En 1989, l’identification du virus nommé virus de l’hépatite C (VHC) est effectuée par l’équipe de Houghton (entreprise Chiron) par biologie moléculaire (Choo et al. 1989). La stratégie de découverte du VHC est alors novatrice puisqu’elle fait appel à la réalisation d’une banque d’expression dans un bactériophage. Cette découverte a permis le développement rapide de tests sérologiques et par la suite le clonage de la séquence complète du génome viral (Houghton 2009).
Hépatite C
Epidémiologie
D’après l’OMS (2007), la prévalence de l’infection par le VHC est de 170 millions de porteurs chroniques et 3 à 4 millions de personnes infectées par an dans le monde, soit près de 3% de la population mondiale (5 fois le taux d’infection par le virus de l’immunodéficience humaine VIH-1). Cela constitue donc un problème majeur de santé publique, puisqu’en effet, l’infection chronique par le VHC est la principale cause de cirrhose, cancer du foie et indication de transplantation hépatique dans les pays occidentaux. Cette prévalence varie suivant les zones géographiques. En France, 600 000 personnes seraient infectées. Les estimations de la prévalence selon les régions sont représentées sur la carte Figure 1. Il faut cependant noter que l’évaluation de la prévalence est certainement sous-estimée car les études sont menées auprès des donneurs de sang, constituant une population sélectionnée probablement différente de la population générale (Sy 2006).
Mode de transmission
Le VHC est un virus hépatotrope mais diverses données indiquent également sa présence dans des cellules mononuclées du sang périphérique (lymphocytes B, monocytes/macrophages, cellules dendritiques). Il est doué d’une forte spécificité d’espèce et de type cellulaire. En l’absence de réservoir animal, l’infection se transmet de manière interhumaine directe.
La contamination s’effectue quasi exclusivement par voie sanguine (utilisation de drogues par voie intraveineuse, actes médicaux invasifs tels que transfusion sanguine ou transplantation) (Sy 2006). Les transmissions du VHC de la mère à l’enfant, comme par voie sexuelle, sont rares et très controversées (Roberts 2002). Il faut cependant noter que la coinfection avec le VIH augmente ces taux de transmission. Pour 30% des cas d’infection, il n’existe aucun facteur de risque identifié (Lauer 2001).
Diagnostic
Il existe 2 types de tests diagnostiques : sérologiques et moléculaires (Lauer 2001; Chevaliez 2009).
Les tests sérologiques sont basés sur la recherche d’anticorps anti-VHC dirigés contre les protéines virales. L’EIA (Enzyme linked ImmunoAssay) est un titrage immunoenzymatique permettant de détecter le virus chez plus de 95% des porteurs chroniques, le taux de détection étant de l’ordre de 50 à 70% pendant la phase aigue. Un test RIBA (Recombinant ImmunoBlot Assay) est souvent réalisé pour confirmer un résultat positif obtenu par titrage EIA et met en évidence les anticorps réagissant avec certains antigènes du VHC (Chevaliez 2009). Un test moléculaire sur l’ARN du VHC, par une technique d’amplification de l’ARN viral (RT-PCR pour Reverse Transcription-Polymerase Chain Reaction) peut aussi être réalisé pour confirmer les résultats des tests sérologiques. Cette technique est également utilisée depuis peu pour le diagnostic et le suivi des patients du fait de ses nombreux avantages (simplicité, rapidité) aidant à la mise en place d’une meilleure prise en charge thérapeutique des patients infectés. Enfin, le génotypage permet d’adapter au mieux le traitement (durée et dose). Son principe repose sur un séquençage direct de la région 5’ non codante de l’ARN viral. La spécificité du test est très bonne pour déterminer les génotypes (cf chapitre I.1.2.) mais légèrement plus faible pour les sous-types (Forns 2006).
Symptômes et Evolution de la maladie
Hépatite aiguë
La caractéristique première de l’infection par le VHC est d’être le plus souvent asymptomatique dans sa phase aigue, qui survient 4 à 12 semaines après la contamination (Figure 2). Près de 20% des individus infectés parviennent à éliminer spontanément le virus, étape souvent associée à une hépatite dite aigue mais silencieuse, qui se traduit par un ictère (25% des cas seulement) accompagné de symptômes non spécifiques (fatigue, malaises, nausées). Des cas d’hépatite fulminante ont été rapportés mais ils sont rarissimes. Les anticorps anti-VHC n’apparaissent que dans 50 à 70% des cas dans la phase aigüe et seulement plusieurs semaines après la contamination. L’ARN viral est détectable 1 à 3 semaines après la contamination, souvent en même temps qu’une élévation du taux de transaminases sériques, 10 fois supérieure à la normale. Ces transaminases, ALAT (Alanine AminoTransférases) et ASAT (Aspartate AminoTransférases) participent à la synthèse et la dégradation des acides aminés dans l’hépatocyte et leur élévation est synonyme d’une atteinte hépatique. La guérison de l’hépatite C correspond à une absence de détection d’ARN viral et à un retour à un taux basal de transaminase. Le taux d’anticorps anti-VHC diminue progressivement mais reste détectable pendant plusieurs années chez les patients ayant spontanément éliminé le virus (Santantonio et al. 2008).
Hépatite chronique
Si au bout de 6 mois, le virus n’est toujours pas éliminé, on parle alors d’hépatite chronique (70 à 85% des cas). Les symptômes sont le plus souvent absents ou modérés et peu spécifiques (fatigue, troubles digestifs, douleurs diffuses…). Le taux de transaminase peut fluctuer au cours de l’infection chronique. C’est néanmoins un marqueur de l’évolution de l’atteinte hépatique. La présence constante d’anticorps anti-VHC est constatée. L’ARN viral est détecté à des taux importants chez les malades (Figure 3). Cette persistance virale est liée à une réponse immunitaire défective, conséquence d’un échappement viral (Ishii 2008). Bien que des méthodes non invasives alternatives à la biopsie hépatique, telles que la détection de marqueurs biochimiques de fibrose hépatique ou FibroTest (Imbert-Bismut et al. 2001; Poynard et al. 2004) soient en cours de validation, le meilleur outil pour suivre la progression de la maladie dans le foie reste l’analyse histologique après biopsie hépatique. L’hépatite chronique se traduit par une dégradation des cellules du foie, la formation de tissus cicatriciels pathologiques ou fibrose. La fibrose est susceptible d’évoluer vers une cirrhose (20% des cas) généralement une dizaine d’années après la contamination (Figure 2). A ce stade, 1 à 4% des patients développent un hépatocarcinome cellulaire (HCC) et une insuffisance hépatique pouvant être à l’origine du décès (espérance de vie à 5 ans : 50%). La cirrhose liée au VHC est une des premières indications de transplantation hépatique en France. De plus, il existe d’autres manifestations extra hépatiques en relation avec l’infection ainsi que divers types de lésions non spécifiques souvent rencontrées dans l’hépatite chronique. Différents facteurs influencent la progression de la maladie ainsi que son traitement : facteurs dépendant de l’hôte (âge, sexe, poids), environnementaux (alcool, tabac, coinfection), mais leur rôle reste encore mal défini (Schutte et al. 2009; Tang 2009).
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Table des matières
INTRODUCTION
HEPATITE C ET VHC
I. Hépatite C
1. Epidémiologie
2. Mode de transmission
3. Diagnostic
4. Symptômes et Evolution de la maladie
5. Rôle de la réponse immunitaire contre le VHC dans l’évolution de l’infection
6. Traitement
II. Le virus de l’hépatite C
1. Caractéristiques générales
1.1. Organisation génomique
1.2. Variabilité génétique
2. Formes naturelles du VHC
2.1. Les particules virales de faible densité
2.2. Les exosomes
2.3. Les nucléocapsides
2.4. Les virus enveloppés
3. Cycle viral
3.1. Récepteurs putatifs, attachement et entrée virale
3.2. Traduction et maturation
3.3. Réplication
3.4. Morphogénèse et sécrétion
3.5. Transmission intercellulaire de l’infection
4. Protéines virales
4.1. Protéines structurales
4.2. Protéines non structurales
III. Modèles expérimentaux
1. Modèles d’étude du VHC in vitro
1.1. Modèle réplicon
1.2. Pseudo particules virales
1.3. Modèles de culture cellulaire
2. Modèles d’étude du VHC in vivo
2.1. Chimpanzés
2.2. Tupaïas
2.3. Tamarins
2.4. Souris transgéniques uPA-SCID avec greffe d’hépatocytes humains
LE VHC ET LE METABOLISME DES LIPOPROTEINES
I. Les différentes classes de lipoprotéines
1. Formation des VLDL
2. Formation des chylomicrons
3. Les récepteurs aux lipoprotéines
3.1. La famille des récepteurs aux LDL
3.2. Le récepteur scavenger SR-B1
3.3. Les HSPG
II. Les enzymes lipolytiques
1. La lipoprotéine lipase (LPL)
1.1. Structure
1.2. Fonctions
2. La lipase hépatique (HL)
2.1. Structure
2.2. Fonctions
III. Transport des lipoprotéines
1. Voie des lipides exogènes
2. Voie des lipides endogènes
3. Voie du transport reverse du cholestérol
IV. Interaction VHC – lipoprotéines
LE VHC ET LE TRANSPORT PAR LES MICROTUBULES
I. Les microtubules
1. Structure
2. Protéines moteurs
2.1. La kinésine
2.2. La dynéine
3. Fonctions dans une cellule normale
4. Fonctions dans une cellule infectée
II. Cytosquelette et VHC
OBJECTIFS DE THESE
RESULTATS
PARTIE I : ROLE DE LA LIPOPROTEINE LIPASE ET DES LIPOPROTEINES ASSOCIEES AU VIRUS DANS LENTREE ET LINFECTION DE LA CELLULE PAR LE VHC
Article 1
Article 2
PARTIE II : ROLE DU RESEAU DE MICROTUBULES DANS LENTREE DU VHC ET LES ETAPES PRECOCES DE LINFECTION
Article 3
DISCUSSION ET PERSPECTIVES
CONCLUSION GENERALE