Le remplissage aseptique
La fabrication des médicaments stériles doit s’effectuer dans des zones à atmosphère contrôlées (ZAC). Ces zones sont classées selon les qualités requises pour leur environnement. En effet, un niveau approprié de propreté de l’environnement est requis pour chaque opération de fabrication. Il existe quatre classes distinctes de ZAC, définies selon les Bonnes Pratiques de Fabrication (3):
– Classe A : Les points où sont réalisées des opérations à haut risque, tels que le point de remplissage, les bols de bouchons, les ampoules et flacons ouverts ; les points de raccordements aseptiques. Les postes de travail sous flux d’air laminaire doivent normalement garantir les conditions requises pour ce type d’opérations. Les systèmes de flux d’air aminaire doivent délivrer de l’air circulant à une vitesse homogène de 0,36 – 0,54 m/s (valeur guide) dans les systèmes non clos (3). Le maintien de la laminarité du flux doit être démontré et validé. Un flux d’air unidirectionnel et des vitesses inférieures peuvent être utilisés dans les isolateurs clos et dans les systèmes clos type « boîte à gants ».
– Classe B : Pour les opérations de préparation et de remplissage aseptiques, cette classe constitue l’environnement immédiat d’une zone de travail de classe A.
– Classes C et D : Zones à atmosphère contrôlée destinées aux étapes moins critiques de la fabrication des médicaments stériles.
La stérilité des produits médicamenteux parentéraux peut être obtenue via deux procédés de fabrication : la stérilisation terminale et le procédé aseptique (remplissage aseptique). La stérilisation terminale est à privilégier. Le remplissage aseptique ne doit être utilisé que lorsque la stérilisation terminale n’est pas possible (ex : destruction de molécules par la chaleur). Différentes technologies sont utilisées pour le remplissage aseptique : la zone aseptique conventionnelle, le Restricted Access Barrier Systems (RABS), et l’isolateur.
Caractéristiques d’un isolateur
1) Historique C’est tout d’abord Louis Pasteur, en 1878 qui, en travaillant sur la fermentation et les microbes, mis en évidence que l’on pouvait conserver le vin par application de la chaleur, en vase clos. (11) Il a fallu attendre 1895 pour avoir les premiers travaux sur la conception des isolateurs avec Nutall et Thierfelder qui essayaient de produire des animaux exempts de germes. (12) Les premiers isolateurs seraient apparus aux USA dans les années 1940, dans les laboratoires LOBUND (Laboratory Of Bacteriology University Notre-Dame) pour maintenir un environnement sans germe lors de l’élevage d’animaux de laboratoires. Ces isolateurs étaient construits en acier inoxydable, munis de hublots et stérilisables à la vapeur. En 1963, La Calhène a développé le premier système de Double Porte de Transfert Étanche (DPTE). La société Calhène a été la pionnière de la construction des isolateurs en Europe, dans le début des années 1970, pour des applications médicales et pharmaceutiques. (13) Il faudra attendre les années 80 pour voir la première application pour des essais de stérilité sous isolateur de Bristol Myers à Lognes. (14) Les premiers isolateurs utilisaient un flux d’air turbulent, des filtres HEPA, des parois flexibles, des gants intégrés à l’isolateur, leur conception étant plutôt rudimentaire. (15) Cette première application dans l’industrie pharmaceutique a ensuite été multipliée par les entreprises, notamment grâce à la mise en place de la décontamination des isolateurs par vaporisation de l’eau oxygénée. (14) La conception a été considérablement améliorée depuis le premier design pour se composer d’une enceinte rigide. La technologie des isolateurs s’est largement développée au cours de la dernière décennie, dans la production des médicaments injectables à la fois dans l’industrie pharmaceutique et dans les hôpitaux. Actuellement, le développement des systèmes d’automatisation et de robotisation permet de réduire, voire de supprimer, l’utilisation des gants, et donc le risque de rupture d’intégrité.
2) Définition Un isolateur est un équipement qui utilise une barrière physique étanche, telle que décrite dans la norme ISO 10648-2, pour provoquer une séparation : (16)
– Entre deux environnements, externe et interne, séparés et contrôlés,
– Entre un processus et du personnel.
Ainsi, la Parenteral Drug Association (PDA) définit un isolateur comme « une structure scellée ou alimentée en air par un système de filtration microbienne rétentif (HEPA) et pouvant être décontaminée de manière reproductible. L’entrée et/ou la sortie de matériaux est réalisée par des ouvertures définies qui ont été conçues et validées pour empêcher le transfert de contamination en maintenant en permanence un gradient de pression. La conception de l’isolateur garantit que la quantité de pression interne créée par les échanges d’air est supérieure à l’extérieur de l’isolateur. L’isolateur peut être utilisé pour des procédés aseptiques, pour le confinement de composés puissants, ou simultanément pour l’asepsie et le confinement. (17) L’isolateur est donc une unité décontaminée, avec une qualité d’air de classe 100 (ISO 5) ou supérieure, qui fournit une isolation continue de l’environnement externe. Il existe deux principaux types d’isolateurs :
– Les isolateurs à système clos, qui excluent la contamination externe de l’intérieur de l’isolateur en effectuant les transferts de matériau via une connexion aseptique à un équipement auxiliaire, plutôt que l’utilisation d’ouvertures vers l’environnement extérieur. Les systèmes clos restent scellés tout au long des opérations. (18) Les isolateurs à système clos sont généralement utilisés à des fins de confinement lorsqu’il s’agit de matières toxiques.
– Les isolateurs à système ouvert, sont conçus pour permettre l’entrée et/ou la sortie continue ou semi-continue de matériaux pendant les opérations à travers une ou plusieurs ouvertures. Les ouvertures sont conçues (par exemple, en utilisant une surpression continue) pour exclure l’entrée de contamination externe dans l’isolateur. (18) Les isolateurs à système ouvert sont généralement utilisés pour le remplissage aseptique de produits pharmaceutiques et permettent une entrée et/ou sortie continue des matériaux pendant le fonctionnement. L’environnement interne de l’isolateur est protégé grâce à la mise en place de cycles de décontamination reproductibles et validés, et l’application d’une pression positive. Ainsi les isolateurs à système ouverts sont fermés pendant la décontamination puis ouverts pendant le remplissage aseptique. L’isolateur présente de nombreux avantages, il permet d’améliorer la qualité des procédés de fabrication, de contrôle, de conditionnement et protéger le produit, le manipulateur et l’environnement.
3) Utilisation Les isolateurs sont couramment utilisés dans diverses applications de l’industrie pharmaceutique, de la pharmacie hospitalière, de l’industrie cosmétique, de l’industrie alimentaire et de la recherche et développement. Ils vont être utilisés pour :
Ø La protection du personnel, de l’environnement et du produit : Afin de protéger le personnel et l’environnement lors de la manipulation de micro-organismes ou de composés et d’agents cytotoxiques ou dangereux.
Ø La protection d’une activité ou du produit manipulé : Les isolateurs sont utilisés pour les activités de production aseptique (pesage, remplissage, formulation …etc.), et pour les tests microbiologiques (tests de stérilité). L’objectif est d’éviter que l’homme ou l’environnement ne contamine la zone interne. (16) La technologie des isolateurs est également utilisée en thérapie cellulaire, dans la production de médicaments de thérapie innovante (Advanced Therapy Medicinal Products), dans les zones de confinement microbiologique et dans les zones d’atmosphère contrôlée et de confinement.
Conception et design de l’isolateur
L’isolateur est composé de plusieurs éléments : un isolateur principal et un ou plusieurs systèmes de transfert, un système de traitement d’air, des systèmes pour la manipulation et enfin un système de décontamination. L’isolateur principal sert au stockage, à la fabrication et éventuellement à l’emballage des produits. (24) La conception des isolateurs ne doit pas négliger :
Ø L’accessibilité des différentes parties de l’installation pour permettre d’assurer le nettoyage et la maintenance.
Ø L’ergonomie pour le travail sous isolateur
L’enveloppe de l’enceinte peut être rigide, en matériaux plastiques ou en acier inoxydable, ou bien souple, en PVC notamment. Les matériaux utilisés doivent répondre à des exigences communes de durabilité. Les paramètres au sein de l’isolateur, tels que la température ou l’hygrométrie doivent également être maîtrisés. La conception en général de l’isolateur doit permettre de prévenir le risque de contamination. Au départ les isolateurs de remplissage étaient des lignes conventionnelles placées dans des boîtes à gants. Au fil du temps, les améliorations du design des isolateurs et l’automatisation ont permis de limiter notamment les risques de percement des gants et les surfaces non décontaminées.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I – L’ISOLATEUR DE REMPLISSAGE
I/ LE REMPLISSAGE ASEPTIQUE
1) Zone aseptique conventionnelle
2) Restricted Acess Barrier System (RABS)(6) Isolateur
II/ CARACTÉRISTIQUES D’UN ISOLATEUR
1) Historique
2) Définition
3) Utilisation
4) Règlementation
4.1 BPF et GMP
4.2 Normes ISO
4.3 Documents techniques supports
PARTIE II – CONCEPTION ET MAITRISE DE L’ASEPSIE SOUS ISOLATEUR
I/ CONTAMINATIONS SOUS ISOLATEUR
1) Contamination particulaire
2) Contamination microbiologique
3) Contamination chimique
4) Contamination croisée
II/ MOYENS DE MAITRISE
1) Conception et design de l’isolateur
1.1 Le système de traitement d’air
1.2 Le système de manipulation
1.3 Les systèmes de transferts
2) Préparation et décontamination de l’isolateur
2.1 Nettoyage et désinfection de l’isolateur
2.2 Stérilisation / Décontamination
Ø Définitions
Ø Agents de décontaminations
Ø Principe des systèmes de décontamination
Ø Exemple de décontamination au peroxyde d’hydrogène
3) Pratiques sous isolateur
III/ QUALIFICATION DE L’ISOLATEUR
1) Qualification de l’équipement
1.1 Qualification de conception (QC)
1.2 Qualification d’installation (QI)
1.3 Qualification opérationnelle (QO)
1.4 Qualification de performance (QP)
2) Qualification de l’environnement de l’isolateur
2.1 Classification particulaire selon ISO
2.2 Qualification de performance de surveillance environnementale (EMPQ)
3) Aseptic Process Simulation (APS)
4) Requalification
IV/ MONITORING DE ROUTINE
1) Contrôle de l’air
2) Contrôles des surfaces
3) Contrôle des gants de l’isolateur
4) Contrôles des paramètres de l’isolateur
PARTIE III – LES OUTILS D’EVALUATION DES RISQUES (RISK ASSESSMENT)
I/ METHODES DE GESTION DES RISQUES
1) Processus de gestion du risque
1.1 Appréciation du risque
1.2 Maîtrise/contrôle du risque
1.3 Communication sur le risque
1.4 Revue du risque
2) Les outils de gestion du risque
2.1 AMDEC
2.2 Arbre des défaillances (FTA – Fault Tree Analysis)
2.3 HACCP
2.4 HAZOP
2.5 RRF
II/ ÉVALUATION DU RISQUE ASEPTIQUE
1) Recommandations
2) Évaluation du risque aseptique au sein de l’isolateur
PARTIE IV – MISE EN APPLICATION : GESTION DES INCIDENTS ET INTERVENTIONS DANS UN ISOLATEUR DE REMPLISSAGE
I/ DEFINITIONS
1) Incident
2) Intervention
II/ MATERIEL ET METHODES
1) L’outil d’évaluation du risque aseptique
2) Utilisation de l’outil d’évaluation du risque
III/ RESULTATS
1) Définition des facteurs de risques
1.1 Analyse du risque aseptique d’un incident
Ø Proximité
Ø État de surface
Ø Analyse du flux d’air – Impact sur la protection des pièces critiques
Ø Note de risque
1.2 Analyse du risque aseptique d’une intervention
Ø Proximité
Ø État de surface
Ø Analyse du flux d’air – impact sur la protection des pièces critiques
Ø Note de risque
2) Validation de l’outil
2.1 Analyse théorique
2.2 Validation théorique de la limite
2.3 Analyse de cas pratiques
IV/ CONCLUSION DE L’ANALYSE DU RISQUE ASEPTIQUE
1) Conclusion : Validation de la limite de 90
2) Conclusion sur l’outil
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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