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Schéma de l’étude et patients
Il s’agit d’une étude monocentrique, rétrospective, observationnelle, en ouvert, se déroulant au sein du CHU de la Timone, à l’APHM, dans le service d’anesthésie de chirurgie de la main.
Trois groupes ont été constitués après tirage au sort :
• Un groupe contrôle (CT) : anesthésie loco-régionale par stratégie conventionnelle,
• Un groupe avec hypnose par réalité virtuelle (VR-H) : hypnose par réalité virtuelle et anesthésie loco-régionale habituelle,
• Un groupe avec distraction par réalité virtuelle (VR-DT) : distraction par réalité virtuelle et anesthésie loco-régionale habituelle.
Les patients inclus étaient des adultes pris en charge par anesthésie loco-régionale (bloc axillaire) pour une chirurgie du membre supérieur.
Les critères de non-inclusion étaient :
o Patient mineur.
o Trouble neurologique (coma, démence, confusion, épilepsie photosensible).
o Trouble psychiatrique lourd.
o Surdité ou trouble de la vision sévère.
o Utilisation chronique de sédatif ou narcotique.
o Insuffisance rénale (clairance créatinine <60 ml/min),
o Instabilité hémodynamique (Pression artérielle moyenne (PAM) <60 mm Hg).
o Instabilité respiratoire (fréquence respiratoire (FR) >25 ou <10/min ou oxygénothérapie au domicile).
o Pathologie cardiaque ou respiratoire sévère.
o Allergie aux anesthésiques locaux, morphiniques ou anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS),
o État cutané non compatible avec un bloc axillaire.
o Femme enceinte ou allaitante.
o Barrière de la langue.
o Absence de couverture sociale.
o Sujet en privation de liberté.
Objectifs de l’étude
L’objectif principal était de comparer les trois stratégies sur le vécu péri-opératoire des patients, jugé par le score EVAN-LR à 24h d’une chirurgie du membre supérieur réalisées sous ALR.
Les objectifs secondaires étaient d’évaluer au sein de ces trois groupes la diminution des doses de sédation utilisées, la douleur, l’anxiété et le confort pendant l’ALR, en per-opératoire et en post-opératoire, le recours à un analgésique de sauvetage, le nombre d’échec d’ALR, défini par la nécessité de convertir en anesthésie générale, la satisfaction à long terme, la satisfaction du personnel au bloc opératoire et les effets secondaires de l’anesthésie et de la réalité virtuelle.
Prise en charge au bloc opératoire
Groupe contrôle
Le jour de l’intervention, lors de l’arrivée au bloc opératoire, l’étude débutait par une information orale du patient participant à l’étude avec un recueil oral de son consentement. La prise en charge usuelle était celle d’une chirurgie du membre supérieur sous bloc axillaire. Aucune prémédication n’a été administrée. En salle d’ALR, le patient était installé, scopé, la tension artérielle était mesurée toutes les 10mins, une perfusion était posée et des lunettes d’oxygène étaient mises en place. Le bloc axillaire était réalisé par un anesthésiste-réanimateur sénior ou par un interne encadré par un médecin sénior, avec de la ropivacaïne à 0,375%, guidé par l’échographie avec une sonde linéaire haute fréquence recouverte d’une protection stérile. Un intervalle de 30 minutes était respecté avant l’entrée dans le bloc opératoire.
Le patient était ensuite transféré dans la salle d’opération et installé. Un test au froid était réalisé pour vérifier l’efficacité de l’anesthésie loco-régionale. Dès l’installation, le protocole d’analgésie était débuté : dexaméthasone 8mg, paracétamol 1g toutes les 6 heures, kétoprofene 100mg toutes les 8 heures en intraveineux. Une antibioprophylaxie par amoxicilline-acide clavulanique ou céfazoline était faite pour certains patients selon les Recommandations de la SFAR. [35] Du dropéridol était administré en fonction du score d’apfel. [36]
Si une sédation devait être utilisée, l’anesthésiste-réanimateur avait recours à du diprivan ou du midazolam en titration. Si cela était insuffisant, l’anesthésiste-réanimateur convertissait la procédure en anesthésie générale en considérant cela comme un échec de l’anesthésie loco-régionale. A la fin de l’intervention, le patient était conduit en salle de surveillance post interventionnelle (SSPI). En post-opératoire, un protocole d’analgésie était introduit en per os : paracétamol 1g toutes les 6h, kétoprofene 100 mg toutes les 12h selon la fonction rénale. Si la douleur était non contrôlée avec une échelle numérique (EN)>3, le médecin avait recours à un analgésique de sauvetage : une titration de morphine était réalisée à la posologie de 0,1mg/kg (maximum 4 mg), puis des injections répétées toutes les 5minutes de 0,025mg/kg jusqu’à l’obtention d’une analgésie suffisante. Si le patient présentait des nausées ou des vomissements, de l’ondansétron 4 mg était administré.
Groupe hypnose par réalité virtuelle
En salle d’ALR, après l’installation du patient, l’anesthésiste mettait en place le casque de réalité virtuelle Pico, le patient choisissait le type de voix humaine (masculine ou féminine), un ou plusieurs univers visuel (plage tropicale, plongée, voyage astral, sous-bois, paysage enneigé) et le style musical. La séance d’hypnose en réalité virtuelle durait 20 minutes.
Durant cette période, le bloc axillaire était réalisé puis le casque était retiré. Le patient était ensuite transféré au bloc opératoire, installé et le casque était de nouveau mis en place avec cette fois ci un film d’hypnose par réalité virtuelle de durée indéterminée.
Groupe distraction par réalité virtuelle
En salle d’ALR, après l’installation du patient, l’anesthésiste-réanimateur mettait en place le casque de réalité virtuelle, avec le même type d’univers visuel et de musique que décrit précédemment mais sans contenu de suggestion hypnotique afin d’avoir des conditions les plus similaires possibles pour comparer l’hypnose et la distraction seule. Une fois le bloc axillaire réalisé, le casque était retiré. Le patient était ensuite transféré au bloc opératoire, installé et le casque était de nouveau mis en place avec la reprise de la distraction pour une durée indéterminée.
Dispositif médical
Le dispositif HypnoVR est une application logicielle qui rend accessible les bénéfices de l’hypnose médicale dans le traitement de la douleur et de l’anxiété au plus grand nombre, grâce à la réalité virtuelle. Le but est d’améliorer la douleur, le stress et l’anxiété des patients en fournissant une solution alternative ou complémentaire aux traitements chimiques. L’utilisation prévue dans la présente recherche est conforme à la destination du dispositif et à ses conditions d’utilisation courante. Il est associé à du matériel : un casque audio et un casque de réalité virtuelle Pico (marqué CE). Il s’agit d’un dispositif médical de classe I selon la règle 12 de la Directive 93/42/CE et sous la nouvelle réglementation MDR 2017/745.
Le logiciel HypnoVR contient un scénario d’hypnose médicale adapté contenant des suggestions hypnotiques, des séquences de respiration guidée et de cohérence cardiaque. La durée choisie peut être de 20 minutes ou indéterminée. Les choix disponibles pour le patient seront les suivants : le choix de l’univers visuel (plage tropical, plongée, voyage astral, sous-bois, paysage enneigé), le choix d’une musique relaxante et celui d’une voix d’homme ou de femme. Ce logiciel permet également de réaliser une séance de distraction seule sans suggestion hypnotique où le patient établit son choix parmi les mêmes univers visuels et musicaux mais cette fois-ci sans voix, ni hypnose. Aucunes données patientes ne sont enregistrées par le dispositif médical HypnoVR.
Critères d’évaluation
Le critère de jugement principal était la satisfaction du patient, évaluée par l’EVAN-LR à 24h de la chirurgie. Il s’agit d’un score multidimensionnel, auto déclaré, validé par une étude de grande ampleur [38] qui comporte 19 questions réparties en cinq dimensions évaluant le vécu péri-opératoire : l’attention, l’information, la douleur, l’inconfort et les délais d’attente. Les items sont notés de 1 à 5 selon l’échelle de Likert (1 = “beaucoup moins qu’attendu”, 2 = “moins qu’attendu”, 3 = “comme attendu”, 4 = “plus qu’attendu”, 5 = “beaucoup plus qu’attendu”). Chaque dimension de ce questionnaire est transformée linéairement en score compris entre 0 et 100 et le score global représente la moyenne de ces scores. Le patient complétait le questionnaire envoyé par mail ou par un appel téléphonique d’un médecin anesthésiste en aveugle.
Les critères de jugement secondaires comprenaient :
o Les posologies de sédation utilisées, évaluées en milligramme (mg), à J1 du jour de la chirurgie avant la sortie de la SSPI.
o La douleur, évaluée pendant la réalisation du bloc axillaire, en post-opératoire immédiat par une échelle visuelle analogique de 100mm (EVA), à J1, le jour de la chirurgie avant la sortie de la SSPI et sur une échelle numérique (EN) de 0 à 10, en post-opératoire à J2, le lendemain de l’intervention.
o L’anxiété, évaluée pendant la réalisation du bloc axillaire, en post-opératoire immédiat par l’EVA, à J1 le jour de la chirurgie avant la sortie de la SSPI et sur l’EN en post-opératoire à J2.
o Le confort, évalué pendant la réalisation du bloc axillaire, en post-opératoire immédiat par l’EVA, à J1 le jour de la chirurgie avant la sortie de la SSPI et sur l’EN en post opératoire à J2.
o Le recours à un analgésique de sauvetage, évalué à J2 de la chirurgie, à 24h.
o L’échec de l’ALR, évalué par la nécessité de convertir en anesthésie générale, recueilli à J1 de la chirurgie.
o La satisfaction du personnel soignant, infirmier anesthésiste, médecin anesthésiste-réanimateur, infirmier de bloc opératoire et chirurgien, recueillie sur une EVA à J1 le jour de la chirurgie.
o La satisfaction à long terme du patient, jugée par l’EN à un mois post-opératoire au travers d’un questionnaire envoyé par mail ou par un appel téléphonique d’un médecin anesthésiste en aveugle.
Les critères de tolérance clinique incluaient la mesure de la tension artérielle toutes les dix minutes, la fréquence cardiaque, la posologie de vasopresseurs, la saturation en oxygène, la fréquence respiratoire, le débit d’oxygène utilisé et la survenue d’une confusion. La sécurité du dispositif médical d’HypnoVR était évaluée par la survenue de nausées, de vomissements et par la nécessité d’arrêter la réalité virtuelle.
Les données recueillies intégraient également des données cliniques, l’âge, le sexe, le score ASA (« American Society of Anesthesiologists »), le score d’apfel, les comorbidités principales (insuffisance d’organe chronique, facteurs de risque et maladies cardiovasculaires, immunodépression, traitements avant admission), la consommation de tabac, d’alcool, de toxiques, de benzodiazépines et d’antalgiques.
Une évaluation pré-opératoire était réalisée avec l’EVA douleur pré-opératoire, l’EVA anxiété pré-opératoire et l’EVA confort pré-opératoire. Le score APAIS (Amsterdam Preoperative Anxiety and Information Scale) dans sa version française était également rempli. C’est un outil de 6 questions validé pour évaluer le niveau d’anxiété pré-opératoire des patients. [39, 40]
Des données concernant le bloc opératoire étaient répertoriées : la posologie de naropéine utilisée (volume et concentration), le temps entre la réalisation du bloc axillaire et l’incision, la durée de la chirurgie et la durée de séjour en SSPI.
L’ensemble des données cliniques de suivi étaient recueillies :
– À J1 le jour de la chirurgie avant la sortie de SSPI par un anesthésiste.
– À J2, le lendemain de l’intervention par un mail ou un appel téléphonique d’un anesthésiste en aveugle.
– À J28, de l’intervention par un mail ou un appel téléphonique d’un anesthésiste en aveugle.
Critères de jugement secondaires
Douleur
La douleur pré-opératoire, jugée par une EVA, était comparable entre les groupes (tableau 1). La douleur était diminuée de façon significative en utilisant l’hypnose par réalité virtuelle par rapport à la stratégie conventionnelle lors de la réalisation de l’ALR, en post-opératoire immédiat et à 24h de l’intervention. La douleur était également réduite de manière significative dans le groupe distraction par réalité virtuelle par rapport au groupe contrôle lors de la réalisation de l’ALR et à 24h de l’intervention. Les résultats sur la douleur sont présentés dans le tableau 3.
En revanche, la distraction ne diminuait pas la douleur post-opératoire immédiate et il n’y avait pas de différence statistiquement significative sur la douleur pendant l’ALR entre les groupes de réalité virtuelle hypnose et distraction.
Anxiété
Alors que l’anxiété était comparable entre les différents groupes autant sur l’EVA que sur le score APAIS (tableau 1) en pré-opératoire, celle-ci était diminuée de façon significative en utilisant l’hypnose par réalité virtuelle par rapport à la stratégie conventionnelle lors de la réalisation de l’ALR, en post-opératoire immédiat en sortie de SSPI et à 24h de l’intervention.
L’anxiété était également réduite dans le groupe distraction par réalité virtuelle par rapport au groupe contrôle lors de la réalisation de l’ALR, en post-opératoire immédiat en sortie de SSPI et à 24h de l’intervention de manière statistiquement significative. En revanche, il n’y avait pas de différence statistiquement significative entre les groupes de réalité virtuelle hypnose et distraction. Les résultats sur l’anxiété sont également résumés dans le tableau 3.
Confort
Le confort pré-opératoire, évalué par l’EVA était comparable entre les groupes (tableau 1). Le confort était amélioré de façon significative en utilisant l’hypnose par réalité virtuelle par rapport à la stratégie conventionnelle lors de la réalisation de l’ALR, en post-opératoire et à 24h de l’intervention. Le confort était également augmenté dans le groupe distraction par réalité virtuelle par rapport au groupe contrôle lors de la réalisation de l’ALR, en post-opératoire immédiat et à 24h de l’intervention de manière significative.
Par ailleurs, il n’y avait pas de différence statistiquement significative entre les groupes de réalité virtuelle hypnose et distraction. Les résultats sur le confort sont détaillés dans le tableau 3.
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Table des matières
ABREVIATIONS
1. INTRODUCTION
2. MATERIELS ET METHODES
2.1. Schéma de l’étude et patients
2.2. Objectifs de l’étude
2.3. Prise en charge au bloc opératoire
2.3.1. Groupe contrôle
2.3.2. Groupe hypnose par réalité virtuelle
2.3.3. Groupe distraction par réalité virtuelle
2.4. Dispositif médical
2.5. Critères d’évaluation
3. ANALYSE STATISTIQUE
4. RÉSULTATS
4.1. Critère de jugement principal
4.2. Critères de jugement secondaires
4.2.1. Douleur
4.2.2. Anxiété
4.2.3. Confort
4.2.4. Sédation
4.2.5. Tolérance clinique
4.2.6. Satisfaction du personnel du bloc opératoire
4.2.7. Satisfaction à long terme
5. DISCUSSION
6. CONCLUSION
7. RÉFÉRENCES
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