Généralités sur les tensioactifs en solution aqueuse

Généralités sur les tensioactifs en solution aqueuse

Les tensioactifs possèdent deux propriétés physico-chimiques remarquables expliquant leur utilisation dans de très nombreux domaines, comme détergents, agents mouillants, moussants ou dispersants pour de nombreuses applications. Ils ont d’une part la propriété de s’adsorber aux interfaces provoquant un abaissement de la tension interfaciale et d’autre part la capacité de s’auto-agréger en solution, phénomène appelé micellisation .

Les grandes classes de tensioactifs

Les tensioactifs sont des composés amphiphiles, c’est-à-dire qu’ils comportent deux parties de polarité différente : une tête polaire hydrophile et une chaîne carbonée apolaire hydrophobe (Figure 2). Du fait de leur double affinité pour l’eau et les phases apolaires, ils contribuent à la diminution de la tension interfaciale et rendent possible le mélange de fluides initialement non miscibles [12].

Il existe quatre grandes familles de tensioactifs, classés selon la nature de leur tête polaire hydrophile :
– les tensioactifs cationiques : tête polaire chargée positivement (ex : sels d’ammonium quaternaire)
– les tensioactifs anioniques : tête polaire chargée négativement (ex : carboxylate, sulfate, sulfonate ou phosphate). Ces derniers sont les plus utilisés dans l’industrie.
– les tensioactifs zwitterioniques : composés de deux parties ioniques, l’une cationique et l’autre anionique (ex : bétaïnes)
– les tensioactifs non ioniques : tête polaire non chargée mais contenant des groupements hydrophiles (ex : alcool, éther, ester, amide) comportant des hétéroatomes comme l’azote ou l’oxygène [12]

Propriétés des tensioactifs 

Effet des tensioactifs sur la tension de surface et sur la tension interfaciale

Placés en solution aqueuse, les monomères de tensioactifs s’adsorbent spontanément à l’interface eau/air afin de minimiser le contact de leur partie hydrophobe avec l’eau : la partie hydrophile reste dans l’eau alors que la partie hydrophobe se retrouve dans l’air. Ce phénomène est spontané car le potentiel chimique du système diminue. Le remplacement à l’interface des molécules d’eau initialement présentes par des monomères de tensioactifs entraine une diminution de la tension de surface (eau/air), également appelée énergie de surface .

Dans le cas d’une interface liquide/liquide (par exemple eau/huile), l’équation de Gibbs ( 3 ) est appliquée dans chaque phase et une relation plus complexe est obtenue [14] mais le principe est le même. Les tensioactifs vont s’adsorber à l’interface afin de satisfaire leurs deux parties de polarité différente : les parties hydrophiles et hydrophobes iront dans les phases avec lesquelles elles ont la plus grande affinité. Un équilibre est alors créé entre interface et volume dans chaque phase.

Structures des agrégats de tensioactifs possibles en solution aqueuse 

En solution aqueuse, différentes formes d’assemblages de tensioactifs, autres que des micelles, peuvent se former dans le cas des systèmes dilués selon les conditions expérimentales (température, pH, nature du tensioactif, force ionique, concentration en tensioactifs, additifs…). Ces derniers paramètres influencent la taille, le nombre d’agrégation (nombre de monomères formant l’agrégat) ainsi que la structure des agrégats obtenus. Leur structure est le reflet des interactions entre les tensioactifs eux-mêmes en solution. Deux interactions en compétition sont à l’origine du phénomène d’agrégation des tensioactifs [17] :
– les interactions attractives hydrophobes entre les chaînes hydrocarbonées du tensioactif
– les interactions répulsives entre les têtes polaires du tensioactif de types électrostatiques (pour les tensioactifs ioniques) ou stériques (pour les non ioniques) .

La première favorise l’agrégation des tensioactifs afin d’exclure les chaînes hydrocarbonées de l’eau alors que la seconde s’y oppose : c’est la théorie des forces opposées énoncée par Tanford et al. [17]. Ainsi les forces attractives entre les chaînes hydrocarbonées tendent à diminuer l’aire occupée par les têtes polaires exposées au solvant alors que les forces répulsives entre les têtes polaires tendent à l’augmenter.

Dans le cas des systèmes plus concentrés, les structures décrites précédemment s’agrègent pour former de nouveaux arrangements géométriques organisés nommés phase de type cristal liquide (ex : phase cubique, hexagonale ou encore lamellaire) [13]. En général, les structures citées précédemment surviennent les unes après les autres dans les diagrammes de phase en variant un paramètre (par exemple la température, la force ionique ou encore l’ajout d’un co-tensioactif) à concentration donnée en tensioactifs. En augmentant la concentration en tensioactifs, on observe généralement des micelles sphériques en début du diagramme de phase puis des micelles cylindriques et finalement des bicouches ou des phases lamellaires plus complexes.

Structure des micelles (Figure 4b et c) en solution aqueuse 

Les micelles directes sont des agrégats sphéroïdaux de tensioactifs de 3 à 50 nm de diamètre environ, présentant les têtes hydrophiles dirigées vers la phase aqueuse et les parties hydrophobes à l’intérieur de la sphère. Différents types de micelles existent et sont présentés sur la Figure 6 [13] : structures sphériques (nombre d’agrégation inférieur à 100), ellipsoïdes allongées (prolate – en forme de « bâtonnets ») ou encore ellipsoïdes aplaties (oblate – en forme de « disques »). La forme la plus répandue dans la littérature est le modèle de micelles sphériques mais de nombreuses études démontrent que la structure en forme d’ellipsoïde est plus représentative de la forme réelle des micelles en solution [22,23]. La formation de micelles (? < 0.3) est favorisée par la présence d’une tête polaire volumineuse (?0 grand).

Structures en bicouches des tensioactifs en solution aqueuse 

Dans la phase des bicouches, les têtes hydrophiles du tensioactif font face à la phase aqueuse alors que les chaînes hydrophobes sont regroupées à l’intérieur de la bicouche. Une bicouche, caractérisée par son énergie élastique (propension de la bicouche à se courber localement), peut se retrouver sous différents états afin de minimiser l’énergie de courbure de l’interface. Dans les systèmes dilués, on retrouve la phase des vésicules (bicouches refermées sur elles-mêmes – forme sphérique) et la phase lamellaire étendue (bicouches infinies – structure plane) est présente dans les systèmes plus concentrés. Si on augmente suffisamment la concentration on obtient une phase L3, dite « phase éponge » (ou « structure bicontinue»).

Les vésicules sont des sphères creuses composées d’une bicouche de tensioactifs agissant comme une « membrane » séparant la solution aqueuse intérieure de la solution aqueuse à l’extérieur de la vésicule. Les vésicules sont des systèmes dynamiques avec d’importantes fluctuations temporelles de tailles et de formes. On peut obtenir différentes classes de vésicules selon leur taille et leur nombre de bicouches [25] : SUV ( « Small Unilamellar Vesicles » : < 50 nm de diamètre), LUV (« Large Unilamellar Vesicles » : entre 50 nm et 10 μm), GUV (« Giant Unilamellar Vesicles » : > 10 μm) ou encore MLV (« Multilamellar Large Vesicles »). Les vésicules unilamellaires (Figure 7) sont le plus couramment obtenues dans le cas des systèmes dilués alors que les MLV se forment dans des systèmes plus concentrés en tensioactifs [24].

Les vésicules se forment en général à partir de micelles sphériques et la transition peut être plus ou moins longue (en général de l’ordre de la milliseconde à la seconde) par la formation intermédiaire de micelles en forme d’ellipsoïdes aplaties qui vont finir par se refermer sur elles-mêmes [26]. La formation peut être spontanée ou induite par une énergie externe comme une agitation physique extérieure (ex : ultrasons à partir d’une phase lamellaire). La phase lamellaire Lα est quant à elle composée d’un empilement successif régulier de bicouches infinies planes et de couches de solvant (Figure 8). Enfin, la phase éponge L3 est une bicouche unique multi-connectée dite « bicontinue » .

En général, pour les tensioactifs ayant une forte propension à former des bicouches (soit des tensioactifs possédant une double chaîne hydrocarbonée et une tête polaire volumineuse ; ? > 0.5), on observe les transitions suivantes en augmentant la concentration en tensioactifs : vésicules unilamellaires puis vésicules multilamellaires et finalement des bicouches planes. Comme présenté dans cette partie, les tensioactifs peuvent s’adsorber à l’interface solide/liquide et la structure de la couche adsorbée à la surface solide est fortement influencée par la morphologie des agrégats de tensioactifs formés en solution.

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Table des matières

Introduction générale
Objectifs de la thèse
Chapitre 1 : Etude bibliographique
1.1. Généralités sur les tensioactifs en solution aqueuse
1.1.1. Les grandes classes de tensioactifs
1.1.2. Propriétés des tensioactifs
1.1.2.1. Effet des tensioactifs sur la tension de surface et sur la tension interfaciale
1.1.2.2. La micellisation en solution
1.1.2.3. Structures des agrégats de tensioactifs possibles en solution aqueuse
1.2. Généralités sur l’adsorption des tensioactifs à l’interface solide/liquide
1.2.1. Interactions intervenant dans le processus d’adsorption
1.2.1.1. Interactions principales associées à l’adsorption de tensioactifs
1.2.1.2. La théorie DLVO (Derjaguin, Landau, Vervey, and Overbeek)
1.2.2. Isothermes et modèles d’adsorption
1.2.3. Structure de la couche adsorbée sur la surface solide
1.2.3.1. Mécanismes d’adsorption sur une surface solide à partir d’une solution micellaire
1.2.3.2. Adsorption de tensioactifs ioniques sur une surface de charge opposée : mécanisme général
1.2.3.3. Mécanismes d’adsorption de vésicules sur une surface solide
Chapitre 2 : Caractérisation des solutions de tensioactifs
2.1. Choix du système modèle
2.1.1. Choix du tensioactif anionique modèle : AOT
2.1.2. Choix de la nature et de la concentration de la saumure
2.1.3. Préparation des solutions
2.2. Propriétés physico-chimiques des solutions de tensioactifs utilisées
2.2.1. Mesure de la Concentration Micellaire Critique (CMC)
2.2.1.1. Principe et méthode
2.2.1.2. Résultats
2.2.2. Mesure de la viscosité des solutions de tensioactifs
2.2.2.1. Méthode
2.2.2.2. Résultats
2.3. Caractérisation des agrégats de tensioactifs formés par l’AOT dans la saumure
2.3.1. Observation directe des agrégats par Cryo-Microscopie Electronique à Transmission (Cryo-MET)
2.3.1.1. Principe et méthode du Cryo-MET
2.3.1.2. Analyse des échantillons d’AOT dans la saumure
2.3.2. Caractérisation des agrégats de tensioactifs formés par l’AOT dans la saumure par interactions rayonnement/matière
2.3.2.1. Caractérisation de la structure des agrégats d’AOT formés dans la saumure à différentes échelles par MALS et SAXS [118]
2.3.2.1.1. La diffusion statique de la lumière (MALS)
2.3.2.1.2. Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS)
2.3.2.1.3. Résultats obtenus pour le MALS et pour le SAXS
2.3.2.2. La Diffusion dynamique de la Lumière (DLS)
2.3.2.2.1. Principe
2.3.2.2.2. Méthode
2.3.2.2.3. Etude de l’agrégation de l’AOT en présence de sel
2.4. Synthèse
Chapitre 3 : Caractérisation de l’adsorption de l’AOT dans la saumure sur la silice
3.1. Etude de l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice
3.1.1. Choix de la silice comme surface modèle
3.1.2. Description de la silice
3.1.3. Etat de l’art sur l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice
3.2. Mesure et caractérisation de la couche adsorbée
3.2.1. Etude de l’adsorption avec la microbalance à quartz (avec dissipation)
3.2.1.1. Principe et méthode de la microbalance à quartz (avec dissipation)
3.2.1.1.1. Principe
3.2.1.1.2. Méthode expérimentale
3.2.1.1.3. Analyse du substrat de la surface des résonateurs à quartz utilisés
3.2.1.2. Etudes préliminaires
3.2.1.2.1. Changement de la viscosité du liquide à la surface du résonateur à quartz
3.2.1.2.2. Adsorption d’une couche rigide sur la surface d’un résonateur à quartz sans variation de la viscosité du liquide
3.2.1.2.3. Influence de la viscosité des solutions tensioactives lors de la formation d’une couche rigide sur la surface d’un résonateur à quartz
3.2.1.3. Etat de l’art sur l’étude de l’adsorption de vésicules sur une surface solide au moyen d’une microbalance à quartz de type QCM-D
3.2.1.4. Résultats : étude de l’adsorption de l’AOT en milieu saumure sur la silice
3.2.1.4.1. Isothermes d’adsorption
3.2.1.4.2. Etude de l’adsorption de l’AOT en milieu saumure à une concentration fixée supérieure à la CVC
3.2.1.4.3. Discussion
3.2.2. La réflectivité des neutrons
3.2.2.1. Principe
3.2.2.2. Méthode
3.2.2.3. Résultats
3.2.2.3.1. Solutions d’AOT : C < CVC
3.2.2.3.2. Solutions d’AOT : C > CVC
3.2.2.4. Synthèse
3.2.3. Conclusion générale sur l’adsorption de l’AOT dans la saumure sur la silice à pH neutre
Conclusion générale

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