Candida est un genre de levure dont l’espèce la plus importante est Candida albicans. C’est une espèce cosmopolite et commensale de la muqueuse digestive et vaginale parfaitement tolérée par l’homme bien portant et retrouvée dans la bouche, dans le système digestif et dans la flore vaginale, avec une prédominance variable selon l’espèce. Les champignons du genre Candida peuvent provoquer des infections superficielles touchant les muqueuses, la peau et des infections viscérales pouvant se limiter à un organe ou se disséminer dans l’organisme. Parmi les 200 espèces de Candida connues, une vingtaine est responsable d’infections humaines. Selon une étude sénégalaise, l’espèce la plus couramment isolée est Candida albicans (56%) [3]. De même, il a été rapporté que la mortalité due à Candida albicans est d’environ 37,9%. Parmi les espèces non albicans, C. glabrata, C. parapsilosis, C. tropicalis, C. krusei et C. dubliniensis ont été identifiés comme les principaux agents étiologiques [3]. Les levures du genre Candida sont souvent responsables d’infections graves, survenant dans un contexte nosocomial [2]. Les atteintes invasives sont un exemple d’infections nosocomiales liées à l accroissement de la population à risque, soumise à une immunosuppression intense et prolongée ou à des procédures médicochirurgicales complexes [4]. Au cours des 20 dernières années, l’incidence des infections fongiques invasives a fortement augmenté avec une part prépondérante des candidoses [3]. Pour faire face à ces infections fongiques, le traitement repose actuellement sur l’utilisation de quatre principales classes d’antifongiques (les analogues pyrimidiques, les polyènes, les azolés et les échinocandines) [5,6]. Toutefois, cette prise en charge médicamenteuse autrefois très efficace, se heurte actuellement à des phénomènes. de résistance de certaines souches de Candida [7,8]. Cette forte pharmaco résistance serait due au mésusage et à l’usage abusif d’antifongiques .
GENERALITES SUR LE GENRE CANDIDA
Les Candida sont des champignons levuriformes commensaux des muqueuses digestive et vaginale chez l’homme. Ce sont des microorganismes eucaryotes, uni- ou pluricellulaires, thallophytes, non chlorophylliens. Pour se développer, les champignons ont besoin d’une source extérieure de carbone car ils sont incapables de réaliser la photosynthèse, ce qui les oblige à vivre à l’état de saprophyte ou de parasite ou de symbiose chez l’hôte. Leur appareil végétatif ou thalle peut se présenter sous différentes formes (blastopores ovales de 2 à 5 μm, filaments ou pseudofilaments) permettant de distinguer les champignons filamenteux (moisissures et dermatophytes) et les levures. Cependant, les champignons dits dimorphiques possèdent des morphologies différentes à l’état saprophytique (forme filamenteuse) et à l’état pathogène (forme levure) [10].
Les champignons du genre Candida sp appartiennent à l’embranchement des Ascomycètes plus précisément au sous embranchement des Saccharomycotina qui regroupent les levures vraies. Ils regorgent plus de 35 espèces de levures dont une minorité serait impliquée dans les pathologies humaines. La majorité des espèces de Candida sp responsables de pathologies humaines appartiennent au clade CTG (Figure 1). Le clade des Candida comprend le sous-groupe des espèces diploïdes (Candida albicans, Candida tropicalis, Candida parapsilosis) et celui des espèces haploïdes (Candida. lusitaniae, Candida famata). Quant à l’espèce Candida glabrata, il s’agit d’une levure haploïde appartenant au Saccharomycetaceae, précisément au clade WGD (Whole-Genome Duplication). Elle est génétiquement plus proche de Saccharomyces cerevisiae, que des autres espèces du genre Candida sp.
Espèces impliquées dans les maladies
Les espèces de Candida les plus impliquées en pathologies humaines sont Candida albicans, Candida glabrata, Candida tropicalis, et d’autres espèces dites émergentes dont Candida krusei, Candida parapsilosis. Candida dubliniensis, une espèce isolée chez les personnes vivant avec le VIH SIDA (PVVIH) a été longtemps confondue avec Candida albicans. Et plus récemment Candida africana nouvelle espèce isolée des prélèvements vaginaux, et très proche de Candida albicans.
Candida albicans
L’espèce Candida albicans est la levure la plus fréquemment impliquée dans les affections candidosiques graves. Elle serait associée à des résistances aux antifongiques classiques. Cette levure qui vit à l’état commensal dans le tube digestif et peut coloniser les voies génito-urinaires et respiratoires. Par ailleurs, Candida albicans est responsable des infections telles que les muguets, candidémies, vulvo-vaginites, onyxis, perionyxis. Bien que les espèces nonalbicans soient en émergence, Candida albicans reste le modèle des études actuelles sur les Candida, ce qui fait de cette espèce, la plus étudiée parmi ce genre [13,14]. Candida albicans a pendant longtemps été la seule espèce de Candida capable de produire un tube germinatif dans du sérum et cette caractéristique était utilisée pour l’identification de l’espèce. Cependant, Jones et Martins [15] ont identifié des souches atypiques de Candida albicans qui n’assimilent pas le sucrose et produisent faiblement des chlamydospores. Ces souches ont par la suite été identifiées et nommées Candida stallatoidea. Ensuite, Sullivan et al. [16] ont trouvé une autre souche atypique de Candida albicans qui n’assimile pas le α-méthyl-D-glucoside, le lactate et le xylose, bien qu’étant blastèse et chlamydospore positive. Elle a été nommée Candida dubliniensis. Tietz et al. [17] ont enfin découvert Candida africana qui donne un test de blastèse positif mais incapable de produire des chlamydospores et n’assimile pas la Nacétylglucosamine et la glucosamine. Ces espèces qui sont capables de produire un tube germinatif dans du sérum sont aujourd’hui regroupées sous le terme d’espèces du complexe Candida albicans et on y retrouve : Candida albicans, Candida dubliniensis et Candida africana. Les méthodes phénotypiques et biochimiques conventionnelles ne sont pas capables de les identifier formellement. Toutefois, l’évolution dans les techniques de biologie moléculaire a permis à Romeo et Criseo [18] de mettre sur pied une technique qui permet de séparer ces 4 espèces sans ambiguïté par amplification du gène Hwp1 commun à ces 4 espèces.
Candida glabrata
Cette espèce représenterait environ 5 à 20% de Candida sp isolé chez l’homme [19]. Elle serait responsable de 10 à 20% des candidémies. L’espèce Candida glabrata vit en commensale dans les voies uro-génitales de l’homme. Elle représente 5 à 15% de la flore vaginale et peut également être retrouvée dans les prélèvements digestifs [20,21].
Candida tropicalis
L’espèce Candida tropicalis est une levure pathogène reconnue comme la deuxième espèce la plus fréquemment isolée tant dans les infections superficielles que systémiques. Elle vit dans les céréales, l’eau, le sol. Chez l’homme, elle induit différentes affections candidosiques à localisation buccale, uro-génitale etc. L’espèce Candida tropicalis est taxonomiquement proche de Candida albicans avec une pathogénicité analogue. Elle est particulièrement virulente chez les patients neutropéniques, ce qui entraîne souvent des candidoses disséminées.
Autres espèces de candida
A côté des espèces habituellement responsables des infections humaines, on assiste à l’émergence de certaines espèces de Candida non albican. Auparavant peu représentées en pathologies humaines. Celles-ci seraient responsables d’infections candidosiques graves souvent réfractaires aux traitements classiques. C’est ainsi que l’espèce Candida dublinensis est impliquée dans les affections buccales chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Quant à l’espèce Candida parapsilosis, elle est incriminée dans les candidémies d’origines exogènes..
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Table des matières
INTRODUCTION
I.GENERALITES SUR LE GENRE CANDIDA
I.1- Espèces impliquées dans les maladies
I.1.1-Candida albicans
I.1.2-Candida glabrata
I.1.3-Candida tropicalis
I.1.4-Autres espèces de Candida
I.2- Problématique liée aux candidoses
I.2.1- Prolifération des candidoses systémiques et émergences de souches pharmacorésistantes
I.2.2-Epidémiologie des souches de Candida
I.2.3-Mortalité des candidoses systémiques
II-CIBLES BIOLOGIQUES ET ANTIFONGIQUES
II.1-Cible biologique des antifongiques actuels
II.1.1-Médicaments agissant sur la paroi fongique
II.1.2-Médicaments agissant sur la membrane fongique
II.1.2.1-Azolés antifongiques
II.1.2.2-Polyènes
II.1.3- Médicaments agissant au niveau des acides nucléiques
III-NOUVELLES CIBLES BIOLOGIQUES ET ANTIFONGIQUES EN DEVELOPPEMENT
III.1-Homosérine transacétylase (HTA)
III.2-Paroi cellulaire mannane
III.3-Biosynthèse de l’ancre glycosylphosphatidylinositols (GPI)
III.4- Biosynthèse de la chitine
III.5- Désaturase d’acide gras D9
III.6- Biosynthèse des Sphingolipides
III.7- Histones désacétylases
IV- CONCEPTUALISATION DES BENZIMIDAZOLYLRETROCHALCONES
CONCLUSION