L’igname est une denrée alimentaire de première importance dans de nombreux pays tropicaux d’Asie, d’Amérique du sud, d’Afrique et plus particulièrement d’Afrique de l’ouest [GIRARDIN et al, 1998]. Les données statistiques de la F.A.O. en 1998 indiquent une production mondiale d’ignames de 36millions de tonnes [AGUEGUIA et al, 1999].
Dans de nombreux pays, du fait de la haute teneur en fécule des différentes espèces, l’igname assure un approvisionnement de base en énergie. Les tubercules de l’igname à l’état frais sont très appréciés par les consommateurs [AGUEGUIA et al, 1999]. Cependant, la conservation de l’igname de manière traditionnelle occasionne des pertes importantes, et l’application des techniques de conservation modernes semble peu probable en raison des coûts trop élevés [GIRARDIN et al, 1998 ; NINJIN et al, 1998 ; N’KPENU et al, 1998]. L’absence d’un mode de conservation efficace rend l’igname indisponible durant toute l’année. Il est alors nécessaire d’orienter les recherches vers la transformation de l’igname en produits stables afin d’assurer une couverture annuelle des besoins d’une part et afin de pouvoir la valoriser d’autre part.
Jusqu’à présent, dans les pays producteurs, l’igname est transformée sous des formes qui s’adaptent à a demande des consommateurs et en d’autres produits stables tels que les chips, le fufu, les frites, le flocon, la farine précuite instantanée, les produits apéritifs et le sirop de glucose, …[ATTAIE et al, 1998]. A Madagascar, l’igname comme la plupart des plantes à racine et tubercule est peu exploitée malgré la richesse de notre flore en espèces d’ignames endémiques. Elle n’est pas encore domestiquée et reste encore un produit de cueillette. En milieu rural, lors des jours du marché, l’igname ne se trouve pas souvent sur la même table que les autres denrées alimentaires, mais la plupart du temps à même le sol.
L’igname est généralement consommée pendant la période de disette alimentaire surtout dans les zones rurales. Actuellement, une équipe multidisciplinaire travaille dans le cadre du projet SP 01 v3-10 financé par la Banque Mondiale, par l’intermédiaire du FADES, qui s’intitule « Appui à la recherche sur les possibilités de valorisation des ignames malgaches ».
Utilisations des tubercules de l’igname
Utilisations alimentaires
Parmi les 600 espèces d’ignames, seules quelques dizaines d’espèces sont comestibles, certaines espèces peuvent être consommées après détoxication [LANCASTER, 1988 ; ATTAIE, 1998]. Généralement, les tubercules de l’igname sont consommés après une simple cuisson à l’eau ou préparée en un plat accompagné de diverses sauces selon les savoir- faire culinaires de chaque pays. Par ailleurs, ils sont aussi transformés à l’échelle artisanale, semi-industrielle ou industrielle afin de mieux les conserver ou d’améliorer leur goût ou pour pouvoir les valoriser. Comme exemple des produits issus de la transformation des tubercules de l’igname, on peut citer :
– la pâte d’igname : appelé « foufou » ou « fufu » ou pudding [HOLLO, 1964 ; HOUNHOUIGAN et al, 1998]
– les ignames braisées, les ignames frites, la purée d’igname, le couscous d’igname [ATTAIE et al, 1998]
– la farine d’igname. Dans la boulangerie, elle peut substituer 20% de farine de blé [ATTAIE et al, 1998]
– la farine instantanée, les produits apéritifs « snacks », l’igname enrichie en protéines [ATTAIE et al, 1998]
– le jus d’hydrolyse d’igname qui peut aussi être utilisé en brasserie ou dans d’autres industries de fermentation [HOLLO, 1964] .
A part son utilisation dans l’alimentation humaine, l’igname est aussi utilisée en alimentation animale [DEGRAS, 1994]. De plus, le jus d’hydrolyse de l’igname est utilisé dans la production de levure fourragère. Ce dernier peut suppléer à la carence en protéines dans l’alimentation du bétail [HOLLO, 1964] .
Utilisations non alimentaires
Dans les pays asiatiques, africains, et américains, la toxicité de certaines espèces est souvent exploitée à des usages pharmaceutiques (en dermatologie, gastroentérologie, gynécologie traditionnelle humaine) [ANONYME, 1986 ; DEGRAS, 1986]. Elle est aussi utilisée pour la chasse au tigre en Himalaya, au singe en Afrique du Sud, aux oiseaux, aux poissons et divers autres animaux [DEGRAS, 1986]. Cette toxicité est aussi exploitée pour la protection du riz en Malaisie et pour la fabrication des shampooings contre les poux en Inde [DEGRAS, 1986]. Le grand pouvoir moussant de l’igname dû à la présence de saponine peut lui offrir une perspective d’utilisation dans l’industrie des détergents [HOLLO, 1964].
IGNAME A MADAGASCAR
Plus de 40 espèces d’ignames sont identifiées dans la flore de Madagascar, mais, 33 espèces dont 27 endémiques sont déjà inventoriées. Elles se répartissent dans 12 sections [BURKILL et PERRIER de la BATHIE, 1950 ; DEGRAS, 1986]. Pour les espèces de la flore malgache, aucun essai de transformation n’est entrepris. Par contre, la valeur nutritionnelle de plus de vingtaine d’espèces est déjà déterminée. Citons Dioscorea sansibarensis [RAZAFIMAHEFA, 1994 ; RANDRIAMAHATODY, 2003], Dioscorea acuminata [RAVELO, 1998], Dioscorea antaly [RAVELO, 1998 ; RANDRIMAHATODY, 2003], Dioscorea maciba [RAVELO, 2003], Dioscorea nako [RAMANANTOANDRO, 1998], Dioscorea fandra [RATSILEFITRA, 1999], Dioscorea bemarivensis [RAKOTOARIMANANA, 2000 ; LALA, 2003], Dioscorea hexagona, Dioscorea trichanta [RALAIARISON, 2002], Dioscorea ovimbato, Dioscorea seriflora [RAKOTOARIMANANA, 2003], Dioscorea ovinala [RANDRIAMAHATODY, 2003], Dioscorea alata [RANDRIAMAMPIANINA, 2003], Dioscorea Maciba et « bako » [LALA, 2003].
MATERIELS D’ETUDE
Systématique et noms vernaculaires
La plante étudiée est connue sous le nom vernaculaire de « oviala » et a été déterminée comme étant Dioscorea seriflora Jum. Perrier. Elle appartient à la famille des DIOSCOREACEAE, ordre des DIOSCOREALES, sous-classe des LILIIDAE, classe des ANGIOSPERMOPSIDA, sous – embranchement des SPERMATOPHYTA, embranchement des ANGIOSPERMAE et règne VEGETAL. Cette appellation « oviala » est celle que l’on utilise généralement dans la région du Betsileo où la récolte de notre matière première a eu lieu. Elle est aussi connue sous le nom de ovifotsy dans la partie Est de Madagascar et ovisofina dans la région de Sakalava [BURKILL et PERRIER DE LA BATHIE, 1950]. Dioscorea seriflora appartient à la section SERIFLORAE [BURKILL et PERRIER DE LA BATHIE, 1950]. Il s’agit d’une section endémique comprenant 4 espèces : Dioscorea tsaratananensis, Dioscorea decaryana, Dioscorea seriflora ; Dioscorea tanalarum. L’échantillon d’herbier correspondant porte le N° R N107 et a été déposé au département de biologie et écologie végétale de la faculté des Sciences d’Antananarivo et à l’herbier de Kew (Londres).
Description botanique
Appareil végétatif
La corme est profonde portant en dessous deux tubercules verticaux, connivents, blancs, très allongés (jusqu’à 1m 20 de long sur 10cm d’épaisseur) et sub-cylindriques : l’un de l’année précédente est en voie de flétrissement, alors que l’autre en voie de croissance porte plusieurs ramifications . Le tubercule de Dioscorea seriflora pèse environ 8Kg. La tige est radicante au niveau des nœuds dans le sol, elle devient un peu plus grosse et cannelée au-dessus du sol. Les feuilles sont alternes ou parfois sub – opposées formant deux lobes arrondis et un lobe médian triangulaire atténué, puis acuminé en pointe très longue et très aiguë. Elles portent 5 à 9 nervures dont les deux externes sont bifurquées .
Appareils reproducteurs
Les Inflorescences mâles sont récurvées solitaires ou groupées par 2 ou 4 à l’aisselle des feuilles et à fleurs isolées. Les inflorescences femelles sont récurvées, solitaires ou géminées, longues de 30 à 35cm et à fleurs isolées. Les fruits sont des capsules réfléchies, sub-elliptiques, un peu anguleuses aux deux extrémités . Les graines sont insérées au sommet des fruits.
Période de récolte
Au mois de septembre, le tubercule de Dioscorea seriflora est mature et possède le meilleur goût. La récolte commence à cette période de maturité et continue jusqu’au mois de novembre – décembre qui est la période la plus propice car le tubercule commence à germer, ce qui facilite son repérage.
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Table des matières
I.INTRODUCTION
II- ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
II-1- GENERALITES SUR L’IGNAME
II-1-1-Igname au niveau mondial
II-1-1-1- Propriétés générales de l’igname
II-1-1-2- Chiffres de production mondiale de l’igname
II-1-1-3- Composition chimique des tubercules de l’igname
II-1-1-4- Utilisations des tubercules de l’igname
a)- Utilisations alimentaires
b)- Utilisations non alimentaires
II-1-2- Igname à Madagascar
II-1-2-1- Matériels d’étude
II-1-2-1-1- Systématique et noms vernaculaires
II-1-2-1-2- Description botanique
a)-Appareil végétatif
b)-Appareils reproducteurs
II-1-2-1-3- Période de récolte
II-1-2-1-4- Caractéristiques de Dioscorea seriflora
II-1-2-1-5- Répartition géographique
II-2- HYDROLYSE
II-2-1- Amidon
II-2-2- Hydrolyse de l’amidon
II-2-2-1- Hydrolyse chimique
II-2-2-2- Hydrolyse enzymatique
II-2-3- Utulisation industrielle de l’amidon
II-2-4- Produit d’hydrolyse et ses usages
II-3- LA FERMENTATION
II-3-1- Définition et historique de la fermentation
II-3-2-Biochimie de la fermentation
II-3-3- Paramètres affectant la fermentation alcoolique
II-3-3-1- Concentration en substrat carboné
II-3-3-2- Teneur en oxygène
II-3-3-3- Température
II-3-3-4- pH
II-3-3-5- Agitation
II-3-3-6- Ethanol
II-3-3-7- Gaz carbonique
II-3-4– Produits de la fermentation
II-3-4-1- Produits secondaires
a)- Glycérol
b)- Méthanol
c)- Alcools supérieurs
d)- Esters
e)- Acide acétique
f)- Aldéhyde formique
II-3-5- Usage de l’alcool
II-3-6- Agent de la fermentation : levure
II-3-6-1- Systématique
II-3-6-2- Propriétés des levures
II-3-6-3- Quelques propriétés biochimiques des levures
II-3-6-4- Milieu de culture de la levure
III- MATERIELS ET METHODES
III-1- PRESENTATION DU MATERIEL D’ETUDE
III-1-1- Détermination du taux d’humidité des tubercules frais
III-1-1-1- Définition
III-1-1-2- Méthode
III-1-1-3- Expression du résultat
III-1-2- Détermination de la teneur en cendres brutes
III-1-2-1- Principe
III-1-2-2- Méthode
III-1-2-3- Expression du résultat
III-1-3- Transformation des tubercules en farine
III-1-3-1- Transformation des tubercules de Dioscorea seriflora en cossettes
III-1-3-2- Transformation des cossettes en farine
III-1-3-2-1- Détermination du taux d’humidité de la farine.de Dioscorea seriflora
III-1-3-2-2- Détermination de la teneur en amidon de la farine de Dioscorea seriflora
a).Principe
b). Réactif
c). Mode opératoire
c-1)- Détermination du titre de la liqueur de Fehling «T»
c-2)- Détermination de la teneur en amidon
c-3)- Dosage
d). Expression du résultat
III-2-HYDROLYSE ENZYMATIQUE DE LA FARINE DE Dioscorea seriflora PAR LA METHODE DE MALTAGE
III-2-1-Principe
III-2-2-Méthodes
III-2-2-1- Développement des enzymes dans les grains de paddy
a)-Trempage
b)-La germination
c)-Obtention du lait de malt
III-2-2-2- Préparation du substrat par gélification
III-2-2-3- Hydrolyse proprement dite
III-2-2-3-1- Dosage des sucres réducteurs formés lors de l’hydrolyse
a)-Principe
b)-Réactifs
c)-Mode opératoire
c)-1- Etablissement d’une gamme étalon
c)-2- Défécation
c)-3- Dosage proprement dit des sucres réducteurs formés
III-2-2-3-2- Optimisation de l’hydrolyse
III-2-2-3-3- Rendement d’hydrolyse
III-2-2-4- Traitements des produits d’hydrolyse
III-2-2-4-1-Centrifugation de l’hydrolysat
III-2-2-4-2-Concentration du sirop
IV- CONCLUSION