Généralités sur Trichoderma

Dans la nature, la plupart des micro-organismes sont utiles, tandis que d’autres constituent de véritables ennemis et entravent le développement de la plante et de son système racinaire. Certains agents pathogènes du sol sont responsables d’importantes pertes de récoltes en causant diverses maladies dont les pourritures des semences, des fruits et des racines, les flétrissements des plantes, les chancres de tiges, les taches foliaires. Les méthodes conventionnelles utilisées pour lutter contre ces pathogènes sont basées sur l’utilisation de produits chimiques avec des effets secondaires sur l’environnement et les microorganismes associés utiles parce que non sélectifs. Les maladies sont complexes et difficiles à combattre parce que souvent initiées par des blessures ce qui facilitent l’entrée et la progression des champignons pathogènes (Caron et al., 2006) .

Cette situation conduit à une utilisation abusive de pesticides chimiques de synthèse. Ces derniers entrainent une pollution des eaux de surfaces et souterraines soit directement par infiltration des eaux de pluies entrainant les produits phytosanitaires ou bien indirectement par ruissellement et lessivage des sols contenant les résidus des pesticides. Au Sénégal par exemple, dans la zone périurbaine des Niayes, plus importante zone de culture maraichères du pays, les concentrations de résidus mesurées dans la nappe phréatique dépassent les normes de potabilité de l’eau (Cissé et al., 2003). Ce même phénomène a été observé dans d’autres pays comme la Côte d’Ivoire, ou une contamination de l’eau souterraine par les pesticides organophosphorés et organochlorés a été montrée dans les régions agricoles où sont cultivés le cacao, le café, la banane et les légumes (Traoré et al., 2006).Un autre phénomène accroissant la contamination de l’espace rural par les pesticides est lié à la création des conditions favorables au développement de la résistance des ennemis (insectes, bactéries, nématodes et champignons) et la destruction des organismes utiles (Harman, 1992). Ainsi, plusieurs cas d’accoutumance des prédateurs aux pesticides ont été constatés (Georghiou, 1986). L’utilisation abusive des pesticides a aussi de nombreuses conséquences sur la santé humaine. On observe ainsi après l’application des pesticides des cas d’irritation de la peau, des céphalées, un rhume, des bouffées de chaleur ou des vertiges (Ahouangninou et al. ; 2011). On a constaté également un lien entre la présence de produits chimiques « perturbateurs endocriniens » et un taux accru de cancers du sein, de la prostate, du testicule, d’endométriose, de malformations congénitales de l’appareil reproducteur masculin et de réductions du nombre de spermatozoïdes (Hileman, 1994). Certaines pratiques, telles que le non-respect des dosages recommandés et des délais avant récolte, constituent également des facteurs de risque pour le consommateur, qui sont souvent à l’origine de nombreux cas d’intoxication alimentaire.

Plusieurs micro-organismes peuvent, par contre, avoir un effet bénéfique dans le contrôle des champignons pathogènes et ainsi minimiser l’effet délétère des pesticides. La découverte de tels agents de lutte biologique et la démonstration de leur capacité à réduire l’incidence et la gravité des maladies ont tracé la voie à plusieurs recherches prometteuses (Lewis et Papavizas, 1987). Dans ce contexte, une attention particulière a été portée aux champignons antagonistes, principalement à cause de leur potentiel à diminuer la densité de l’inoculum des champignons pathogènes (Elad et al., 1982). Parmi les champignons antagonistes qui ont démontré un bon potentiel de lutte, Trichoderma sp. est sans doute le plus rapporté dans la littérature (Elad et al,. 1982; Harman, 2000). Cependant, malgré son importance dans la protection des plantes contre les maladies racinaires et son intérêt économique, aucune étude officielle n’a été réalisée au Sénégal sur l’isolement ou l’utilisation des ces champignons dans l’industrie agroalimentaire ou comme agent de lutte biologique.

Généralités sur Trichoderma

Les Trichoderma sont des microorganismes cosmopolites répartis dans tout le monde et appartiennent à un grand ensemble de champignons sans reproduction sexuée connue (Roquebert, 1996 ; Genilloud et al., 1994). Le genre Trichoderma regroupe de nombreuses espèces réparties dans différents écosystèmes (terrestre ou aquatique). En milieu terrestre il joue un rôle important dans l’industrie agroalimentaire et est une matière de choix pour l’exploitation industrielle de manière générale à cause de leur capacité de production d’enzymes, de substances bioactives, d’acides aminés et leur développement rapide. De nos jours prêt de 100 espèces de Trichoderma ont été isolées et certaines de ces espèces du genre Trichoderma viride et Trichoderma harzianum sont d’intérêt économique pour leur production d’enzymes cellulolytiques et sont utilisées dans la lutte biologique. Ainsi grâce à leurs nombreuses propriétés antagonistes vis-vis des autres espèces fongiques pathogènes (antibiose, mycoparasitisme, compétition, lyse, promotion de la plante hôte), ces espèces sont capables de protéger les plantes contre les pathogènes et de permettre une stimulation de la croissance des plantes (Mouria et al., 2007). Ce qui permet de réduire l’utilisation abusive des traitements chimiques contre les champignons pathogènes pour une agriculture plus respectueuse des normes environnementales. Dans ce contexte de nombreuses espèces de Trichoderma ont été isolées partout dans le monde notamment en Afrique dans des pays comme la cote d’ivoire (Kebe et al., 2009), la Tunisie (Daami-Remadi M., El Mahjoud M., 2001 ; Hibar et al., 2005), au kenya( Okoth et al., 2009), en lybie (Attitalla et al., 2012) au Cameroune (Tondje et al., 2007). Les espèces de Trichoderma ont été utilisées pour la lutte biologique contre différents champignons pathogènes tels que Phytophthora palmivora (Kebe et al., 2009) Fusarium oxysporum f. sp. radicis-lycopersici , Pythium ultimum, Rhizoctonia solani, Sclerotinia sclerotiorum et Verticillium dahliae (Caron et al. ; 2002) pour la protection de certaines cultures comme la tomate , le concombre (caron et al. ; 2002, Mouria et al.;2007) l’oignon, l’aubergine (caron et al. ; 2006) .

Historique de la classification 

Les Trichoderma sont des champignons imparfaits saprophytes qui se retrouvent dans divers milieux : sol, bois mort, débris des végétaux. Le terme a été introduit dans la mycologie en 1794 par Persoon et désigne des champignons microscopiques considérées depuis 200 ans comme étant des Gastéromycètes. L’histoire de la classification des Trichoderma est caractérisée par de nombreuses controverses. Les champignons du genre Trichoderma sont des espèces anamorphes et n’ont pas de mode de reproduction sexué connu, ce qui fait que ce caractère ne peut pas être utilisé dans la classification de ces espèces. Ainsi on se base alors sur les aspects culturaux, la morphologie des appareils sporogènes (Roquebert., 1996) ainsi que sur le matériel génétique en s’appuyant sur des techniques de biologie moléculaires (Gams et Bissett., 1998) Si on répertorie succinctement les dates les plus importantes qui ont marqué la systématique des Trichoderma sp, on se rend vite compte que leur positionnement taxonomique n’a pas été chose facile. En 1794, Persoon décrit le premier Trichoderma sp. et établit 4 espèces. En 1821, Fries classa les Trichoderma sp. parmi les Gastéromycètes. En 1860, débutent les controverses sur cette systématique, Tulasne contredit Fries puisqu’il ne trouve pas de forme téléomorphes (sexuées) à ce genre. En 1871, devant le nombre croissant d’espèces rencontrées, Harz insiste sur l’importance des caractères morphologiques sous microscopie optique (surtout les phialides). En 1916, Waksman décrit 6 nouvelles souches de Trichoderma sp. en utilisant des critères macroscopiques, différents de ceux préconisés par Harz. En 1926, Abbot identifie 4 espèces de Trichoderma selon des critères différents des précédents. Le raisonnement d’Abbot reste en vigueur jusqu’à 1939. En 1939, Bisby tente de mettre de l’ordre dans ces systèmes en proposant une unique espèce : Trichoderma viridae. Durant 24 ans, toute espèce fongique à spores vertes était considérée comme étant un Trichoderma sp. En 1963, les travaux de Gutter et Monbasher mettent fin au système précédant, en démontrant la variabilité des espèces de Trichoderma en fonction des conditions environnementales. En 1969, conscient de toute cette polémique, Rifai propose une classification «utilisable avec le concept d’« espèces agrégées », basé sur les caractères microscopiques. « Une espèce agrégée est une entité composée de groupement d’espèces très similaires, difficiles à séparer ». Neuf espèces agrégées sont crées (T. aureoviridae Rifai, T. hamatum Bain, T. harzianum Rifai, T. koningiiOudemans, T. longibrachiatum Rifai, T. piluliferum Webster et Rifai, T. polysporum Rifai, T pseudokoningii Rifai et T. viridae Gray), tout en tolérant une certaine variabilité au sein de chaque espèce agrégée (Rifai., 1969).

En comparaison avec les nombreux critères précédents, ce système semble le plus facilement utilisable pour la communauté scientifique, d’autant plus qu’il a été amélioré récemment par Bissett (1984, 1991a et b). En 1991, Bissett propose la notion de « section » pour faire face au nombre croissant d’espèces nouvelles de Trichoderma sp., sans rapport avec les espèces agrégées. Se basant sur la morphologie des conidiophores et des phialides, il regroupe les espèces agrégées dans 5 sections (Figure2) (Trichoderma, Pachybasium, Hypocreanum, Longibrachiatum et Saturnisporum) (Leuchtmann., 1996) Le système taxonomique de Bissett est aussi appuyé, entre autres, par des approches de biologie moléculaire (PCR), pour répondre au positionnement de nouvelles espèces de Trichoderma identifiées (dont les formes téléomorphes sont souvent non identifiées) et reste le plus fiable actuellement. Les espèces de Trichoderma ainsi que leurs rares formes téléomorphes observées sont classées parmi les Ascomycètes. Plus de 200 espèces du genre Hypocrea ont été identifiées, mais sont rarement cultivables, et de ce fait peu décrites en termes modernes (Gams and Bisset, 1998) Sous certaines conditions, méconnues, les Hypocrea sp. (téléomorphes) se transforment définitivement en Trichoderma sp. (anamorphes). On pense alors que l’évolution a conduit à la disparition du mode sexué pour l’établissement d’un genre à reproduction exclusivement asexuée (Roquebert., 1996). Au cours des dernières années, l’identification sûre des nouvelles espèces de Trichoderma a été considérablement facilitée par l’élaboration d’un code à barres oligonucléotide (TrichOKEY) et un outil de recherche personnalisé (Tricho BLAST), tous deux disponibles en ligne à www.is+th.info (Druzhinina et al ;.2005). La biologie moléculaire nous révèle aujourd’hui que des espèces de Trichoderma génétiquement différentes, présentent des similitudes morphologiques spectaculaires et leurs caractéristiques se chevauchent. C’est ce qui, d’une part explique la longue controverse connue par ce genre auparavant et d’une autre part, montre que les seuls critères morphologiques ne suffisent plus pour une classification incontestable et rigoureuse des formes anamorphes de Trichoderma sp. (Cournut., 1984 ; Sugiyama., 1987). La taxonomie moderne des champignons a aboli l’embranchement des Deuteromycotina, auquel appartenait le genre Trichoderma.

Ecologie

Comprendre les facteurs écologiques qui affectent la distribution de Trichoderma dans leurs habitats naturels peut conduire à une meilleure compréhension de la dynamique, de la survie et de la prolifération des populations de ce champignon antagoniste dans le sol et la rhizosphère. Pour cette raison, une analyse minutieuse du comportement de ce champignon dans l’écosystème du sol est nécessaire.

Grâce à sa grande capacité d’adaptation aux différentes conditions climatiques, le genre Trichoderma est très répandu dans la nature. On le trouve aussi bien en milieu terrestre que marin .En effet, les Trichoderma sp. sont remarquables pour leur croissance rapide et leur capacité à utiliser différents substrats et sont, par conséquent, l’élément majeur dans la microflore terrestre et marine. Les Trichoderma sp. terrestres se développent quasiment dans tous les sols (forestiers ou cultivés), en particulier dans ceux contenant un important contenu en matière organique et sur les végétaux en décomposition. Il semble être un colonisateur secondaire à cause de son isolement fréquent dans la matière organique bien décomposée (Danielson et al., 1973). Trichoderma se trouve également sur la surface des racines de diverses plantes; écorce en décomposition, surtout quand il est endommagé par d’autres champignons (Danielson et al., 1973) et sur les sclérotes ou autres propagules d’autres champignons ( Davet 1979, Wels et al., 1972). Ils contaminent fréquemment le compost de la culture industrielle des champignons comestibles, mais sont rarement parasites de plantes vivantes.

Morphologie 

L’aspect macroscopique de Trichoderma sp. est apprécié à partir de cultures sur géloses nutritives appropriées, réparties en boîtes de Petri. Les colonies fongiques peuvent être légèrement floconneuses ou bien compactées en touffes. Entre ces deux extrêmes, existent des aspects intermédiaires. Les colonies sont colorées en fonction de la pigmentation des phialides. Cinq jours après sa germination, la conidie donne naissance à un mycélium d’abord blanc et stérile en forme de cercle. Deux jours plus tard, une couleur verte est visible sur les parties aériennes du mycélium, correspondant à la conidiogenèse. D’autres cercles concentriques réguliers se forment par la suite, et entre le 16ème et le 20ème jour un feutrage épais se superpose à la culture. Au microscope optique on peut observer un mycélium composé d’hyphes jaunes, septés, ramifiés à parois lisses. Les conidiophores ont une forme conique ou pyramidale. Très ramifiés, ils portent des phialides en forme de flasques ou de quilles. A leur tour, les phialides portent les spores (phialospores ou bien conidies).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Synthèse bibliographique
1. Généralités sur Trichoderma
1.1. Historique de la classification
1.2 Ecologie
1.3 Morphologie
1.3.1. Conidiophores
1.3.2. Phialides
1.3.3. Conidies
1.3.4. Chlamydospores
1.4. Cycle de vie de Trichoderma
2. Importance de Trichoderma
2.1.Pouvoir antagonistes de Trichoderma
2.1.1. Antibiose
2.1.2. Compétition
2.1.3. Mycoparasitisme
2.2. Stimulation de la croissance de la plante
2.3. Production de métabolites intéressants
2.3.1. Production d’enzymes
2.3.2. Production de substances bioactives
2.3.3. Synthèses d’acides aminés
3. Aspect de Trichoderma en Culture
3.1.Patato dextrose agar
3.2.Malt extract agar
3.3.Czapek Dox
3.4.Sabouraud
Matériels et méthodes
1. Isolement de Trichoderma
1.1. Présentation du site d’échantillonnage
1.2. Technique de prélèvement des échantillons de sol
1.3. Technique d’isolement
2. Identification de Trichoderma
2.1. Au plan macroscopique
2.2. Au plan microscopique
3. Conservation des souches
4. Culture in vitro de Trichoderma
4.1. Culture dans différentes conditions abiotiques
4.1.1. Milieux de culture
4.1.2. pH
4.1.3. Température
4.1.4. Degrés de salinité
5. Tests d’antagonisme in vitro
5.1. Méthode de confrontation directe
5.2. Méthode de confrontation à distance
Résultats
1. Identification de Trichoderma
1.1.Examen macroscopique
1.2.Examen microscopique
2. Effets des contraintes sur la croissance de Trichoderma
2.1.Effet des milieux de cultures
2.2.Effet de la Température d’incubation
2.3.Effet du pH
2.4.Effet de la salinité
3. Tests d’antagonismes in vitro
3.1.Confrontation directe
3.2.Confrontation à distance
Discussion
1. Isolement de Trichoderma sp
2. Culture in vitro de Trichoderma sp
3. Tests d’antagonismes
Conclusion et perspectives
Références bibliographiques
Annexes

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *