Généralités sur les tumeurs à cellules granuleuses

Historique

Décrites pour la première fois en 1854 par Weber(1) puis analysées en 1926 par Abrikossoff(2) (voir biographie en Annexe 1), les tumeurs à cellules granuleuses (TCG), ou « tumeurs d’Abrikossoff », sont des lésions ubiquitaires, le plus souvent bénignes. Elles touchent préférentiellement la langue, le tissu sous-cutané ou la sphère gynécologique.(3) L’analyse en microscopie optique des TCG est caractéristique et son association avec une étude en immunohistochimie est particulièrement informative, permettant le diagnostic positif et l’élimination des diagnostics différentiels.(3) Il existe une forme maligne, particulièrement rare, partageant certaines caractéristiques anatomo-pathologiques communes avec les TCG dites « bénignes », mais avec un potentiel d’invasion loco-régionale important et un risque de dissémination métastatique.(3,4) L’histogénèse de ces lésions est source de débat depuis leur découverte. L’hypothèse initiale formulée était celle d’une origine myogène, dérivant des cellules musculaires striées squelettiques, en raison des rapports étroits de la tumeur avec le muscle. A ce titre, la terminologie consacrée à l’époque était celle de « myoblastome à cellules granuleuses »(2) ou « rhabdomyome granulo-cellulaires ». Dès 1934, d’autres auteurs suggérèrent cependant une origine neurogène, mésenchymateuse, proposant la dénomination de « schwannome à cellules granuleuses ».(5,6) L’avènement de la microscopie électronique et de l’immunohistochimie a permis de valider cette filiation mésenchymateuse des TCG, neuroectodermique, dérivant des cellules de Schwann en dégénérescence wallérienne. Bien qu’encore actuellement débattue par certains auteurs, c’est à ce jour l’hypothèse communément admise.

Généralités sur les tumeurs à cellules granuleuses

Le diagnostic de TCG doit nous amener à considérer 3 cas de figure, quel que soit l’organe atteint, jugé sur des critères cliniques et anatomopathologiques :
– il s’agit d’une TCG bénigne.
– il s’agit d’une localisation primitive d’une TCG maligne.
– il s’agit d’une localisation secondaire (métastase) d’une TCG maligne.

Comme nous le verrons, la reconnaissance de la nature bénigne ou maligne des TCG revêt un intérêt majeur, puisque influençant directement le pronostic et la conduite à tenir thérapeutique attendue.

Les données épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques présentées dans cette section de généralités sur les TCG concernent essentiellement les lésions bénignes, de loin les plus fréquentes. Les caractéristiques et spécificités des lésions malignes, exceptionnelles de par leur fréquence, font l’objet d’une sous-section particulière.

Epidémiologie

Incidence et prévalence

La prévalence globale de l’ensemble des TCG est faible, estimée entre 0,02 et 0,03% de toutes les pathologies tumorales diagnostiquées (bénignes et malignes). (13) L’atteinte est ubiquitaire, tous les organes pouvant potentiellement être atteints. L’incidence respective pour chaque localisation est difficile à estimer, du fait d’une prévalence générale faible. D’une manière générale, les lésions superficielles sont de loin les plus fréquentes, touchant préférentiellement la peau, la langue ou le sein, les lésions profondes étant plus rares.

Facteurs de risque

Plusieurs facteurs sont associés à une fréquence plus importante des tumeurs à cellules granuleuses, quelle qu’en soit la localisation :

Age :
Tous les âges peuvent être concernés mais il existe un pic d’incidence entre la 3ème et la 5ème décennie. (42) Les formes pédiatriques et congénitales restent exceptionnelles.

Sexe :
Classiquement, les TCG sont plus fréquentes chez la femme. Plusieurs études soutiennent l’influence de facteurs hormonaux sur la genèse et/ou l’évolution de ces lésions. Ainsi, les observations de Benisch et Ipakchi rapportent chacun un diagnostic de TCG trachéale, établi respectivement au 1er et 2ème semestre de grossesse devant apparition d’une dyspnée sifflante. (43,44) Des hypothèses hormonales ont été avancées pour expliquer ce phénomène. (43,44) Pour corroborer cette probable influence des oestrogènes, citons l’étude de Dunn et al, qui met en évidence une fréquence plus importante des TCG du col utérin chez des souris traitées par oestrogènes. (45) De plus, Markovitz rapporte une diminution d’incidence des TCG de la sphère gynécologique chez des souris traitées par anti-aromatases.

Ethnie :
Les données de la littérature retrouvent une prédominance chez les sujets d’origine africaine, sans qu’il ne semble exister d’explication physiopathologique.

Pathologies sous-jacentes ou formes particulières :
Plusieurs pathologies, souvent de révélation néonatale ou infantile sont associées à une incidence plus importante de TCG, parmi lesquelles:
– Neurofibromatose (47)
– Syndromes cardio-cutanés avec lentiginose, dont le syndrome LEOPARD (Lentigines, Electrocardiogram abnormalities, Ocular hypertelorism, Pulmonary stenosis, Abnormal genitalia, growth Retardation and sensorineural Deafness) (48,49): associant TCG multiples, disséminées, multisites, (jusqu’à 124 lésions décrites chez un même individu) (50) , lentigines éparses, syndrome malformatif variable (dysmorphie faciale, cardiopathies, sténoses pulmonaires, retard de croissance…) .
– Epulis Congenital(31), correspondant à une pseudotumeur bénigne touchant spécifiquement la cavité buccale et notamment la gencive, correspondant sur le plan anatomopathologique à une TCG bénigne typique. Il s’agit d’une pathologie de révélation néonatale, dont le pronostic est bénin après exérèse complète.
– Formes familiales : Quelques rares cas de TCG héréditaires au premier degré, essentiellement cutanées ont été rapportés dans la littérature.

Présentation clinique 

A l’exclusion des rares formes malignes (cf section 2.7), les TCG sont volontiers bénignes, asymptomatiques, d’évolution indolente, découvertes de manière fortuite ou devant une complication locale avec retentissement fonctionnel.

Il n’existe habituellement pas de retentissement général. L’examen clinique est généralement peu spécifique quel que soit le site considéré, retrouvant une tuméfaction indolore ou une lésion jaunâtre voire blanchâtre de 1 à 2cm, bien limitée. Les tumeurs de plus grand diamètre peuvent prendre un aspect plus inquiétant du fait de l’adhérence fréquente aux organes de voisinage. (14) Certaines localisations peuvent cependant s’avérer sévères du fait de leur localisation avec risque de retentissement fonctionnel important, ou en raison de complications, indépendamment de tout critère de malignité. (atteinte cardiaque, laryngo-trachéale, neurologique, orbitaire, cutanée…) .

Ces lésions sont le plus souvent uniques (90% des cas) (13) mais une atteinte multifocale, concomitante dans plusieurs organes n’est pas rare, estimée entre 5 et 14% d’après l’étude de Lack, portant sur 110 patients. (15) Cette particularité semble corroborer l’hypothèse d’une origine neurale, comme on peut le voir dans d’autres pathologies à tropisme neurogène (ex : neurofibromatoses).

Diagnostic positif : données anatomopathologiques 

Description macroscopique
• Présentation générale : Il s’agit le plus souvent d’une lésion nodulaire unique, homogène et bien limitée, non encapsulée. En cas d’atteinte muqueuse, on retrouve une lésion nodulaire lisse ou polypoïde, souvent pédiculée ou plus rarement un épaississement muqueux isolé, voire une lésion plane, atone et aspécifique. Il n’existe habituellement pas d’hypervascularisation ou de zones de nécrose associée.
• Taille : Les dimensions peuvent être très variables selon les localisations, de quelques mm jusqu’à 18cm dans la littérature. (59)
• Couleur : Avant fixation, on observe une tumeur blanchâtre ou jaunâtre, plus rarement grisâtre ou rose pâle.
• Consistance : La lésion est classiquement ferme ou rénitente.
• Invasion locale : En dehors de toute considération de malignité, on note souvent un certain degré d’invasion locale (jusqu’à 40% des cas dans la série de Hernandez et al.).

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Table des matières

1. Introduction
1.1. Historique
1.2. Plan d’analyse
2. Généralités sur les tumeurs à cellules granuleuses
2.1. Epidémiologie
2.1.1. Incidence et prévalence
2.1.2. Facteurs de risque
2.2. Présentation clinique
2.3. Diagnostic positif : données anatomopathologiques
2.3.1. Description macroscopique
2.3.2. Description en microscopie optique
2.3.3. Analyse cytologique et microscopie électronique
2.3.4. Analyse en immunohistochimie
2.3.5. Analyse cytogénétique
2.3.6. Diagnostics différentiels
2.4. Examens complémentaires
2.5. Traitements
2.5.1. Abstention thérapeutique
2.5.2. Traitement chirurgical
2.5.3. Traitement endoscopique
2.6. Suivi et pronostic
2.7. Particularités des lésions malignes
2.7.1. Données épidémiologiques
2.7.2. Diagnostic positif
2.7.3. Présentation clinique
2.7.4. Modalités thérapeutiques
2.7.5. Suivi et pronostic
3. Etude multicentrique des cas de tumeurs à cellules granuleuses trachéales ou bronchiques
3.1. Objectif
3.2. Méthodologie
3.3. Résultats
3.3.1. Epidémiologie
3.3.2. Caractéristiques cliniques
3.3.3. Caractéristiques endoscopiques
3.3.4. Caractéristiques anatomopathologiques et immunohistochimiques
3.3.5. Caractéristiques radiologiques
3.3.6. Modalités de prise en charge
3.3.7. Suivi
4. Discussion
4.1 Principaux messages concernant l’atteinte thoracique et comparaison aux données de la littérature
4.1.1. Incidence des formes broncho-pulmonaires
4.1.2. Caractéristiques épidémiologiques
4.1.3. Topographie de l’atteinte endo-trachéobronchique
4.1.4. Coexistence avec un carcinome broncho-pulmonaire invasif
4.1.5. Présentation clinique
4.1.6. Caractéristiques endoscopiques
4.1.7. Caractéristiques anatomopathologiques et immunohistochimiques
4.1.8. Examens complémentaires pratiqués
4.1.9. Diagnostics différentiels
4.1.10. Modalités de prise en charge
4.1.11. Suivi
4.2. Points positifs de l’étude
4.3. Limites de l’étude
5. Conclusion et perspectives
6. Références bibliographiques
7. Annexes

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