Risques zoonotiques
L’incidence de Toxocara canis chez les carnivores doit être prise en compte quand on sait qu’il a une potentialité zoonotique, pouvant être à l’origine de « larva migrans viscerales » (VLM) avec hyperéosinophilie affectant plusieurs organes d’une part et d’autre part la « larva migrans oculaire» (OLM) affectant l’œil et le nerf optique. Dans les viscères, elles produisent des granulomes éosinophiles. Dans l’œil, elles sont à l’origine d’un granulome sous-rétinien qu’il convient de différencier du rétinoblastome [15]. Le portage d’œufs sur les poils des animaux est sans doute un facteur de risque potentiel et important de contamination, d’autant plus que les carnivores domestiques partagent parfois la maison et le lit avec leurs propriétaires. La majorité des cas de toxocarose humaine reste néanmoins asymptomatique [14]. Aussi, l’importance de cet agent zoonotique serait-elle sous-estimée. La toxocarose est rarement identifiée en Afrique Occidentale.
Taenia spp.
Le genre Taenia regroupe plusieurs espèces. Leur biologie étant très proche, nous décrivons ici un modèle commun de cycle parasitaire, pathologie et diagnostic expérimental. Les particularités propres à chaque espèce sont résumées dans le tableau I. Les cestodes du genre Taenia sont des parasites de l’intestin grêle du chien ou du chat sous leur forme adulte. La contamination se fait par prédation d’un hôte intermédiaire. L’hôte intermédiaire varie en fonction de l’espèce de Taenia en cause. Le plus souvent, l’hôte intermédiaire est un mouton.
– T. pisiformis : HI : lapin, lièvre, rongeur. Larve de type cysticerque sur le foie et le péritoine.
– T. hydatigena : HI : de ruminants ou de porcins (plus rarement). Larve de type cysticerque hépatopéritonéale. Elle est remplie de liquide qui n’est pas sous pression (on parle aussi de « boule-d’eau ») et peut mesurer jusqu’à plusieurs centimètres de diamètre. Elle contient un scolex invaginé et parasite la cavité abdominale de son hôte.
– T. multiceps ou Taenia coenurus : HI : Mouton. Larve de type cénure dans le système nerveux central, elle est responsable de la maladie de tournis chez celui-ci. Comme le cysticerque, le cénure contient un liquide translucide sans pression [22]
Actions pathogènes des formes adultes
Action spoliatrice : Les ascarides se nourrissent du chyme intestinal de leurs hôtes. La spoliation s’effectue principalement sur les glucides, les sels minéraux et les vitamines. Cette action reste très limitée pour les cestodes. Les ankylostomes et les trichures adultes exercent une spoliation sanguine importante. Ces parasites étant hématophages.
Action mécanique et irritative
– Ascaride : Il exerce une action mécanique ; traumatisme à l’origine d’une inflammation catarrhale de l’intestin grêle, obstruction et perforation de ce dernier. Action importante due à la grande taille des parasites, à leur mobilité et à leur nombre souvent élevé. La taille des vers adultes explique les déchirures de l’intestin lors d’infestation importante [25].
– Capillaria aerophila : Les adultes irritent les bronches et la trachée provoquant une trachéo-bronchite.
– Ancylostomes : Il provoque une irritation du tube digestif et une entéropathie exsudative. Il exerce une action traumatique ; conséquence de leur cheminement à travers les tissus.
– Trichures : action traumatique liée à la présence des parasites fixés à la paroi du gros intestin. Il en résulte une irritation suffisante pour entraîner une congestion des muqueuses, et un hyperperistaltisme qui peut favoriser les invaginations.
– Taenias : action mécanique due au nombre et à la taille des vers. La présence de nombreux vers de grande taille peut être à l’origine d’occlusions intestinales. On peut noter une particularité pour Dipylidium caninum : ses anneaux se déplacent dans l’intestin, forcent le sphincter anal et viennent parfois obstruer l’orifice des glandes anales, provoquant leur engorgement.
Action antigénique et immunité
– Ascaride, Ancylostomes : une action antigénique peut entraîner des réactions d’hypersensibilité chez l’hôte qui entraîne le développement de réactions allergiques locales.
– Taenias : absence d’immunité acquise.
Action toxique
– Ascaride : Action toxique en raison des substances protéolytiques présentes dans la cavité générale des vers. La mort simultanée de nombreux adultes peut provoquer une toxémie.
– Ancylostomes, trichures : secrètent des substances toxiques hémolysantes et inhibant le fonctionnement des organes hématopoïétiques, à l’origine de l’anémie hémolytique secondaire.
– Taenias : due aux produits de décomposition de nombreux segments dans le tube digestif.
Action inoculatrice et favorisante des infections
– Trichures : Action bactérifère et favorisant des infections [26].
– Ancylostomes : En pénétrant à travers la peau, les larves entraînent avec elles certains germes tels que des bactéries.
Méthode de collecte et de conservation des fèces
Nous avions choisi d’effectuer les prélèvements de façon individuelle. Ils avaient été réalisés au sein du cabinet vétérinaire MIZAMI. Les matières fécales examinées sont prélevées :
soit directement dans le rectum par une fouille rectale par l’auteur lui même. Cette méthode de prélèvement semble l’idéale afin d’éviter les contaminations secondaires par le milieu extérieur.
soit immédiatement après l’émission de selles [28] sur la table d’examen ou à même le sol du cabinet si le chien défèque pendant la consultation.
soit rapportées par le propriétaire au cabinet quelques heures après leur émission.
Dans ce dernier cas, il était fourni au propriétaire tous les matériels de prélèvements nécessaires à savoir : un flacon en plastique stérile pour chaque chien dans lequel on avait ajouté de l’alcool à 70°, des sachets plastiques aseptiques, des gants. Il importe de noter que dans toutes les récoltes au sol, on prend garde de ne pas prélever les excréments qui auraient été en contact direct avec le sol.
Degré d’infestation
Les résultats obtenus montrent que la quantité d’œufs par gramme pour les différentes espèces de parasites est élevée. Parmi les parasites observés, la plus forte infestation est représentée par Toxocara canis avec 533 ± 655,22 œufs par gramme de fèces. Pour le reste des parasites la moyenne des OPG se situe entre 100 à 300 OPG ; Ancylostoma caninum (283 ± 483, 69 OPG), Trichuris vulpis (260 ± 429,51 OPG), Dipylidium caninum (200 ± 385,74 OPG), Uncinaria stenocephala (146 ± 291,39 OPG), Toxascaris leonina (105 ± 255, 32 OPG), Capillaria aerophila (104 ± 239,6 OPG), sauf pour Taenia spp. qui ont une intensité moyenne de 84 ± 218,5 OPG. Les OPG moyens varient proportionnellement avec la prévalence des espèces rencontrés. Plus la prévalence est élevée, plus l’OPG moyen pour cette espèce est élevée. Le degré d’infestation des chiens dans notre étude ne s’éloigne pas de celle effectuée à Kinshasa (Zaire) [86]. Mais les OPG observés lors de son étude sont largement supérieurs aux nôtres. Par exemple, la moyenne pour Ancylostoma spp. se situe à 950 œufs et Toxascaris leonina à 150 œufs. Une étude réalisée par Oluyomi A et Sowemimo dans l’île-Ife (Nigeria) montre que le niveau d’infestation est bas ; la moyenne pour Toxocara canis est de 393,8 ± 83,4 OPG, Ancylostoma spp. (101, 5 ± 32,8 OPG), Trichuris vulpis (3,4 ± 1,5 OPG), Dipylidium caninum (2,2 ± 0,8 OPG), Uncinaria stenocephala (0,2 ± 0,2 OPG), Toxascaris leonina (14,3 ± 7,9 OPG) et Taenia spp. (5,4 ± 4,7 OPG) [60]. L’augmentation du nombre d’OPG dans la présente étude pourrait résulter de la différence entre l’environnement ainsi que la méthode d’observation. D’autant plus que la quantité d’éléments parasitaires retrouvée dans les matières fécales n’est pas forcément corrélé au nombre de parasites présent chez l’animal, l’excrétion étant variable dans le temps. Il n’y a pas d’excrétion d’œufs pendant la période prépatente (parasites immatures).
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Table des matières
INTRODUCTION
RAPPELS
1. Helminthoses du tube digestif chez les chiens
2. Présentation des principaux helminthes des chiens
2.1. Nématodes
2.1.1. Ascarides
2.1.1.1. Famille des Ascarididés
2.1.1.1.1. Toxascaris leonina
2.1.1.2. Famille des Toxocaridés
2.1.1.2.1. Toxocara canis
2.1.1.3. Famille des Ancylostomatidés
2.1.1.3.1. Ancylostoma spp
2.1.1.3.2. Uncinaria stenocephala
2.1.2. Autres familles
2.1.2.1. Famille des Capillaridés
2.1.2.1.1. Capillaria aerophila
2.1.2.2. Famille des Trichuridés
2.1.2.2.1. Trichuris vulpis
2.2. Cestodes
2.2.1. Famille des Dilépididés
2.2.1.1. Dipylidium caninum
2.2.2. Famille des Taeniidés
2.2.2.1. Taenia spp
2.2.2.2. Echinococcus granulosus
3. Clinique et pathogénie
3.1. Symptômes
3.2. Diagnostic
3.2.1. Diagnostic clinique
3.2.2. Diagnostic de laboratoire
3.3. Pathogénie
3.3.1. Actions pathogènes des formes immatures
3.3.2. Actions pathogènes des formes adultes
METHODOLOGIE
1. Cadre de l’étude
2. Type d’étude
3. Période étudiée et durée de l’étude
4. Population d’étude
4.1. Critères d’inclusion
4.2. Critères d’exclusion
5. Mode d’échantillonnage
6. Taille de l’échantillon
7. Variables étudiées
8. Matériels utilisées
8.1. Matériel animal
8.2. Bio-matériel
8.3. Matériel de prélèvement et de conservation des fèces
8.4. Matériel de traitement et d’observation des échantillons au laboratoire
9. Collecte de données
9.1. Outils de collecte de données
9.2. Méthode de collecte et de conservation des fèces
9.3. Traitement des échantillons avant l’examen
9.4. Mesures de biosécurité
10. Analyse coproscopique et diagnose des éléments parasitaires
10.1. Examen macro-coproscopique
10.2. Examen micros-coproscopique
10.2.1. La coprologie qualitative
10.2.2. La coprologie quantitative : méthode de flottaison sur lame Mac Master
11. Analyse et traitement des données
12. Limites de l’étude
13. Considérations éthiques
RESULTATS
1. Population canine enquêtée
2. Coproscopie
2.1. Aspect qualitatif
2.2. Aspect quantitatif
2.2.1. Prévalence globale des helminthes dans la population prélevée
2.2.2. Les associations parasitaires
2.2.3. Prévalence par espèce parasitaire
2.2.4. Prévalence par classe parasitaire
2.2.5. Degré d’infestation
2.3. Association entre la prévalence et les facteurs de risque
2.3.1. Prévalence d’infestation des chiens selon le groupe de race
2.3.2. Prévalence d’infestation des chiens selon le sexe
2.3.3. Prévalence d’infestation des chiens selon l’âge
2.3.4. Prévalence d’infestation des chiens selon le mode de vie
2.3.5. Prévalence d’infestation des chiens selon la présence ou non d’autres animaux cohabitant avec le chien prélevé
DISCUSSION
1. Commentaires et limites du protocole
2. Prévalence des infestations et facteurs de risque associés
3. Associations parasitaires
4. Symptômes cliniques rencontrés au sein du cabinet
5. Degré d’infestation
6. Recommandations de lutte contre les helminthoses
6.1. A l’attention des propriétaires des chiens
6.1.1. Mesures médicales
6.1.1.1. Choix des anthelminthiques
6.1.1.2. Les associations de molécules
6.1.1.3. Protocoles de vermifugation
6.1.2. Mesures sanitaires
6.1.2.1. Pour le risque de zoonose lié au chien
6.1.2.2. Contrôle des parasites dans l’environnement
6.1.2.3. Lutte contre les hôtes intermédiaires
6.2. A l’attention des vétérinaires praticiens
6.3. A l’attention des chercheurs
6.4. A l’attention des services publics
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
RESUME
ABSTRACT
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