PATHOGENIE
Les facteurs génétiques
Les facteurs de risque génétiques, prennent en compte, la population d‟étude, c‟est-à-dire la race (noire, caucasienne, arabe, asiatique), l’origine géographique, laconsanguinité, les familles, les jumeaux et les modèles animaux. Les études ont montré que les facteurs génétiques,contribuent à la susceptibilité de la SpA à hauteur de 80 à 90 % [48]. Une étude conduite en Finlande, concluait à un taux de concordance de 50 % entre jumeaux monozygotes et de 15 % entre dizygotes, une deuxième au Royaume-Uni indiquait un taux de concordance de 75 % entre jumeaux monozygotes et de 12,5 % entre dizygotes [49, 50]. Ce qui montre le rôle crucial des facteurs génétiques dans la prédisposition à la maladie en comparant le taux de concordance entre les monozygotes et dizygotes.
D‟autres études ont estimé que le risque de survenue de la SpA serait 40 à 60 fois supérieur chez une famille dont l‟un des membres est atteint de la maladie [51]. En ce qui concerne les apparentés du second degré, le risque chute à 1 %, et la nette baisse observée entre premier et second degré de parenté confirme que plusieurs gènes sont impliqués dans l‟apparition de la maladie. [50] Plusieurs facteurs génétiques prédisposant ont été à ce jour identifiés, c‟est le cas notamment de l‟antigène HLA-B27, du gène codant pour le récepteur de l‟Interleukine 23 (IL23R), de certains polymorphismes de gènes codant pour l‟IL-1 (en particulier IL-1 β) et du gène ARTS1 codant pour une protéine intervenant dans le clivage des récepteurs membranaires de cytokines pro inflammatoires. Néanmoins, bien d‟autres facteurs restent encore à découvrir pour élucider la physiopathologie de la maladie. [52]
Les facteurs de susceptibilité génétiques associés à des facteurs environnementaux jouent un rôle dans la survenue de la maladie. Le facteur génétique le plus documenté est l‟antigène HLA-B27. La prévalence du HLA B27 varie en fonction de l‟ethnie, de 0 % chez les Bantus en Afrique et les aborigènes d‟Australie à 50 % chez les indiens d‟Amériques [9], en passant par une prévalence de 6,9 à 16% en Europe de l‟Ouest [9] et 6% au Maroc [37]. L‟antigène HLA B27 est rarement trouvé en Afrique sub-saharienne [38, 39] où sa prévalence est estimée à 0,5% au Togo [36], 0,90% au Burkina Faso, 1,9% au Sénégal [40] et 3% en Gambie [41]. De nombreux travaux ont cherché à évaluer la prévalence des divers sous-types de l‟HLA B27 au cours des SpA. Tous dérivent d‟un allèle ancestral l‟HLA-B*2705, sous-type le plus répandu et présent chez 90 % des patients HLA-B27+ d‟origine caucasienne, mais égalementen Afrique, notamment en Gambie [41]et en Tunisie [42].Au Sénégal, lesous-typele plus retrouvé estB*2707 [43], tandis qu‟au Togo, il s‟agitde HLA B14 (B*1403) [44]. L‟antigène HLA B27 est présent chez environ 90Ŕ95 % des patients atteints de SA.
Gènes du système HLA
Le système HLA (encore appelé complexe majeur d‟histocompatibilité : CMH) est unensemble de glycoprotéines de membrane, exprimées à la surface des cellules de l‟organisme. Il est localisé sur le bras court du chromosome 6 ou 6p. [49, 53, 54, 55]. Cette région comprend :
– HLA de classe I : distribué à des pourcentages variables sur l‟ensemble des cellules. Elle comprend HLA-A, HLA-B, HLA-Cw et trois régions non classiques HLA-E, F et G.
– HLA de classe II : essentiellement localisé sur les cellules présentatrices professionnelles d‟antigènes (cellules dendritiques, lymphocytes B et macrophages). Elle comprend HLADP, HLA-DQ, et HLA-DR.
– HLA de classe III : ce sont des gènes apparentés au système HLA (gènes du TNF, du TGF, et du complément) [55].
HLA B27
HLA B27 est le premier facteur de susceptibilité génétique impliqué dans la survenue des SpA.
Structure
C‟est une molécule hétérodimèrique composée d‟une chaîne lourde α (à trois domaines α1, α2 et α3) associée par une liaison covalente à une chaîne légère non polymorphe ou β2 microglobuline (β2m) [54, 55, 56]. Cette liaison hétérodimèrique permet la stabilité de la molécule HLAB27. Ce complexe présente normalement des peptides endogènes d‟environ neuf acides aminés aux cellules lymphocytaires TCD8 positives. Cependant, la présentation de peptides beaucoup plus grands, jusqu‟à 33 acides aminés a été démontrée [52].
L‟assemblage des molécules HLA de classe I commence dans le réticulum endoplasmique (RE). Les chaînes lourdes de classe I nouvellement synthétisées se lient à une protéine chaperonne, la calnexine qui est ensuite déplacée par la β2m. Le couple chaîne lourde β2m va ensuite lier d‟autres protéines chaperonnes (calreticuline, tapasine, TAP1, TAP2) permettant la fixation de peptides antigéniques dans la poche de chaque molécule HLA de classe I. Celles-ci, ainsi chargées de leur peptide, sont libérées du RE et exprimées à la membrane plasmatique [52].
Pénétrance faible du HLA-B27
Le risque de développer une SpA chez les porteurs de l‟allèle HLA-B27 est multiplié environ par 40 par rapport aux non-porteurs [59]. Il n‟est cependant ni nécessaire, ni suffisant à sa survenue. En effet, près de 20 % des malades ne sont pas porteurs de cet allèle [59]. De plus, parmi les porteurs du HLA-B27, seuls 3 à 5 % développent une SpA [59, 60]. Ce pourcentage passe à 20 % chez les patients HLA-B27+ apparentés à un malade suggérant la présence d‟autres facteurs génétiques partagés [43]. L‟étude de paires de jumeaux B27+ conforte cette hypothèse puisque la différence du taux de concordance entre jumeaux monozygotes et dizygotes persiste si l‟on ne considère que les individus B27+ [61].
Polymorphisme
Le système HLA possède un polymorphisme qui se traduit par un nombre important d‟allèles pour chaque locus. Plus de 105 variants alléliques HLA-B27 ont été découverts à travers le monde [52]. Tous dérivent d‟un allèle ancestral l‟HLA-B*2705, sous-type le plus répandu et présent chez 90 % des patients HLA-B27+ d‟origine caucasienne [49, 53, 55, 56, 62].
HLA B27 et spondyloarthrites
Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer le rôle du HLAB27 dans le déterminisme de la SpA. On distingue les théories dites spécifiques et les théories non spécifiques d‟antigène.
Hypothèse du peptide arthritogène.
Des peptides exogènes bactériens, ayant une homologie de séquence avec ces peptides arthritogènes, pourraient être présenté par HLA et initier une réponse cytotoxique [52, 63].
Hypothèse du mimétisme moléculaire
Les anticorps dirigés contre des motifs peptidiques bactériens pourraient avoir une réaction croisée avec l‟antigène tissulaire HLA-B27 [52]. L‟observation ayant servi de trame à l‟élaboration de cette hypothèse était la forte association des AR à l‟antigène tissulaire HLA-B27 d‟une part, et d‟autrepart la comparaison avec d‟autres pathologies comme le rhumatisme articulaire [49, 53, 64, 65].
Misfolding
Il s‟agit d‟un mauvais repliement de la molécule HLA B27 dû à la présence d‟acides-aminés particuliers au niveau de la poche B de fixation du peptide antigénique, notamment la cystéine en position 67. Cette dernière serait à l‟origine de la formation de ponts disulfures qui engendreraient la création anormale d‟homodimères de chaînes lourdes non associés à la β2m. L‟accumulation d‟homodimères ou d‟HLA B27 mal repliés dans le réticulum endoplasmique, par défaut des processus de dégradation, provoquerait un stress cellulaire dirigé par des protéines UPR (Unfolded Protein Response) responsables de l‟activation du facteur de transcription NFκB (Nuclear Factor kappa B) et de la réponse inflammatoire par induction de cytokines pro-inflammatoires telles que le TNFα (Tumor Necrosis Factor alpha), l‟IL-1 (Interleukine 1) et l‟IL-6 (Interleukine 6) [55, 56, 64].
D‟autres hypothèses en rapport avec HLA-B27 ont été évoquées [49, 53, 55, 56, 64]:
– L‟accumulation de β2m
– Un changement de conformation tridimensionnelle la chaîne lourde de HLA-B27 non liée à la β2m ni au peptide antigénique.
Gènes non HLA
Gènes de l’IL23R
Les gènes IL23R situé sur le chromosome 1, codant respectivement pour la sous-unité du récepteur de l‟IL23 spécifique de cette cytokine, et pour l‟IL12p40, sous-unité commune à lIL-12, qui induit la voie Th1, et à l‟Il-23, qui induit la voie Th17. Deux autres locus concernent des gènes de récepteurs de cytokines impliquées dans la différenciation Th17 : IL6R et IL1R2/IL1R1. Parmi les gènes associés à la SA pouvant être reliés à la voie Th17, se trouvent aussi TYK2 et STAT3, qui codent pour des protéines de signalisation en aval des récepteurs de l‟IL-23 et de l‟IL-6 [68].
Gène ERAP 1 et 2
Le gène ERAP1 et 2 (aminopeptidases Endoplasmic reticulum associated amino peptidase) situé sur le chromosome 5, qui code pour une aminopeptidase du réticulum endoplasmique (RE) impliquée dans la production des peptides antigéniques présentés par le HLA-B27. Les deux enzymes sont induites par l‟interféron gamma et permettent aux peptides de subir une étape de protéolyse sur leur partie N terminale, réduisant leur taille afin de permettre leur chargement sur les molécules HLA de classe I [39]. Chez des souris déficientes en ERAP1, il en résulte une réduction de l‟expression des molécules HLA de classe I à la surface des cellules, une augmentation de l‟altération des marqueurs de surface de classe I, une diminution de la stabilité et une présentation défectueuse des antigènes sur la surface des cellules [52, 55].
Gène CARD9
Le gène CARD9 situé dans la région péricentromérique du chromosome 16 est impliqué dans la signalisation par la dectinequiestun récepteur membranaire d‟un motif glucidique d‟origine microbienne, le β-glucan. Le gène PTGER4 code pour un récepteur de prostaglandines induisant la sécrétion d‟IL-23 par les DC. Le gène IL27A code pour une cytokine inductrice de la voie Th1 et inhibitrice de la voie Th17. Le gène ICOSL estresponsable du codage d‟une molécule de costimulation favorisant la réponse Th17. [54, 55].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE REVUE DE LA LITTERATURE
I. HISTORIQUE
II. EPIDEMIOLOGIE
II.1 FREQUENCE
II.1.1 Prévalence
II.1.2 Incidence
II.2 SEXE
II.3 ÂGE
III.1. Les facteurs génétiques
III.1.1. Gènes du système HLA
III.1.1.1. HLA B27
III.1.1.2. Autresgènes HLA
III.1.2. Gènes non HLA
III.1.2.1. Gènes de l‟IL23R
III.1.2.2. Gène ERAP 1 et 2
III.1.2.3. Gène CARD9
III.1.2.4. Le cluster de L‟IL-1
II.1.3.L‟apport des modèles animaux
III.2. Les facteurs environnementaux
III.2.1 Les facteurs infectieux
III.2.2 Les facteurs toxiques : tabac et alcool
III.2.3 Les facteurs endocriniens : Vitamine D
III.2.4Les facteurs métaboliques
III.2.5 Les facteurs physiques
III.2.6 Les facteurs psychiques
III.2.7 Les Facteurs immunitaires
IV. PHYSIOPATHOLOGIE
IV.1 La phase de l’inflammation
VI.2La phase de fibrose cicatricielle
V. DIAGNOSTIC DES SPONDYLOARTHRITES
V.1. DIAGNOSTIC POSITIF
V.2 DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
V.2.1. Devant une arthrite sacro-iliaque à prédominance unilatérale
V.2.2. Devant une atteinte rachidienne
V.2.3. Devant une arthrite périphérique isolée
V.3. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
V.4. DIAGNOSTIC D’EVOLUTIVITE
V.5. DIAGNOSTIC DE RETENTISSEMENT
VI. PRONOSTIC
VII. TRAITEMENT
VII.1. But
VII.2. Moyens
VII.2.1. Moyens non pharmacologiques
VII.2.2. Moyens pharmacologiques par voie générale
VII.2.2.1. Traitement symptomatique
VII.2.2.2. Les traitements de fond conventionnels
VII.2.2.3. Traitements de fond innovants : les biothérapies
VII.2.2.3. 1. Anti TNF-α
VII.2.3. Moyens pharmacologiques par voie locale
VII.2.4. Moyens physiques
VII.2.5. Moyens chirurgicaux
VII.3. Indications
VII.3.1. Spondylarthrite ankylosante dans sa forme axiale primitive
VII.3.2. Formes étiologiques
VII.3.3. Formes selon le terrain
DEUXIEMES PARTIE
I. Matériels et méthode
I.1 Le cadre d‟étude
I.2 Le type et durée d‟étude
I.3. -Population d‟étude
I.3.1. Critères d‟inclusion
I.3.2. Critères de non – inclusion
I.4. Méthodes d‟étude
II- Résultats
II-1.Données épidémiologiques
II-1-1. Fréquence
II-1-2. Le sexe
II-1-3. Age
II-1-4. Origine géographique
II.1-5 Zone géographique
II-1-6. Ethnie
II-1-7. Le statut matrimonial
II-1-8 la scolarité
II-1-9 la profession
II-1-10. Facteurs de favorisants
II-2 Données cliniques
II-2-1. Circonstances de découverte
II-2-2. Le délai diagnostique et l‟âge de début
II-2-3. Le mode de début
II-2-4. Atteinte axiale
II-2-5. Atteinte périphérique
II-2-6. Manifestation générale
II-2-7. Manifestations extra articulaires
II-2-8. Critères Diagnostiques
II-2-9. Formes cliniques
II-2-10. Les formes cliniques selon le sexe
II-2-11. Les formes familiales
II-2-12. Pathologies associées et comorbidités
II-3. Données paracliniques
II-3-1. Syndrome inflammatoire biologique
II-3-2. Bilan SPA
II-3-3. Signes radiologiques
II-4 Données de retentissement
II-4-1 Echelles de qualité de vie
II-4-2 Retentissement fonctionnel
II-4-3 Activité de la maladie
II-4-4 Retentissement paraclinique
II-5. Données thérapeutiques
II-5. Données évolutives
II- Discussion
III.1 Données épidémiologiques
1.1. Sexe
1.2. Age
1.3. Origine géographique
1.4. Ethnie
2. Données cliniques
2.1. Mode de début
2.2. Délai diagnostique
2.3. Circonstances de découverte
2.4. Atteinte axiale
2.5. Atteinte périphérique
2.6. Les formes cliniques
2.7. Les manifestations extra articulaires
2.8. Pathologies associées et comorbidités
3. Données paracliniques
4. Données thérapeutiques
5. Données évolutives
CONCLUSION