GEODYNAMIQUE ACTUELLE DE L’ARMENIE ET DES TERRITOIRES ADJACENTS 

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Caractéristiques géologiques de l’Arménie et des territoires adjacents

Evolution géodynamique régionale

L’histoire tectonique des régions Transcaucasiennes a été discutée dans un premier temps par de nombreux auteurs (Paffenholts 1948; Abovyan, 1981; Sargsyan, 1989; Khain et al., 1973; Milanovski, 1952, 1968; Milanovski et Khain, 1963; Gabrielyan, 1950, 1970; Gabrielyan et al., 1981; Gamkrelidze, 1949, 1977; Aslanyan, 1958; Aslanyan et al., 1982). L’avènement de la tectonique des plaques a permis de revisiter ces premiers travaux (Aghamalyan, 2004; Aghamalyan et al., 2012; Zonenshain and Le Pichon, 1986; Philip et al.,1989; Trifonov et al., 1994 ; Karakhanian et al., 1996; Dorbath et Cisternas, 1997; Adamia et al., 1981; Ricou, 1994; Bassoullet J-P. et al., 1993; Robertson et al., 2002).

La faille active de Pambak-Sevan-Syunik

Cinématique et géométrie de la faille

La faille de PSS est la plus grande faille en Arménie et s’étend sur environ sur 400 km (Fig. 1.9, 1.10). Sa géométrie et sa cinématique ont été étudiés à l’aide de la géodésie (GPS), des analyses d’imageries aériennes et spatiales, des observations sur le terrain, (études morphotectoniques et paleosismologiques (Trifonov et al., 1990, 1994; Philip et al., 1992; Karakhanian et al. 1997, 2002, 2003, 2004a, 2013; Philip et al., 2001; Avagyan 2001, 2009, 2011, 2013; Avagyan et al. 2003, 2005, 2010; Davtyan 2007)).
Ces études ont été réalisées dans le cadre de plusieurs programmes et projets internationaux (PICS, MEBE, IRG, LIA, etc.). Les travaux réalisés sur plusieurs segments de la faille de PSS ont permis de définir les caractéristiques des déformations sur différents segments de la faille (géométrie, cinématique, vitesses horizontales et verticales de déplacement, âges et magnitudes (Mw) des derniers séismes avec ruptures de surfaces.
La faille de Pambak-Sevan-Syunik change l’orientation du nord-ouest (N100°E) au sud-est (N150°E), changement qui est également corrélé à une variation de sa cinématique (Trifonov et al. 1994; Karakhanyan et al. 1997, 2013; Philip et al. 2001; Avagyan 2001; Avagyan et al. 2005, 2010).
Dans sa partie centrale, la composante horizontale est la plus importante. L’amplitude de la composante verticale étant moins exprimée peut se changer même sur la longueur d’un seul segment.
Le système de failles de Pambak-Sevan-Syunik a été subdivisé en 8 segments principaux, en fonction de son orientation, ses caractéristiques structurales et sa cinématique, (NorAtom 2011, Fig. 1.10).
1. 29 km, N 100
2. 62 km, N 108
3. 67 km, N 114
4. 48 km, N 135
5. 123 km, N 110
6. 70 km, N 100
7. 66 km, N 130
8. 104 km, N 150

Approche paléosismologique

Pour mieux comprendre la géodynamique de la région, les géologues ont besoin d’avoir catalogue de séismes, qui couvre l’intervalle le plus long possible. Malheureusement la période couverte par les données de sismicité instrumentale couvre au maximum une centaine d’années (la première station sismique en Arménie a été installée en 1932). Pour compléter le catalogue des données instrumentales, on s’intéresse aux documents historiques (y compris des épopées, des légendes, des inscriptions cunéiformes et des chroniques anciennes) (Fig. 2.1).
Cependant, les catalogues de sismicité historique contiennent de nombreuses incertitudes pour les raisons suivantes :
1. La liste des séismes n’est pas exhaustive, et de nombreuses données ne sont pas enregistrées (eg : en période de guerre. lorsque les grandes villes n’ont pas été détruites, lorsqu’il n’y a pas d’habitants dans la région touchée par les séismes)
En fait, les historiens enregistrent les événements plus impressionnants et pas des évènements du point de vue de sismologie (Fiches et al. 1997).
2. Difficulté de la détermination des épicentres des séismes. Les sources historiques ne permettent pas de déterminer précisément les épicentres des séismes passés. Lorsque les historiens témoignent sur un séisme dévastateur, le risque est qu’ils placent l’épicentre de celui-ci près de grandes villes où les dégâts sont les plus importants. Par ailleurs, ils ne prennent pas en compte les effets de site.
3. Difficulté de calcul des intensités des séismes.
L’approche paléosismologique au sens large, c’est-à-dire l’analyse de la morphologique affectée par les failles actives et l’analyse de la stratigraphie des dépôts que celles-ci traversent permet de déterminer la localisation, la cinématique (sens de mouvement), la magnitude et l’âge des forts séismes passés. Les fortes séismes (Mw > 6) génèrent généralement des escarpements dans la morphologie (Fig 2.2, a, Fig. 2.3), qui sont soumis à l’érosion au cours du temps (Fig 2.2, c, b) et/ou qui vont entrainer une perturbation local du système de drainage etc… Ainsi par exemple, pendant l’érosion un coin colluvial se formera (Fig 2.2, b, c) au pied d’un escarpement sous l’effet de processus d’abord gravitaires puis diffusifs (Fig 2.2, d).

La méthode «14C» radiocarbone

Cette méthode de datation est une méthode radiométrique (Lobby, 1955). Elle est basée sur l’activité radiologique du 14C contenu dans la matière organique dont on souhaite connaitre l’âge écoulé depuis sa mort. La limite supérieure de cette méthode est de 30-50 Ka, ce qui en fait une méthodelargement utilisée par les disciplines telles que l’archéologie, la paléoanthropologie, la paléosismologie, etc. Les organismes vivants de tous types et toutes tailles assimilent du carbone durant leur vie. Le carbone atmosphérique est composé de trois isotopes : 12C (98.89%), 13C (1.11%) et 14C (10″10%). Le radiocarbone (14C) est le produit de l’interaction entre le 14N et les rayonnements cosmiques dans la stratosphère (75%) et la troposphère supérieure (25%). Il correspond au seul isotope radioactif du carbone. Il est largement répandu sur Terre. Il a une demi-vie de 5734 ± 40 ans. Une fois produit, le 14C circule dans l’atmosphère principalement sous la forme de dioxyde de carbone (14CO2) qui est assimilé par les organismes avec un fractionnement isotopique connu. En raison des échanges permanents entre les organismes vivants et leur milieu, le rapport 14C/12C total est considéré comme constante (Fig. 2.8).
On peut dire que la méthode «14C» se base sur la présence, dans tout organisme, de radiocarbone en infime proportion. Une fois que l’organisme meurt, la perte de 14C par décroissance radioactive n’est plus compensée par l’assimilation de l’organisme. Sa décroissance suit une loi exponentielle, qui est dépendante de la demi-vie du 14C (Fig. 2.8). La comparaison du rapport 14C/12C dans l’échantillon et dans l’atmosphère permet de déterminer l’âge radiocarbone de la mort de l’organisme.
Fig. 2.9 : Comparaison de la courbe de calibration du 14C de l’atmosphère (d’après la dendrochrologie) avec la courbe gaussienne de l’âge radiocarbone analytique non-corrigé pour l’estimation de l’âge calibré.
La méthode de datation consiste à déterminer la concentration de radiocarbone d’un échantillon à l’instant de la mesure, puis de dater en utilisant l’équation suivante : ! »! = 1 × %& ‘# # $ ‘(
Où C0 est la concentration de radiocarbone au moment t0 de la mort de l’organisme, # la constante radioactive de l’organisme.
En générale, la datation de radiocarbone se base sur l’hypothèse que la concentration initiale de 14C dans l’atmosphère, à la mort de l’organisme, était la même que dans l’atmosphère actuelle. Néanmoins, dans l’atmosphère la concentration et la production de radiocarbone change au cours du temps. Pour résoudre ce problème, le rapport 14C/12C obtenues par les analyses au radiocarbone a été comparé avec les donnes de dendrochronologie, c’est-à-dire l’analyse du rapport 14C/12C dans les cernes de croissance des arbres qui fournissent un âge calendaire (Ferguson, 1968 ; Suess, 1980). En conséquence, on obtient la courbe de calibration, qui permet de transformer les âges radiocarbones en âge réel (exprimé en cal BP ou cal AD) (Fig. 2.9). La difficulté est que pour une même valeur d’âge radiocarbone, il peut exister plusieurs âges calibrés. Il faut donc prendre compte les intervalles de confiance des âges calibrés obtenus. Le rapport 14C/12C est mesuré principalement par spectrométrie de masse.

Méthode de datation par analyse de la Luminescence Stimulée Optiquement (OSL)

La datation par mesure de la luminescence stimulée optiquement, dite méthode «OSL» (Huntley et al., 1985), repose sur deux principes : la physique cristalline et les propriétés de certains cristaux de stocker des énergies, et la radioactivité (propriétés dosimétriques). L’énergie stockée proportionnellement au temps dans les minéraux cristallins provient de différentes sources de rayonnements (radionucléides naturels (U, Th, 40K)). Les atomes bombardés, dans les cristaux, vont alors relâcher des électrons libres qui vont s’accumuler dans les pièges électroniques des minéraux voisins (i.e. le quartz ou le feldspath). La stimulation optique par une source lumineuse de longueur d’onde donnée (ie verte ou infrarouge) va permettre la libération de ces énergies et la production d’un signal de luminescence (libération des photons). L’ensemble des photons relâchés sont mesurés et constituent la quantité d’énergie stockée dans le milieu depuis sa dernière exposition (on parle de Dose équivalente, De). Ce Dose équivalente correspond à un dernier enfouissement (Fig. 2.10). On mesure aussi la dose annuelle (Dr pour Dose rate) qui correspond à la quantité d’énergie accumulée pendant un an (dans le même type de milieu). En comparant la dose équivalente (De) de l’échantillon avec la dose annuelle Dr, on peut calculer l’âge du dernier
enfouissement du sédiment : ! = )* )+.
Pendant l’échantillonnage il faut être très prudent pour que la lumière ne passe pas dans l’échantillon. Pour ce faire, il existe différents protocoles d’échantillonnage (Voir thèse de M. Rizza, 2010). Dans le cadre de cette étude nous avons utilisé la méthode d’échantillonnage par «bloc» qui consiste à prélever un bloc de sédiments de 15x15x15 cm3 au centre duquel sera mesurée la De et autour duquel seront mesurées les Dr qui seront ensuite moyennée en une valeur.
Une fois l’échantillon collecté, il est entouré de papier cellophane pour préserver son humidité, puis entourer de papier d’aluminium.
Fig. 2.10: Principe de stockage et de perte d’énergie au sein d’un sédiment au cours du temps utilisé pour la datation OSL. A chaque enfouissement, le sédiment se charge en énergie et $ chaque exhumation, il se décharge ou blanchit (Image par Dr K. Lepper).

La méthode de datation 40Ar/39Ar

Le 40K est un élément radioactif qui se désintègre en deux éléments, le 40Ca et l’40Ar, dans des proportions fixes et connues avec une demi-vie globale de 1,26 milliard d’années. L’argon étant un gaz, il s’échappe facilement dans une roche en fusion. La fusion ramène ainsi à zéro la quantité d’argon dans la roche. Après cristallisation des minéraux, l’argon réapparaît, produit par la désintégration du potassium. En théorie, la mesure de l’argon dans la roche donne l’âge de l’échantillon. Cependant il peut y avoir des biais. En effet, les isotopes de l’argon peuvent dans certains cas s’échapper d’une roche (fissures, circulation de fluides, etc.) ou être apportés depuis des bulles de gaz piégées dans la roche, d’origine atmosphérique (l’atmosphère est constituée à 1% environ d’argon) ou profonde, modifiant notamment la teneur de la roche en 40Ar utilisé pour
la datation.
Fig. 2.11: Diagramme montrant le schéma de désintégration de 40K en 40Ar et 40Ca (d’après McDougall et Harrison, 1999). La désintégration du 40K est par un processus de branchement : 10,48% de 40K désintègre à 40Ar par désintégration &+, suivi par décroissance * à l’état du sol, et par capture d’électrons directement à l’état du sol, et 89,52% de 40K désintègre à 40Ca par désintégration &- à l’état du sol.
La méthode 39Ar/40Ar (Merrihue et Turner, 1966) permet de distinguer les sources d’argon. On place l’échantillon au cœur d’un réacteur nucléaire où il est irradié par des neutrons à un taux connu, transformant une partie du 39K en 39Ar (isotope radioactif n’existant pas naturellement car
ayant une demi-vie très courte de 269 ans). -.,/& = -.02/3.
L’échantillon est ensuite chauffé dans un four par incréments de température, relâchant plus d’argon à chaque palier. On mesure le rapport 40Ar/39Ar. Si l’40Ar est bien issu de 40K de la roche, il sera libéré de la même manière que l’39Ar issu du 39K. S’il y a un excès d’argon d’origine inconnue le rapport 40Ar/39Ar ne sera pas constant pour toute la plage de températures. On obtient un spectre des rapports 40Ar/39Ar en fonction de l’39Ar total relâché. On calcule ainsi l’âge de l’échantillon à l’aide de l’équation suivante :
La valeur J est déterminée en utilisant des étalons de minéraux de l’âge connu pour contrôler le flux de neutrons
Si l’on observe un plateau de 40Ar/39Ar constant, on peut donner un âge. Si 40Ar/39Ar varie on ne peut pas obtenir d’âge.

La méthode de datation «3He» in situ

L’hélium est le gaz noble le plus léger, et est l’élément le plus abondant dans l’univers après l’Hydrogène. Il est composé de deux électrons, deux protons et deux neutrons. 4He (le plus abondant) et 3He sont les deux isotopes stables de l’hélium. Dans les roches l’isotope cosmogénique de l’3He est produit par interaction des rayonnements cosmiques secondaires (essentiellement des neutrons énergétiques – eux-mêmes issus d’une première réaction du rayonnement cosmique primaire avec les atomes de l’atmosphère – avec les atomes présents dans les minéraux). Son taux de production dépend de trois facteurs principaux : l’altitude, la latitude de l’échantillon, et des conditions locales d’exposition au rayonnement : le masque végétal ou topographique, épaisseur et densité du matériel échantillonné, sa profondeur. La spallation se produit sur tous les éléments chimiques (sauf l’H) sous l’effet des muons négatifs (qui sont captés par le 7Li :2-3%) et qui aboutit à la production d’3He cosmogénique in situ (Goehring et al., 2010). Dans les roches magmatiques (basaltes, andésites, etc.), l’3He est particulièrement bien préservé dans les minéraux de type clinopyroxènes et olivines. Les équations de calcul d’âges par l’3He est plus simple que dans les cas du 10Be car il n’est pas radioactif. Dans les minéraux il existe deux types d’isotope de 3He : l’3He magmatique produit dans les roches avant leur exposition en surface et l’3He cosmogénique produit lors de l’exposition en surface (Kurz, 1986; Blard and Pik, 2008). L’Hélium atmosphérique peut également être présent à la surface des minéraux mais il est éliminé par chauffage. Lors d’une analyse de l’3He on mesure indifféremment l’3He et l’4He totaux, qui est dont égal à : He (total) = He (magmatique) + He (cosmogénique).
Puisqu’on s’intéresse seulement à l’He cosmogénique, il nous faut connaitre la concentration d’He magmatique (provenant des inclusions fluides du minéralissu de la décroissance radioactive de l’U, Th et Sm présents dans les minéraux de la roche (Fig. 2.12)).
L’extraction de l’Hélium magmatique se fait broyage et par chauffage sous vide (Blard and Farley, 2008). Une fois corrigée de la quantité d’He magmatique, la concentration d’He restante (cosmogenique), permet de calculer l’âge d’une exposition de la roche selon l’équation suivante : ‘?>++ !*;<> = @A* où Ccorr est la concentration en 3He (corrigée de l’Hélium magmatique) et PHe le taux de production en at/g/an. Dans le cadre de cette thèse, le taux de production local a été calculé en utilisant le SLHL (Sea Level and High Latitude) P3 de Blard et al. (2013).

La méthode satellitaires (InSAR – Interferometric Synthetic Aperture Radar)

Les images satellitaires radar

Dans les sciences de la terre, les scientifiques sont intéressés par une large variété de déformations qui sont causées par des processus tectoniques, gravitataires volcaniques, les mouvements de masses glaciaires, etc. Pour être capable de mesurer ces déformations, en dehors des mesures à terre, ils utilisent l’imagerie aéroportée ou satellitaire, qui peut être divisée en deux catégories selon le type de capteur de satellite :
1) famille Radar à Synthèse d’Ouverture (ou «Synthetic Aperture Radar» – SAR) qui est un système imageur actif (antenne radar orientée vers le sol – visée oblique – pour émission et réception).
2) les systèmes optiques ou multi-spectraux (par exemple, les satellites SPOT-5, QuickBird, etc.), qui sont des systèmes passifs c’est-à-dire des satellites qui ne sont pas émetteurs du signal rétrodiffusé. Ils enregistrent les signaux issus d’une autre source (le soleil).
Les systèmes radars émettent un signal électromagnétique modulé en fréquence centré sur une fréquence centrale (de l’ordre du GHz), se propageant sans atténuation à travers l’atmosphère, à la vitesse de la lumière. Le signal électromagnétique est un signal pouvant être représenté sous la forme d’un nombre complexe dont l’amplitude correspond à l’énergie du signal, et la phase à l’angle de rotation du champ électromagnétique dans le plan perpendiculaire à sa direction de propagation.
Ces satellites sont situés à ~800 km d’altitude, sur des orbites quasi-polaires, imageant une zone au sol avec une périodicité de quelques jours (typiquement 35 jours pour les anciennes missions ERS et Envisat, 12 jours pour la nouvelle mission Sentinel).
Les images sont acquises en géométrie «radar», à savoir, d’une part, selon l’axe de visée du satellite («range» ou «distance»), c’est à dire perpendiculairement à l’orbite et avec un angle donné par rapport à la verticale (typiquement ~23° pour les missions ERS ou Envisat), et d’autre part, le long de l’orbite («azimut»). Les contraintes électroniques et mécaniques font que la résolution au sol des images brutes est plurikilométrique dans les 2 directions.
Le traitement du signal SAR («Synthetic Aperture Radar» ou «Radar à Synthèse d’Ouverture») appliqué à une image brute permet d’obtenir une résolution décamétrique (par exemple, le traitement ASAR sur une acquisition Envisat permet d’obtenir une image dont la résolution est de 4 m en azimut et de 20 m en distance).
La géométrie oblique d’acquisition entraine l’existence de zones masquées dans l’image. Les pentes topographiques orientées vers le satellite et dont la pente est supérieure à l’angle d’incidence du signal radar entrainent également des effets de repliements de phase («overlay»). L’information de phase mesurée à la réception du signal rend compte :
• Du trajet aller-retour qui dépend de la distance entre le satellite et la cible au sol ainsi que de l’allongement du trajet induit lors de la traversée de l’atmosphère.
• De la nature géométrique et physique des cibles individuelles constituant le pixel sur lequel la moyenne complexe est effectuée.
La contribution propre des cibles à la rotation de la phase est spatialement aléatoire, rendant l’exploitation de la phase d’une seule image impossible pour discriminer la composante de distance qu’elle contient.

L’interférométrie radar (InSAR)

L’interférométrie radar (InSAR) est une approche qui repose sur l’hypothèse que les propriétés (physiques et géométriques) de rétrodiffusion du signal radar par les cibles au sol ont peu changée entre 2 acquisitions. Dès lors, une simple convolution des 2 images recalées permet d’obtenir la différence des 2 mesures de phase qui ne dépend plus que de la différence des trajets aller-retour. La phase interférométrique dépend donc :
• De la variation d’orbite entre les 2 acquisitions.
• De l’altitude de la cible au sol.
• De la différence des retards atmosphériques entre les 2 acquisitions.
• D’un éventuel déplacement de la cible au sol.
• D’un bruit additionnel selon que la nature de la cible a changée ou pas entre les 2 acquisitions (e.g. Zebker et Villasenor, 1992).
Cette technique a été mise en œuvre au début des années 90 (e.g. Gabriel et al., 1989 ; Massonnet et al., 1993 ; Bürgmann et al., 2000; Hanssen, 2001), et a été appliquée dans de nombreux domaines (Massonnet et Feigl, 1998):
• Extraction de MNT (par ex., SRTM, Farr et Kobrick, 2000).
• Champs de déplacements cosismiques (e.g. Massonnet et al., 1993; Peltzer et al., 1998a; Feigl et al., 2002 ; Simons et al., 2002; Fialko et al., 2005 ; Peyret et al., 2008a ; Tong et al., 2010 ; Lindsey et al., 2015).
• Déformation post-sismique (e.g. Peltzer et al., 1998b ; Jacobs et al., 2002 ; Fialko, 2004 ; Gourmelen et Amelung, 2005).
• Chargement intersismique (e.g. Wright et al., 2001 ; Fialko, 2006 ;Gourmelen et al., 2010).
• Suivi de volcans (e .g. Delacourt et al., 1998 ; Amelung et al., 2000 ; Pritchard et Simons, 2002 ; Chadwick et al., 2011).
• Glissements de terrains (e.g. Fruneau et al., 1995 ; Peyret et al., 2008b).
• Subsidence (e.g. Motagh et al., 2007 ; Higgins, 2014).
La précision de la mesure est de l’ordre d’une fraction de longueur d’onde (centimétrique). Pour autant, cette technique a quelques limitations :
• Décorrélation temporelle : par exemple, entre 2 acquisitions la végétation va nécessairement changer (généralement de façon spatialement aléatoire) à l’échelle de la longueur d’onde du signal radar, ce qui va introduire un bruit irréversible sur la phase interférométrique.
• Biais atmosphérique (de l’ordre d’une frange, soit une demi-longueur d’onde) (Goldstein,
1995 ; Zebker et al., 1997 ; Massonnet et Feigl, 1998), liée aux changements de l’atmosphère entre 2 acquisitions, et notamment de sa composante humide.

L’InSAR multi-temporelle (MT-InSAR)

Une manière de réduire le biais atmosphérique consiste à moyenner un ensemble (le plus large possible) d’interférogrammes indépendants (technique dite de «stacking»). Cette approche utilise l’aspect temporellement aléatoire de ces délais atmosphériques. Dès lors, cette composante s’annule statistiquement, tandis que la composante de déformation (supposée ici constante) s’additionne (e.g. Wright et al., 2001 ; Sandwell et Price, 1998 ; King et al., 2003 ; Lyons et Sandwell, 2003 ; Fialko, 2006). Cependant, cette méthode ne peut s’appliquer ni dans le cas d’une déformation non permanente, ni sur des zones où la décorrélation temporelle est importante.
Afin de s’affranchir de ces limitations, une nouvelle approche d’InSAR multi-temporelle a été proposée (Ferretti et al., 2000 et 2001). Elle consiste à :
• Déterminer, dans un ensemble d’interférogrammes, les pixels ayant un comportement stable de rétrodiffusion du signal radar. Ces pixels sont appelés PS pour «Permanent Scatterers» ou «Persistent scatterers» (réflecteurs permanents).
• Résoudre, pour chaque PS, un système linéaire d’équations (autant d’équations que d’interférogrammes) où les inconnues sont :
o Le déplacement.
o L’erreur du MNT utilisé pour simuler la composante topographique de la phase interférométrique.
o Le délai atmosphérique de chaque image.
Ces principes ont fait l’objet de divers développements méthodologiques sensiblement différents (e.g. Schmidt et Bürgmann, 2003; Werner et al., 2003; Hooper et al., 2004 et 2007; Kampes, 2006; Zebker et al., 2007).
Parmi les cibles susceptibles de générer des PS, on trouve, essentiellement, les bâtiments et autres constructions civiles, ainsi que les affleurements rocheux.
Une faible décorrélation spatiotemporelle de la phase interférométrique peut provenir d’un réflecteur ponctuel dominant (PS), ou bien de réflecteurs distribués (DS pour «Distributed Scatterer») dont la moyenne spatiale offre une bonne cohérence. Ce dernier cas correspond à l’approche SBAS (Small-BASeline) conventionnelle (e.g. Berardino et al., 2002; Lanari et al., 2004; Doin et al., 2011).
Ces approches ont été appliquées dans de nombreux domaines :
• Monitoring de volcans (e.g. Hooper et al., 2004 et 2007).
• Champs de déplacements intersismiques (e.g. Biggs et al., 2007 ; Peyret et al., 2011 et 2012 ;Rizza et al., 2012).
• Recensement d’instabilités gravitaires (e.g. Hilley et al., 2004).
• Subsidences (e.g. Ferretti et al., 2000 ; Lopez-Quiroz et al., 2009).

Les approches PSI (Persistent Scatterer Interferometry) et SBAS (Small BAseline Subset)

Certaines approches traitent conjointement PS (Persistent Scatterer) et DS (DistributedScatterers) (e.g. Ferretti et al., 2011), mais la plupart des chaines de traitement les traitent séparément:
• La chaine NSBAS (New-SBAS) (Doin et al., 2011) met en œuvre une analyse de type SBAS en incluant notamment des modules de filtrage spatial ainsi que de correction d’effets atmosphériques stratifiés (ERA-Interim).
• MinTS (Hetland et al., 2012) est une toolbox Matlab qui utilise les bases d’ondelettes pour inverser les phases d’un ensemble (de type SBAS) d’interférogrammes sous-
échantillonnés.
• La toolbox Python GIAnT (Agram et al., 2013) met en œuvre les approches SBAS, NSBAS et MinTS.
Dans cette thèse, on a utilisé la chaine de traitement StaMPS qui met en œuvre, et combine des approches PSI (Persistent Scatterer Interferometry) et SBAS (Hooper, 2008).
L’originalité principale de cette chaîne de traitement concerne la sélection des PS. Contrairement à la plupart des approches qui utilisent l’index de dispersion de l’amplitude comme proxy de la déviation standard de la phase (ce qui n’est acceptable que dans le cas de forts rapports signal sur bruit, c’est à dire généralement en zone urbaine), StaMPS utilise la corrélation spatiale de la phase interférométrique pour sélectionner les PS (Hooper et al., 2004 ; Van der Kooij et al., 2005). Cette approche permet de sélectionner des PS ayant une amplitude relativement faible, ce qui est souvent le cas en milieu naturel.

Les corrections atmosphériques

Calibration

Afin de corriger les bais atmosphériques de chaque interférogramme, les modèles suivants ont été utilisés :
• Modèles mathématiques de corrélation avec la topographie, soit linéaire (Li et al., 2006b), soit en loi de puissance (Bekaert et al., 2015) à partir de données de radiosondage.
• Modèles de prédiction météo ERA-Interim ou WRF (e.g.Wadge et al., 2002 ; Foster et al., 2006 ; Puisségur et al., 2007 ; Doin et al., 2009 ; Löfgren et al., 2010 ; Jolivet et al., 2011 et 2014):
o Faible résolution spatiale (~80 km pour ERA-I, ~15 km pour WRF). o Interpolation entre modèles séparés de 6h.
• Modèles issus des mesures de spectromètres imageurs tels que MERIS, MODIS (e.g. Li et al., 2005, 2006a et 2009 ; Puisségur et al., 2007):
o Haute-résolution (~1 km pour MODIS, ~300 m pour MERIS). o MERIS est Synchrone avec les acquisitions radar d’Envisat.
o Interpolation temporelle entre 2 acquisitions séparées de 6h pour MODIS.
o Pas d’info exploitable dans le cas de couverture nuageuse.
Bien que cela n’ait pas été fait dans le cadre de cette étude, on pourrait également utiliser un modèle issu d’interpolation de délais atmosphériques GPS (e.g. Onn et Zebker, 2006 ; Löfgren et al., 2010 ; Li et al., 2006b).
L’utilisation de ces modèles s’avère particulièrement indispensable lorsque la déformation est corrélée à la topographie (e.g. Beauducel et al., 2000).

Filtrage spatio-temporel

Une alternative à la correction des délais atmosphériques par modèles mathématiques (corrélation linéaire ou en loi de puissance avec la topographie), par mesures externes (MODIS, MERIS, ou GPS), ou par modèles météo (ERA-I, WRF), est l’application d’un filtrage spatio-temporel. Cette approche repose sur l’idée que les phénomènes atmosphériques (notamment turbulents) sont aléatoires dans le temps, tandis que la déformation est supposée avoir une certaine régularité (voire constance). Cette signature spécifique caractérisée par une corrélation spatiale et une décorrélation temporelle (e.g. Ferretti et al., 2001) permet de discriminer cette composante atmosphérique par simple filtrage spatiotemporel.

Les données radar et GPS utilisées dans cette étude

Dans notre étude, nous avons utilisé le satellite Envisat / bande C / I2 fournies par l’ESA (I2 = angle d’incidence ~23°, taille 100 km x 100 km (en distance et azimut)).
On a utilisé le champ GPS uniquement horizontal (solution fournie par P. Vernant). L’analyse InSAR a pour objectif principal de déterminer l’existence (ou pas) d’une composante verticale de la déformation, sachant que le gradient de vitesses horizontales projeté selon l’axe de visée du satellite est à peu près nul.
Recalage des vitesses PS par rapport au GPS :
• Le champ PS issu de la chaine de traitement StaMPS utilise la moyenne des vitesses comme référence (0 mm/an). On pourrait aussi imposer comme référence la vitesse en un PS donné, mais ce n’est pas l’approche adoptée ici.
• Un recalage exact avec le GPS exigerait que l’on dispose des 3 composantes (y compris verticale) des vitesses GPS. Or, on dispose d’une estimation de la composante verticale, mais dont l’incertitude est très élevée, entre 1.7 et 15.2 mm/an selon les sites.
• Le champ GPS horizontal relatif à l’Eurasie fixe projeté selon LOS (line of sight) est aussi ~0 mm/an.
• La procédure de recalage est finalement la suivante : pour chaque site GPS, dont on connait la vitesse horizontale projetée selon LOS, on calcule la vitesse moyenne des PS situés dans un voisinage proche, puis on estime le décalage moyen entre GPS projetés et PS moyens. Le champ des vitesses PS est alors décalé uniformément de cette valeur.
Les images brutes, fournies par l’ESA, sont synthétisées avec la chaine de traitement ROI_PAC (Rosen et al., 2003). Ces images (dites SLC pour «Single Look Complex») sont ensuite recalées par rapport à une image maitresse, laquelle a été déterminée de manière à minimiser à la fois les écarts orbitaux et les écarts temporels des interférogrammes traités. Les interférogrammes sont construits à l’aide de la chaine de traitement DORIS (Kampes et al., 2003). Les orbites précises DORIS sont fournies par l’ESA.

Modèle de blocs à partir des donnés GPS (GPS block model)

La méthodologie de blocs est bien décrite dans les nombreux articles (Meade and Hager, 2005; d’Alessio et al., 2005; and McCaffrey, 2005, Karakhanian, Vernant et al., 2013). Ces modèles divisent la croûte en microplaques élastiques et rigides, limitées par des failles actives et utilisent les vitesses GPS pour estimer les mouvements de ces différentes microplaques ou blocs les unes par rapport aux autres, sur une sphère. Les failles sont généralement supposées être bloquées entre la surface et une profondeur choisie. Les déformations élastiques (en raison du blocage des failles) sont également incluses dans le modèle. Les taux de glissement des failles sont calculés sur la base des mouvements relatifs entre microplaques adjacentes.
Depuis l’introduction des modèles de blocs, les différents auteurs ont modifié la méthodologie pour inclure la possibilité de glissement spatialement variable sur certaines failles, de contrainte interne au sein des blocs, et incorporer des contraintes de glissement géologiques et des observations InSAR (par ex. McCaffrey, 2009; Meade and Loveless, 2009; Evans et al., 2012).

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Table des matières

CHAPITRE 1. CADRE GEOGRAPHIQUE, GEOLOGIQUE ET GEODYNAMIQUE DE L’ARMENIE
1.1 CADRE GEOGRAPHIQUE DE L’ARMENIE
1.2 C
ADRE PHYSIOGRAPHIQUE DE L’ARMENI
1.3 C
ARACTERISTIQUES GEOLOGIQUES DE L‘ARMENIE ET DES TERRITOIRES ADJACENTS 
1.3.1 Evolution géodynamique régionale
1.4 GEODYNAMIQUE ACTUELLE DE L‘ARMENIE ET DES TERRITOIRES ADJACENTS 
1.4.1 Les failles actives principales
1.4.2 La faille active de Pambak-Sevan-Syunik
1.4.2.1 Cinématique et géométrie de la faille
1.4.2.2 Les séismes associés à la faille de Pambak-Sevan-Syunik
1.4.3 Paléosismologie
CHAPITRE 2. APPROCHES ET METHODES UTILISEES
2.1 APPROCHE PALEOSISMOLOGIQUE 
2.2 A
PPROCHE MORPHOTECTONIQUE
2.3 M
ETHODES DE DATATION
2.3.1 La méthode «14C» radiocarbone 
2.3.2 Méthode de datation par analyse de la Luminescence Stimulée Optiquement (OSL) 
2.3.3 La méthode de datation 40Ar/39Ar
2.3.4 La méthode de datation «3He» in situ
2.4 LA METHODE SATELLITAIRES (INSAR – INTERFEROMETRIC SYNTHETIC APERTURE RADAR)
2.4.1 Les images satellitaires radar
2.4.2 L’interférométrie radar (InSAR) .
2.4.3 L’InSAR multi-temporelle (MT-InSAR)
2.4.4 Les approches PSI (Persistent Scatterer Interferometry) et SBAS (Small BAseline Subset)
2.4.5 Les corrections atmosphériques
2.4.5.1 Calibration
2.4.5.2 Filtrage spatio-temporel
2.4.6 Les données radar et GPS utilisées dans cette étude
2.5 MODELE DE BLOCS A PARTIR DES DONNES GPS (GPS BLOCK MODEL)
CHAPITRE 3. ANALYSE DE LA TECTONIQUE ACTIVE DANS LA REGION D’AMASIA (SEGMENT D’ARPI, EXTREMITE NW DE LA FAILLE PSS)
3.1 DESCRIPTION GEOLOGIQUE
3.2 A
CTIVITE SISMIQUE
3.3 C
ARTOGRAPHIE ET GEOMETRIE DES STRUCTURES 
3.4 A
CTIVITE TECTONIQUE LE LONG DU SEGMENT D’ARPI 
3.5 V
ITESSES DE DEPLACEMENT LE LONG DES FAILLES DU SEGMENT D’ARPI
3.5.1 Analyse morphotectonique
3.5.2 Calcul des vitesses d
e déplacements à partir des données GPS et d’un modèle de blocs élastiques
3.5
.3 Calcul des vitesses de déplacements à partir des données PS-InSAR (Permanent Scatterers)
3.5.3.1 Choix d’une sous-série temporelle
3.5.3.2 Le champ de vitesses issu de
l’analyse PSI
3.5.3.3 Les corrections
atmosphériques 
3.5.3.4 Analyse
3.5.3.5 Discussion
3.6 P
ALEOSISMOLOGIE
CHAPITRE 4. LE SEGMENT DU KHONARASAR
4.1 BREVE DESCRIPTION DU SEGMENT DE KHONARASAR
4.2 S
YSTEMES DE FAILLES DU VOLCAN TSGHUK 
4.2.1 Géométrie et cinématique des failles de la vallée de Gailahovit
4.2.2 Calcul des vitesses de déplacements à partir des études morphotectoniques
4.2.3 Calcul des vitesses de déplacements à partir des données PS-InSAR (Permanent Scatterers)
4.2.3.1 Les champs de vitesses issus de StaMPS
4.2.3.2 Les corrections atmosphériques 
4.2.3.4 Analyse
4.2.3.5 Discussion
4.2.4 Calcul des vitesses de déplacements à partir des données GPS et d’un modèle de blocs élastiques
4.2.5 Paléosismologie
DISCUSSION ET CONCLUSION GENERALE
REFERENCES 

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