Les parodontopathies sont des maladies multifactorielles à manifestation inflammatoire ayant comme étiologie principale le biofilm bactérien et dont l’évolution dépend de l’équilibre entre l’agression bactérienne, la réponse de l’hôte ainsi que de facteurs de risque environnementaux et génétiques. Les maladies parodontales se traduisent cliniquement par une inflammation avec formation de poche par destruction progressive du système d’attache pouvant aboutir à des récessions, une perte osseuse, des mobilités et à long terme une perte des dents [5].
L’association entre la parodontite et les maladies systémiques demeure un domaine de recherche intense. Au cours de ces dernières années, plusieurs études ont apporté la preuve de l’association entre les maladies parodontales et les différentes maladies chroniques systémiques comme le diabète [86], les maladies cardiovasculaires [44], les issues défavorables de la grossesse comme les accouchements prématurés et les bébés de faible poids à la naissance [118] ainsi que les troubles hypertensifs de la grossesse comme la pré-éclampsie.
La grossesse est une période de profonds changements physiologiques qui peuvent affecter la santé buccale de la future mère. Il se produit une augmentation de la vascularisation gingivale, du saignement gingival et de risque de parodontite. En même temps la recherche montre qu’une mauvaise santé parodontale peut affecter la santé de la mère et du fœtus. Au cours de l’inflammation parodontale prolongée, les pathogènes parodontaux et les facteurs de virulence s’associent à la circulation sanguine par l’intermédiaire d’une bactériémie transitoire; ces facteurs vont diffuser à travers différents systèmes d’organes et affecter la réponse inflammatoire ou coloniser directement les tissus [24, 54]. Il a été suggéré que la mise en œuvre de cette réponse inflammatoire pendant la grossesse peut entraîner des complications de la grossesse, par exemple la prééclampsie [130].
La pré-éclampsie appelée aussi toxémie gravidique est une hypertension artérielle (HTA) qui apparaît dans la deuxième moitié de la grossesse. Elle est caractérisée par une pression artérielle systolique (PAS) supérieure à 140 mm Hg ou une diastolique supérieure à 90 mm Hg, combinée avec une protéinurie > 0,3 g/24h. Le terme pré-éclampsie fait référence au fait qu’il s’agit d’une condition clinique qui, lorsqu’elle n’est pas prise en charge, peut évoluer vers l’éclampsie qui est la cause habituelle des convulsions en fin de grossesse ou au cours du travail. Elle est caractérisée par des crises convulsives tonicocloniques à répétition, suivies d’un état comateux. C’est un accident paroxystique de la toxémie gravidique méconnue, non ou mal traitée [45]. Elle constitue une situation d’urgence vitale de la grossesse [10].
GENERALITES SUR LE PARODONTE SAIN ET LES MALADIES PARODONTALES
Parodonte sain
Définition
Le parodonte est défini comme l’ensemble des tissus soutenant et entourant la dent. Il est composé de deux tissus mous, la gencive et le ligament parodontal et de deux tissus minéralisés, le cément et l’os alvéolaire [19].
Structure du parodonte
Gencive
La gencive fait partie des tissus mous de revêtement de la cavité buccale. Elle entoure les collets des dents assurant la continuité de l’épithélium buccal audessus du ligament parodontal et de l’os alvéolaire. De couleur rose pâle et pigmentée dans certains cas, elle se divise en trois parties: la gencive libre ou marginale, la gencive attachée et la gencive papillaire ou inter dentaire.
➤ La gencive libre ou marginale entoure le collet des dents. Elle est séparée de la dent par le sillon gingivo-dentaire ou sulcus gingival qui a une profondeur moyenne de 0,3 à 3 mm [126].
➤ La gencive attachée est limitée coronairement par le sillon marginal ou la base du sulcus et apicalement par la ligne mucogingivale qui la sépare de la muqueuse alvéolaire [19].
➤ La gencive papillaire ou inter dentaire est située sous les points de contact dentaires. Elle est constituée par deux protubérances triangulaires, les papilles vestibulaires et linguales (ou palatines). Entre ces deux papilles, il existe une zone de dépression appelée col gingival.
Le tissu gingival est constitué d’un tissu conjonctif recouvert d’un épithélium stratifié pavimenteux comprenant l’épithélium gingival oral kératinisé, l’épithélium sulculaire et une formation épithéliale dite épithélium de jonction très caractéristique car assurant l’ancrage de la dent à la gencive [19]. L’attache épithéliale ou l’épithélium de jonction est une mince couche épithéliale située sous le fond du sillon marginal, contre la surface de la dent (l’émail dans les cas normaux). L’épithélium de jonction s’étend jusqu’à une zone proche du collet anatomique, près de la jonction amélo cémentaire. L’épaisseur de l’attache épithéliale varie de 15 à 30 couches cellulaires dans le fond du sillon gingivo-dentaire, pour atteindre 2 ou 3 couches au niveau du collet [75]. Le chorion gingival est un tissu conjonctif, donc il contient des cellules, des fibres, des vaisseaux et nerfs (issus des rameaux dentaires inférieurs et maxillaires supérieurs), et une substance fondamentale. Parmi les cellules, les fibroblastes se retrouvent en plus grand nombre. On retrouve également des polynucléaires neutrophiles, des monocytes, des mastocytes, des macrophages, des lymphocytes et des plasmocytes. Les fibres sont surtout composées de collagène, et sont organisées en faisceaux dont les principaux sont: les fibres dento-gingivales, les fibres dento-périostées, les fibres alvéolo-gingivales (crestales), les fibres circulaires et les fibres transseptales. Le tissu conjonctif par le biais des fibres, constitue l’attache conjonctive située sous l’attache épithéliale et qui se termine à l’aplomb du sommet de la crête alvéolaire [75].
Appareil d’ancrage
Il est constitué du ligament parodontal ou desmodonte, du cément et de l’os alvéolaire.
Ligament parodontal ou desmodonte
Le ligament parodontal unit la dent à la paroi de l’alvéole et au-delà, aux os maxillaires, l’intégrant à l’appareil stomatognathique. Sa largeur, de l’ordre de 0,3 mm en moyenne, varie en fonction du niveau radiculaire, de l’âge du sujet et de l’état fonctionnel de la dent.
Le ligament parodontal est une structure viscoélastique composée de faisceaux de fibres arrimant la dent à l’os et d’une matrice extracellulaire interstitielle dans laquelle résident différents types cellulaires. Il est richement vascularisé et innervé.
Cément
Le cément est un tissu calcifié et minéralisé, semblable à l’os ; il recouvre toute la dentine radiculaire. Il est ni vascularisé ni innervé [77]. Le cément contient une matrice extracellulaire très proche de celle de l’os. Elle est composée de minéral, de collagène, de protéines non collagéniques, de lipides et d’eau [19]. Il existe plusieurs types de céments qui diffèrent les uns des autres par leur localisation, leur structure, leur vitesse de formation et leur fonction [18].
– Cément acellulaire afibrillaire (CAA) composé d’une matrice minéralisée dépourvue de collagène et ne participe à l’ancrage de la racine dans l’alvéole.
– Cément acellulaire à fibres extrinsèques (CAFE) composant essentiel du système d’attache, permet l’ancrage des fibres du ligament dans la racine.
– Cément cellulaire à fibres intrinsèques (CCFI) se forme après la fermeture de l’apex et répond aux contraintes mécaniques qui s’exercent sur la racine.
Os alvéolaire
L’os alvéolaire est la partie du maxillaire et de la mandibule qui forme et supporte les alvéoles dentaires. Il est formé par la réunion de deux corticales vestibulaire et linguale et sa morphologie varie en fonction des formes et des positions des racines. Il se développe avec les dents et s’efface presque totalement après leur disparition [77]. Le tissu osseux est constitué de zones minéralisées et non minéralisées des régions corticales et trabéculations des os longs et plats, contenant des cellules osseuses, des éléments vasculaires et nerveux et une matrice extracellulaire. L’os trabéculaire enserre la moelle osseuse [19].
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LE PARODONTE SAIN ET LES MALADIES PARODONTALES
1. PARODONTE SAIN
1.1. Définition
1.2. Structure du parodonte
1.2.1. Gencive
1.2.2. Appareil d’ancrage
1.2.2.1. Ligament parodontal ou desmodonte
1.2.2.2. Cément
1.2.2.3. Os alvéolaire
2. MALADIES PARODONTALES
1.2.1. Définition
1.2.2. Classification
1.2.3. Anatomopathologie
1.2.4. Etiopathogénie
1.2.4.1. Biofilm et complexe bactérien
1.2.4.2. Réaction inflammatoire et réponse immunitaire
1.2.4.3. Facteurs de risque
CHAPITRE II : GENERALITES SUR LA PRE-ECLAMPSIE
1. Définition
2. Epidémiologie
2.1. Facteurs de risque
2.2. Aspects génétiques
2.3. Aspects immunologiques
3. Physiopathologie
3.1. Phase pré-clinique : la dysfonction placentaire
3.2. Phase clinique : la dysfonction endothéliale secondaire aux facteurs solubles d’origine placentaire
4. Symptômes
4.1. Signes neuro-sensoriels
4.2. Signes digestifs
4.3. Signes biologiques
4.3.1. Uricémie
4.3.2. Plaquettes sanguines
4.3.3. Hématocrite
4.3.4. Volume plasmatique
4.3.5. Doppler
5. Complications
5.1. Eclampsie
5.1.1. Phase d’invasion
5.1.2. Phase tonique
5.1.3. Phase clonique
5.1.4. Phase post-critique
5.2. Hellp syndrome
5.3. Hématome rétro-placentaire
5.4. Autres lésions maternelles
5.5. Complications fœtales
6. Traitements
CHAPITRE III : IMPACT DE LA GROSSESSE SUR LA SANTE PARODONTALE
1. Changement de la flore buccale
2. Changement de la concentration hormonale
3. Changement de la réponse immunitaire
4. Implications cliniques et paracliniques
5. Lien entre maladies parodontales et pré-éclampsie
CONCLUSION