Habiter et marché immobilier : La part de l’affectif dans les transactions immobilières

En France, le logement est au cœur de toutes les problématiques : pénurie de logements, prix élevé… Il fut d’ailleurs au cœur de la campagne présidentielle de 2012. Acquérir un logement pour la plupart des français est donc un aboutissement mais c’est aussi le départ d’un emprunt bancaire pour de nombreuses années et il s’agit donc d’un achat réfléchi, surtout en période de crise économique comme celle que nous connaissons actuellement. C’est ainsi un investissement financier… mais aussi affectif important. En effet, acheter un bien immobilier signifie nécessairement vivre pendant plusieurs années dans ce même logement. Les futurs acheteurs n’ont donc pas le droit à l’erreur et doivent faire le meilleur achat, ou bien le meilleur compromis. Nous allons donc étudier comment se fait ce choix ? Est-il purement rationnel, c’est-à-dire à maximiser son profit (ou minimiser sa perte) ou y a-t-il une part d’affectivité ? Et si oui, dans quelle mesure ? Nous nous sommes plus particulièrement intéressés à la question du coup de cœur immobilier que nous avons tenté d’expliquer, de comprendre les mécanismes de sa mise en œuvre et d’en mesure ses conséquences.

Contexte économique et affect 

Au préalable, nous tenons à faire remarquer que notre travail de recherche s’inscrit dans un contexte économique bien particulier, dans une période de crise, à la dimension mondiale et que de ce fait le marché du logement, plus particulièrement, est aussi affecté. Si l’on considère les conditions courantes d’échanges sur un marché, on observe que lorsque les quantités offertes augmentent et que les quantités demandées diminuent les prix s’abaissent. A l’inverse, lorsque les quantités offertes diminuent et les quantités demandées augmentent les prix s’élèvent. Nous pouvons donc dire que le marché immobilier suit la Loi de l’offre et de la demande, c’est-à-dire qu’en cas d’excès de l’offre par rapport à la demande, la concurrence entre les vendeurs amène une baisse de prix. A l’inverse, un excès de la demande par rapport à l’offre provoque la concurrence entre les acheteurs et conduit à l’augmentation du prix. La variation du prix se poursuit jusqu’à correction complète du déséquilibre. Lorsque l’offre égale la demande on atteint le prix d’équilibre.

On s’aperçoit donc que le prix joue également un rôle d’information économique. En effet la régulation d’un marché comme celui de l’immobilier repose sur la formation de prix libres qui assurent 3 fonctions principales : l’information (Les prix sont des signaux. Ils donnent des indications concernant la rareté relative des biens), l’incitation (Une variation des prix incite à modifier l’offre et la demande) et l’équilibre (L’équilibre du marché, l’équilibre général de l’économie).

D’après le ministère du logement l’évolution des prix :
– a une croissance tendancielle très proche de celle du revenu moyen par ménage
– est auto-corrélée. Un marché a des chances de baisser au cours d’une année N s’il baissait déjà au cours de l’année N-1 et réciproquement.
– est faiblement liée à l’évolution des taux d’intérêt des crédits immobiliers.
– est faiblement corrélée au cours des marchés.
– est faiblement liée à la taille du parc de logements.

Comme nous le rappelions en introduction, dans le contexte économique actuel les prix ont tendance à être élevés et même si la bulle immobilière semble en stagnation, les estimations financières des biens immobiliers dépassent la réalité des marchés et la valeur intrinsèque des logements, surtout dans les zones urbaines densément peuplées.

La dimension affective

« La définition du cadre de vie urbain prend évidemment des connotations diverses selon les dimensions privilégiées par l’urbanisme, l’architecture, l’économie, les sciences politiques ou psychosociales »

En effet, il semblerait que l’homme ait une tendance à se construire sur des oppositions :
– forme et fond
– dedans et dehors
– vide et plein
– concertation et isolement

La théorie de contraste est un des éléments nécessaire à une dynamique vitale. Moles et Rohmer décrivent également cette alternance. Le foyer est un refuge face à la pression urbaine tandis que de son coté l’urbain exerce une forte pression (pression sociale, pression de la foule, stress lié à la ville…). Afin d’évoluer sereinement dans son environnement physique Festinger, Pepitone et Newcomb ont mis en lumière des besoins spécifiques de l’homme ne pouvant être satisfaits que par le contact interpersonnel. Ils se regroupent en 2 classes :

– les besoins qui touchent au statut, à l’approbation, qui impliquent la mise en valeur de l’individu et nécessitent visibilité sociale et identification de l’individualité.
– les besoins dont la satisfaction exige d’être confondu avec le groupe et correspondent à une recherche d’anonymat dans lequel le sujet ne peut être ni identifié, ni distingué.

Ceci rejoint l’aspect intime. L’intimité n’est pas un état d’autosuffisance, ni une fin en soi, mais bien un instrument qui permet à la personne d’atteindre ses buts, les états d’être indispensables à son bon équilibre psychique, selon la formule de Jourard . Une autre fonction importante réside dans les possibilités de libération émotionnelle, dans le fait de pouvoir s’affranchir de son masque social. Effectivement, la relation constante avec autrui engendre de multiples tensions. Pour les assumer sans dommage psychique ou physique, la personne doit s’accorder des périodes de retrait où une détente émotionnelle est facilitée. Dans ces temps privilégiés, il est plus facile de laisser tomber sa façade sociale. La personne peut devenir elle-même, appréhender l’image du soi envers soi, sans dissimulation. Hall envisage d’ailleurs les éléments architecturaux comme des écrans derrière lesquels l’individu peut oublier périodiquement ses strates protectrices du moi pour se laisser aller et être simplement lui-même. Le foyer est donc une zone où l’on peut se laisser aller, être soi-même, où l’individu peut laisser tomber le masque porté pour se protéger de la pression urbaine, extérieure et c’est pourquoi l’habitation revêt une telle importance dans la vie de chacun. La maison ou l’appartement est comme une sorte de coquille individuelle, présumée inviolable, qui s’ouvre et se ferme grâce à une clé. L’habitation revêt alors la fonction de refuge où l’être n’est entouré que par des êtres et des objets familiers sur lesquels il exerce son emprise de maître. Il y a ici une référence au matériel mais aussi au foyer dans le sens de famille, notamment au sens de Chombart de Lauwe , c’est-à-dire la famille restreinte qui comprend strictement dans les sociétés monogames le père, la mère, les enfants avec toutes les recompositions familiales qui peuvent se faire.La sphère d’appropriation qu’est l’habitat est caractérisé par l’opposition entre un aspect dénotatif et l’aspect esthétique.

Le coup de cœur

A travers cette dimension affective, nous nous sommes plus particulièrement intéressés au coup de cœur appliqué à l’immobilier c’est à dire à la part du non rationnel et de l’affectivité dans les transactions immobilières. L’expression « coup de cœur » est utilisée par tous, elle est largement passée dans le langage courant et elle souvent utilisée pour faire du marketing. On entend souvent dire qu’une personne a un « coup de cœur » que ce soit une voiture, une maison, etc. Généralement il s’agit d’un bien matériel dont le prix est élevé et que les personnes peuvent posséder affectivement. Nous nous sommes davantage intéressés à expliquer le moment du coup de cœur immobilier plutôt que de le définir explicitement. A travers cette explication, nous aborderons diverses notions (émotion, sentiment…) liées les unes aux autres qui nous permettrons d’expliquer le basculement vers le coup de cœur (immobilier).

Stimulation
A la base du coup de cœur, il faut une stimulation, ou plutôt des stimulus, qui éveilleraient l’individu. Ceux-ci doivent être d’ « intensité suffisante pour exciter un récepteur sensoriel ». Ces stimulus se situent dans l’environnement, dans le bien immobilier visité par l’individu. Celui-ci effectue un « filtrage qui contribue à ne rendre efficace qu’un nombre restreint de ces informations et à en faire des stimulus ». Ceux-ci bien entendu peuvent être différents selon les sujets. Cela peut être la couleur, la luminosité, la forme architecturale ou bien la remémoration de souvenirs comme par exemple celui de la maison de vacance de son enfance.

Sensation et perception
Suite à ces stimulations, il y a un « traitement de l’information » qui conduit à la formation de différentes sensations chez l’individu. Il s’agit de l’interaction entre l’individu et le logement à travers ses 5 sens. Le regroupement de ces différentes sensations donne lieu à la perception, c’està-dire « un acte de l’esprit permettant d’organiser les sensations provenant de l’extérieur et de les interpréter. » Mais la perception n’est pas seulement une interprétation des messages sensoriels comme le souligne Livet dans Emotions et rationalité morale, « elle est jugement et prise de décision, elle est anticipation des conséquences de l’action ».

Emotion et représentation
Il existe aujourd’hui une multitude de définitions de l’émotion mais la plupart des ouvrages psychologiques se réfère à 5 composantes et se rattachent aux émotions primaires (la joie, l’intérêt-excitation, la surprise, la tristesse, la colère, la peur, le dégoût, le mépris et la honte).

Les émotions sont ainsi des réponses de « fortes intensités qui comportent des manifestations expressives (changement dans l’expression faciale, vocale, posturale…), physiologiques (action de bondir, frapper, fuir, s’immobiliser…) et subjectives typiques (le vécu émotionnel, les émotions ‘socialement apprises’ ).  », qui s’installent rapidement et sont de courte durée. C’est ce qu’on appelle la « triade de la réaction émotionnelle  ». A cela peut s’ajouter deux autres composantes. La première est la « tendance à l’action », cette composante est « une forme de préparation à l’action » et « représente la facette la plus importante d’une émotion parce qu’elle est typique à chaque émotion ». La dernière composante est la composante d’évaluation cognitive. Elle « représente la processus cognitif par lequel un événement externe ou interne va être évalué, même de façon implicite, de sorte que la réponse émotionnelle constituée des 4 composantes mentionnées ci-dessus est déclenchée et se différencie en une émotion spécifique telle que la joie, la peur…  ». Ceci explique « la grande variabilité intra et inter individuelle dans le domaine de l’émotion : un même événement peut déclencher des émotions très différentes chez un même individu ».

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Table des matières

I)INTRODUCTION
II) GENERALITES
III) METHODOLOGIE
IV) RESULTATS
V) COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VI) CONCLUSION  
VII) REFERENCES
ANNEXES
RESUME

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