Généralités sur les composants Grands Gaps
Les nouvelles technologies mises en œuvre pour réduire la consommation énergétique des systèmes électroniques se basent sur les matériaux Grands Gaps (semi-conducteurs à large bande interdite) tels que le Carbure de Silicium (SiC), le Nitrure de Gallium (GaN) et le Diamant. Les objectifs recherchés à travers ces technologies sont la réduction des dimensions et du poids des convertisseurs, l’augmentation de l’efficacité énergétique et la diminution des coûts. La technologie GaN (Nitrure de Gallium) fait partie des technologies « Grands Gaps » qui permet de repousser les limites des semi-conducteurs de puissance actuels. Dans cette section, des généralités sur les matériaux Grands Gaps sont présentées en mettant l’accent sur le positionnement du GaN par rapport aux Si, SiC et au Diamant.
Compromis entre la tenue en tension et la température
Les dispositifs de puissance traditionnels réalisés à partir du Silicium (Si) montrent certaines limitations dès lors que l’on souhaite combiner de fortes tenues en tension, des utilisations en températures au-dessus de 200°C et des fréquences de commutation élevées afin d’augmenter les densités de puissance. Pour franchir ces limitations, il est nécessaire de recourir à des matériaux à large bande interdite (Grands Gaps) qui présentent des propriétés plus adaptées. Ils permettent un fonctionnement potentiel du dispositif à des températures, des tensions et des vitesses de commutation supérieures aux dispositifs à base de Silicium (Si) utilisés actuellement. Le Carbure de Silicium (SiC), le Nitrure de Galium (GaN) et le Diamant sont les matériaux à large bande interdite les plus prometteurs.
Mécanismes de piégeage
Principe et modèle mathématique
Ces mécanismes sont liés à des défauts provenant des procédés de réalisation, encore difficilement maitrisés. Les structures HEMT, avec des couches actives très fines, sont particulièrement sensibles à ces défauts et la densité du gaz-2D est facilement perturbée par ces charges.
Lorsque des défauts ponctuels ou des défauts cristallins sont présents, soit dans le volume de la structure ou aux interfaces (par exemple entre l’AlGaN et la passivation SiN de la figure I.11), ces derniers introduisent des niveaux d’énergie à l’intérieur de la bande interdite (qui est particulièrement large). Ces niveaux d’énergie, non souhaités, vont dès lors capturer et/ou émettre des porteurs en ionisant ou neutralisant le défaut auquel ils sont liés. On dit alors que les impuretés, ou les défauts, en question sont des pièges car ils auront tendance à piéger ou libérer des électrons (capture ou émission). Ceci a pour conséquence de modifier l’état de charge dans la structure et par effet électrostatique (en modifiant le champ électrique local) de modifier localement la densité du gaz-2D. En fonction du type d’impuretés, le piège est dit accepteur s’il capte un électron (en s’ionisant négativement) ou donneur s’il le fournit (en s’ionisant positivement).
En effet, le diagramme de bandes d’un semi-conducteur monocristallin parfait (sans impuretés) se compose d’une bande de valence Ev et d’une bande de conduction Ec séparées par la bande interdite dans laquelle il n’y a aucun niveau d’énergie. Lorsque le cristal contient des atomes étrangers ou des défauts cristallins (pièges), des niveaux d’énergie discrets sont introduits dans la bande interdite, indiqués par les niveaux ET sur la figure I.12. Pour les semi-conducteurs monocristallins comme le Silicium, le Germanium et l’Arséniure de Gallium, les défauts sont généralement des impuretés métalliques, mais également des imperfections cristallines, telles que des dislocations, des empilements, des précipités, des lacunes ou des interstitiels. Dans certains semi-conducteurs comme GaAs et InP, les impuretés augmentent la résistivité du substrat, créant des substrats semi-isolants [Sch06].
?? = ?? + ?? Eq.I.1
La densité d’électrons dans la bande de conduction n, la densité des trous dans la bande de valence p et l’état de piège nT ou pT sont toutes des fonctions du temps à cause des processus de capture et d’émission. Pour cette raison, des équations se sont définies pour suivre l’évolution de n, p et nT en fonction du temps. Seules les équations appropriées pour les électrons sont développées. Les équations pour les trous sont analogues. La densité d’électrons dans la bande de conduction est diminuée par la capture d’électrons (processus (a) de la figure I.12) et augmentée par l’émission d’électrons (processus (b) de la figure I.12). L’émission d’électrons dépend de la densité des impuretés occupés par les électrons nT et du taux d’émission. Elle ne dépend pas de la densité d’électrons dans la bande de conduction n car il n’est pas nécessaire qu’il y ait des électrons dans la bande de conduction pendant le processus d’émission. Mais les pièges doivent être occupés par des électrons, car s’il n’y a pas d’électrons dans les pièges, aucun électron ne peut être émis.
Caractérisations des pièges
La caractérisation des pièges est l’étape qui permet d’extraire expérimentalement les paramètres physiques des pièges. Elle consiste à déterminer les constantes de temps de chaque type de pièges puis définir les énergies d’activation (Ea) et les sections efficaces de capture (σn) en utilisant les graphes d’Arrhenius. Diverses méthodes ont été utilisées sur les HEMT-GaN pour étudier le comportement de piégeage [Bin02, Miz03, Men08, Soz05, Ima11]. Dans [Ima11], la méthode de la spectroscopie optique de niveau profond (DLOS) a été utilisée pour caractériser les pièges pendant le vieillissement. Les résultats ont permis de conclure que le décalage de la résistance Ron et de la tension de pincement Vp (Cf. Figure I.13) était attribué au niveau profond dans la région de la grille. En effet, pour l’essai de vieillissement, une contrainte VGS de 10V a été appliquée pendant 5000s. Les électrodes de drain et de source ont été mises à la terre. Le test de vieillissement a été arrêté toutes les 1000s en mesurant Vp, définie comme la tension VGS à Id de 1mA/mm et VDS de 0,5V, et Ron, définie comme résistance de Drain-Source à VGS de 10V. Par le test de vieillissement, Vp a été décalé vers la valeur positive et Ron a augmenté. La dépendance de Ron a été comparé vis-à-vis de Lr (la longueur de grille en retrait= gate recess) (Cf. Figure I.13). En l’absence de structure de grille en retrait, Ron a été mesuré à VGS = 0V et à VDS = 0,5V. Ron a augmenté uniquement lorsque des structures de grille en retrait ont été utilisées.
|
Table des matières
Introduction générale
CHAPITRE I Etat de l’art sur les modes de dégradation des dispositifs de puissance à base de GaN
Introduction
I.1 Généralités sur les composants Grands Gaps
I.1.1 Compromis entre la tenue en tension et la température
I.1.2 Compromis entre la tenue en tension et la résistance RON-spécifique
I.1.3 Applications des composants Grands Gaps
I.2 Structures des composants GaN
I.2.1 Structure latérale
I.2.2 Structure verticale
I.3 Mécanismes de dégradation des composants GaN
I.3.1 Mécanismes de piégeage
I.3.1.1 Principe et modèle mathématique
I.3.1.2 Caractérisations des pièges
I.3.1.3 Conséquences des mécanismes de piégeage
I.3.2 Electrons chauds
I.4 Problème des fuites
I.5 Problème de la variation dynamique de Ron
I.6 Vieillissement
I.6.1 Vieillissement des composants GaN en Radiofréquence
I.6.2 Vieillissement par court-circuit
I.6.3 Cyclage actif : contrainte thermique
I.7 Estimation de la température de jonction Tj
I.7.1 Méthodes électriques (mesures indirectes)
I.7.2 Méthodes optiques (mesures directes)
Conclusion
CHAPITRE II Description et caractérisations des composants étudiés
Introduction
II.1 Composant GaNSystems
II.1.1 Description générale du transistor GS66508P
II.1.2 Caractéristique statiques de transfert IDS-VGS et tension de seuil du transistor GS66508P
II.1.3 Caractéristiques statiques de sortie IDS-VDS du transistor GS66508P
II.1.4 Courants de fuite du transistor GS66508P
II.1.5 Gate lag et Drain lag
II.2 Composant CEA Normally-On
II.2.1 Description générale du composant Normally-On
II.2.2 Caractéristique statique de transfert IDS-VGS et tension de seuil du transistor CEA Normally-On
II.2.3 Caractéristiques statiques IDS-VDS du transistor CEA Normally-On
II.2.4 Courants de fuite du transistor CEA Normally On
II.2.5 Gate lag et Drain lag
II.3 Composant CEA Normally-Off
Conclusion
CHAPITRE III Evolution de la résistance dynamique Ron_dyn des transistors de puissance GaN pendant les cycles de commutation
Introduction
III.1 Caractérisations en commutations cycliques
III.1.1 Principe du test
III.1.2 Moyens de test et méthodologie
III.1.3 Tests de commutations cycliques sur le composant GaNSystems
III.1.3.1 Séparation de l’effet dû à la thermique de celui dû au piégeage
a) Modèle thermique
b) Etalonnage
c) Différenciation entre l’effet dû à la thermique de celui dû au piégeage
III.1.3.2 Résultats expérimentaux sur les composants GaNSystems
a) Influence de la température
b) Influence de la fréquence de commutation
c) Influence de la tension Vdc au blocage
d) Cas destructifs
III.1.4 Tests de commutations cycliques sur les composants CEA
III.1.4.1 Principe et étude expérimentale
III.1.4.2 Résultats expérimentaux
a) Tests « statiques » et « normaux »
b) Effet de la température
c) Effet du courant
d) Effet du dV/dt
III.2 Modélisation de l’évolution de la Ron_dyn
III.2.1 Modèle simplifié de Ron_dyn
III.2.2 Évolution des densités de centres « piégeurs » neutres
III.2.3 Estimation de la valeur initiale à l’équilibre
III.2.4 Estimation de la résistance Ron_dyn
Conclusion générale