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Importance
Les parcs agroforestiers revêtent une importance capitale pour les populations locales. Cette importance est visible tant sur le plan écologique que socioéconomique.
Alimentation humaine
Les parcs agroforestiers jouent un rôle très important dans l’alimentation humaine. En effet, les populations locales préservent dans les champs certaines espèces essentiellement pour les fruits qu’elles produisent. Parmi ces espèces on peut citer entre autres Parkia biglobosa, Elaeis guineensis, Borassus akeassii, Cordyla pinnata, Adansonia digitata etc.
Apport de revenus
Les parcs agroforestiers constituent également une source non négligeable de produits ligneux et non ligneux, dont les ménages tirent une bonne partie de leurs revenus et qui s’avèrent appréciables pour les économies locales (Boffa, 2000). Pour les produits ligneux il s’agit essentiellement du bois de feu, le bois de service et le bois d’œuvre. Quant aux produits non ligneux, il peut s’agir des fruits, des graines, de la sève (Elaeis guineensis, Borassus akeassii). Une fois cueillis ou récoltés, ces produits sont vendus et permettent aux ménages d’avoir des revenus qui leur permettent de subvenir à leurs besoins.
Production de fourrage
La production de fourrage est aussi une des fonctions essentielles du parc agroforestier. En effet, certaines espèces sont très appréciées par le bétail. Il s’agit de Faidherbia albida qui est connu pour ses feuilles et ses gousses.
Pharmacopée
Les arbres qui sont conservés dans les champs ont aussi des valeurs phytopharmaceutiques bien connues des paysans. Les différentes parties (inflorescence, fruit, feuilles, écorce, racines) de l’arbre sont susceptibles d’être utilisées. Ces usages sont fonction des espèces.
Protection et restauration de la fertilité des sols
Le rôle de l’arbre dans la protection et la restauration de la fertilité du sol n’est plus à démontrer. En effet, certaines espèces de par leur litière et leurs racines contribuent non seulement à protéger le sol mais aussi à maintenir ou augmenter son niveau de fertilité.
Généralités sur Parkia biglobosa
Taxonomie et description
Parkia biglobosa est une Leguminosae de la sous famille des Mimosoideae et de la tribu des Mimosae. Il appartient au genre Parkia qui compte environ trente (30) espèces dont seulement trois (3) sont observées en Afrique continentale (P. biglobosa (Jacq) Benth., P. bicolor A. Chev. et P. filicoidea Welw.ex Oliv.), et une quatrième à Madagascar (P. madagascariensis R.Viguier) (Ouédrago, 1995 ; Ayihouenou et al., 2016). Selon Baumer (1995), les divers Parkia sont de grands arbres faciles à reconnaître par leurs belles inflorescences en boules rouges, roses ou oranges suspendues à l’extrémité de longs pédoncules, et par leurs grappes de longs légumes linéaires suspendus à un réceptacle.
Parkia biglobosa est une espèce à feuilles caduques pérennes, typique des pars agroforestiers, avec une hauteur allant de 7 à 20 m. Il peut cependant atteindre les 30 m (Ayihouenou et al., 2016). Son fût est généralement droit, robuste, et cylindrique, pouvant mesurer jusqu’à 160 cm de diamètre et est souvent ramifie à faible hauteur. Le tronc est recouvert d’une écorce gris-cendre à gris brun souvent noirâtre, profondément striée ; ce qui donne un aspect écailleux, en plaquettes plus ou moins quadrangulaires à l’arbre adulte qui résiste aux feux de brousse (Ouédrago, 1995). Les feuilles bipennées alternes avec des rachis longs de 20 à 40 cm comprennent 6 à 18 paires de pennes, comprenant 13 à 60 paires de foliolules, de 0,5 à 1,5 cm de largeur et de 1,5 à 2 cm de longueur, à sommet arrondi et base asymétrique, présentant 3 nervures sur la face supérieure et serrées les unes contre les autres. Les foliolules sont glabres, seuls les bords sont finement pubescents. Les inflorescences en larges capitules sphériques de 4,5 à 7 cm de longueur et 3,5 à 6 cm de diamètre, biglobose mais avec une partie distale beaucoup plus large, pendent à l’extrémité de longs pédoncules de 10 à 35 cm de long. Les fleurs étroites rouges, gamopétales, hermaphrodites, avec des lobes de la corolle petits (1 à 3 cm de longueur), ne dépassent pas de 1/3 à 1/4 de sa longueur totale. Les fruits sont de longues gousses brunâtres glabres, légèrement aplaties, plus ou moins linéaires de 12 à 30 cm de longueur et 1,5 à 2 cm et 1,5 à 2 cm de largeur pendent à l’extrémité de longs pédoncules. Les graines ovoïdes, jusqu’à 12 x 8-10 x 4,5 mm, de couleur brunâtre à noirâtre, à tégument dur, lisse avec pleurogramme, sont contenues dans une pulpe farineuse jaunâtre, sucrée, comestible. Il est possible de compter jusqu’à 23 graines, tapissant toute la cavité de la gousse.
Répartition et Écologie
Le genre Parkia a une répartition pantropicale mais seulement trois (3) des trente (30) espèces que compte le genre sont observées en Afrique continentale, et une quatrième à Madagascar (Sina, 2006 ; Ayihouenou et al., 2016). Parkia biglobosa se trouve dans les savanes arborées de la région soudanienne et dans les parcs agroforestiers des savanes soudaniennes africaines. Son aire de répartition couvre les savanes soudanaises et guinéennes et s’étend depuis le Sénégal à l’ouest jusqu’en Ouganda à l’est (Sina, 2006 ; Dotchamou et al., 2016). Au Sénégal, P. biglobosa est retrouvé surtout dans les terres sablonneuses. Il est répandu dans toute la région soudanienne et dans les sols les plus divers : sablonneux (Sine, Cayor), berges (Saloum), ferrugineux (Tambacounda), carapaces latéritiques (Niokolo Koba) ; il est également présent dans les forêts sèches du Sénégal oriental et de la Casamance (Fortin et al., 2000).
Il peut se développer sous des conditions climatiques extrêmement variées, dans des milieux où la pluviométrie annuelle est comprise entre 600 et 1 500 mm et où la saison sèche dure entre cinq et sept mois. On le trouve dans des habitats naturels et semi-naturels comme les savanes et les forêts claires, parfois sur des pentes rocheuses, des crêtes pierreuses ou des collines gréseuses. Il aime les sols profonds.
L’aire de répartition de Parkia biglobosa jusqu’à la limite sud de l’écozone du Sahel le long de l’isohyète des 600 mm. Elle s’étend depuis la côte occidentale de l’Afrique jusqu’au Soudan à travers dix-neuf pays : Sénégal, Gambie, Guinée-Bissau, Guinée, Sierra-Léone, Mali, Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Ghana, Togo, Bénin, Niger, Nigéria, Cameroun, Tchad, République centrafricaine, RDC ex Zaïre, Soudan et Ouganda.
Ethnobotanique
Parkia biglobosa est une espèce ligneux des parcs arborés, une espèce alimentaire dont l’importance est bien reconnue tant au niveau régional qu’international (Ouédraogo, 1995). Il rend beaucoup de services à une grande partie de la population rurale, le plus souvent, comme principale source de revenus et moyen efficace de lutte contre la pauvreté (Gutierrez, 2000 ; Goudiaby, 2013 ; (Koura et al., 2013). Le néré est une légumineuse et contribue ainsi à la restauration et à l’amélioration de la fertilité des sols grâce à sa capacité de fixation de l’azote (Dupriez et De Leener, 1993 cités par (Gnangle et al., 2010). Ainsi, de nombreux usages sont faits à partir des différentes parties de l’arbre, allant du fruit aux racines en passant par les feuilles, les branches, le tronc et l’écorce. Ceux-ci peuvent être regroupés en différentes catégories (alimentation, pharmacopée, pâturage, énergie, etc.).
Le fruit
Les fruits de Parkia biglobosa, en forme de gousse, sont consommés non seulement pour leur pulpe farineuse et sucrée, mais aussi et surtout pour les graines qui, fermentées, fournissent un condiment utilisé dans la cuisine africaine (Koura et al., 2014). Trois sous-produits sont donc tirés du fruit de P. biglobosa. Il s’agit de la farine ou pulpe jaune, les graines et la gousse.
La pulpe jaune qui se trouve dans la gousse est beaucoup utilisée dans la consommation humaine. Elle est agréablement parfumée, sucrée et acidulée (Berhaut, 1971) et très riche en saccharose, constituant ainsi un excellent aliment énergétique (Gutierrez et al., 2000). Elle est souvent consommée en période de soudure par les populations rurales (Gutierrez et al., 2000). Elle se consomme à même la gousse ou bien délayée dans de l’eau. Selon (Goudiaby, 2013), la pulpe jaunâtre du fruit est considérée par certains paysans comme aliment de base pendant les travaux champêtres pour compléter la ration alimentaire de la journée. L’auteur ajoute que pour ces paysans, le fruit est réservé au repas du midi durant les journées de travail champêtre en terre ferme, y compris durant les travaux de labour et de repiquage du riz de vallées ; c’est un repas de transition qui est pris en attendant le retour à la maison où seront pris en famille les autres repas à base de céréales (riz, mil, sorgho, maïs, entre autres). En pharmacopée, la farine est utilisée pour traiter certaines maladies telles que la fièvre jaune, l’ictère, le rachitisme, l’anorexie, la constipation (Potel, 2002).
Les graines du P. biglobosa sont riches en glucides, protides et lipides constituant ainsi un excellent aliment énergétique (Buisson, 1965 ; Djakpo, 2005) cités par (Koura et al., 2013). Dans l’actuelle commune de Mangagoulack, au sud du Sénégal, les graines sont moulées puis associées aux feuilles du Philoxerus vermicularis et aux fruits de l’Avicennia nitida pour donner un plat local très prisé en période de soudure, surtout par les ménages à faibles revenus (Goudiaby, 2013a). Amère et tonique, la graine est aussi utilisée, mais plus rarement, comme succédané de café connu sous l’appellation de « café du Soudan » (Berhaut, 1971) et Daziel, 1937 cité par (Gutierrez et al., 2000) et aurait des propriétés aphrodisiaques (Berhaut, 1971). Les graines du P. biglobosa peuvent être transformées par un processus de fermentation en un sous-produit qui est utilisé comme complément alimentaire dans les sauces. Ce sous-produit est connu sous le nom de « afitin » au Bénin, « nététou » au Sénégal, « soumbala » au Mali, au Burkina Faso ou en Guinée, et encore « iru » ou « dadawa » au Nigéria (Gutierrez et al., 2000). Ces condiments de par leurs vertus thérapeutiques seraient un régulateur de la tension artérielle, ce qui favorise leur consommation de plus en plus croissante (Gutierrez et al., 2000). Selon Bonnah et al. (1998), le décocté des graines séchées de P. biglobosa est indiqué dans le traitement de l’hypertension artérielle et les graines sont également indiquées dans d’autres circonstances, comme dans la constipation et dans l’induction de l’avortement.
Les gousses ou coque du P. biglobosa font aussi l’objet de plusieurs utilisations. Selon (Berhaut, 1971) les gousses auraient la propriété de teindre en bleu. En effet, on le mêle à l’indigo pour donner plus de lustre à l’étoffe colorée. Elles sont brûlées pour donner un produit qui sert à augmenter la force du tabac. Bien cuites, elles servent à noircir les poteries. La gousse est parfois employée avec l’écorce de l’arbre comme ichtyotoxique (Berhaut, 1971 ; Gutierrez et al., 2000). Selon (Goudiaby, 2013), la coque du fruit de P. biglobosa aide le paysan à réduire les dépenses d’entretien de son habitat, à augmenter ses surfaces cultivables grâce à la récupération de terres salées, à améliorer son cadre de vie et son hygiène corporelle, tout en générant un revenu monétaire aux ménages avec la vente du savon traditionnel. En effet, le précipité issu du contact entre la coque et l’eau de pluie protégerait les cases traditionnelles faites en paille de Pobeguinea arrecta appelée « mugit » en diola et les clôtures en bois contre les attaques des termites. Ce même précipité permettrait également d’éliminer les mauvaises herbes. Les coques sont aussi épandues dans les casiers rizicoles en début d’hivernage pour permettre aux paysans de récupérer les terres salées par drainage au moment du repiquage du riz. La poudre ou cosse tirée de la gousse du fruit de P. biglobosa est aussi utilisée contre Striga hermonthica (Del) Benth (plante parasite des céréales) a un effet bénéfique sur les propriétés agrochimiques du sol (Kambou et al., 2000). Selon Aguwa et Okafor (2012) cités par Ahouansou et al. (2017) la cosse de la gousse est valorisée pour améliorer les caractéristiques physiques des briques de construction.
Les feuilles
Les feuilles du P. biglobosa sont utilisées dans plusieurs domaines. En médecine traditionnelle, elles entrent dans le traitement des états fébriles et des bronchites (Fortin et al., 2000) et sont utilisées pour faire disparaître rapidement les boutons de fièvre (Berhaut, 1971). Selon le même auteur, avec les feuilles et l’écorce, on prépare une lotion pour les maux des yeux et des cataplasmes et des massages de feuilles pilées sont employés pour le traitement externe des bronchites. Par ailleurs, les folioluIes, légèrement grillées, puis écrasées, sont appliquées sur les plaies par brûlure (Berhaut, 1971 ; Potel, 2002). Les feuilles sont également utilisées pour traiter la coqueluche, l’ascaridiose, les hémorroïdes, le pian, le rhume. Les feuilles du P. biglobosa également interviennent dans tous les rituels qui marquent les différentes étapes de la vie d’un individu dans la société (Ouédraogo, 1995). En effet, lorsque le nouveau-né, à la naissance ne donne pas signe de vie, les accoucheuses utilisent un petit fouet confectionné à partir de feuilles de Néré pour le réanimer. Chez les Gourounsi de la Sissili et du Nahouri et en pays bissa, les feuilles servent à confectionner des cache-sexe qui sont portés par les initiés et les masques lors des cérémonies et avec la désapprobation des cérémonies d’excision, cet usage tend du même coup à disparaître. De même, chez les Gourma et les Moba du Togo, le cordon qui relie les deux valves de l’exocarpe est utilisé dans la confection des ceintures des cache-sexe des femmes excisées ainsi que des cache-seins et des coiffures des femmes durant leur veuvage (Ouédraogo et Djagba, 1991 cités par Ouédraogo, 1995). L’auteur ajoute que la poudre mouillée des feuilles pilées est utilisée pour enduire les têtes rasées des membres de la famille du défunt, surtout lorsque celui-ci était une personne âgée, afin de les protéger contre les mauvais esprits. Les épouses du défunt, dans le Houet, s’entourent la taille de feuilles de Néré confectionnées sous forme de ceinture pour implorer le pardon du mari pour toutes les offenses qu’elles auraient pu lui faire de son vivant. Dans le Houet et la Comoé au Burkina Faso, on entoure la canne du défunt de feuilles que l’on dépose près du corps dans la tombe. Au Togo, les feuilles servent également à fabriquer des coussinets pour le transport des morts dans la région des savanes notamment chez les ethnies Gourma et Moba. Enfin la décoction des feuilles est utilisée dans le Houet comme une eau de toilette ayant des propriétés de protection contre les esprits de mal.
Le tronc et les branches
Le tronc et les branches du P. biglobosa sont aussi utilisés. Selon (Goudiaby, 2013) ils sont exclusivement utilisés pour le bois de chauffe.
L’écorce
L’écorce du néré est utilisée pour soigner les abcès dentaires, ictère, lèpre, morsures de serpents, oreillons, pneumonie, ulcères phagédéniques (Potel, 2002). Selon (Berhaut, 1971), l’écorce infusée dans une bonne tisane à prendre après la rougeole et la petite vérole et la vapeur de la décoction de l’écorce en inhalations calme le mal de dents. L’extrait aqueux de l’écorce (EAPB) induit, chez le lapin, une hypotension dose dépendante, permettant de dire que cet extrait contient des principes actifs de type hypotenseur (Kassi et al., 2008) alors que selon Kassebné (1989) cité par Bonnah et al. (1998), avec l’extrait éthanolique de l’écorce de tronc de « néré », qui est également utilisée dans le traitement de l’hypertension. Selon Fortin et al. (2000), l’écorce additionnée au jus de citron est utilisée dans le traitement des plaies et des ulcères.
Les racines
Les racines du P. biblobosa sont utilisées dans la pharmacopée. Selon Kerharo et Adam (1974) cités par Gutierrez et al. (2000) ; Kerharo (1974) cité par Fortin et al. (2000) ; Potel (2002), elles sont utilisées pour le traitement de certaines maladies telles que les bronchites, la lèpre, les trachéites, et les maladies vénériennes.
Importance socioéconomique
Parkia biglobosa est l’une des espèces d’intérêt socio-économique les plus valorisées par les populations locales. C’est une importante source de revenus pour les populations locales qui font la commercialisation de ses fruits (Gutierrez, 2000). Selon (Ouédraogo, 1995), cette importance du Néré dans la vie du paysan lui a valu son intégration complète, depuis des temps reculés, dans le système de production agrosylvo-pastoral. Sur le plan économiques, la vente des graines du néré permet aux paysans d’avoir des revenus leurs permettant de subvenir à leurs besoins. Selon Goudiaby (2013), la vente des fruits sur le marché local ou national à des prix variant entre 7 500 et 10 000 FCFA le contenu d’une bassine estimée à 30 kg, soit 250 à 350 FCFA le kilogramme, offre des opportunités aux ménages ruraux de se procurer des revenus monétaires pouvant améliorer leurs conditions de vie.
Aspects écologiques
Parkia biglobosa est une espèce des parcs arborés qui rend beaucoup de services environnementaux notamment dans la protection et amélioration des sols en vue de l’augmentation des rendements (Gutierrez et al., 2000 ; Dotchamou et al., 2016). Par contre, selon Ouédraogo (1995), le néré, par l’ombre produite par sa cime étalée, entraîne un effet dépressif sur certaines cultures annuelles. Cependant, les paysans ont développé des pratiques culturales consistant à faire des tailles appropriées de l’arbre, pour tirer le meilleur profit de l’interaction arbre/cultures et l’intégrer dans leur système de production.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Présentation de la zone d’étude
La Basse Casamance est située dans la partie méridionale, au sud-ouest du Sénégal et correspond à la région administrative de Ziguinchor. Elle est limitée à l’est par la région de Sédhiou, à l’ouest par l’Océan Atlantique, au nord par la Gambie et au sud par la Guinée Bissau. Elle couvre une superficie de 7 339 km² soit 3,73% du territoire national. Elle comprend les départements de Ziguinchor, Oussouye et Bignona. C’est dans ce dernier que sont localisés nos villages d’études. Il s’agit de Kagnobon dans la commune de Diégoune et Mangagoulack dans la commune de Mangagoulack. Ces deux villages appartiennent à la province du « Blouf » dans l’arrondissement de Tendouck.
Le village de Kagnobon se trouve dans la commune de Diégoune. Cette dernière est limitée au nord par les communes de Djinaky et Suelle, au sud par la commune de Balinghor, à l’ouest par celles de Thionck-Essyl et de Kartiack et à l’est par la commune de Tenghory. Elle couvre une superficie d’environ120 km2 dont 75% sont destinée à l’agriculture pluviale. Selon les projections de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) de 2013, la population de la commune compterait 8 771 habitants en 2018.
Le village de Mangagoulack quant à lui, se trouve dans la commune de Mangagoulack. Celle-ci est située au sud-est de l’arrondissement de Tendouck. Elle est limitée au nord par les communes de Mlomp et de Diégoune, au sud par le fleuve Casamance à l’ouest par le littorale du fleuve Casamance et à l’est par les Communes de Balinghore et Niamone. Les projections de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) de 2013 font état d’une population qui compterait 9 899 habitants en 2018.
Le climat
Le climat de la Basse Casamance est habituellement considéré comme étant de type tropical sub-guinéen. Il est caractérisé par l’alternance de deux saisons bien différenciées : une saison sèche qui va de novembre à mai (7 mois) et une saison pluvieuse qui va de juin à octobre (5 mois) avec un maximum diluvien en août. Comme dans la plupart des pays sahéliens, la majorité des précipitations reçues en une seule saison de pluies est centrée autour du mois d’août (Ceillier, 2015). Les données pluviométriques de la station de Ziguinchor obtenues à l’Agence Nationale de l’Aviation Civile et de la Météorologie (ANACIM) ont permis de faire une situation de l’évolution du climat au cours des trente (30) dernières années (figure 3) avec une moyenne de 1352,64 mm. L’analyse de cette figure permet de noter deux périodes bien distinctes. Une période déficitaire de façon générale qui va de 1988 à 2004, marquée par des années pluvieuses 1991 (1550,2 mm), 1993 (1481,7 mm), 1999 (1946,1 mm) et 2001 (1368,6 mm). L’année la plus déficitaire est 2002 avec 811,7 mm et 1999 est l’année la plus humide avec 1946,1 mm. La deuxième période va de 2005 à 2018. Au cours de cette période, seules les années 2007, 2011 et 2018 sont en dessous de la moyenne. 2007 étant l’année la plus déficitaire avec 918,7 mm. L’année la plus pluvieuse est 2008 avec 1732,7 mm.
Le régime thermique de la région se caractérise par une température moyenne annuelle d’environ 27°C. La moyenne mensuelle maximale à Ziguinchor (37°C) se produit en avril, et la minimale (15,50°C) en janvier. De janvier à juin, les températures dépassent souvent 35°C pendant la journée et tombent en dessous de 20°C la nuit entre décembre et avril.
En ce qui concerne les vents, on rencontre dans la région de Ziguinchor des vents chauds et secs (harmattan) de secteur nord-est de novembre à mai et des vents chauds et humides (mousson) de secteur sud-ouest de mai à novembre.
La durée de l’insolation est relativement uniforme et reste importante toute l’année avec une légère baisse en hivernage due au couvert nuageux.
Les données de la pluviométrie et de la température de l’année 2018 de la station météorologique obtenues à l’ANACIM ont permis de tracer le diagramme ombrothermique de la région de Ziguinchor.
La lecture de ce diagramme permet de noter deux périodes. Une première période qui va de novembre à mai où la température est au-dessus (P<2T) et une seconde période qui va de juin à octobre pendant laquelle la pluviométrie est au-dessus de la température (P>2T). Cette dernière constitue la période la plus humide de l’année.
La végétation
La région subit l’influence du climat sub-guinéen, favorisant ainsi une forte pluviométrie par rapport aux régions centre et nord du pays. Le domaine forestier est constitué par des forêts denses sèches et des forêts galeries localisées principalement dans la partie sud. Selon Guèye (2000), la végétation de la Basse Casamance est de type forêt dense sèche dans sa majeure partie. Elle est caractérisée par des espèces sub-guinéennes dont les plus représentatives sont Khaya senegalensis (Caïlcédrat), Afzelia africana (Linké), Parinari excelsa (Mampato), Ceiba pentandra (Fromager), Chlorophora regia (Iroko), Antiaris africana (Tomboiro), Detarium senegalense (Detah) et Erythrophleum suaveolens (Tali). Dans l’estuaire, la mangrove à Rhizophora et à Avicennia prend le relais sur une superficie d’environ 100 000 ha. La végétation y est également en régression depuis au moins deux décennies, sous l’effet des défrichements, des coupes anarchiques, des feux de brousse et de la sécheresse (Guèye, 2000).
L’hydrographie
Le réseau hydrographique de la région est principalement formé du fleuve Casamance (fleuve à régime semi-permanent dont l’écoulement dure de juin à mars). Ce fleuve reçoit le Soungrougrou, un affluent de 140 km, et les marigots de Guidel, Kamobeul et Bignona. La superficie de bassin drainée est d’environ 20 150 km² comprenant les grands sous-bassins (Baïla : 1 645 km², Bignona : 750 km², Kamobeul : 700 km², Guidel : 130 km² et Agnack : 133 km²) avec des volumes très variables de 60 à 280 millions de m3/an. Le fleuve Casamance, long de 350 km, est souvent bordé de mangroves et envahi par les eaux marines jusqu’à 200 km de son embouchure (Diana Malari/Sédhiou) où se déversent des volumes très variables : 60 à 280 millions de m3 d’eau par an.
Les activités socio-économiques
De par sa richesse en ressources forestières, sa production agricole, son potentiel en matière d’élevage et de tourisme, la région de Ziguinchor dispose de fortes potentialités économiques favorables à son émergence (SRSD/ANSD, 2017).
Matériel de terrain
Un ensemble de matériel a été utilisé pour mener à bien cette étude. Dans le cadre de l’inventaire, des fiches ont été utilisées pour la prise de note, un GPS (Global Positionning System) (GPS Essentials) pour géoréférencer les champs, un ruban métrique de 20 m pour les mesures de distance, de circonférence à 1,30 m et un dendromètre/Blum-Leiss pour l’estimation des hauteurs des individus. Pour l’identification et la détermination des autres espèces ligneuses présentes dans le parc à P. biglobosa, les clés de détermination telles que la flore du Sénégal de (Berhaut, 1967) et Arbres, arbustes et lianes des zones sèches d’Afrique de l’ouest de (Arbonier, 2000) ont été utilisées. Les espèces non identifiées sur place sont collectées à l’aide de presse de collecte pour constituer un herbier. Enfin, un appareil photo numérique reflex a servi pour les prises de vues.
Méthodes
Revue bibliographique
La revue bibliographique a permis de rassembler des données secondaires ayant trait à notre thématique de recherche. Il s’agit d’exploiter l’ensemble des documents (rapports, livres, mémoires, thèses, publications scientifiques, monographies, etc.) disponibles en ligne (internet) mais également dans des bibliothèques universitaires (UCAD ; UASZ ; ISFAR ; ENSA) et des structures de recherches (ISRA/CNRF, IRD) concernées directement ou indirectement par cette thématique. Une fiche de lecture a été conçue à cet effet, contenant l’essentiel des idées qui sont retenues. Cette phase de l’étude a permis non seulement de faire l’état des connaissances et de renforcer nos analyses et commentaires mais également, de mieux comprendre la problématique et d’accéder aux méthodes consacrées à l’étude des parcs agroforestiers. Elle s’est faite tout au long de l’étude.
Relevés de végétation
La caractérisation du parc agroforestier à P. biglobosa a été effectuée sur la base de relevés de végétation dans les deux sites visés par cette étude. Elle a permis de connaître l’ensemble des paramètres floristiques et structuraux mais aussi, de faire des observations directes sur l’état du parc. Pour les paramètres floristiques et structuraux, il s’est agi de dresser la liste des espèces ligneuses présentes et de mesurer les paramètres dendrométriques tels que la densité, la hauteur totale des individus, la circonférence du tronc pour les individus dont la circonférence à 1,30 m est supérieure ou égale à 15 cm et le diamètre croisé du houppier. Les individus dont la circonférence du tronc à hauteur de poitrine est inférieure à 15 cm sont considérés comme de la régénération naturelle. Les individus morts ont également été pris en compte. Les observations quant à elles ont porté sur l’état du parc et ont permis de compléter l’inventaire en ce qui concerne les effets des activités anthropiques sur les individus et la régénération naturelle. Ces observations portaient essentiellement sur les coupes, les écorçages, les passages de feux, les prélèvements de racines, les élagages, le pâturage, etc.
Une mission exploratoire effectuée dans les deux localités a permis l’identification et le choix des sites à inventorier. Les principaux critères qui ont guidé le choix de ces sites sont la présence du parc et l’abondance des individus de P. biglobosa. Une fois que les champs ont été identifiés, le principe consiste à prendre un ensemble de points coordonnées de façon à faire le tour complet des champs. Au niveau de ces zones, les champs sont délimités par des digues. La délimitation de ces champs a été faite à l’aide de l’application GPS Essentials par la prise de coordonnées nous permettant ainsi de faire une cartographie des sites et de connaître la superficie inventoriée à l’aide du logiciel Arc Gis 10.5. Ainsi, trois sites ont été identifiés dont deux à Kagnobon (« Tabene » et « Bafembe »)1 et un à Mangagoulack. Le site de « Tabende » couvre une superficie de 4 ha. Il est situé au nord, au sud et à l’est par des jachères et à l’ouest par des rizières et un bras du marigot de Baïla. Les sites de « Bafembe » et de Mangagoulack couvrent des superficies respectives de 11 ha et 3 ha et sont tous entourés de jachères.
Un inventaire systématique a été effectué sur chaque site avec la méthode du « Plus Proche Individu » (Niang, 2001 ; Diatta et al., 2009 ; Diatta, 2013 ; Faye, 2013). Cette méthode consiste à commencer l’inventaire à partir d’un individu choisi au hasard dans les champs et de poursuivre vers l’individu le plus proche quelle que soit la direction. Pour ce faire, chaque site a été divisé en bandes dans lesquelles l’inventaire a été fait. Pour chaque individu, après identification, nous avons procédé à la mesure des paramètres de tous les individus présents dans le champ et à la prise de coordonnées géographiques. En plus de l’avantage de permettre de calculer la densité réelle des individus inventoriés, cette méthode a permis de voir, l’espacement des individus de P. biglobosa et des autres espèces dans les champs.
Pour les espèces qui n’ont pas pu être identifiées sur place, un herbier a été constitué et les échantillons ont été déterminés à l’herbier du Département de Biologie Végétale de la Faculté des Sciences et Techniques de l’UCAD de Dakar.
Enquêtes ethnobotaniques et socio-économiques
Les enquêtes ethnobotaniques et socio-économiques ont été effectuées auprès des populations locales des deux villages. Elles ont pour objectifs de mettre en exergue les modes d’exploitation, les biens et les services fournis par le parc à P. biglobosa. Cette phase de l’étude repose essentiellement sur l’observation directe sur le terrain et des enquêtes individuelles. Ces dernières ont été faites à travers des entretiens structurés à l’aide d’un questionnaire et des entretiens semi-structurés à l’aide d’un guide d’entretien. Le ménage a été retenu comme unité d’observation et les chefs de ménage ont été essentiellement ciblés. En cas d’absence, le chef de ménage est remplacé par son représentant direct qui peut être son épouse ou son fils. Compte tenu du temps et des moyens impartis pour ce travail, le taux de sondage a été fixé à 10%. Ainsi, le nombre de ménages enquêtés (NME) est fonction du nombre de ménages total (NMT) et du taux de sondage (TS) fixé suivant la formule : =NMT×TS
Le choix des ménages à enquêter s’est fait sur la base d’un tirage aléatoire simple sans remise à l’aide de la liste des ménages trouvée dans le cahier des rôles de chaque chef de village.
Pour se faire, les ménages ont été numérotés de 1 à n sur des bouts de papier, mis dans un sachet et nous avons demandé à un enfant de faire le tirage. 49 ménages au total ont été enquêtés dont 39 à Kagnobon et 10 à Mangagoulack (voir tableau 1).
L’objectif du questionnaire est de collecter des données quantitatives visant à connaître l’importance socioéconomique et ethnobotanique du P. biglobosa dans les deux villages. Les principaux thèmes abordés sont : la caractérisation des ménages, la caractérisation des produits tirés du P. biglobosa et à leurs usages ethnobotanique, l’importance socioéconomique du P. biglobosa, la tendance évolutive de la population de P. biglobosa et à la perception paysanne du parc agroforestier de façon générale.
Le guide d’entretien, quant à lui, a visé essentiellement des personnes ressources telles que les responsables du service des Eaux, Forêts, Chasses et de la Conservation des Sols, des autorités administratives comme le chef de village, les chefs coutumiers et les tradipraticiens. Les points abordés à ce niveau sont relatifs à la collecte des Produits Forestiers Non Ligneux (PNFL) de façon générale et du P. biglobosa en particulier, à l’organisation de la commercialisation (Eaux et Forêts), aux différents usages médicinaux des différents produits tirés du P. biglobosa (chefs coutumiers et tradipraticiens) et à la dynamique du parc à P. biglobosa.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. Contexte justificatif
2. Problématique
3. Objectifs de l’étude
CHAPITRE 1 : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1. Généralités sur les parcs agroforestiers
1.1.1. Définition
1.1.2. Typologie
1.1.3. Importance
1.1.3.1. Alimentation humaine
1.1.3.2. Apport de revenus
1.1.3.3. Production de fourrage
1.1.3.4. Pharmacopée
1.1.3.5. Protection et restauration de la fertilité des sols
1.2. Généralités sur Parkia biglobosa
1.2.1. Taxonomie et description
1.2.2. Répartition et Écologie
1.3. Ethnobotanique
1.3.1. Le fruit
1.3.2. Les feuilles
1.3.3. Le tronc et les branches
1.3.4. L’écorce
1.3.5. Les racines
1.4. Importance socioéconomique
1.5. Aspects écologiques
CHAPITRE 2 : MATÉRIEL ET MÉTHODES
2.1. Présentation de la zone d’étude
2.1.1. Le climat
2.1.2. La végétation
2.1.3. L’hydrographie
2.1.4. Les activités socio-économiques
2.2. Matériel de terrain
2.3. Méthodes
2.3.1. Revue bibliographique
2.3.2. Relevés de végétation
2.3.3. Enquêtes ethnobotaniques et socio-économiques
2.3.4. Traitement et analyse des données
CHAPITRE 3 : RÉSULTATS ET DISCUSSION
3.1. Résultats
3.1.1. Composition de la flore du parc agroforestier à Parkia biglobosa
3.1.1.1. Site de « Tabende »
3.1.1.2. Site de « Bafembe »
3.1.1.3. Site de Mangagoulack
3.1.2. Diversité, densité et recouvrement de la végétation ligneuse du parc agroforestier à P. biglobosa
3.1.3. Structures des peuplements
3.1.3.1. Structure horizontale
3.1.3.2. Structure verticale
3.1.4. Caractérisation des produits tirés de la cueillette du P. biglobosa
3.1.4.1. Produits issus de la cueillette du P. biglobosa
3.1.4.2. Modes et période de cueillette des produits du P. biglobosa
3.1.4.3. Prise en compte du genre dans la cueillette des produits du P. biglobosa
3.1.4.4. Usages ethnobotaniques des produits du P. biglobosa
3.1.5. Mode et pratiques de gestion du parc agroforestier à Parkia biglobosa
3.1.5.1. Foncier de l’arbre
3.1.5.2. Existence de conflits
3.1.5.3. Types de sanctions
3.1.5.4. Les techniques sylvicoles du P. biglobosa
3.1.5.5. Activités de pérennisation du parc à P. biglobosa
3.1.6. Activités socioéconomiques menées dans le parc à P. biglobosa
3.1.6.1. Agriculture et élevage
3.1.6.2. La cueillette du fruit
3.1.6.3. Organisation de la vente
3.1.6.4. Revenus tirés des produits de cueillette
3.1.6.5. Utilisation des revenus
3.1.7. Tendance évolutive de la population et de la production de P. biglobosa
3.1.7.1. Tendance évolutive de la population de P. biglobosa
3.1.7.2. Évolutive de la récolte fruitière
3.1.8. Perception du parc agroforestier par la population locale
3.1.8.1. Importance agroécologique d’arbre
3.1.8.2. Importance du P. biglobosa dans le champ
3.1.8.3. Préférence par rapport aux fruitiers sauvages
3.2. Discussion
3.2.1. Caractérisation du parc agroforestier à P. biglobosa
3.2.2. Caractérisation et usages ethnobotaniques des produits tirés du P. biglobosa
3.2.3. Pratiques et mode de gestion du parc à P. biglobosa
3.2.4. Contribution dans le revenu des ménages
3.2.5. Interaction entre P. biglobosa et les cultures
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
Bibliographie
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