Généralités sur les régimes d’ébullition

Ce travail de thèse s’inscrit dans le cadre des études de sûreté des réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium (RNR-Na). Lors d’un accident grave provoquant la fusion partielle ou généralisée du cœur de réacteur, le combustible fondu peut entrer en contact avec le réfrigérant. Sous certaines conditions, cette interaction, communément appelée Interaction Combustible-Réfrigérant, peut être de nature explosive. On parle alors d’explosion de vapeur. Du point de vue de la sûreté nucléaire des RNR-Na, l’étude de l’interaction entre l’UO2 et le sodium est essentielle afin de prédire l’occurrence d’une explosion de vapeur ainsi que ses conséquences en termes de recriticité et d’endommagement des structures du réacteur.

On distingue plusieurs étapes lors d’une explosion de vapeur. Lorsque le combustible fondu entre en contact avec le réfrigérant, il se mélange grossièrement, donnant lieu à des fragments de l’ordre du centimètre (phase de prémélange). Si les températures mises en jeu sont suffisamment élevées, un film de vapeur isole les gouttes de combustible du liquide environnant, réduisant considérablement les transferts de chaleur. La déstabilisation de ce film, spontanée ou initiée par une perturbation extérieure, provoque l’apparition de contacts directs entre le combustible très chaud et le liquide sous-refroidi (phase de déclenchement). Ces contacts entraînent une fragmentation fine du combustible (de l’ordre de quelques centaines de microns), conduisant par là même à une vaporisation rapide et intense du liquide. Cette vaporisation engendre des ondes de pression qui se propagent et provoquent à la déstabilisation des films voisins (phase de propagation). On assiste alors à un phénomène d’escalade, où la fragmentation fine a lieu à l’échelle du mélange. Le combustible, rapidement fragmenté, cède une part importante de chaleur au liquide environnant, qui se vaporise. Cela entraîne une pressurisation du mélange, pouvant aller jusqu’à la formation d’une onde de choc (phase d’expansion).

Le déroulement d’une telle interaction dépend du scénario accidentel ainsi que de nombreux paramètres parmi lesquels on peut citer la température des matériaux en présence, la pression du système, les masses mises en jeu ainsi que le mode de mise en contact. La géométrie du système a également un effet significatif sur les transferts de chaleur, contraignant plus ou moins le confinement du mélange.

GÉNÉRALITÉS SUR LES RÉGIMES D’ÉBULLITION 

Nukiyama (1934) fut l’un des premiers à étudier l’ébullition d’un liquide au contact d’une paroi chauffante. Il a mis en évidence les différents régimes qui apparaissent lors de l’ébullition en vase de l’eau sur un fil métallique. De nombreuses expériences ont suivi pour étudier l’ébullition de différents fluides, en convection naturelle ou forcée, sur des géométries (plaque plane, sphère, cylindre) et dans des conditions de pression et de température variées. L’allure des courbes d’ébullition obtenues expérimentalement pour l’eau, fluide classique, et le sodium liquide, métal liquide, est similaire . La description qui suit est donc valable quel que soit le fluide considéré.

MISE EN ÉVIDENCE DE DEUX SOUS-RÉGIMES D’ÉBULLITION EN FILM 

La plupart des études menées sur l’ébullition en film des fluides classiques considèrent un film de vapeur stable et continu. Toutefois, des contacts liquide-solide (L-S) ont été mesurés lors de l’ébullition en film d’un liquide sur une surface chauffante. Ces contacts ont lieu localement et de manière intermittente. On peut citer les travaux de Bradfield (1966) ou ceux, plus récents, de Kikuchi (1992) et de Honda (1995), qui portent sur la mesure des contacts L-S lors de l’ébullition en film de l’eau, saturée ou sous-refroidie, autour d’une sphère ou d’un cylindre à pression atmosphérique. Des contacts L-S ont également été observés lors de l’ébullition en film du sodium sur un cylindre de tantale par L. Caldarola (FZK, 1977) mais aucun document n’a été retrouvé à ce sujet (Berthoud, 2009-a).

Il existe deux méthodes pour la mesure des contacts L-S :
– la mesure des variations de température à la surface de l’élément chauffant,
– la mesure des signaux électriques (résistance, capacitance, impédance) entre la paroi et le liquide en ébullition, préférentiellement adoptée dans les expériences.

Ces mesures permettent d’accéder à la fréquence des contacts. Les signaux électriques peuvent par ailleurs être reliés à la fraction d’aire mouillée par le liquide, dont l’évolution peut être suivie au cours de la trempe . Les premiers contacts L-S n’apparaissent qu’après une période de refroidissement de la surface en régime d’ébullition en film stable. Puis, au fur et à mesure que la température de surface diminue, la fréquence et l’intensité des contacts augmentent progressivement, jusqu’à l’effondrement du film de vapeur et le passage au régime d’ébullition de transition. La présence ou non de contacts L-S a ainsi mis en évidence l’existence de deux sous-régimes d’ébullition en film : un sous-régime stable, sans contact, et un sous-régime que l’on qualifiera d’instable, avec contacts .

INFLUENCE DES CONTACTS SUR LE TRANSFERT DE CHALEUR

Se pose alors la question de la contribution des contacts L-S aux transferts thermiques lors de l’ébullition en film et de la façon dont les paramètres de contrôle (sous-refroidissement, surchauffe, diamètre, vitesse de l’écoulement externe, pression, nature du corps chaud, …) influent sur la densité de flux de chaleur et la température minimum d’ébullition en film en régime stable et instable. Des éléments de réponse ont été apportés par Honda ((Honda, 1992) et (Honda, 1995)), qui a effectué des essais de trempe d’un fil de platine dans l’eau en convection forcée. Les courbes d’ébullition obtenues confirment l’existence des deux sous-régimes d’ébullition en film, décrits précédemment, avec la présence de deux minima locaux, notés M1 et M2, sous certaines conditions expérimentales .

EXPÉRIENCES D’ÉBULLITION EN FILM DU SODIUM 

La littérature fait état de nombreuses expériences dédiées à l’étude de l’ébullition en film de fluides classiques (eau, fréon, éthanol, …), pour des géométries variées (sphères, cylindres, plaques planes), en convection naturelle et forcée. En revanche, très peu d’expériences ont été menées pour étudier l’ébullition en film du sodium ou, de manière plus générale, des métaux liquides. La grande majorité d’entre elles sont effectuées sur des cylindres ou des plaques, et ne sont donc pas directement utilisables dans le cadre de notre étude portant sur des géométries sphériques.

Padilla (1968) a répertorié quelques-unes des expériences effectuées avec des métaux liquides, que nous citerons à titre d’exemple. En 1955, Lyon fut le premier à étudier de manière approfondie les transferts thermiques pour les métaux liquides. Il s’est intéressé à l’ébullition du mercure, du sodium, du cadmium et d’un alliage sodium-potassium sur un cylindre horizontal en acier inoxydable. Le régime d’ébullition en film a uniquement été observé pour le mercure et le cadmium. Par la suite, Bonilla et Merte ont mené des expériences en mercure sur des surfaces horizontales. En 1968, Padilla a étudié les transferts thermiques en ébullition en film du potassium sur une plaque plane horizontale. Witte (1968) a réalisé quant à lui une expérience d’ébullition du sodium en convection forcée autour d’une sphère de tantale à haute température (1375 K ≤ TS ≤ 2255 K). Le degré de sous refroidissement du sodium, compris entre 431 K et 581 K, était bien trop important pour pouvoir atteindre le régime d’ébullition en film.

À notre connaissance, seules deux expériences ont permis de mettre en évidence l’ébullition en film du sodium autour de sphères : celle de Farahat (1971) et celle de Zimmer (1991), présentées ci-après. Dans les essais de Zimmer, l’intérêt était porté sur l’analyse de l’interaction thermique entre les gouttes d’alumine et le sodium liquide. Aussi, les mesures ne nous permettent pas d’exploiter ces essais pour l’étude de l’ébullition ; elles permettent néanmoins de donner un ordre de grandeur de la température TMFB pour le système Alumine-Na, en fonction du sous-refroidissement du liquide.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Généralités sur les régimes d’ébullition
1.1. La courbe classique d’ébullition
1.2. Mise en évidence de deux sous-régimes d’ébullition en film
1.3. Influence des contacts sur le transfert de chaleur
2. Expériences d’ébullition en film du sodium
2.1. Expérience de Farahat (1971)
2.2. Expérience de Zimmer (1991)
3. Connaissances actuelles sur l’ébullition en film
3.1. Configuration du film de vapeur
3.1.1. Effet du diamètre de la sphère
3.1.2. Effet du sous-refroidissement et de la surchauffe
3.1.3. Effet de la convection forcée de l’écoulement externe
3.2. Température minimum d’ébullition en film, TMFB
3.2.1. Corrélations empiriques
3.2.2. Considérations hydrodynamiques
3.2.3. Considérations thermodynamiques
3.2.4. Conclusion
3.3. Transferts thermiques en ébullition en film
3.3.1. Généralités
3.3.2. Corrélation de Farahat (1971)
3.3.3. Modèle de Farahat & El-Halfawy (1975)
3.3.4. Corrélations du code SIMMER
3.4. Influence de différents paramètres sur TMFB et hFB
3.4.1. La surchauffe de la paroi
3.4.2. Le sous-refroidissement du liquide
3.4.3. Le diamètre de la sphère
3.4.4. La vitesse de l’écoulement environnant
3.4.5. La pression du système
3.4.6. La nature et l’état de la surface
3.5. Contacts liquide-solide en régime d’ébullition en film
4. Objectifs de la thèse
CHAPITRE 2 L’EXPÉRIENCE DE FARAHAT, L’UNIQUE EN SODIUM
1. Description de l’expérience
1.1. Dispositif expérimental
1.2. Procédure expérimentale et traitement des données
1.3. Incertitudes sur le flux de chaleur
2. Résultats de l’expérience
2.1. Courbes d’ébullition de Farahat
2.2. Influence de différents paramètres de contrôle
2.2.1. Le diamètre de la sphère (essais 24, 38 et 41 – essais 30 et 43)
2.2.2. La surchauffe initiale de la sphère (essais 24 à 29)
2.2.3. Le sous-refroidissement du sodium (essais 24, 30, 32, 33 et 36)
2.2.4. La profondeur d’immersion de la sphère (essais 35 et 36)
2.3. Commentaires
CHAPITRE 3 ANALYSE SIMPLIFIÉE DE L’ÉBULLITION EN FILM DU SODIUM
1. Démarche de l’étude
2. Ébullition en film du sodium en convection naturelle
2.1. Description du système
2.2. Hypothèses simplificatrices
2.3. Équations fondamentales du problème
2.4. Analyse d’échelles
2.4.1. Cas 1 : Fort sous-refroidissement du liquide (faible vaporisation)
2.4.2. Cas 2 : Faible sous-refroidissement du liquide (forte vaporisation)
2.4.3. Critères de sélection du cas 1 ou 2
3. Ébullition en film en convection forcée
3.1. Définition du système étudié et hypothèses simplificatrices
3.2. Équations fondamentales du problème
3.3. Analyse d’échelles
3.3.1. Cas 1 : Fort sous-refroidissement du liquide (faible vaporisation)
3.3.2. Cas 2 : Faible sous-refroidissement du liquide (forte vaporisation)
3.3.3. Critère de sélection du cas 1 ou 2
4. Application à l’expérience de Farahat
CHAPITRE 4 MODÈLE D’ÉBULLITION EN FILM STABLE DU SODIUM AUTOUR D’UNE SPHÈRE
1. Formulation mathématique du problème
1.1. Description du système étudié
1.2. Hypothèses simplificatrices
1.3. Équations fondamentales du problème
2. Mise en œuvre d’une méthode intégrale
2.1. Définition des profils de vitesse et de température
2.2. Équations intégrales
2.2.1. Intégration des équations de continuité
2.2.2. Intégration des équations de quantité de mouvement et d’énergie
2.2.3. Bilan : le système d’équations obtenu
2.3. Variables et équations adimensionnelles
3. Résolution numérique du modèle
3.1. Calcul des coefficients et de leur dérivée
3.2. Calcul des fonctions auxiliaires et de leur dérivée
3.3. Conditions initiales
3.4. Résolution du système d’équations différentielles
3.5. Calcul des flux de chaleur
4. Introduction du rayonnement à l’interface liquide-vapeur
CHAPITRE 5 RÉSULTATS DU MODÈLE DÉVELOPPÉ ET DISCUSSION
CONCLUSION

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