coloniale et semi-féodale. Elle subit une forte agitation sociale, une stagnation économique, des ingérences et des invasions de plus en plus marquées de la part des puissances étrangères. Toute la nation chinoise s’enfonça dans la guerre, la famine, la maladie etc. L’enseignement supérieur ne contribua beaucoup à la société chinoise que dans le domaine politique, comme le mouvement du 4 mai 1919. Ce mouvement a été déclenché par l’échec de la diplomatie chinoise à la conférence de la paix de Paris en 1919. Ce jour-là, un mouvement patriotique qui s’est déroulé à Beijing et auquel un grand nombre de personnes ont participé (citoyens, hommes d’affaires, et surtout de jeunes étudiants) a pris diverses formes telles que des manifestations, des pétitions, des grèves et des affrontements violents contre le gouvernement de la République. C’était le mouvement patriotique total du peuple chinois contre l’impérialisme et le féodalisme. (LIU Jingfang, 2009 : 3-11) Par ce mouvement, les intellectuels voulaient contribuer à une intense fermentation intellectuelle et à une radicalisation de la vie politique. Ils voulaient trouver un moyen de sauver la Chine par la polémique dans des revues telles que La Jeunesse créée par CHEN Duxiu, futur fondateur du Parti Communiste. Hu Shi, professeur de l’Université de Beijing, diplômé en doctorat aux Etats-Unis, était le seul expert brillant à demander moins de débat, plus de recherche. Pourtant, cette proposition n’eut aucune popularité.

En résumé, par le contact avec les pays étangers, l’enseignement du français vit le jour avant la liberté de la nation chinoise, mais resta en germe.

Développement de l’enseignement du français après la libération de la Chine

Nous considérons que le premier octobre 1949, le jour de la fondation de la Chine Nouvelle, République Populaire de la Chine, marque le développement de l’enseignement supérieur en Chine. En 1950, la déclaration du «projet temporaire des établissements de formation supérieure » approuvé par le Conseil des Affaires d’État ouvre un nouveau chapitre du développement de l’enseignement supérieur en Chine. À partir de ce jour-là, le gouvernement chinois se mit à réfléchir au développement des établissements de l’enseignement supérieur, y compris les départements des langues étrangères. Nous allons présenter ce développement en trois parties : refondation, développement et récession.

Refondation

L’enseignement du français, mais aussi d’autres spécialités universitaires eurent besoin de refondation après une trentaine d’années de guerre sur le territoire de la Chine. Pendant cette période, l’attraction de la Chine Nouvelle et l’esprit du relèvement national de la Chine incarné par le Président Mao Zedong, – dû au fait que depuis la Guerre de l’opium, les Chinois vivaient dans une société semi-coloniale, semi-féodale -, jouèrent un rôle définitif et important pour encourager les enseignants, comme les travailleurs d’autres métiers. Aux yeux des contemporains, ils devenaient les patrons du pays pour la première fois dans toute l’histoire chinoise et voulaient contribuer à ce qu’ils possédaient. Beaucoup de diplômés chinois, tels que le mathématicien HUA Luogeng, les physiciens QIAN Xuechen et DENG Jiaxian, le géographe LI Siguang, résidant à l’étranger ou d’étrangers d’origine chinoise vinrent contribuer à l’édification socialiste après avoir surmonté beaucoup de difficultés à cause de la confrontation politique entre la Chine et les pays capitalistes. Cela aidait le pays à prendre les expériences des pays étrangers pour référence. Entre la libération de la Chine et la fin 1950, il y eut au total 5096 étudiants chinois rentrant des pays étrangers dont 190 vinrent de France (LI Lingge, ZHAO Wenyuan, 2003 : 99-101). Pour le nouveau gouvernement chinois, ces 190 étudiants réalisèrent la refondation de l’enseignement universitaire de français. Cependant, le  nouveau gouvernement chinois n’y accorda pas d’importance au début. En raison de la relation politique entre la Chine et l’Union soviétique, le russe devint d’abord la première langue étrangère pendant les années 1950. L’ancien premier ministre ZHOU Enlai émit le décret gouvernemental, «projet du développement technique et scientifique au long terme entre 1956 et 1967 » qui prit l’initiative d’établir l’enseignement du russe avant d’autres langues étrangères dans les universités chinoises. À cause de la guerre en Corée du nord contre les États-Unis et d’autres pays capitalistes, le pays coupa presque toutes les relations diplomatiques avec les occidentaux et le soutien financier du gouvernement français pour l’enseignement universitaire comme l’Aurore fut clairement arrêté. Le développement de l’enseignement du français ne put compter que sur les ressources chinoises. Si l’on en croit la mémoire des étudiants diplômés de la première génération de Beiwai, Institut des langues étrangères de Beijing, SITU Shuang, CHEN Zhenyao, il n’y eut pas de professeur français dans les années 1950; leur seule lectrice étrangère fut russe (CHEN Zhenyao, SITU Shuang, 2010 : 40 – 46). Cela permet d’expliquer la difficulté du développement du français. En même temps, la refondation du département de français ne fut pas arrêtée. Afin de répondre au développement économique et diplomatique de la Chine Nouvelle, en 1950, 2 départements de français (WANG Huide, CAO Deming, 2005 : 2) furent ouverts dans les universités ou instituts chinois, bien qu’au début, les professeurs n’aient pas eu d’expérience, ni de manuel, ni de programme commun. Zhang Yanling, étudiante de français, entrant à Beiwai en 1950 se souvient qu’ il n’y eut qu’une classe de 40 étudiants pour la première année du recrutement (ZHANG Yanling, 2010 : 50).

Pendant cette période, la refondation de la discipline français se réalisa et jeta donne les bases de son développement pour les années suivantes.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
Chapitre 1 Histoire de l’enseignement du français en Chine
Naissance : avant la libération de la Chine
Développement de l’enseignement du français après la libération de la Chine
1.2.1 Refondation
1.2.2 Développement
1.2.3 La récession au cours de la Révolution Culturelle (1967-1977)
La réforme et l’ouverture
Explosion du français et globalisation
Conclusion du chapitre 1
Chapitre 2 Le contexte de l’enseignement du français langue étrangère en Chine
Qu’est-ce que le FLE en Chine?
2.1.1 Les apprenants de FLE en Chine
2.1.2 Les manuels de FLE en Chine : analyse de contenu
2.1.2.1 Le texte
2.1.2.2 La grammaire
2.1.2.3 Les exercices
2.1.2.4 Les images
2.1.3 Approches du FLE en Chine
2.1.4 Les objectifs du FLE en Chine
2.1.4.1 Objectifs de formation des apprenants
2.1.4.2 Objectifs de formation des enseignants
2.1.4.3 Les objectifs de l’Université
Le FLE en Chine pour l’acquisition de la seconde langue(ASL) ou de la troisième langue(ATL)
2.2.1 Différence entre l’ASL et l’ATL
2.2.2 L’ATL et de la pratique du FLE en Chine
2.2.3 Les particularités du FLE en Chine
Conclusion du chapitre 2
Chapitre 3 La didactique du FLE en Chine
Histoire de la didactique en Chine
Évolution historique de la didactique des langues
3.2.1 Évolution historique de l’éducation des langues étrangères
3.2.2 Évolution historique de la formation en didactique
3.3.1 Les universités normales chinoises et les soutiens politiques
3.3.2 Les apprenants
3.3.3 Les enseignants
3.3.4 Le Programme de formation pour les enseignants
3.3.5 Le contrat didactique
3.3.6 Les méthodes
Conclusion du chapitre 3
CONCLUSION GÉNÉRALE

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