L’alimentation est supposée apporter au corps humain tous les nutriments nécessaires à une croissance et un développement parfait. Elle doit apporter des vitamines, des macroéléments, des microéléments et de l’énergie qui vont contribuer au maintien de l’homéostasie. Les oligoéléments présents à des taux infimes sont tout aussi importants que les macroéléments (magnésium, potassium, calcium, soufre, chlore, sodium) présents à des concentrations beaucoup plus importantes. L’utilisation des oligoéléments remonte à l’Antiquité, bien avant l’apparition de l’allopathie. En effet, ces oligoéléments sont pour la plupart essentiels au métabolisme enzymatique. Le chrome trivalent est un oligoélément essentiel. Il est assez répandu dans la nature et c’est sous cette forme qu’il est retrouvé dans l’alimentation. Ainsi, les travaux sur le chrome trivalent ont mis en évidence son rôle clef dans l’homéostasie glucidique via un effet potentialisateur de l’insuline. Des effets antioxydants et hypolipémiants ont également été constatés. Chez l’homme, l’intérêt de l’administration de chrome à des patients diabétiques a été mis en évidence dans les années 1970, lorsqu’une patiente recevant une alimentation parentérale totale et développant des signes sévères de diabète, réfractaires à des doses élevées d’insuline, a vu tous ses symptômes corrigés après une supplémentation en chrome (Roussel, 2009). Depuis, plusieurs études ont été menées chez l’homme, afin d’évaluer le réel bénéfice d’une supplémentation en chrome. Ainsi, le maintien d’un statut optimal en chrome apparaît important pour lutter contre le risque de diabète et de maladies cardiovasculaires. S’il n’existe aucune preuve d’un effet bénéfique d’une supplémentation lorsque le sujet n’est pas déficitaire, les effets bénéfiques d’apports complémentaires de chrome chez les patients atteints de syndrome métabolique, associant un statut déficient en chrome et une sensibilité à l’insuline diminuée, sont décrits par de nombreuses études, mais ces effets restent controversés (Roussel, 2009).
GENERALITES SUR LES OLIGOELEMENTS
DEFINITION
Les oligoéléments sont des substances indispensables à notre organisme. En quantités faibles, ils interviennent dans de nombreux mécanismes biologiques et leur rôle est prépondérant (Oligomed, 2006). Un oligoélément est de nature minérale, présent dans le corps humain à un taux inférieur à un milligramme/kilogramme de poids corporel. D’autres auteurs définissent un oligoélément essentiel sur les critères suivants : présents dans les tissus sains de tous les organismes vivants, sa concentration tissulaire est constante d’un animal à l’autre ; l’interruption de l’apport provoque des anomalies fonctionnelles ou structurales, l’addition de l’élément prévient les anomalies. Ces dernières sont associées à une modification biochimique spécifique (Saudin, 1988). Par ailleurs, un élément est essentiel quand sa carence se traduit objectivement par un trouble fonctionnel et quand son apport à doses physiologiques prévient ou guérit ce trouble (Mertz, 1981 ; Cancarini, 2016). Ainsi, trois catégories peuvent être retenues (Saudin, 1988) :
– les oligoéléments essentiels : Fe, Zn, Cu, Se, Cr, Mn, Mo, Co, I ;
– les oligoéléments pouvant être essentiels : Si, Ni, V, Li, As ;
– les oligoéléments seulement bénéfiques : F.
Certains éléments-traces sont dits non essentiels : Il s’agit de Al, Bi, et Au. Ils n’ont pas de rôle physiologique connu et sont surtout utilisés pour leur rôle pharmacologique à dose pondérale mais peuvent toutefois avoir un rôle important en oligothérapie catalytique. Ils ne sont pas présents à l’état normal dans l’organisme (Loriol, 2001). Le rôle des oligoéléments et des minéraux est essentiel dans la plupart des systèmes enzymatiques, des métabolismes et dans la construction cellulaire. Sont considérés comme minéraux les éléments tels que calcium, phosphore, magnésium et leur déficit est habituellement bien appréhendé en clinique, l’évaluation biologique est possible en pratique courante et les besoins sont relativement bien définis. En revanche, les données concernant les oligoéléments (fer, sélénium, zinc, chrome) sont beaucoup plus floues, et l’évaluation des besoins est actuellement très difficile (Ferry, 2012 ; Berger, 2017 ; Douart, 1994) .
APPORTS NUTRITIONNELS RECOMMANDES EN MINERAUX ET OLIGOELEMENTS
Les Apports Nutritionnels Conseillés(ANC) sont définis comme des valeurs de références moyennes mesurées à partir d’un groupe d’individus définis selon leur sexe, leur âge ainsi que leur condition physique .
OLIGOELEMENTS : CARENCE SURDOSAGE ET MODE D’ACTION
Une des particularités des oligo-éléments est qu’ils peuvent tous provoquer des désordres importants, notamment quand ils sont à des taux élevés dans l’alimentation humaine. Une absence ou un apport massif de l’un d’entre eux peut être la source principale de défaillance dans l’organisme et de pathologies. L’effet de l’apport d’un oligoélément dépend donc de la dose (Jamison, 2003). Tout d’abord, la carence d’un oligo-élément sera expliquée par l’alimentation puis les états physiologiques comme la croissance, le vieillissement, la grossesse, l’allaitement, la ménopause mais également l’activité physique, les restrictions caloriques (régime stricte ou végétariens, ou appauvrissement des sols) sont également responsables de ces déficits. Les pathologies chroniques, les allergies, la malabsorption, les pertes liquidiennes excessives peuvent aussi s’y ajouter (Oligomed, 2006).
Fer
Il fait partie des oligoéléments les plus importants dans l’organisme. Il est le métal qui complexe l’hémoglobine (environ 63% du fer), impliquée dans les échanges gazeux et du transport de l’oxygène au niveau des globules rouges. Le reste du Fe est trouvé dans la myoglobine et les enzymes telles que la ribonucléotide réductase une enzyme clé impliquée dans la synthèse de l’ADN. Il peut aussi être un puissant oxydant impliqué dans la réaction de Fenton et le cycle d’Haber Weiss puis catalyser la production d’ions hydroxyles (Roussel, 2014).
Les déficits en fer ont des retentissements hématologiques importants comme une anémie ferriprive et une augmentation de la susceptibilité à l’infection. Ils peuvent aussi diminuer les fonctions intellectuelles de l’organisme (Riché, 1996). Le Fe en excès peut participer à la génération de radicaux libres dont la toxicité pour l’organisme n’est plus à démontrer. Ainsi, il pourrait aussi être impliqué dans l’étiopathologie de maladies chroniques comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, et certains cancers (Roussel, 2014).
Zinc
C’est l’oligo-élément, après le fer, le plus important quantitativement dans notre organisme. Il est essentiel et agit comme cofacteur enzymatique dans de nombreux processus métaboliques de l’être humain. Le zinc permet la synthèse des prostaglandines et des leucotriènes, en activant la phospholipase A2, la lipooxygenase et la cyclo-oxygénase, d’où son importance dans la réaction inflammatoire (Roussel, 2017). Le zinc intervient sur plusieurs niveaux :
– assure la stabilité structurale de la superoxyde dismutase (Cu-Zn SOD), enzyme de défense antioxydante majeure ;
– protège, par compétition avec le fer, les groupements thiols(SH) de l’oxydation ;
– inhibe l’activité de la NADPH oxydase, source de radicaux libres de l’oxygène ainsi que la réaction de Fenton, source d’ion hydroxyle OH- particulièrement délétères ;
– induit des synthèses de métallothionéines anti-oxydantes
– protège la cellule endothéliale contre l’agression par le tumor necrosis factor (TNF) ou facteur de nécrose tumorale ;
– est également impliqué dans la fonction insulinique (Roussel, 2009).
Le zinc présente aussi un rôle dans la reproduction et la fertilité (abaissement de la 5-alpha dihydrotestostérone) et dans les fonctions de gustation (la gustine est une hormone à zinc) et de vision. Les personnes carencées en zinc sont souvent léthargiques et une diminution de la zincémie a été signalée chez des personnes atteintes de troubles mentaux (schizophrénie) (Roussel, 2009). Paradoxalement, un effet neurotoxique du zinc en excès peut être retrouvé. Une élévation de la concentration en zinc dans le cerveau est retrouvée chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Les deux caractéristiques de cette pathologie sont une apparition de plaques amyloïdes et une dégénérescence neurofibrillaire par agrégation de la protéine Tau. Il est déconseillé, par mesure de précaution, la prise de zinc chez le patient atteint de la maladie d’Alzheimer (Roussel, 2009).
Cuivre
Cet oligo-élément essentiel joue le rôle d’anti-infectieux et d’anti-inflammatoire. De par ses propriétés chimiques particulières, le cuivre est un métal à la fois essentiel et toxique, comme le fer. Il fait partie des métaux de transition et possède deux états d’oxydoréduction (Cu2+ , Cu+ ).
En tant que métal de transition, le cuivre joue un rôle important dans le déclenchement de réactions de production d’espèces réactives de l’oxygène (réactions de Fenton) et devenir pro oxydant lorsque sa concentration est élevée (Berger, 2017). Un excès comme une carence en cet oligoélément est potentiellement délétère et peut être responsable de lésions cellulaires dans différents organes et en particulier dans le foie et le cerveau. La diminution du Cu sanguin peut traduire une carence en Cu d’origine héréditaire ou acquise mais également s’observer en cas de surcharge en Cu génétique (Maladie de Wilson). Cette surcharge en Cuivre peut aussi être due à une intoxication aigue (Trocello et al, 2010).
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LES OLIGOELEMENTS
I. DEFINITION
II. APPORTS NUTRITIONNELS RECOMMANDES EN MINERAUX ET OLIGOELEMENTS
III. OLIGOELEMENTS : CARENCE SURDOSAGE ET MODE D’ACTION
III.1. Fer
III.2. Zinc
III.3. Cuivre
III.4. Sélénium
III.5. Chrome
III.6. Manganèse
III.7. Molybdène
III.8. Cobalt
III.9. Iode
IV. APPROCHE DE L’OLIGOTHERAPIE
IV.1. Oligothérapie catalytique
IV.2. Oligothérapie nutritionnelle
IV.3. Oligothérapie pharmacologique
CHAPITRE II : CHROME
I. PROPRIETES PHYSICO – CHIMIQUES
I.1.Propriétés physiques
I.2. Propriétés chimiques
I.2.1. Etats d’oxydation
I.2.2. Composés
II. SOURCES ET APPORTS RECOMMANDES
II.1. Sources du chrome trivalent
II.2. Apports recommandés
III. PHARMACOCINETIQUE DU CHROME
III.1. Absorption
III.2. Distribution et stockage
III.2.1.Transport du chrome du sang vers les tissus
III.2.2.Transport du chrome des tissus vers la circulation sanguine
III.2.3. Transport au niveau du placenta
III.2.4. Stockage et concentration tissulaire
III.3. Métabolisme
III.4. Excrétion
IV. VALEURS NORMALES DE LA CHROMEMIE ET CHROMURIE
IV.1. Chromémie
IV.2. Chromurie
V. EFFETS BENEFIQUES DU CHROME DANS L’ORGANISME
V.1. Métabolisme glucidique
V.1.1. Rappels sur la transmission du signal insulinique
V.1.2. Chrome et insuline
V.1.2.1. Etudes chez l’Homme ou l’animal
V.1.2.2. Mécanisme d’action intracellulaire du chrome par la chromoduline
V.1.2.3.Mécanisme d’action extracellulaire du chrome par le glucose tolerance factor
V.2. Métabolisme lipidique
V.3. Rôle antioxydant
VI. CHROME ET PATHOLOGIES
VI.1. Diabète de type 2
VI.2. Athérosclérose
VI.3. Syndrome des ovaires polykystiques
VII. TOXICITE
VII.1. Par ingestion
VII.2. Par inhalation
VII.3. Par contact dermique
CHAPITRE III : UTILISATIONS DU CHROME
I. UTILISATIONS EN PHARMACIE
I.1. Règles de base pour le conseil en oligothérapie
I.1.1. Voies d’administration
I.1.2. Posologies
I.1.3. Moment de prise
I.1.4. Durée du traitement
I.1.5. Contre-indications
I.1.6. Effets indésirables
I.2. Utilisations du Chrome
I.2.1. Indications thérapeutiques
I.2.2. Formes commerciales du chrome
I.2.3.Compléments alimentaires contenant du chrome
II. AUTRES UTILISATIONS
II.1. Domaine médical
II.2. Domaine industriel
II.2.1. Peinture
II.2.2. Acier inoxydable
II.2.3. Industrie chimique
II.2.4. Milieu domestique
CONCLUSION
REFERENCES