Depuis une décennie, les recherches biologiques et écologiques sur les mammifères endémiques de Madagascar tels les primates, les rongeurs et les tenrecs s’avèrent être des sujets populaires pour la contribution à la conservation, la dépendance à la forêt et à la biogéographie (Stephenson et al, 1994; Ramanamanjato et Ganzhorn, 2001; Ganzhorn et al, 2003; Kappeler et Rasoloarison, 2003). Or, d’autres ordres constituants également cette classe ont été souvent négligés durant ces nombreuses enquêtes d’évaluation de la biodiversité. Tel est le cas des Chiroptères qui sont des mammifères volants dont peu d’informations ont été disponibles entre les années 1980 et 1990. Néanmoins, quelques recherches scientifiques ont été déjà entreprises. Dorst (1947a, b ; 1948) a réalisé une revue de la diversité et de la biogéographie des chauves-souris malgaches. Peterson et al (1995) ont publié la monographie et ont reconstitué la taxonomie des chauves-souris malgaches en se basant sur les séries de collections de 1970. Depuis quelques années, les nouvelles informations reçues telles la distribution des chauves-souris malgaches (Goodman et al, 2005b) ont permis de réviser leur taxonomie et d’en découvrir de nouvelles espèces (Goodman et Cardiff, 2004; Goodman et Ranivo, 2004).
Durant toutes ces recherches, les informations écologiques montrent toujours une lacune sur les Chiroptères malgaches. Tel est le cas des Myzopodidae qui, à part l’observation en 1947 de leur importante relation avec le palmier Ravenala madagascariensis comme dortoir diurne (Schliemann et Maas, 1978), peu d’informations sont connues sur ceux-ci. Göpfert et Wasserthal (1995) ont noté que M. aurita se nourrit des petits lépidoptères de nuit après avoir effectué l’analyse des matières fécales d’un individu capturé à l’extrême Sud Est de l’île. Myzopodidae est l’une des quatre familles de chauves-souris dans le monde dotée de ventouses. De ce fait, Thomas (1904), Miller (1907), Dorst (1947a), Hayman et Hill (1971) ont tous suggéré que les plus proches parents des Myzopodidae sont les Thyropteridae et les Natalidae d’Amerique du sud. Or, en tenant compte des sept caractères dérivés énumérés par Van Valen (1979) pour les Natalidae actuels, les Myzopodidae présentent trois caractères qui leurs sont propres dont les caractères de leurs ventouses, leurs longues oreilles et la longueur de la mâchoire inferieure plus petit celle de la supérieure ; ce qui les rendent endémiques de Madagascar. Elles comportent deux espèces dont Myzopoda aurita endémique de la partie orientale et M. schliemani, un nouveau taxon endémique de la partie occidentale récemment décrit (Goodman et al, 2007). Originairement, cette famille a été considérée comme mono spécifique mais l’étude de la couleur du pelage, des caractères du crâne et de la morphométrie a permis de constater la différence entre ces deux espèces (Goodman et al, 2007).
Généralités sur les chauves-souris
Caractères généraux
L’ordre des Chiroptères est remarquable par sa grande diversité spécifique et sa large distribution géographique. Il représente 20% de toutes les espèces vivantes de mammifères et est présent sur tous les continents, excepté l’Antarctique. Ce sont des mammifères volants dont les ailes sont constitués par une main transformée c’est à dire leurs longs doigts sont liés par une fine membrane de peau souple, résistante et extensible appelée « patagium » qui relie leurs mains à leurs pattes et pour certaines espèces, à leur queue. Le terme « chiroptère » signifie d’ailleurs littéralement « qui vole avec ses mains ». Leurs pattes sont munies de griffes qui leur permettent de s’accrocher tête vers le bas sur un support (Neuweiler, 2000). Pendant la chasse, les chauves-souris frugivores volent en utilisant leurs yeux mais celles dites insectivores émettent des ultrasons qui leur permettent de se repérer dans la nuit et de chercher leur proie car leurs yeux qui sont du type primitif ne permettent qu’une vision des contours des choses. Grâce aux ultrasons, ces insectivores arrivent à distinguer les obstacles qui s’opposent sur leur chemin, la grosseur et la caractéristique de leurs proies. L’émission de ces ultrasons peut aller jusqu’à une distance de trois à quatre mètres et un effet écho est suscité au retour.
Gîte
Les Microchiroptères utilisent une large variété de sites pour gîter (Kunz, 1982). Ils peuvent jucher dans des creux d’arbres créés naturellement ou formés aux activités d’autres animaux comme les Oiseaux. Dans les forêts tropicales et tempérées, certains Microchiroptères se nichent seulement sous les feuilles de certaines plantes, d’autres gîtent entre les denses feuillages et beaucoup s’accrochent librement sur les branches. Les grottes et les mines fournissent des conditions idéales pour l’hibernation durant la saison froide et l’allaitement durant la saison chaude. D’autres structures comme les crevasses, les saillies de montagnes, les abris ménagés sous les pierres, les toits de bâtiments (maisons, églises, etc.) sont également utilisés comme juchoirs par les Microchiroptères. Les plus larges colonies de chauves-souris des régions tropicales et tempérées sont rencontrées dans les grottes avec des millions d’individus (Hutson et al, 2001).
Régime alimentaire
Le régime alimentaire des Chiroptères est très diversifié. Ce qui permet une classification qui est la suivante :
– Insectivore : ce sont ceux qui consomment des criquets, des sauterelles, des papillons, des mouches, des moustiques, des coléoptères, des chenilles, etc. Ils assurent un rôle important sur le contrôle de la population en entomofaune comme la densité des moustiques (Hutson et al, 2001) ;
– Frugivore : ce sont ceux qui consomment des fruits, des pollens et des nectars. A Madagascar, la famille des Pteropodidae représente cette classe et joue un rôle important dans la pollinisation et la dispersion des graines (Fujita et al, 1991) ;
– Piscivore : ces espèces possèdent de longues pattes et des pieds armés de longues griffes à l’aide desquelles elles traquent les poissons qui viennent s’aventurer près de la surface. L’aire de répartition de la chauve-souris piscivore s’étend en Amérique, du nord-ouest du Mexique jusqu’au nord de l’Argentine, aux Antilles et à Trinidad ;
– Vampire : ce sont des chauves-souris hématophages qui sucent le sang des animaux à sang chaud comme les bétails, les petits mammifères ainsi que les oiseaux. Ce sang est aspiré à partir des petites blessures qu’elles infligent aux animaux cibles. Il existe seulement trois espèces de chauves-souris vampires : le vampire commun (Desmodus rotundus), le vampire à pattes velues (Diphilla ecaudata) et le vampire à ailes blanches (Diaemus youngi). Ces trois espèces sont originaires du sud du continent américain principalement du Mexique, du Chili, du Brésil et de l’Argentine ;
– Mixte : c’est-à-dire qu’ils sont à la fois frugivores et insectivores. Par exemple, Phyllostomus, un insectivore qui sait parfaitement éplucher des bananes.
Habitat et territoire de chasse
Les Microchiroptères utilisent une multitude variété d’habitats servant à la fois de gîtes et de lieux de chasse. Les étendues de forêts primaire ou secondaire régénérée et les zones boisées sont des habitats clés. Les habitats dits aquatiques comme les rivières, ruisseaux, lacs et canaux sont d’excellents lieux de chasse pour certaines espèces dûs aux réserves riche en insectes. D’autres espèces sont bien adaptées aux environnements urbains et peuvent y trouver des juchoirs et des lieux de fourrages (Hutson et al, 2001).
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Table des matières
INTRODUCTION
I CADRE GENERAL DE L’ETUDE
I.1 Généralités sur les Chauves-souris
I.1.1 Caractères généraux
I.1.2 Gîte
I.1.3 Régime alimentaire
I.1.4 Habitats et territoires de chasse
I.1.5 Taxonomie des Chiroptères
I.1.6 Chiroptères de Madagascar
I.2 Espèce étudiée
I.2.1 Particularités biologiques
I.2.2 Taxonomie
I.3 Hypothèses
I.4 Période d’étude
I.5 Site d’étude
I.5.1 Situation géographique
I.5.2 Historique du site
I.5.3 Facteurs abiotiques
I.5.3.a Climat
I.5.3.b Hydrographie
I.5.4 Facteurs biotiques
I.5.4.a Population locale
I.5.4.b Flore
I.5.4.c Faune
II MATERIELS ET METHODES
II.1 Capture et manipulation des chauves-souris
II.1.1 Filet japonais
II.1.2 Mensuration
II.1.3 Identification
II.2 Etude du régime alimentaire
II.2.1 Collecte de fèces
II.2.2 Capture d’insectes par piège Malaise
II.2.3 Identification et analyses des proies
II.3 Radio télémétrie
II.3.1 Principes
II.3.2 Matériels nécessaires
II.3.3 Fonctionnalités des matériels
II.4 Gîte
II.4.1 Technique de recherche de gîte
II.4.2 Description des gîtes
II.4.3 Captures au niveau des gîtes
II.5 Domaine vital
II.5.1 Technique de suivi
II.5.2 Polygone Convexe Minimal (MCP)
II.6 Analyses statistiques
II.6.1 Test « One way ANOVA »
II.6.2 Test de Kruskall-Wallis
II.6.3 Analyse des composantes du milieu
III RESULTATS
III.1 Capture
III.1.2 Effort de capture
III.1.3 Nombre d’individus de M. aurita capturés
III.1.4 Composition de la communauté des chauves-souris
III.1.5 Description morphométrique
III.1.6 Sexe et âge des individus capturés par le filet japonais
III.1.7 Variation de poids et de la longueur des avant-bras
III.2 Gîtes
III.2.1 Nature et place des gîtes
III.2.2 Description des gîtes
III.3.3 Constituant du groupe dans le gîte
III.3 Régime alimentaire
III.3.1 Composition des nourritures par saison
III.3.2 Abondance et disponibilité des insectes
III.4 Utilisation des habitats
III.4.1 Effort de suivi
III.4.2 Variation du nombre de points de localisation en fonction de la taille du domaine vital
III.4.3 Taille des habitats utilisés par M. aurita
III.4.4 Analyse des composantes du milieu
III.4.5 Distance de déplacement par rapport au gîte
IV DISCUSSION
IV.1 Capture
IV.2 Gîte
IV.2.1 Caractéristiques des gîtes
IV.2.2 Changement de gîte
IV.2.3 Structure sociale
IV.3 Régime alimentaire
IV.3.1 Comportement alimentaire
IV.3.2 Attitude de chasse
IV.4 Radio-télémétrie
IV.5 Domaine vital
IV.6 Biologie
IV.6.1 Organe de fixation
IV.6.2 Organe sexuel
IV.6.3 Reproduction
IV.7 Conservation
CONCLUSION