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LE PERSONNEL DOUANIER
Hiérarchies et grades
Nous ne disposons pas de l’effectif exact du personnel douanier à Madagascar. Mais nous savons, par contre, que les agents fonctionnaires de la douane se scindent en quatre grades que voici (par ordre croissant) :
– Préposé des douanes
– Agent de constatation des douanes
– Contrôleur des douanes
– Inspecteur des douanes.
Il est à noter que le Corps de préposés des douanes est en cours de suppression progressive d’ici 2008. Et l’idée de créer un grade supérieur à celui d’inspecteur fait également son chemin au niveau de la DGD. Mais pour l’heure, les quatre grades cités précédemment demeurent opérationnels. Chaque ministère a sa propre physionomie. Il semble évident que les relations hiérarchiques sont beaucoup plus autoritaires aux Ministères de la Défense et de l’Intérieur qu’au Ministère de l’Economie et des Finances. Il n’en reste pas moins que l’Administration des Douanes demeure fortement hiérarchisée, et les grades y jouent encore un rôle très important dans le fonctionnement des services. Le côté paramilitaire de l’administration subsiste, et apparemment, personne ne s’en plaint. Cela semble convenir à tout le monde.
Pour en revenir à notre sujet, il faut dire que cet te effectivité des rapports hiérarchiques revêt un caractère essentiel lorsqu’i s’agit de comprendre l’intégrité professionnelle au sein de la douane. Elle permet de relativiser la responsabilité personnelle de chacun. L’expression « suivant instruction de l’Autorité Supérieure » est typiquement douanière. Les décisions prises par le supérieur hiérarchique dégagent considérablement la responsabilité du subordonné.
Modes de recrutement
Disons-le franchement : de nombreux candidats se bousculent au portillon pour travailler dans l’Administration des douanes, le plus souvent sans savoir à l’avance ce que fait exactement la douane. Le recrutement se fait par voie de concours pour assurer l’égalité juridique d’accès à la fonction publique. Il empêche toute discrimination suivant la fortune, la classe sociale, l’opinion politique, le sexe ou l’origine. Mais malheureusement, les règles de droit ne suffisent pas à assurer l’égalité réelle entre les candidats.
Les candidats devant être titulaires de certains diplômes, le recrutement des douaniers se fait principalement dans les catégories sociales les plus scolarisées. Par exemple, pour pouvoir se présenter au concours direct d’élèves – inspecteurs des douanes, il faut être titulaire d’une maîtrise en D.E.G.S. Droit,( Economie, Gestion, Sociologie), ou d’un titre équivalent (rarement accepté). Les procédures de sélection mises en place ont donc jusqu’ici un caractère essentiellement, voire exclusivement intellectuelle. Mais pour juger de la moralité des candidats, ce serait une entreprise délicate. Aussi se contente-t-on d’exiger la virginité du casier judiciaire du candidat au moment du concours. C’est le fameux Bulletin N°3, délivré par le greffier du Tribunal. Ce n’est pas suffisant, mais sur quelle base juridique et sur quel fondement moral pourrait-on écarter un candidat sous prétexte qu’il ne présente pas – a priori – les qualités éthiques requises ?
D’aucuns proposent en effet que les procédures de sélection doivent comporter une enquête de personnalité approfondie qui ne se limite plus à la recherche des antécédents judiciaires. Nous verrons plus loin les limites d’une telle démarche du point de vue psycho-sociologique.
Formations
La technicité croissante de la douane exige un personnel bien formé. Après le concours, les candidats reçus poursuivent leurs for mations dans les Ecoles de douanes pour devenir douaniers (cas des externes) ou pour mériter du grade supérieur (cas des internes). Rappelons que la promotion interne existe au sein de la douane conformément au statut général des fonctionnaires. Les inspecteurs des douanes malgaches ont été formés, soit à l’Ecole nationale Supérieure des douanes de Neuilly-sur-Seine en France, soit à l’Ecole des Douanes et Accises de Bruxelles en Belgique, soit à l’Ecole nationale Supérieure des Douanes de Barikadimy, à Toamasina. A part la formation initia le obligatoire, il existe des séances de formations continues ou des séminaires de mise à jour des connaissances. Quant aux agents subalternes, ils bénéficient également d’une formation initiale obligatoire.
La pluralité des origines scolaires de l’élite douanière, la différence des filières d’origine des candidats recrutés sont de nature à enrichir l’Administration des douanes. Economistes, gestionnaires, juristes, sociologues, informaticiens, enseignants, etc. travaillent ensemble en tant que douaniers.
CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL
L’Administration des douanes malgache exerce leurs missions dans un cadre juridique et institutionnel bien défini, où législations nationales et internationales s’interpénètrent régulièrement. Commençons par les institutions internationales.
Institutions internationales
L’Organisation Mondiale des Douanes (OMD) constitue la première institution douanière à l’échelle mondiale. Créée en 1952 sous le nom de Conseil de Coopération douanière, l’OMD a son siège à Bruxelles. La capitale belge, déjà siège de l’Union Européenne, se présente donc en quelque sorte comme la capitale mondiale des douanes.
Madagascar a un représentant auprès de l’OMD qui assiste aux séances de réunion organisées par cette entité internationale.
L’Organisation Mondiale des Douanes s’occupe de nombreux domaines, y compris l’éthique douanière. Par exemple, un séminaire international sur l’éthique douanière a été organisé au siège de l’organisation les 05 et 06 avril 1993, présidé par la Secrétaire Général. L’objectif avoué d’un tel séminaire consistait à « concevoir un ensemble de principes dont les pays pouvaient s’inspirer dans l’adoption des programmes d’éthique professionnelle ».
Il existe donc un projet de programme universel sur l’éthique douanière, et celle-ci se place au premier rang des préoccupations de toutes les administrations des douanes, car aucun pays au monde n’est immunisé contre les risques de corruption. En dehors de l’OMD, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), ayant pour siège à Genève, mérite d’être mentionnée. Cette première organisation du commerce mondial est également en relation étroite avec les administrations des douanes des pays membres, et surtout avec l’OMD.
Textes internationaux
Il s’agit des textes relevant des Conventions ou Traités signés par Madagascar dans le cadre de la Coopération régionale ou autres (COI, SADC, COMESA etc.)
– La nomenclature : le système d’énumération des marchandises a été mis au point en 1950 par la Conseil de Coopération douanière de Bruxelles, future Organisation Mondiale des Douanes. Actuellement, la douane malgache utilise le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, élaboré par l’OMD. L’espèce des marchandises est la dénomination qui leur est attribuée par la nomenclature tarifaire (Art. 18, paragraphe 1 du code des douanes). Cette nomenclature du Système Harmonisé comprend officiellement 96 chapitres, contenant plusieurs milliers de positions et de sous-positions tarifaires. Toute marchandise est donc susceptible d’être classée dans cette nomenclature.
LES PRINCIPALES MISSIONS DE LA DOUANE MALGACHE
Ce chapitre explique pourquoi l’administration des douanes existe, et quelle est sa raison d’être. Les tâches incombant à la douane peuvent se diviser en deux : d’une part, les tâches fiscales, et d’autre part, les tâches dites non fiscales, à savoir la protection des intérêts socio-économiques, de la santé des personnes, de l’environnement, de la sécurité de la société, du patrimoine culturel, etc.
MISSIONS FISCALES
Le principe de légalité des droits et taxes douaniers
L’administration des douanes est avant tout une administration fiscale, perceptrice d’impôts et de taxes. Elle est chargée de l’établissement et de la perception des droits de douane (DD), des droits d’accises (DA), des taxes sur la valeur ajoutée(TVA), des droits sur les marchandises importées ou exportées (DMI,DME)etc.
Les recettes recouvrées par la douane représentent une somme considérable à l’échelle de la richesse des pays en développement(près de 60% des recettes budgétaires dans le cas du Burundi, par exemple).Madagascar n’échappe pas à la règle, la douane malgache assure près de la moitié des recettes budgétaires de l’Etat. Même si les recettes douanières augmentent sans cesse en valeur réelle, cette proportion tend toutefois à diminuer, suite notamment à l’amélioration du taux de pression fiscale au sein de l’Administration des impôts, et surtout à cause des conventions douanières signées ou à signer par Madagascar (COI, COMESA, SADC..) qui vont amputer une part des recettes douanières.
La douane fait partie de ce que les gens appellent vulgairement le fisc. Du latin fiscus, c’est-à-dire trésor public, le fisc c’est la puissance publique considérée dans ses prérogatives en matière d’impôts.
Le principe majeur est celui de la légalité de l’impôt. La conformité à la loi, requise dans tous les actes de l’Administration dans l’Etat de droit est particulièrement impérative en matière fiscale ou douanière. En principe, l’administration n’a aucune latitude dans l’application de la loi douanière. La perception des droits et taxes ne doit pas être simplement autorisée par la loi de finances, elle est obligatoire.
Le principe peut se résumer ainsi : « Rien que la loi douanière, mais toute la loi douanière ».Le réalisme du terrain exige pourtant des interprétations plus souples de la loi. C’est ce qu’on appelle « des mesures de tempérament » ou « des tolérances administratives».
Le principe d’égalité des usagers devant l’Administration
La douane malgache assure donc la perception correcte des impôts dont le recouvrement lui est confié. Dans cette optique, ele ne doit pas percevoir plus que ce qui est dû. Elle est tenue d’assurer l’égalité juridique des clients par rapport aux règlements douaniers. Ce traitement uniforme des usagers provient d’un principe très connu en droit administratif : le principe d’égalité des usagers devant l’Administration. Les cas similaires, présentant les mêmes conditions et les mêmes risques, seront traités de la même manière.
L’indépendance de l’administratif par rapport au politique est donc la condition sine qua non de l’exécution de ce principe. Le politique et le douanier ne doivent plus se mêler. C’est le début du respect de l’éthique douanière. Aucune pression politique ne doit influencer le douanier dans l’exécution de ses tâches. Mais est-ce vraiment toujours le cas ?
MISSIONS NON FISCALES
Mission économique ou commerciale
La douane intervient de plus en plus dans la protection des intérêts économiques de la nation malgache, surtout dans un contexte de mondialisation où la concurrence s’annonce rude. La douane contribue fondamentalement au bien-être économique en aidant à la protection et à la réglementation du marché. Ce quipeut améliorer la capacité concurrentielle de nos entreprises déjà fragiles.
Le droit de douane est un impôt national, entièrement versé au budget général de l’Etat sans qu’aucun pourcentage ne soit affecté aux collectivités locales. Les ressources que la douane procure au Trésor Public sont relativement levées. D’où l’importance stratégique de la douane en matière de politique économique de l’Etat. La douane peut donc servir d’outil en matière d’orientation politique, mais encore faut-il trouver la bonne formule.
Dans la pratique, la douane peut aider les décideurs politiques, administratifs et économiques pendant le processus de leurs prises dedécision. La douane prête également son concours à l’Institut National de la Statistique (I NSTAT) dans l’établissement des statistiques du commerce extérieur, ou du trafic portuaire etc. Voilà pourquoi l’intervention de la douane ne doit augmenter inutilement les coûts ou avoir des effets nuisibles pour le commerce. En d’autres termes, la douane ne doit en aucun cas adopter des attitudes ou des méthodes anti-économiques dans l’exécution de ses tâches.
Mission de protection
La douane exécute les mesures de protection de la société malgache en ce qui concerne la santé, l’environnement et la sécurité.Pour ce faire, elle travaille avec de nombreux autres départements ministériels : Ministères de l’Intérieur, de la Santé publique, des Eaux et Forêts, de l’Energie et des Mines, de al Culture etc.
Plus concrètement, la douane protège la société malgache contre les marchandises dangereuses pour la santé publique (drogues, stupéfiants), dangereuses pour la sécurité publique (armes et munitions, détonateurs, explosif…), dangereuses pour la moralité publique c’est-à-dire jugées contraire aux bonnes mœurs (livres, photos, films, cassettes à caractère pornographique et autres marchandises similaires).
S’y ajoute la protection de la nature, de la faune et de la flore malgaches ainsi que les patrimoines nationaux à l’exportation. Tandis qu’à l’importation, la douane contrôle les marchandises contrefaites ou piratées. La contrefaçon et la piraterie sont devenues un fléau international contre lequel il faut lutter.
La contrefaçon , c’est le fait de reproduire, imiter, utiliser, apposer, ou modifier une marque enregistrée. Cette manœuvre frauduleuse a po ur but ou pour conséquence d’entraîner un risque de confusion pour la clientèle, et de causer un préjudice économique pour le détenteur de la marque.
La piraterie s’entend de toutes les copies faites sans le consentement du détenteur de droit à partir d’un article, dans le cas où la réalisation de ces copies aurait constitué une atteinte au droit d’auteur ou à un droit connexe, e n vertu de la légalisation en vigueur dans le pays.
Nous ne saurions entrer dans les détails de la technique douanière. Disons simplement que la douane est une administration d’intérêt général, qui se propose de contribuer à la défense des intérêts fiscaux, économiques et sociaux de Madagascar. La douane malgache arrive-t-elle à remplir correctement ses missions ? A une question de cette nature, il est difficile de donner une réponse catégorique. D’où al nécessité de s’interroger sur l’éthique douanière, objet du présent travail de recherche.
La mondialisation du commerce et de l’économie va avoir des influences sur les missions de la douane malgache. Parmi toutes les grandes administrations publiques, la douane est celle qui a le plus de liens avec la mondialisation.
DOUANES MALGACHES ET MONDIALISATION
Dans ce chapitre, nous allons examiner successivement les influences de la mondialisation sur la douane malgache, la théorie de la gestion générique et la problématique de la privatisation.
LES INFLUENCES DE LA MONDIALISATION SUR LA DOUANE MALGACHE
La porosité des frontières
Dans sa forme contemporaine, l’Etat se fonde encore sur un territoire aux limites relativement fixes qui s’appellent « frontières », une notion fondamentale en droit international public. Or la mondialisation d’aujourd’hui contribue à la porosité des frontières, pour reprendre l’expression de P. Moreau- Defarges (La mondialisation, coll. « que sais-je ? ».PUF, 1997, p55). En effet, la mondialisation perturbe l’ensemble des fonctions traditionnelles de l’Etat et donc sa légitimité même. Les frontières ne sont plus hermétiques, elles sont devenues« poreuses ».
Se clore, c’est se condamner à l’is olement, à la pauvreté, au sous-développement. Pour chaque Etat, la protection du erritoire, la fermeture hermétique de l’espace national tendent à devenir secondaires par rapport à la capacité de s’adapter au jeu économique mondial. La mondialisation de l’économie entraîne ainsi la floraison des organisations de coopération régionale telles que al COI, le SADC, la COMESA, l’UA, etc. Ce processus est extrêmement poussé au sein del’Union Européenne, où 25 nations s’acheminent vers l’union douanière. La douane peut se transformer et devenir un « service public international ».
La souveraineté législative de ’Etatl est, elle aussi, affectée par la mondialisation. Et Madagascar n’a pas le droit ni les moyens d’y déroger. La multiplication des échanges et des flux fait que les législations nationales tendent à être supplantées par les accords internationaux.
La douane, une vieille administration qui s’accommode aux mœurs du temps
La douane, à Madagascar comme ailleurs, est une vie ille administration qui s’adapte aux nouveaux défis du monde moderne et de la mondialisation. La douane malgache du futur devra être au diapason de l’évolution du monde. Dans la mesure où les flux commerciaux augmentent, la douane malgache est appelée à se remettre en question pour y faire face.
Sachons donc que le triomphe du libre-échange prôné par la mondialisation s’accompagne aussi d’une montée de la contrebande et des trafics de biens illicites et nocifs (drogues, argents sales, stupéfiants, armes, contrefaçons…). C’est pourquoi la liberté du commerce, dont on parle beaucoup de nos jours, reste une liberté surveillée. Et c’est à la douane qu’incombe la responsabilité du contrôle des frontières. D’où l’utilisation des Nouvelles Technologies de l’Infor mation et de la Communication (NTIC) s’impose d’elle-même. C’est en ce sens qu’il faut comprendre la technicité croissante des activités douanières.
A part l’informatisation du système douanier, l’usage du scanner mobile constitue également une avancée considérable. D’aucuns estiment que cet équipement allonge inutilement la durée du dédouanement et porte un préjudice économique aux firmes utilisant le port de Toamasina. Nous sommes personnellement d’accord sur le fond quant à l’utilisation de cet engin infernal, mais t rès réservé sur la forme. De nombreuses choses restent en effet à améliorer dans la coordination du travail entre l’administration portuaire, la Société Générale de Surveillance (SGS) et la douane. La modernisation matérielle de la douane doit être suivie par un renouveau des mentalités et de l’éthique professionnelle.
Le problème de la pertinence de la gestion générique se pose désormais. La gestion de l’entreprise est-elle applicable à la ge stion publique ? Le fayolisme administratif est-il possible ?
LA THÉORIE DE LA GESTION GÉNÉRIQUE
La limite secteur public/secteur privé est encrise
De nombreux auteurs rejettent le critère fondé surune soi-disant séparation entre le public et le privé. Certes, l’administration publique traditionnelle a des caractères spécifiques : soumission directe ou indirecte au pouvoir politique, système juridique particulier, prédominance des concepts de service public et d’intérêt général, financement rigide selon des règles spécifiques, etc. La question se pose donc : tous ces critères suffisent- ils à distinguer le public du privé ? Les avis divergent.
Romain Laufer (dans « Gouvernabilité et management des systèmes administratifs complexes », Politique et Management public, vol.3 n°1, mars 1985), distingue trois grandes phases :
– La première va de 1800 à 1880. C’est l’ère de l’Eta t-puissance où règne le critère de la puissance publique. Le langage administratif de cette époque est le droit. D’où l’épanouissement de la bureaucratie.
– La seconde période (de 1880 à 1945-1960) est celle où domine le critère du service public. Au langage du droit s’ajoute le langage technique propre aux spécialistes de chaque service. C’est le langage de l’expert qui domine ici.
– La troisième période qui s’ouvre en 1945 est cellede la crise du critère de service public. La limite secteur privé/secteur public tend à s’estomper, et c’est au cours de cette période de remise en cause qu’émerge le langage managérialdans les systèmes administratifs.
Pour R. Laufer, analyse de système et langage managérial sont incontournables dans une société complexe. L’analyse de système estle mode de pensée d’une société complexe ; le management public est le langage de l’Etat dans une société complexe. La crise de la dichotomie public/privé va entraîner la notion de gestion générique, observée notamment dans le modèle administratif anglo-saxon(Canada,Etats-Unis…).
Le management privé est- il applicable à l’Administration ?
Le management peut se définir comme la capacité d’atteindre des objectifs fixés préalablement conformes aux intérêts de l’organisation en utilisant au mieux les ressources disponibles. Cette définition met troiséléments en exergue :
– les objectifs à atteindre
– les moyens à disposition, qu’ils soient humains ou matériels.
– l’art de combiner les deux.
La douane, comme tout service public, a une mission et elle doit tendre vers la réalisation de celle-ci. Pour cela, elle doit mettre en œuvre tous les moyens dont elle dispose : matériels et humains. Dans la plupart descas, ceux-ci sont largement insuffisants (pauvreté oblige), d’où la nécessité du management.
L’idée d’utiliser dans le secteur public les méthodes de gestion utilisées jusque-là dans les entreprises n’est pas nouvelle, comme l e montrent les tentatives de Taylor, Fayol ou même Max Weber. Mais le management publica pris un essor considérable à la fin des années 1960 avec le concept de« rationalisation des choix budgétaires » (RCB) en France, issu du fameux PPBS (planning, progamming, budgeting system) mis en place aux Etats-Unis, notamment au ministère de la défens sous Mc Namara. Les méthodes RCB vont être abandonnées en France pour revenir aumodèle traditionnel de gestion. Quoiqu’il en soit, le management public existe encore dans de nombreux pays « civilisés », il apporte à l’Etat les signes de la gestion rationnelle des ressources publiques. Ce processus semble irréversible.
Plus concrètement, l’Administration utilise désormais des concepts empruntés de la gestion privée. On peut citer, par exemple, les méthodes d’aide à la décision, adaptés à la sphère publique : analyse de systèmes, méthodescoûts- avantages et coûts- efficacité, méthodes multi-critères. Il existe aussi des méthodes de gestion directement transposées du secteur privé : comptabilité analytique, contrôle de gestion, direction par objectifs (DPO) et surtout l’utilisation des systèmes informatiques à tous les niveaux. Dans certains pays industrialisés donc, le management privé s’applique indifféremment à l’Administration publique.
Nous reconnaissons volontiers que le terme « management » est trop fort pour qualifier ce qui existe actuellement au sein de la douane malgache. A priori, la théorie canadienne de la gestion générique (c’est-à-dire sans distinction du genre) n’est pas encore appliquée. Il est toutefois indéniable qu’une évolution dans le domaine du management public se dessine depuis une décennie. Le management a été introduit dans le secteur public par le biais de formations à la gestion des ressources humaines, à la communication …, qui sont censées sensibiliser le personnel de l’ administration .L’introduction de l’éthique professionnelle suppose, par exemple, la maîtrise des techniques élémentaires du management et de la communication.
Mais force est de constater le manque d’intérêt quel’on porte à ce sujet au sein du Ministère de l’Economie, des Finances et du Budget. La pesanteur des traditions administratives et bureaucratiques, la peur du changement sont encore vivaces. Prenons l’exemple de l’informatisation qui a connu beaucoup de réticences de la part des agents douaniers. Cette résistance au changement n’est pourtant pas une spécificité malgache, si l’on en croit Didier Olbrechts, Inspecteur des Douanes, professeur de management au Service Public Fédéral belge des finances, à Bruxelles. Les douaniers belges, sinon les agents des finances en général, résistent, selon i,lu à toute politique de réforme. Les termes ou les expressions qui sentent le privé font peur aux agents de l’Etat. Toute administration est donc de nature conservatrice. Mais le mot qui fait le plus peur aux douaniers malgaches est celui de « privatisation ».
LA PROBLÉMATIQUE DE LA PRIVATISATION
Sur le désengagement de l’Etat
L’Etat malgache se désengage petit à petit du secteur productif et laisse la place au secteur privé.L’Etat, par le moyen de l’Administration, ne fait plus qu’assurer les services de base, que l’on appelle également les fonctions régaliennes relevant de la souveraineté nationale. Mais l’idée de souveraineténationale a-t-elle encore un sens aujourd’hui ?
En effet, la mondialisation d’aujourd’hui fait que certaines entités étrangères interviennent de plus en plus dans les affaires internes de Madagascar. Pour mener à bien sa Politique d’Ajustement Structurel (PAS), pour appuyer la mise en œuvre du Document cadre de politique économique (DCPE), signé le 18 Septembre 1996 sous le gouvernement Ratsirahonana, et afin d’assurer l’app lication du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) validé les25 et 26 Mars 2003, l’Etat malgache, comme beaucoup d’autres pays en développement, est obligé de recourir aux bailleurs de fonds tels que la Banque mondiale (BM), le Fonds monétaire international (FMI), la Banque africaine pour le développement (BAD), l’Union européenne (UE), etc. Pour financer le Madagascar Action Plan (MAP) proposé par le Chef de l’Etat actuel, cette dépendance à l’égard des bailleurs de fonds ira encore grandissant.
En contrepartie, ces institutions financières internationales nous dictent un certain nombre de conditionnalités plus ou moins difficiles à réaliser. L’application stricte du libéralisme économique, la privatisation des anciennes entreprises publiques, le désengagement de l’Etat du secteur productif, le respect de la démocratie, la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, etc sont autant de conditionnalités que les bailleurs de fonds imposent aux gouvernements des pays en développement comme le nôtre. Ces mesures draconiennes, parfois inappropr iées et anachroniques, imposées de l’extérieur finissent par « étouffer » la population malgache, impatiente et déjà exsangue.
Et même au sein de la douane, les visites répétés trope fréquentes effectuées par les représentants de ces bailleurs de fonds (BM, FMI, UE) n’amusent plus personne. De toute façon, les grands bailleurs de fonds sont devenus les nouveaux maîtres du monde, ils font la pluie et le beau temps, comme on dit. Le développement rapide et durable tant souhaité à Madagascar ne pourrait se réaliser que si le gouvernement malgache se soumettait à ces conditionnalités prônées par les bailleurs de fonds qui, avouons-le, grignotent considérablement notre souveraineté nationale.
En tout cas, l’Etat limite désormais ses interventions dans le jeu économique national .Certains parlent de la fin progressive de l’Etat – providence. Le principe du « Moins d’Etat, mieux d’Etat » s’applique pour ne p as perturber les lois de l’économie et de la concurrence. On parle également de la politique du 3P (Partenariat Public- Privé) dans les activités de développement. Certaines méthodes de gestion de l’appareil administratif font aujourd’hui l’objet d’une forte critique. On dit souvent dans les coulisses de l’opposition que l’équipe de Ravalomanana gère l’Etat comme on gère une entreprise. La TIMisation de l’Administration n’étant pas très nette, on parle plutôt d’une instauration d’un Etat-TIKO à Madagascar. Vrai ou faux ? Le débat reste ouvert sur la question.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I – GÉNÉRALITÉS SUR L’ADMINISTRATION DES DOUANES
CHAPITRE I – HISTORIQUE, STRUCTURE ET ORGANISATION
A. HISTORIQUE
1. De l’Antiquité à la puissance romaine
2. Douanier et apôtre du Christ
3. De Colbert à la période coloniale
B. STRUCTURE ET ORGANISATION P.7
1. La Direction générale des douanes
2. Les recettes des douanes
C. LE PERSONNEL DOUANIER
1. Hiérarchies et grades
2. Modes de recrutement
3. Formations
D. CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL
1. Institutions internationales
2. Textes internationaux
3. Le code des douanes
4. Des prérogatives étendues
CHAPITRE II – LES PRINCIPALES MISSIONS DE LA DOUANE
A. MISSIONS FISCALES
1. Le principe de légalité des droits et taxes douaniers
2. Le principe d’égalité des usagers devant l’Administration
3. Evolution récente des recettes douanières
B. MISSIONS NON FISCALES
1. Mission économique ou commerciale
2. Mission de protection
CHAPITRE III – DOUANES MALGACHES ET MONDIALISATION
A. LES INFLUENCES DE LA MONDIALISATION SUR LA DOUANE MALGACHE
1. La porosité des frontières
2. La douane, une vieille administration qui s’accommode aux mœurs du temps
B. LA THEORIE DE LA GESTION GÉNÉRIQUE
1. La limite secteur public/secteur privé en crise
2. Le management privé est-il applicable à l’Administration ?
C. LA PROBLÉMATIQUE DE LA PRIVATISATION
1. Sur le désengagement de l’Etat
2. Sur la privatisation éventuelle de la douane malgache
PARTIE II – PRÉSENTATION, ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE
CHAPITRE IV – MYTHES ET RÉALITÉS SUR L’ÉTHIQUE DOUANIÈRE
A- NOTION D’ÉTHIQUE, ESSAI DE DÉFINITION
1. Etymologie
2. Ethique, morale et déontologie
3. Ethique et liberté de choix
4. Ethique individuelle et éthique de groupe
B- ASPECTS PSYCHOSOCIOLOGIQUES DES RAPPORTS ENTRE LA DOUANE ET LES TIERS
1. Les rapports Douanes – contribuables
2. Les rapports Douanes – Public
3. La confusion du genre
CHAPITRE V – LA PERSONNALITÉ DU DOUANIER
A- STÉRÉOTYPE ET PROFIL DU DOUANIER
1. Définitions
2. Le douanier en tant que fonctionnaire
3. La présomption de malhonnêteté des financiers
4. Hiérarchie des avantages matériels
B- LA POSITION ÉTHIQUE DE LA DOUANE
1. La Justice, médaille de plomb de la corruption ?
2. Une attitude réaliste
3. Vers une amélioration sensible de la situation
PARTIE III – ANALYSE SOCIOLOGIQUE DE L’ÉTHIQUE PROFESSIONNELLE DU DOUANIER
CHAPITRE VI – DIFFERENTS TYPES D’APPROCHES DE L’ÉTHIQUE DOUANIÈRE
A- APPROCHE MORALE DE LA CORRUPTION FISCALE
1. Le principe du « voler le fisc n’est pas voler ».
2. Du coté de l’agent douanier
3. Du coté du contribuable
4. Nécessité fait loi
B- APPROCHE MATERIALISTE DE LA CORRUPTION FONDÉE SUR L’HÉRITAGE SOCIAL OU SOCIALISTE
1. La faim justifie les moyens
2. La corruption, une pathologie sociale
3. A l’image de notre société
C- APPROCHE IDÉALISTE FONDÉE SUR LA CORRUPTIBILITÉ INDIVIDUELLE DE L’AGENT
i. La prise de décision éthique
ii. L’honnêteté professionnelle, une vertu dynamique
iii. Approche psychologique de la personnalité.
iv. Les facteurs exogènes de la corruption.
D- APPROCHE LÉGALISTE FONDÉE SUR LE DROIT
1. La peur du Gendarme
2. Ethique et Droit
3. Le droit, un fait social
4. Le phénomène BIANCO
CHAPITRE VII – SUGGESTIONS
A- MESURES D’ORDRE MATÉRIEL
B- MESURES D’ORDRE STRUCTUREL OU ORGANISATIONNEL
C- MESURES D’ORDRE JURIDIQUE OU DISCIPLINAIRE
D- MESURES D’ORDRE PSYCHOSOCIOLOGIQUE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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