Les alkylphénols (AP) et les phtalates (PAE), bien que purement anthropiques, sont présents dans toutes les matrices environnementales. Un certain nombre de travaux (Vethaak et al., 2005, Wang et al., 2008, Salapasidou et al., 2001, Bergé et al., 2012, Bergé et al., 2013b) ont démontré leur caractère ubiquiste et leur omniprésence dans l’atmosphère, les eaux naturelles, les sols et les organismes vivants de tout genre (algues, poissons, mammifères…). Ce constat est problématique du fait du caractère toxique de ces composés. En effet, les alkylphénols et les phtalates sont classés dans la catégorie des perturbateurs endocriniens pouvant entrainer une malformation des appareils génitaux, une baisse de fertilité ou la féminisation de populations… Cependant, malgré leur toxicité, les alkylphénols et les phtalates sont utilisés dans des produits de la vie quotidienne.
Afin de protéger les individus et l’environnement, les alkylphénols et les phtalates sont réglementés aux niveaux européen et français. Certains alkylphénols, comme le nonylphénol, et des phtalates comme le phtalate de di-n-butyle, le phtalate de butylbenzyle et phtalate de di-(2-éthylhexyle) sont interdits notamment dans les cosmétiques et dans les produits de puériculture. Concernant la protection de l’environnement, deux alkylphénols et un phtalate sont listés dans la directive cadre sur l’eau (DCE), version 2000, et conservés dans la version de 2013. Cette directive a pour objectif le retour au bon état chimique et écologique des cours d’eaux européens en diminuant puis éliminant les substances dangereuses dans l’environnement.
Cependant, afin de limiter ces rejets dans l’environnement, il est indispensable de connaître les sources de rejets en alkylphénols et en phtalates dans l’environnement. Les travaux de Bergé et al. (2014) ont permis de démontrer que les flux d’alkylphénols et de phtalates provenaient à moins de 5 % des rejets des industriels. Bien que ces travaux aient démontré la faible importance des rejets industriels et la nécessité d’étudier les eaux usées domestiques afin de réduire les transferts vers le milieu naturel, à ce jour, une seule étude a quantifié ces micropolluants dans les deux types d’eaux composant les rejets domestiques, c’est-à-dire les eaux grises et les eaux vannes. Palmquist et Hanaeus (2005) ont démontré que les alkylphénols et les phtalates présents dans les eaux usées domestiques provenaient principalement, voire exclusivement pour certains phtalates, des eaux grises.
Les travaux sur les alkylphénols et les phtalates n’ont pas permis, jusqu’à maintenant, de répondre à certaines questions concernant l’origine de ces composés dans le réseau d’assainissement et leur devenir en station d’épuration. Ces travaux avaient pour but de combler ces lacunes.
Les alkylphénols sont des composés possédant un noyau benzénique portant une fonction alcool et une chaîne carbonée avec un nombre d’atomes de carbone variable. Le nonylphénol (NP) ne correspond pas à une seule molécule mais plutôt à un ensemble d’isomères de tous les alkylphénols avec neuf carbones dans la chaîne alkyle. D’après Guenther et al. (2006), il existerait au total 211 nonylphénols. Au contraire du NP, le terme 4-t-octylphénol (qui sera appelé OP dans le reste du manuscrit) ne correspond qu’à une seule molécule.
Les alkylphénols et leurs éthoxylates n’ont pas de sources naturelles connues. Leur présence dans le milieu naturel est exclusivement due à l’activité anthropique (Environnement Canada et santé Canada, 2001). Grâce à leurs caractéristiques physico-chimiques, les alkylphénols peuvent être utilisés comme surfactant, émulsifiant, dispersant et agents mouillants dans de nombreuses applications (Bergé et al., 2012). Les trois principales sources de production sont, par ordre d’importance:
1. La production d’alkylphénols éthoxylés. Il s’agit de l’utilisation la plus courante du 4-NP puisqu’elle représente entre 54 et 60 % de l’utilisation de cette molécule (Cladière, 2012) ;
2. La production de résine. Cette utilisation représenterait 40 % de l’utilisation total du 4-NP (Cladière, 2012). Ces résines peuvent ensuite être utilisées dans l’industrie pétrolière ou comme additifs dans des colorants, encres et peintures ou encore pour améliorer les performances des plastiques comme le PVC (Gilbert-Pawlik, 2011, Cladière, 2012) ;
3. La production d’oximes phénoliques servant à la purification du minerai de cuivre (GilbertPawlik, 2011, Cladière, 2012).
D’après l’INERIS (2011), les éthoxylates d’alkylphénols sont quant à eux utilisés dans différents secteurs industriels comme la production de papier et de pâte à papier, l’industrie textile, les matériaux du génie civil, les tanneries, etc. On les retrouve également dans les :
• Détergents industriels et domestiques ;
• Peintures ;
• Produits phytosanitaires et biocides ;
• Engrais.
Cependant, la présence d’alkylphénol dans la majeure partie de ces utilisations est réglementée depuis 2005 (cf paragraphe réglementation). Ces nombreuses applications permettent d’expliquer l’ubiquité des alkylphénols dans l’environnement.
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Table des matières
Introduction générale
Partie 1 : Généralités sur les alkylphénols et les phtalates
Chapitre 1 : Présentation des alkylphénols
1. Généralités
1.1. Structures et nomenclature
1.2. Propriétés physico-chimiques
1.3. Utilisation et origines
1.4. Ubiquité
2. Voies d’exposition et toxicité
2.1. Voies d’exposition chez l’Homme
2.2. Perturbations endocriniennes et CMR
3. Comportement en milieu naturel
3.1. Biodégradation et photodégradation
3.2. Accumulation
4. Réglementation
Chapitre 2 : Présentation des phtalates
1. Généralités
1.1. Structures et nomenclature
1.2. Propriétés physico-chimiques
1.3. Utilisations et origines
1.4. Ubiquité
2. Voies d’exposition et toxicité
2.1. Voies d’exposition chez l’Homme
2.2. Perturbations endocriniennes et CMR
3. Accumulation en milieu naturel
4. Réglementation
Partie 2 : Les rejets domestiques
Chapitre 1 : Les rejets d’eaux usées
1. Les eaux pluviales
2. Les eaux industrielles
3. Les eaux domestiques
3.1. Répartition des volumes d’eaux composant les rejets domestiques
3.2. Paramètres physico-chimiques
3.3. Contamination en polluants organiques
Chapitre 2 : Matériels et méthodes
1. Sites et stratégie d’échantillonnage
1.1. Caractéristiques démographique des volontaires
1.2. Techniques d’échantillonnage
2. Méthodes analytiques
2.1. Conditionnement du matériel
2.2. Procédure d’extraction
2.3. Quantification par GC-MS
2.4. Performances analytiques
Conclusion générale
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