Glomérulosclérose nodulaire liée à une gammapathie monoclonale

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Étiologies de glomérulosclérose nodulaire

Néphropathie diabétique

La néphropathie diabétique est la première cause d’insuffisance rénale chronique terminale dans le monde. Son incidence est en constante augmentation du fait de l’«épidémie » mondiale de diabète de type II (3). Nous en préciserons les tendances épidémiologiques, avant de décrire les mécanismes physiopathologiques, puis les lésions histologiques qui en découlent.

Épidémiologie

La prévalence du diabète traité pharmacologiquement en France était de 5% de la population soit 3,3 millions de personnes en 2016 (4), avec de grandes disparités régionales (plus élevé dans les départements d’Outre-mer et dans le Nord). Environ 90% des diabétiques présentent un diabète de type II et 5 à 10% un diabète de type I. La tranche d’âge la plus touchée est 75-85 ans avec un homme sur cinq et une femme sur sept touchés.
Le risque de développer une néphropathie chez un sujet diabétique a baissé à partir des années 1970 grâce à l’obtention de meilleurs contrôles glycémiques (Fig. 3). Une récente étude finlandaise (5) chez des diabétiques de type I montre que le risque cumulé de développer une insuffisance rénale chronique terminale est de 2,2% à 20 ans et de 7,0% à 30 ans d’évolution. Ce risque est plus difficile à évaluer chez les diabétiques de type II du fait de la difficulté à dater l’installation de la maladie. Ainsi, 3% des diabétiques de type II présentent déjà des signes de néphropathie diabétique au diagnostic.
L’apparition d’une néphropathie diabétique est un tournant évolutif majeur chez ces patients. Dans une étude de 2016, la survenue d’évènements cardio-vasculaires était multipliée par 1,79 chez les sujets ayant une microalbuminurie et par 2,65 chez ceux ayant une macroalbuminurie comparativement aux sujets sans albumine dans les urines.
Plus tard au cours de l’évolution de la néphropathie diabétique, l’étude de cohorte finlandaise montre un risque relatif ajusté de décès de 10,2 chez les patients présentant une insuffisance rénale chronique terminale par rapport aux autres patients diabétiques. Il est intéressant de noter que certains patients semblent protégés du risque de développer cette néphropathie. Il a été montré (6) que le risque de développer une néphropathie diabétique croissait lors des 15 premières années de la maladie avant de diminuer.
Cela peut être dû au fait qu’il existe des prédispositions ethniques et génétiques (7). Une étude portant sur 430 000 vétérans américains diabétiques de tout type et de toute ancienneté (8) a évalué la prévalence de cette néphropathie selon leur origine ethnique. Celle-ci montre une plus grande prévalence chez les sujets Afro-américains (14,7%), Asiatiques (12,9%) et des Indiens d’Amériques (12,7%) par rapport aux sujets Caucasiens (10,8%). La tribu indienne des Pimas, dans laquelle la moitié des sujets de 35 ans sont diabétiques, présente également une proportion plus importante de patients porteurs d’une néphropathie diabétique (9).
Ces constatations, associées à l’identification de familles diabétiques présentant plus d’atteinte rénale, ont permis de mettre en évidence des susceptibilités génétiques à son développement (10). Les gènes de susceptibilité mis en évidence codent pour des protéines impliquées dans le métabolisme lipidique ou glucidique, l’angiogenèse, le système rénine-angiotensine-aldostérone ou encore l’inflammation et le stress oxydatif (Tab. 1), jouant un rôle dans les mécanismes physiopathologiques du développement de la néphropathie diabétique.

Physiopathologie

La compréhension des mécanismes à l’œuvre dans l’installation et la progression de la néphropathie diabétique a connu des avancées majeures au cours des vingt dernières années. Celle-ci reste cependant incomplète.
Le modèle de description le plus utilisé est celui du diabète de type I, considéré comme plus « pur » que le type II. En effet, la néphropathie diabétique du type II est classiquement décrite comme une néphropathie mixte, diabétique et vasculaire, du fait de l’importance les lésions de macroangiopathies associées. Ainsi, une classification de la néphropathie diabétique dans le type II a été proposée en fonction des lésions histologiques (11). La classe I était définie comme « néphropathie diabétique typique », la classe II comme montrant des « lésions glomérulaires ischémiques » et la classe III comme la « présence d’une autre glomérulopathie ». La répartition des patients dans les différentes classes est indiquée dans le tableau 2.

Histologie

Les atteintes rénales du diabète les plus caractéristiques concernent essentiellement les glomérules. Comme pour la physiopathologie, le modèle le mieux décrit est celui du diabète de type I.
L’évolution naturelle de la néphropathie diabétique suit plusieurs stades selon l’apparition d’une micro-albuminurie, d’une protéinurie, d’une hypertension artérielle ou d’une insuffisance rénale chronique. Il existe une corrélation entre les stades cliniques et les lésions histologiques observées (Fig. 7).La classification actuelle de la néphropathie diabétique a été établie en 2010 (25) et comprend quatre classes :
– Les modifications observées dans la classe I surviennent après 2 à 5 ans d’évolution et sont souvent asymptomatiques.
– Pour la classe IIa, après 5 à 10 ans d’évolution, apparaît une microalbuminurie. La classe IIb, après 10 à 20 ans d’évolution, se traduit par une protéinurie et une dégradation de la fonction rénale, une hypertension artérielle.
– Les patients porteurs d’une classe III voient leur fonction rénale poursuivre sa dégradation. Il est démontré que l’apparition des nodules de Kimmelstiel-Wilson était un facteur de gravité.
– Enfin, les patients porteurs d’une classe IV présentent une insuffisance rénale terminale.
– Microscopie optique
– Épaississement des parois capillaires (Fig. 8) : c’est la lésion de la plus précoce. Elle est mieux perçue en microscopie électronique, technique rarement utilisée dans ce contexte.
– Expansion mésangiale (Fig. 9) : elle correspond à une accumulation globale et diffuse de matrice mésangiale PAS-positive et éosinophile. L’hypercellularité mésangiale est peu fréquente (26). Cette expansion, combinée à l’épaississement des parois capillaires, induit une baisse de la perméabilité membranaire.
– Nodules mésangiaux : ce sont des accentuations arrondies et homogènes de l’expansion mésangiale. Leur contenu est habituellement acellulaire, les noyaux des cellules mésangiale étant refoulés à leur périphérie. Ils sont identifiables lorsque leur taille atteint une fois et demie celle d’une tige mésangiale, soit environ 40µm (27). Leur présence est notée sur environ 25% des biopsies de glomérulopathies diabétiques. Deux types de nodules peuvent être identifiés :
– les plus fréquemment observés se répartissent en périphérie du glomérule, sont souvent multiples (. 10.A).
– plus rarement, on peut observer de plus volumineux nodules (Fig. 10.B), atteignant parfois 200µm. Ils diffèrent par leur contenu hétérogène, mésangiolytique, avec aspect feuilleté en argentation de Jones, ainsi que par la présence de microanévrysmes à leur contact.
Un mécanisme d’apparition de ces nodules proposé est que la condensation de la matrice mésangiale entraine une perte des points d’ancrage de la membrane basale glomérulaire au mésangium. Parallèlement, une perte de cellules endothéliales capillaires est constatée. Ces phénomènes favorisent le développement de microanévrysmes à partir des boucles capillaires glomérulaires. A leur contact, l’accumulation de matrice mésangiale s’organise en fibrilles et se condense, épaississant dans un premier temps les parois de ces microanévrysmes. Au fur et à mesure des appositions se forment des stratifications qui aboutissent à la formation des nodules (28).
– Hyalinose et lésions exsudatives : il s’agit de matériel éosinophile d’aspect hyalin s’accumulant dans plusieurs éléments du glomérule. Cette lésion est retrouvée sur environ 60% des biopsies de néphropathie diabétique (27) et sa prévalence augmente avec la sévérité de la néphropathie. Elle est observée dans les zones de glomérulosclérose segmentaire. En situation sous-endothéliale, ces dépôts forment des fibrin cap (Fig. 11.A) qui participent à l’occlusion des capillaires glomérulaires.
Des lésions similaires, appelées capsular drop peuvent être observées (Fig. 11.B), entre la membrane basale de la capsule de Bowman et les cellules épithéliales. Elles ne sont toutefois pas spécifiques du diabète (29).
Enfin, il est observé une perte de podocytes, qui met à nu la membrane basale glomérulaire et pourrait ainsi initier l’apparition de la glomérulosclérose. Ce phénomène est dû à une augmentation de l’apoptose favorisée par l’hyperglycémie et à une moindre production d’intégrines qui participent à leur attachement à la membrane basale.
– Immunofluorescence
Son utilité diagnostique principale dans la néphropathie diabétique repose sur l’exclusion de diagnostics différentiels, notamment des étiologies de glomérulosclérose nodulaire en rapport avec une gammapathie monoclonale.
Quelques spécificités sont toutefois retrouvées. On retrouve fréquemment un marquage pariétal linéaire d’IgG (Fig. 12) (30), mais son importance n’est pas corrélée à la sévérité clinique (31). Un marquage similaire peut être observé avec l’IgM, l’albumine, le C3 ou le fibrinogène. Le mésangium et les nodules ne sont généralement pas marqués, alors que les lésions de hyalinose sont marquées par l’IgM et le C3. Tous ces marquages non spécifiques peuvent être dus aux propriétés de liaison de molécules par les AGE en excès.
– Microscopie électronique
– Capillaires glomérulaires (Fig. 13) : les modifications structurelles concernent les trois couches de la fente de filtration que sont les cellules endothéliales, la membrane basale glomérulaire et les cellules épithéliales ou podocytes. L’épaississement de la membrane basale est le premier signe histologique qui apparaît au cours de la maladie. Il pourrait même correspondre à un état pré-diabétique, comme démontré par une étude de 23 patients non-diabétiques présentant une protéinurie supérieure à 0,5g/24h avec cette anomalie histologique (32). Après 24 mois de suivi, 16 d’entre eux développaient un état diabétique. Cet épaississement augmente ensuite avec la durée d’évolution du diabète et la sévérité de la maladie (33). Il s’accompagne d’une modification de la composition de la membrane basale, avec plus de collagène IV et moins de laminine et d’héparane sulfate, ce qui modifie les propriétés électriques de la membrane.
L’architecture des podocytes est également modifiée au niveau des pédicelles qui sont épaissis, formant une lame cytoplasmique continue, diminuant le nombre de fentes de filtration. Ces cellules sont également moins nombreuses dans la néphropathie diabétique. Ainsi, la surface de membrane basale non couverte par les pédicelles augmente avec le degré de protéinurie (34).
Le podocyte interagit avec la cellule endothéliale, notamment par la sécrétion de VEGF. L’appauvrissement en podocyte pourrait donc être responsable de la diminution de surface d’endothélium fenestré chez les patient diabétiques.
– Mésangium : on distingue l’expansion mésangiale diffuse et les formations nodulaires. La matrice mésangiale (Fig. 14.A) est normalement finement granuleuse, réalisant un réseau microfibrillaire entourant les cellules mésangiales. Ce réseau est moins dense quand on s’approche des capillaires glomérulaires. Au cours de la néphropathie diabétique, on observe une augmentation de la surface occupée par le mésangium au sein du glomérule, proportionnelle à la durée d’évolution du diabète (35). On identifie en son sein des débris cellulaires, des fibrilles de collagène, des résidus d’organites formant des granules denses. Le contenu des nodules (Fig. 14.B) est riche en collagènes I, III, IV , V et VI, ainsi qu’en fibronectine et laminine.

Glomérulosclérose nodulaire liée à une gammapathie monoclonale

Les gammapathies monoclonales d’expression rénale forment un large spectre (Fig. 15), pouvant quasiment toutes prendre la forme d’une glomérulosclérose nodulaire. En plus de la microscopie optique, l’immunofluorescence et surtout la microscopie électronique ont une place particulièrement importante pour les différencier. Cette dernière permet d’analyser l’ultrastructure des dépôts qui est à la base de la classification de ces maladies. On distingue d’une part les dépôts organisés, en fibrilles ou en microtubules, et les dépôts non organisés (36).
Les maladies à dépôts organisés en fibrilles comprennent les amyloses et les glomérulopathies fibrillaires. Les microtubules sont vus dans les glomérulonéphrites immunotactoides (ou GOMMID) et les cryoglobulinémies de type 1. Les maladies à dépôts non organisés sont représentées par les maladies de dépôts d’immunoglobulines monoclonales (syndrome de Randall), les glomérulonéphrites proliféra ves à dépôts non organisés d’immunoglobuline monoclonale (PGNMID) et les glomérulonéphrites à dépôts de C3 isolés.

Amylose AL

Elle survient le plus souvent dans un contexte de gammapathie monoclonale de signification indéterminée, parfois de myélome multiple. Son pronostic est réservé, lié aux atteintes cardiaques, hématologiques et rénales.
L’atteinte rénale est essentiellement glomérulaire, liée à des dépôts organisés, quelque soit le type d’amylose. Ces dépôts correspondent à une substance amorphe composée d’une protéine amyloïde dite en feuillet béta plissée venant se déposer dans le mésangium. Dans l’amylose AL, il s’agit de chaines légères d’immunoglobuline entières ou de régions variables de chaines légères. En microscopie optique, les dépôts sont d’abondance variable, parfois difficilement visualisables, jusqu’à former de volumineux nodules. Les caractéristiques essentielles de ces dépôts sont d’être colorés par le rouge Congo et d’être dichroïques jaune-vert en lumière polarisée. Contrairement à la glomérulosclérose, ces dépôts ne prennent pas l’argentation de Jones. Les vaisseaux sont très souvent atteints, les tubes et l’interstitium sont atteints dans une moindre mesure.
L’immunofluorescence est fondamentale pour typer l’amylose. Dans l’amylose AL, elle met en évidence les dépôts monotypiques de chaines légères, le plus souvent lambda.
Enfin la microscopie électronique montre des dépôts d’immunoglobulines enchevêtrées réalisant des fibrilles de 8 à 10 nanomètres, principalement mésangiaux. Ils peuvent également s’étendre dans les parois capillaires glomérulaires les espaces sous-endothéliaux.

Glomérulopathie fibrillaire

Il s’agit d’une entité rare décrite pour la première fois en 1977, d’expression uniquement rénale, réalisant un tableau de syndrome néphrotique avec insuffisance rénale (36). Ses étiologies sont très diverses, et comprennent, outre une gammapathie monoclonale, un syndrome lymphoprolifératif, un cancer solide carcinomateux, une infection par le VHC, diverses maladies auto-immunes (38).
En microscopie optique, on retrouve une expansion mésangiale éosinophile PAS-positive tendant à la nodulation. Cette expansion correspond à des dépôts et non pas à de la matrice extracellulaire, comme le montre l’absence d’imprégnation par l’argentation de Jones. Contrairement aux amyloses, ils sont négatifs au rouge Congo.
En immunofluorescence, les dépôts sont le plus souvent marqués par des IgG polyclonales (de sous-classe IgG4 prédominante) et du C3. Au niveau mésangial, le marquage n’est ni granuleux, ni linéaire, mais dit « en tâche ». Récemment, il a été montré qu’un marquage positif par l’anticorps anti-DNAJB9 représente un outil diagnostic très performant dans cette maladie (39).
La microscopie électronique permet de conforter le diagnostic. Les dépôts forment des fibrilles rigides de 15 à 30nm de diamètre disposées en tout sens au sein du mésangium, infiltrant parfois la membrane basale glomérulaire (Fig. 17).

Glomérulopathies à dépôts organisés microtubulaires d’immunoglobulines monoclonales (GOMMID) ou glomérulonéphrites immunotactoides

La présentation clinique est identique à celle d’une glomérulopathie fibrillaire. La description du premier cas remonte à 1980, mais sa fréquence reste nettement moindre. La principale différence, en dehors de l’architecture ultrastructurale des dépôts, repose sur le fait que l’on retrouve quasi-systématiquement une immunoglobuline monoclonale ou un syndrome lymphoprolifératif (le plus souvent leucémie lymphoïde chronique).
En microscopie optique, la présentation peut prendre des formes plus variées. En plus de l’expansion mésangiale nodulaire PAS-positive ne prenant pas l’argentation de Jones et le rouge Congo, on peut retrouver une surcharge inflammatoire endocapillaire, des croissants, des thrombi intraluminaux, une hyalinose segmentaire et focale, une glomérulonéphrite membrano-proliférative.
En immunofluorescence, on retrouve une positivité d’IgG monoclonale, dont la distribution des dépôts est mésangiale (Fig. 18.A) mais aussi capillaire, et dont l’aspect est granuleux.
Enfin, la microscopie électronique (Fig. 18.B) permet d’affirmer le diagnostic en montrant l’architecture microtubulaire des dépôts. Ils sont disposés parallèlement, formant des faisceaux au sein du mésangium et des espaces sous-endothéliaux. Le diamètre de ces microtubules est compris entre 30 et 60nm.

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Table des matières

I- Introduction
II- La glomérulosclérose nodulaire
A- Généralités
B- Définition
C- Étiologies de glomérulosclérose nodulaire
1- Néphropathie diabétique
2- Glomérulosclérose nodulaire liée à une gammapathie monoclonale
3- Glomérulosclérose nodulaire liée à une hypoxie rénale chronique
4- Glomérulosclérose nodulaire idiopathique
III – Méthode
IV – Résultats
A – Inclusion
B – Description des cas
C – Analyse des résultats
V- Discussion
A – Rôle du tabac
B – Rôle de l’insulinorésistance
C – Rôle de la néoangiogénèse
D – Exclusion des causes connues de glomérulosclérose nodulaire
E – Iatrogénie médicamenteuse ou origine toxique environnementale
F – Caractérisation de l’atteinte rénale
VI- Conclusion
Bibliographie

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