Généralités sur les munitions et les blindages
Les différents types de menaces balistiques
Les menaces balistiques sont ici classées selon deux catégories : les projectiles, qui sont volontairement orientés vers une cible, et les fragments, qui résultent d’une explosion.
Projectiles
Les projectiles balistiques les plus courants sont les balles, caractérisées principalement par leur calibre (ou diamètre extérieur). D’autres types de projectiles, comme les ogives à charge creuses et les obus-flèches, conçus pour percer les blindages des chars, mettent en jeu des calibres bien plus élevés. Globalement on distingue :
– Gros calibres, ex : ogives à charge creuse (Ø125 mm) [Wikipedia, 2006c], obus-flèche (Ø22 mm) [Wikipedia, 2006b]
– Moyens calibres, ex : balle de diamètre 12,7 mm [Wikipedia, 2006a]
– Petits calibres, ex : balle de diamètre 5,56 mm ou 7,62 mm [Wikipedia, 2006a] .
♦ Cœur (ou noyau)
Partie principale de la balle, son matériau et sa géométrie sont adaptés à l’application visée : un matériau ductile pour le maintien de l’ordre public (exemple : plomb) ou un matériau à haute dureté et haute densité dans une application militaire (exemple : acier durci, carbure de tungstène).
♦ Chemise
En métal déformable (ex : cuivre, laiton, acier doux), elle permet de protéger l’intérieur du canon du passage du cœur à haute dureté et d’en épouser les stries donnant à la balle un mouvement rotatif stabilisant sa trajectoire.
♦ Bouchon arrière
Le dernier élément est un bouchon de matériau à haute densité (ex : plomb) situé à l’arrière du cœur. Sa position lui permet d’augmenter la force de l’impact via son énergie cinétique, et de marteler le cœur pour améliorer son pouvoir pénétrant.
D’autres balles de calibre 7,62×51 existent sans bouchon, avec un cône lubrifiant devant le cœur, voire avec un cœur en carbure de tungstène.
Fragments
Lors d’explosion d’obus, de mines ou d’engins explosifs improvisés (« EEI ») , des fragments sont projetés à haute vitesse et représentent une menace pour les véhicules se trouvant à proximité.
Au vu de la diversité des situations et des dispositifs existants, il est difficile de connaitre précisément la nature du fragment (matériau, forme, masse, vitesse par exemple). Le STANAG définit des projectiles de référence dénommés FSP pour « Fragment Simulating Projectile » de diamètre 20 mm [NATO, 2011].
Les différents types de blindage
Les fonctions d’un blindage
Le mode d’action d’un blindage sur une menace peut être décomposé en fonctions technologiques. On peut identifier comme fonctions principales :
– FP1 : Protéger les occupants du véhicule contre les menaces extérieures.
– FP2 : Protéger les systèmes critiques du véhicule (ex : moteur, carburant)
Cinq sous-fonctions, plus spécifiques au mode d’action des matériaux constituant la protection, ont été identifiées . Par souci de concision, les « sous-fonctions » seront simplement appelées « fonctions ».
Des contraintes liées à l’environnement du véhicule s’ajoutent également, par exemple :
– Masse
– Résistance au feu
– Résistance à l’environnement (humidité, variations de température, ultra-violets, obstacles (ex : barbelés)…)
– Résistance au multi-impact
– Coût d’achat et de possession
– Encombrement
– Empreinte environnementale
– En cas d’impact, peu de fragments projetés qui pourraient blesser des personnes autour du véhicule .
Ces fonctions et contraintes sont souvent incompatibles, et un compromis doit être trouvé. Par exemple, un blindage de char respectera toutes les fonctions, mais sera lourd, encombrant et coûteux. D’autre part, un blindage d’hélicoptère est léger et peu encombrant, mais ne peut pas éroder les projectiles. Par conséquent le blindage est souvent adapté en fonction du rôle du véhicule concerné ainsi que de sa localisation : la partie avant a par exemple besoin d’un niveau de protection supérieur à celui du toit. De plus, certains blindages sont modulaires : des couches peuvent être ajoutées ou retirées pour s’adapter rapidement aux conditions sur le terrain.
Blindages passifs, actifs et réactifs
Classiquement, le blindage est passif : il subit l’action du projectile et ne réagit que par les modes de déformation et de rupture de ses matériaux constitutifs. Cette technologie est suffisante contre les balles de petits et moyens calibres. En revanche face à des charges creuses ou des obus-flèches un blindage réactif est nécessaire (exemple : Brenus de Nexter, [Nexter, 2014]). Ce type de blindage se présente sous la forme de tuiles de matière explosive prise en sandwich entre deux plaques d’acier. Lors de l’impact, l’explosion se déclenche et les plaques d’acier se séparent l’une de l’autre à haute vitesse, perturbant fortement la trajectoire du projectile. Un blindage actif, enfin, vise à neutraliser la menace avant même qu’elle n’entre en contact avec le véhicule (exemple : système SHARK de Thales, [Defense-Update, 2010]) : un système de contre-mesure propulse une charge explosive au-devant de la menace, qui la détruit avant son impact. Cette technologie se destine principalement à contrer les obus, missiles et charges creuses. Bien que plus performants qu’un blindage passif, les blindages actifs et réactifs ont des coûts d’achat et de possession (entretien, maintenance, remplacement) plus élevés. De plus, ils ne peuvent équiper que des véhicules disposant d’un blindage passif suffisant pour résister au souffle de l’explosion perturbant la menace.
Blindages et munitions d’intérêt
Blindage : Passif
CNIM a choisi d’orienter l’étude vers un blindage passif pour véhicule du génie à vision directe offrant une protection de niveau 3 d’après le STANAG (voir Annexe A p189). Les éléments vitrés ne sont pas considérés ici. L’acier à blindage MARS® 380 (ex-MARS® 190) a été sélectionné comme acier à blindage de référence. Cette dénomination (« 380 ») correspond à la dureté Brinell moyenne pour une plaque de faible épaisseur (≤ 6,32 mm). Le MARS® 380 correspond davantage à un niveau de performance global qu’à un matériau donné. Ainsi, sa composition, ses traitements thermiques et ses caractéristiques mécaniques de base (résistance mécanique, allongement à rupture, ténacité, dureté) peuvent varier pour s’adapter aux demandes des clients.
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Table des matières
I. Introduction
I.1. Contexte général
I.2. Périmètre de l’étude
I.3. Cahier des charges et enjeux industriels
I.4. Enjeux et verrous scientifiques
I.5. Organisation du manuscrit
II. Étude bibliographique
II.1. Généralités sur les munitions et les blindages
II.2. Performances d’un blindage passif : VLP
II.3. Modes de défaillance de blindages passifs en fonction du matériau constitutif
II.4. Optimisation de blindages
II.5. Ondes de choc dans les solides
II.6. Modélisation constitutive
II.7. Bilan de l’étude bibliographique
III. Investigation expérimentale
III.1. Projectiles et protections
III.2. Moyens expérimentaux
III.3. Résultats des essais d’impacts à vitesse modérée (lanceur Ø40)
III.4. Résultats des essais d’impacts à haute vitesse (lanceur Ø60)
III.5. Résultats des essais de tir réel (veine de tir)
III.6. Bilan de la campagne expérimentale
IV. Dialogue expérience-simulation
IV.1. Outils de modélisation numérique
IV.2. Mise au point de la méthodologie d’optimisation
IV.3. Calibration, vérification et validation des briques élémentaires numériques
IV.4. Optimisations de protections mono-matériau face à des projectiles D20-AcierPlat/Conique
IV.5. Changement de projectile
IV.6. Optimisations de protections mono et multi-matériaux face à des projectiles D6.35- WC-Conique
IV.7. Bilan du dialogue expérience-simulation
Conclusions