Généralités sur l’usinage de l’alliage d’aluminium 2024-T351

Généralités sur l’usinage de l’alliage d’aluminium 2024-T351

L’alliage d’aluminium 2024-T351

L’alliage d’aluminium 2024 est l’un des alliages les plus couramment utilisés dans l’industrie aéronautique. C’est un alliage à durcissement structural, c’est-à-dire que ses propriétés mécaniques lui sont conférées par l’application d’un traitement thermique après sa mise forme. Ce traitement thermique induit une précipitation contrôlée de certaines phases à l’intérieur de la matrice d’aluminium et donc une augmentation des propriétés mécaniques de l’alliage.

L’alliage d’aluminium 2024-T351 possède à la fois de bonnes propriétés mécaniques, une bonne conductivité thermique et une faible masse volumique. Cela explique sa large utilisation dans l’industrie aéronautique depuis de nombreuses années.

Mise en forme et traitement thermique

Le processus de mise en forme de l’alliage d’aluminium 2024 comporte 3 étapes (Pauze, 2008; Prieto Yespica & José, 2012):
– La coulée : tous les composants de l’alliage sont mélangés à 700°C, puis le mélange est coulé sous forme de plaque, la plaque se solidifie ensuite ce qui entraîne la formation d’hétérogénéités structurales et chimiques.
– L’homogénéisation : la plaque est portée entre 475 et 495°C pendant 20 h. Les hétérogénéités macroscopiques de composition sont alors éliminées. Les particules intermétalliques grossières formées pendant la solidification sont, elles, insolubles à cette température et demeurent.
– Le laminage : la plaque est laminée à chaud (puis éventuellement à froid) pour atteindre l’épaisseur désirée. Cela entraîne la fragmentation et l’élongation des grains. Les particules intermétalliques grossières sont cassées et redistribuées dans la direction de laminage.

Afin d’augmenter les propriétés mécaniques de l’alliage 2024, un traitement thermique, indiqué par la lettre « T », est toujours appliqué au matériau après sa mise en forme pour engendrer le durcissement structural de celui-ci. L’étude porte sur l’alliage 2024 traité à l’état T351. Le traitement thermique T3 est composé de quatre étapes : la mise en solution, la trempe, l’écrouissage et la maturation (Benedyk, 2010). La désignation Tx51 indique qu’une opération de détensionnement par traction est réalisée après la trempe .

Les étapes successives du traitement T351 sont ainsi les suivantes (Pauze, 2008) :
– La mise en solution : le matériau est porté à une température supérieure à la température de solvus des éléments d’alliage pendant une durée suffisante pour obtenir une mise en solution totale des atomes de soluté.
– La trempe : l’alliage est refroidi suffisamment rapidement de sorte à ce que les précipités intermétalliques stables n’aient pas le temps de se former et à conserver, à la température ambiante, la solution solide sursaturée en lacunes et en atomes de solutés obtenue à la fin de la mise en solution.
– Le détensionnement : le matériau subi une traction avec déformation plastique de l’ordre de 2% afin de réduire les contraintes résiduelles induites par la trempe et de rendre la précipitation ultérieure plus homogène en générant des dislocations, sites privilégiés de germination des précipités.
– La maturation et/ou le revenu : l’alliage est maintenu à température ambiante (maturation) et durcit spontanément par décomposition de la solution solide sursaturée en éléments d’addition. Dans la plupart des cas, ce vieillissement qualifié de naturel est suivi par un vieillissement artificiel avec un maintien à une température supérieure (entre 120 et 170°C), appelé revenu, afin d’ajuster les caractéristiques mécaniques du matériau.

Le durcissement de l’AA2024-T351 résulte donc du phénomène de précipitation associé à la décomposition de la solution solide sursaturée au cours de l’étape de maturation. Cet alliage est durci par la précipitation des phases CuAl2 et Al2CuMg (Huda et al., 2009). Les précipités durcissants constituent des obstacles au passage des dislocations lors de la déformation plastique, ce qui contribue à l’augmentation des propriétés mécaniques du matériau.

Texture morphologique

La texture morphologique d’une tôle en AA2024-T351 d’épaisseur 50 mm a été étudiée par micrographie optique après oxydation anodique par Pauze (Pauze, 2008). A cause de l’opération de laminage subie par le matériau lors de sa mise en forme, celui-ci présente une structure fibrée fortement anisotrope qui est constituée de gros grains aplatis et étirés dans la direction de laminage . Cette structure peut être caractérisée selon trois directions : sens long (L), sens travers court (TC) et sens travers long (TL).

De plus, cette étude de la texture morphologique a mis en évidence un gradient de la taille des grains dans l’épaisseur de la tôle avec des grains de taille beaucoup plus petite au niveau de l’extrême peau (4 mm). La structure anisotrope d’une tôle en AA2024-T351 lui confère des propriétés mécaniques également anisotropes. En effet, les pièces extraites d’une telle tôle présentent de meilleures propriétés mécaniques lorsqu’elles sont sollicitées dans le sens long que lorsqu’elles sont sollicitées dans le sens travers court ou long. C’est pourquoi, certains auteurs, comme Pauze (Pauze, 2008), donnent des propriétés mécaniques différentes de l’AA2024-T351 en fonction de la direction de sollicitation. Dans l’industrie aéronautique, afin d’avoir des structures les plus résistantes possibles, les pièces fabriquées à partir de tôles d’aluminium laminées sont toujours extraites de sorte à ce que la direction du laminage corresponde à la direction principale de sollicitation de la pièce une fois en service.

Usinabilité de l’AA2024-T351

L’usinabilité d’un matériau caractérise sa capacité à être mis en forme par enlèvement de matière. Elle peut être évaluée à travers plusieurs critères : la durée de vie de l’outil ou son usure, la forme du copeau, le taux d’enlèvement de matière, les efforts de coupe et la puissance consommée, la qualité de la surface usinée. Plusieurs travaux traitent de l’usinabilité des alliages d’aluminium en rapport avec ces critères (Carrilero and Marcos 1996; Jawahir and Balaji 2003; Songmene et al. 2011; Santos et al. 2016).

Durée de vie de l’outil
Différents matériaux sont utilisés pour la fabrication des outils coupants pour l’usinage des alliages d’aluminium : aciers rapides, carbure de tungstène, diamant polycristallin, etc… Dans l’industrie aéronautique, le matériau le plus répandu des outils de perçage de l’AA2024-T351 est le carbure tungstène. Ce matériau permet un bon compromis entre l’état de surface obtenu, la résistance à l’usure de l’outil et le coût de celui-ci. Lors de l’usinage des alliages d’aluminium, et en particulier lors de l’usinage à sec, différents mécanismes d’endommagement de l’outil coupant peuvent avoir lieu : usure par adhésion, usure par abrasion, usure par diffusion, déformations plastiques sévères. La prédominance d’un ou des mécanismes d’usure dépend à la fois des propriétés physico-chimiques des matériaux de l’outil et de la pièce usinée, du type d’opération d’usinage, et des conditions de coupe. Au cours de l’usinage de l’AA2024-T351, les mécanismes d’endommagement prédominants sont l’usure par adhésion et l’usure par diffusion (G. List et al., 2005).

Le premier phénomène se produit sous l’effet de la pression. Des soudures se créent entre l’outil et le copeau par écrasement des aspérités ou par des phénomènes d’adsorption et de solubilité lorsqu’il existe une affinité chimique entre les atomes des matériaux de l’outil et de la pièce. Lorsque ces soudures se rompent, des fragments de matière provenant du copeau restent accrochés sur l’outil. Dans certains cas d’usinage de l’AA2024-T351, ces éléments de copeau restant collés au niveau de la pointe de l’outil peuvent s’accumuler de manière importante et former une arête rapportée (Built-Up Edge, BUE) . Celle-ci peut devenir instable en grossissant et se briser, ce qui induit une modification des conditions de coupe et une détérioration de l’intégrité de surface. Le phénomène d’adhésion a lieu principalement lors de la coupe avec des outils en carbure de tungstène ou en aciers rapides pour le domaine des faibles vitesses de coupe et des faibles avances (List, 2004) soit pour les conditions de coupe généralement considérées pour le perçage conventionnel de AA2024-T351. Afin de limiter ce phénomène d’usure, un revêtement de surface adapté peut être appliqué sur l’outil de coupe ou une lubrification peut être mise en place. Dans l’industrie aéronautique, une micro-lubrification (MQL : Minimal Quantity Lubrification), qui consiste à appliquer une quantité minimale de fluide de coupe par jet d’air, est ainsi généralement employée pour le perçage de l’AA2024-T351. Ce type de lubrification présente des avantages économique et écologique notables par rapport à la lubrification classique (arrosage) tout en permettant d’obtenir de très bons résultats en termes de qualité de surface.

Le phénomène de diffusion est dû aux températures et pressions élevées qui fournissent assez d’énergie aux atomes pour qu’ils migrent de l’outil vers le copeau ou inversement. Pour le cas de l’usinage de l’AA2024-T351 avec un outil en carbure, les atomes d’aluminium peuvent migrer dans l’outil à travers le liant cobalt et forment des composés intermétalliques AlxCox (List, 2004). Cela fragilise la cohésion entre les grains de carbure et le liant de cobalt et contribue à la fragilisation de l’outil. Le phénomène de diffusion a lieu majoritairement au cours de l’usinage à grande vitesse de coupe et la température est le facteur principal contrôlant le taux de diffusion (Nouari, 2000). Ainsi, il est important de limiter les niveaux de températures atteints au cours de l’usinage de l’AA2024-T351. L’utilisation d’une lubrification sous forme de MQL, qui contribue à réduire l’échauffement à l’interface outil/pièce, permet donc de limiter également le phénomène d’usure de l’outil par diffusion dans les cas où un usinage de l’AA2024 T351 à grande vitesse est mis en place.

Ainsi, dans certaines conditions particulières de coupe de l’AA2024-T351, l’endommagement de l’outil de coupe peut être un problème majeur induisant une détérioration de la pièce usinée, la ruine de l’outil et donc des coûts importants associés. Cependant, pour la majorité des applications industrielles aéronautiques, le perçage de l’AA2024-T351 est un procédé maitrisé qui, grâce à l’utilisation de conditions de lubrification et de matériau d’outil, et parfois de revêtement, adaptés, n’entraîne pas d’endommagement majeur de l’outil.

Forme du copeau

La grande ductilité des alliages d’aluminium a tendance à conduire à la formation de copeaux continus. Ceux-ci ne sont pas souhaitables pour les opérations de perçage dans le cas d’applications industrielles car ils peuvent engendrer plusieurs problèmes affectant le bon déroulement de la coupe. En effet, les copeaux continus se fragmentent difficilement et ont tendance à former des copeaux longs difficilement évacuables vers l’extérieur de la pièce. Ils peuvent conduire à des problèmes de bourrages induisant des arrêts de production et à une altération de l’intégrité de la surface de trou à travers le frottement du copeau sur celle-ci. De plus, contrairement aux copeaux segmentés ou fragmentés, les copeaux continus favorisent la formation d’une arête rapportée lorsque qu’une zone de stagnation de la matière se crée au niveau de la pointe de l’outil. Comme évoqué précédemment, cette forme d’usure de l’outil peut aussi altérer l’intégrité de surface.

Les vitesses de coupe et d’avance jouent un rôle majeur dans la morphologie des copeaux (Rubio et al. 2006; Wagner et al. 2012). Avec les avances relativement faibles habituellement employées en perçage conventionnel des alliages d’aluminium, les copeaux obtenus ont tendance à être continus quelle que soit la vitesse de coupe. En revanche, pour certains cas d’application où des avances plus importantes sont considérées, la morphologie du copeau dépend également de la vitesse de coupe. L’augmentation de l’avance et de la vitesse de coupe peut permettre l’obtention de copeaux segmentés ou fragmentés. Par ailleurs, la géométrie de l’outil a aussi un impact sur la nature des copeaux. La mise en place d’un brise-copeaux sur l’outil est très efficace pour l’obtention de copeaux non continus (Carrilero & Marcos, 1996).

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1. Etat de l’art
1.1 Objectifs
1.2 Généralités sur l’usinage de l’alliage d’aluminium 2024-T351
1.2.1 L’alliage d’aluminium 2024-T351
1.2.2 Usinabilité de l’AA2024-T351
1.3 L’opération de perçage
1.3.1 Cinématique des procédés de perçage axial et orbital
1.3.2 Outils et moyens de perçage
1.3.3 Phénomènes d’enlèvement de matière en perçage
1.3.4 Optimisation des conditions de coupe en perçage
1.3.5 Comparaison des deux procédés de perçage étudiés
1.4 Instrumentation, mesure et simulation de l’opération de perçage
1.4.1 Instrumentation de l’opération perçage
1.4.2 Mesures de la qualité du trou percé
1.4.3 Simulation de l’opération de perçage
1.5 Usinage, intégrité de surface et tenue en fatigue
1.5.1 Impact de l’intégrité de surface sur la tenue en fatigue d’alliages d’aluminium
1.5.2 Impact de l’opération de perçage sur l’intégrité de surface et la qualité du trou percé
1.6 Synthèse de l’étude bibliographique
Chapitre 2. Influence du procédé de perçage sur la tenue en fatigue de la pièce percée
2.1 Objectifs
2.2 Matrice d’essais et éprouvettes
2.2.1 Matrice d’essais
2.2.2 Eprouvettes
2.3 Essais de perçage
2.3.1 Présentation des moyens d’essais de perçage
2.3.2 Outils et conditions de coupe
2.3.3 Etude des sollicitations thermomécaniques mises en jeu au cours du perçage
2.3.4 Etude de la qualité des trous percés au regard des spécifications aéronautiques
2.4 Essais de fatigue
2.4.1 Présentation de l’essai de fatigue
2.4.2 Durée de vie en fatigue
2.4.3 Faciès de rupture
2.5 Synthèse
Chapitre 3. Caractérisation de l’intégrité de surface des trous percés
3.1 Objectifs
3.2 Caractérisation expérimentale des aspects topologiques de l’intégrité de surface
3.3 Profondeur du matériau en bord de trou affectée par les aspects internes de l’intégrité de surface
3.3.1 Problématique de caractérisation des aspects internes de l’intégrité de surface avec les méthodes d’analyses usuelles
3.3.2 Développement d’un modèle numérique macroscopique prédictif de la profondeur du matériau, en bord de trou, affectée à l’issue du perçage
3.3.3 Analyse des résultats
3.4 Caractérisation expérimentale des aspects métallurgiques de l’intégrité de surface
3.4.1 Caractérisation de la dureté
3.4.2 Etude des modifications microstructurales induites par les sollicitations mécaniques
3.4.3 Etude des modifications microstructurales induites par les sollicitations thermiques
3.5 Caractérisation expérimentale des aspects mécaniques de l’intégrité de surface – Mise en place d’une nouvelle méthode d’analyse des contraintes résiduelles
3.5.1 Présentation de la nouvelle méthode d’analyse HOCT
3.5.2 Caractérisation de l’état de contraintes résiduelles avec la méthode HOCT
3.6 Corrélation entre intégrité de surface et tenue en fatigue
3.7 Synthèse
Chapitre 4. Impact de l’opération de perçage sur l’intégrité de surface du trou percé
4.1 Objectifs
4.2 Paramétrage de la coupe latérale en goujure mise en jeu au cours du perçage
4.3 Analyse de l’impact potentiel des paramètres de l’opération de perçage, dans le cadre de cette étude
4.3.1 Analyse des paramètres de coupe
4.3.2 Analyse des paramètres géométriques
4.4 Etude numérique de l’impact de l’opération de perçage sur l’intégrité de surface
4.4.1 Objectifs et stratégie de simulation
4.4.2 Modèle éléments finis
4.4.3 Validation du modèle
4.4.4 Modèle de référence
4.4.5 Exploitation du modèle pour l’étude des paramètres de perçage identifiés comme ayant un impact potentiel sur l’intégrité de surface dans cette étude
4.4.6 Exploitation du modèle pour l’étude de l’impact des autres paramètres de perçage sur l’intégrité de surface
4.5 Corrélation entre les paramètres de l’opération de perçage et l’intégrité de surface
4.6 Synthèse
Conclusion générale

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