C’est au cours des dix dernières années que la lutte contre la mortalité maternelle et infantile est passée de l’arrière-plan au devant de la scène internationale. Il est aussi de plus en plus admis que la protection de la mère est une condition sous-jacente impérative au développement social et économique. Ce qui atteste l’engagement de la communauté internationale sur l’Initiative à la maternité sans risque qui vise à chercher des moyens pour assurer la promotion de la santé du couple mère enfant (1). Dans le monde en développement où la mortalité et la morbidité maternelles restent un problème très préoccupant et que les infrastructures sanitaires ne sont pas suffisantes voire absentes pour couvrir les besoins en matière de santé surtout en milieu rural, les tradipraticiens sont souvent les seuls recours disponibles.
GENERALITES SUR LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
DEFINITIONS
Selon l’OMS : la médecine traditionnelle constitue la somme totale de toutes les connaissances et pratiques traditionnelles utilisées en diagnostic, prévention et élimination des déséquilibres physique, mental ou social. Le tradipraticien peut être une accoucheuse traditionnelle, un tradithérapeute, un herboriste, un médico-droguiste.
Les accoucheuses traditionnelles
On entend par «accoucheuse traditionnelle» une personne d’une communauté qui assiste les femmes au cours de leur grossesse, de leur l’accouchement et de la période post-partum, mais qui n’appartient pas au système de santé officiel. Elle constitue une catégorie de personne qu’on appelle guérisseur traditionnel .
La médecine traditionnelle
La médecine traditionnelle peut être définie comme étant un ensemble de connaissances, de techniques de préparations et d’utilisations des substances et pratiques explicables ou non, basée sur le fondement socio culturel et la religion des collectivités, et qui s’appuient sur les expériences vécues .
Le guérisseur traditionnel
Un guérisseur traditionnel est une personne reconnue par la collectivité dans laquelle elle vit comme compétente pour dispenser des soins de santé, grâce à l’emploi de substances végétales, animales, minérales ou d’autres méthodes basées sur le fondement socio culturel et la religion, aussi bien que sur les connaissances, comportements et croyances liés au bien-être physique, mental ou social, ainsi qu’à l’étiologie des maladies et des invalidités prévalentes dans la collectivité .
LA DIFFERENCE ENTRE LA THERAPIE TRADITIONNELLE ET LA THERAPIE MODERNE
La médecine traditionnelle est un savoir détenu par les tradipraticiens, à savoir les tradithérapeutes, les accoucheuses traditionnelles, les herboristes et les médico-droguistes. Tandis que la médecine moderne est contrôlée par les personnes ayant fait des études médicales et titulaires d’un diplôme reconnu. Dans la recherche des causes de la maladie, le tradipraticien utilise uniquement l’inspection, la palpation, la sensibilité à travers le goût et l’odorat pour faire des examens biologiques. Par contre, le médecin utilise une démarche scientifique, rigoureuse et universelle aboutissant à des hypothèses sur un diagnostic exact et, enfin un traitement précis et prescrit. Le savoir faire des tradipraticiens se transmet de génération en génération. Il s’agit en quelque sorte d’un don ou encore d’une culture léguée par les ancêtres. , Les tradipraticiens se forment et se perfectionnent à travers les connaissances tirées du milieu écologique et en vertu du don que leurs ascendants ont laissé. Contrairement aux personnels de santé qualifiés et diplômés qui acquièrent leurs connaissances dans un établissement de formation.
SITUATION PROFESSIONNELLE DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
Malgré la popularité des accoucheuses traditionnelles dans toutes les communautés, il n’existe encore aucun texte juridique bien défini qui régit leurs activités. Néanmoins, dans la stratégie nationale de santé communautaire en matière de ressource du personnel, il y a une certaine évolution qui reconnaît les accoucheuses traditionnelles formées comme agent de santé communautaire (ASC) et on commençait à leur accorder des considérations :
• Les accoucheuses traditionnelles sont soumises à une réglementation par le service de santé officiel où elles figurent sur un registre
• Les services de santé par la voie du cours d’institution définissent les devoirs et des responsabilités des accoucheuses traditionnelles .Elles reçoivent un certificat qui les qualifie comme enregistrées ou contrôlées par les centres de santé.
• Les accoucheuses traditionnelles non enregistrées n’ont le droit d’exercer dans aucune circonstance et s’exposent à des poursuites judiciaires si elles enfreignent cette juridiction.
• Les accoucheuses traditionnelles ne sont pas autorisées à pratiquer des accouchements lorsqu’un personnel de santé qualifié est disponible.
De même à Madagascar, aucun statut n’est encore élaboré concernant les activités des tradipraticiens. Néanmoins, des projets de loi portant la reconnaissance de l’exercice de la médecine traditionnelle sont actuellement en cours d’étude. La politique nationale en matière de santé s’intéresse maintenant à la médecine traditionnelle et vise «à promouvoir et à valoriser la médecine traditionnelle malgache ». L’objectif est d’intégrer la médecine traditionnelle dans le système national de santé. Ainsi les tradipraticiens (y compris les accoucheuses traditionnelles formées) inscrits au registre du ministère de la santé et de la planification familiale font partie intégrante du système de santé dans le but de renforcer les relations entre médecine traditionnelle et médecine moderne .
LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA COLLABORATION AVEC LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
Dans plusieurs pays, de nombreuses femmes continuent d’accoucher seules avec l’aide d’une parente proche, d’une amie ou des accoucheuses traditionnelles. Cela concerne particulièrement les femmes les plus démunies et les moins instruites, qui encourent par conséquent de grands risques quant à l’issue de l’accouchement. C’est ainsi qu’on doit reconnaître que les questions de sécurisation de la qualité, de l’efficacité des services ou des soins qu’elles effectuent, particulièrement devant la pandémie du SIDA, ne sont pas vraiment prises en considération par la majorité de ces tradipraticiens. Ce qui explique la nécessité de formation pour une mesure de garantie. Dans de nombreux pays, les accoucheuses traditionnelles, avec un soutien et une formation appropriée en théorie et pratique, représentent une ressource qui peut être développée pour promouvoir la santé maternelle et infantile .
HISTORIQUE DE LA FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
La formation des accoucheuses traditionnelles a commencé dans certains pays depuis longtemps (En 1921 au Soudan, au début des années 50 en Inde, en Thaïlande et aux Philippines) pour faire face aux manques de personnels de santé et couvrir les besoins de la population en matière de santé. Vers les années 70, l’idée de former systématiquement les accoucheuses traditionnelles dans les pays en voie de développement commence à émerger lors d’un séminaire inter régional organisé en Malaisie par l’OMS. En 1972, le projet des soins de santé primaires axés sur les accoucheuses traditionnelles semblait parfaitement entrer dans les stratégies internationales. Des dizaines de milliers d’accoucheuses traditionnelles ont été alors formées principalement en Asie, en Amérique latine et en Afrique. On a pensé que les accoucheuses traditionnelles formées puissent faire des consultations pré natales et de même elles pourraient être intégrées dans le système de santé en tant que personnel de santé On continuait à encourager la formation des accoucheuses traditionnelles jusqu’au milieu des années 80 mais on commençait à mettre en doute l’efficacité de cette stratégie puisque la formation des accoucheuses traditionnelles n’avait que peu d’impact sur la mortalité maternelle et infantile. Vers le début du XXe siècle, la formation des accoucheuses traditionnelles devient de moins en moins adoptée et qu’au lieu de former ou de recycler des accoucheuses traditionnelles il valait mieux former des jeunes filles pour devenir des sages-femmes Ainsi, avec l’augmentation progressive du nombre des sages-femmes formées les accoucheuses traditionnelles disparaissent dans le système de santé. La population reconnaissait la compétence des sages-femmes et finit par s’adresser exclusivement à elles.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1- GENERALITES SUR LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
1-1 DEFINITIONS
1-1-1 Les accoucheuses traditionnelles
1-1-2 La médecine traditionnelle
1-1-3 Le guérisseur traditionnel
1-2 LA DIFFERENCE ENTRE LA THERAPIE TRADITIONNELLE ET LA THERAPIE MODERNE
1-3 SITUATION PROFESSIONNELLE DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
1-4 LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA COLLABORATION AVEC LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
1-5 HISTORIQUE DE LA FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
2 – GENERALITES SUR LA SANTE MATERNELLE ET INFANTILE DANS LE MONDE
2-1 EVOLUTION DU TAUX DE MORTALITE MATERNELLE DANS LE MONDE
2-2 LES PRINCIPALES CAUSES DE MORTALITE MATERNELLE DANS LE MONDE
2-3 EVOLUTION DU TAUX D’ACCOUCHEMENT ASSISTES PAR UN PERSONNEL DE SANTE
2-4 LES POSSIBILITES OFFERTES PAR LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES DANS LA PROMOTION DE LA SANTE MATERNELLE ET INFANTILE
3 – LA FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES A AMBOHIMAHAMASINA
3-1 SITUATION GÉOGRAPHIQUE D’AMBOHIMAHAMASINA
3-2 SITUATION SANITAIRE
3-3 LE PROGRAMME DE FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
3-3-1 Le but
3-3-2 Déroulement de la formation
i) Mode de triage des accoucheuses traditionnelles à former
ii) Contenu de la formation
3-3-3 Profil des accoucheuses traditionnelles formées
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1 – OBJECTIF
2 – MÉTHODOLOGIE
2-1 COLLECTE DES DONNEES SUR LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
2-2 ENQUETE AU NIVEAU DE LA COMMUNAUTE
2-2-1 Les paramètres à analyser
2-2-2 Traitements de résultats
2-3 ETUDE DES DONNEES DU CENTRE DE SANTE
2-3-1 Le rapport mensuel d’activités (RMA)
2-3-2 Le registre d’accouchement des accoucheuses traditionnelles et les billets de référence
3 – RESULTATS
3-1 LES DONNEES DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
3-1-1 Considération des facteurs de risques par les accoucheuses traditionnelles formées
3-1-2 Sensibilisation et animation des femmes enceintes par les accoucheuses traditionnelles
3-1-3 Changement de comportement après la formation
3-1-4 Mode de rémunération des accoucheuses traditionnelles
3-2 RAPPORT D’ACTIVITES DE LA FORMATION SANITAIRE
3-2-1 Nombre d’accouchements dans le service de santé
3-2-2 Modalité d’accouchement dans la commune d’ Ambohimahamasina
3-2-3 Nombre d’accouchements à risque pratiqués par les accoucheuses traditionnelles
3-2-4 Les systèmes de suivi des activités des accoucheuses traditionnelles
3-2-5 La consultation pré natale
3-2-6 La consultation post natale
3-2-7 Le taux d’utilisation du service de santé
3-2-8 Le taux de couverture vaccinale et taux de couverture en contraception
3-3 RESULTATS DES ENQUETES COMMUNAUTAIRES
3-3-1 Les facteurs conditionnant le lieu d’accouchement des femmes
3-3-2 La considération de la méthode de planification familiale
3-3-3 Les catégories d’accoucheuses fréquentées par les villageois
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRE, DISCUSSION ET SUGGESTION
1 – EVALUATION DES RESULTATS
1-1 FONCTIONNEMENT DU SYSTEME «ORIENTATION RECOURS»
1-2 SENSIBILISATION COMMUNAUTAIRE PAR LES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
1-3 CHANGEMENT DE COMPORTEMENT APRÈS LA FORMATION
1-3-1 Respect des règles d’hygiène
1-3-2 Considération des facteurs de risques
2 – DISCUSSION SUR L’IMPACT DU PROGRAMME DE FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
2-1 LES REUSSITES DU PROGRAMME DE FORMATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
2-2 LIMITE DE L’UTILISATION DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES
2-2-1 Les problèmes engendrés par la collaboration avec les accoucheuses traditionnelles
2-2-2 Les principaux facteurs intervenant sur la promotion de la santé maternelle et infantile dans le milieu rural
3 SUGGESTION POUR LA PERSPECTIVE D’AVENIR
3-1 POUR L’AMELIORATION DE LA QUALITÉ DE SERVICE DES ACCOUCHEUSES TRADITIONNELLES FORMEES
3-1-1 Perfectionner la formation
3-1-2 Améliorer la motivation des accoucheuses traditionnelles
3-1-3 Activer le partenariat avec la communauté
3-2 MISE EN ROUTE DES SOLUTIONS PERTINENTES
CONCLUSION